Les instructions officielles de 1967 ont opéré un choix qui consiste
à fonder l’enseignement des techniques corporelles à l’école
sur les pratiques sportives. Pour la majorité des étudiants d’aujourd’hui
et pour une grande partie des enseignants d’éducation physique,
voire des formateurs à la première épreuve écrite des concours de recrutement
officiant dans les IUFM ou les UFRSTAPS, ce choix ne fait " qu’entériner
ce qui ce faisait déjà sur le terrain ". En d’autres termes,
aucun autre choix ne pouvait être fait .
Les préparateurs actuels – qui pour certains n’ont d’autres
carte de visite en matière de compréhension des réalités historiques
que leur participation aux jurys des épreuves écrites – véhiculent
cette idée, oubliant qu’avant 1967, des résistances très fortes
ont été formulées à l’égard d’un enseignement exclusivement
sportif et que ce texte a engendré de nombreuses critiques exposées
tout au long des années soixante-dix. Un débat extrêmement riche se
tient alors sur la question de l’enseignement sportif et au-delà
sur l’éducation physique.
Mais curieusement, si l’on connaît les slogans (1) utilisés
pour justifier un enseignement sportif, les études critiques qui se
sont développées à la suite des instructions officielles de 1967 sont
inconnues des étudiants ou bien réduites à quelques caricatures. Dans
les copies de concours, il est rituel d’évoquer brièvement " la
critique du sport ", à propos des années soixante-dix. Les candidats
ouvrent alors un tiroir (sous forme de parenthèses) duquel ils extraient
pêle-mêle " Brohm, Pujade-Renaud, Denis ",
sans savoir qui sont ces auteurs ni ce qu’ils ont écrit. En outre,
ils semblent réduire ce qu’ils appellent " la critique du
sport " au mouvement organisé à partir et autour des écrits mais
aussi de la personnalité de Jean-Marie Brohm. Or, c’est
méconnaître la diversité des points de vue et des auteurs qui alimentent
le débat.
La critique du sport n’existe pas.
Réduire les positions critiques à celle de Jean-Marie Brohm,
c’est ou bien se laisser aller aux défaillances de la mémoire
collective ou bien se laisser abuser par l’histoire officielle
de la critique dite radicale (2). Il existe en revanche une multitude
de réflexions sur la question de l’enseignement sportif obligatoire.
La critique de l’institution sportive ou de l’institution
scolaire, la dénonciation du caractère réducteur ou mécaniste des techniques
et des pédagogies sportives, les réquisitoires contre l’emprise
normative et inconsciente des pouvoirs sur le corps, sont des dimensions
qui ne se réduisent pas les unes aux autres. Les niveaux de l’analyse,
les objets sur lesquelles elles portent, les projets qu’elle sert,
les théoriciens qui s’y livrent, n’autorisent pas l’amalgame.
Au contraire, ce foisonnement intellectuel fait des années soixante-dix
une période extrêmement riche du point de vue de la compréhension des
logiques et des mécanismes institutionnels.
Cependant, la mise en évidence des convergences autour de la critique
de l’éducation physique sportive ne doit cependant pas faire oublier
les points de vue parfois irréductibles des différents acteurs dont
il va être question. La dispute entre Jean-Marie Brohm
et Daniel Denis ou Georges Vigarello, les
critiques faites par Michel Bernard à Jean-Marie Brohm
ou Daniel Denis et celle que ce dernier lui adresse
en retour, la controverse entre Georges Vigarello et Pierre
Parlebas attestent à l’évidence qu’il n’y a pas
– en matière d’analyse critique – de pensée unique
(3). Pourtant, du conflit émerge une compréhension nouvelle de l’éducation
physique et du sport dont la portée critique dévoile des dimensions
occultées, des phénomènes inconscients, des logiques invisibles jusqu’alors.
Car ce qui est commun à tous ces auteurs – et ce qui est nouveau
– c’est qu’ils s’appuient sur des travaux anthroposociologiques
qui placent le corps au centre de leur questionnement. Leurs apports
critiques s’appuient sur les recherches les plus récentes des
sciences sociales. Chacun apporte ainsi – à partir de l’analyse
des fondements corporels de notre société – des éléments de compréhension
sur l’éducation physique et le sport. A leur égard, le terme de
" dominés " semble donc inadéquat (4). Car leurs analyse ont
profondément modifié la manière d’appréhender la culture corporelle.
Et il n’est pas utile qu’elles soient partagées par le plus
grand nombre pour que leur pertinence soit mise en cause.
Il peut pourtant sembler surprenant que le choix d’un support
d’enseignement comme le sport paraisse aujourd’hui aller
de soi. Dans les copies de concours l’éducation physique devait
devenir sportive. Aucun autre choix n’est envisagé. Or cette évidence
a été disséquée par des analyses fort édifiantes, même si peu d’études
scientifiques existent sur le sport, au moment où il est retenu pour
réaliser l’éducation physique de la jeunesse scolarisée. " L’analyse
en profondeur du sport éprouve beaucoup de difficulté à se développer.
Les résistances surabondent. " (5) Les clichés suffisent pour
justifier la place du sport dans l’éducation physique.
En réaction au discours convenu, ces années soixante-dix ont livré
des analyses décisives quant à la compréhension du phénomène sportif.
En opposition à la pensée unique de l’époque elles ont été conduites
par des enseignants pour qui l’utilisation du sport comme support
de l’éducation physique scolaire n’allait justement pas
de soi (6).
1 – Critiques à propos de l’exclusivité sportive
Toutefois, les critiques sur l’enseignement des techniques sportives
ne se situent pas toutes au même niveau. En 1965, par exemple dans la
seconde version de Vers une éducation physique méthodique, Pierre
Seurin reconnaissait déjà que " pour satisfaire à un " intérêt "
actuel évident et au besoin permanent de jeu, [...] nous devons faire
appel aux exercices sportifs, mais en les considérant comme des moyens
pédagogiques parmi d'autres moyens. " (7) Son projet d'éducation
physique se traduit ainsi par l'utilisation de moyens variés. La référence
sportive n'est qu'une référence parmi d'autres dont l'utilisation est
liée aux intentions éducatives retenues. À ce titre, les techniques
sportives peuvent tout à fait participer à l'éducation physique des
élèves.
La mise en évidence du caractère appauvrissant de ces techniques se
situe à deux niveaux. Tout d'abord, le sport ne peut suffire à assurer
une éducation corporelle complète. Par ailleurs, il propose un modèle
de motricité qui lie rend pas compte de la diversité et de la richesse
de la culture corporelle.
Ainsi, Jean Le Boulch affirme que " rien n 'est possible dans
le domaine du sport de compétition sans une formation corporelle préalable.
" (8) Sa conception d'une éducation physique fondamentale ne peut se
réduire à la formation sportive ni même surtout à " faire du
Français un citoyen à l’esprit sportif " comme le suggèrent
l'Essai de doctrine du sport (l965) puis les Instructions officielles
du 19 octobre 1967. Pour lui, éduquer physiquement la jeunesse, c'est
sans doute contribuer à la préparation du sport compétitif, mais c'est
aussi participer à la formation aux gestes professionnels, à lit Sécurité
au travail, à la gymnastique d'entretien des adultes, à la danse, à
l'expression dramatique, etc. Finalement, sa critique ne porte pas tant
sur l'usage des techniques sportives mais sur la confusion entre les
buts et les moyens qu'il perçoit dans l'usage des sports au sein de
l'éducation physique scolaire. En effet, même si les Instructions officielles
de 1967 précisent que l'éducation Physique ne se confond pas avec les
moyens qu'elle utilise (les activités physiques et sportives), le but
de l'enseignement des années soixante-dix se traduit le plus souvent
par la recherche de la plus grande efficacité sportive. Ce que rappelle
Jean Le Boulch, finalement, c'est que ces activités sont un "
support possible pour une formation corporelle dispensée dans le
cadre scolaire obligatoire ", mais qu'elles ne peuvent servir, à
elles seules, de projet éducatif. Qu'elles soient un support possible,
ne justifie pas leur usage exclusif en éducation physique.
C'est ce qu'affirme également Claude Pujade-Renaud, lorsqu'elle
soutient que " les activités sportives [sont] partie intégrante mais
non suffisante d'une éducation corporelle entendue dans un sens extensif
" (9). Ce que relève cette auteure, et ceux dont il est question dans
cet article, c'est le danger d'accepter d'emblée les activités sportives
sans en questionner les; fondements, les significations, les valeurs,
les logiques et de croire que leurs effets se réduisent à modifier la
motricité.
Le débat traduit ainsi la diversité des conceptions de l'éducation
physique, tant sur les moyens employés que sur les fins qu'elle vise.
1-1 Les sports : Un modèle de jeu parmi d'autres
Les critiques sont notamment soutenues par la volonté d'ouvrir l'éducation
Physique à d'autres dimensions de la corporéité. Car "parmi un champ
des possibles extrêmement vaste, l'institution sportive n'a retenu qu
un modèle d'affrontement un seul " (Pierre Parlebas). La
supériorité des techniques sportives sur d'autres techniques existantes
n'est donc qu'une illusion, entretenue par la croyance en un progrès
cumulatif selon laquelle les techniques sportives seraient l'aboutissement
d'un perfectionnement constant. Mais ce perfectionnement se développe
au sein d'un seul et même modèle ludique, celui du duel. " Or, ce
modèle n'est pas inéluctable - il ne va pas de soi [..] ce n'est là
qu'un modèle parmi des dizaines d'autres et quantité de jeux sportifs
possédant des modèles de coalition très différents sont ainsi refoulés.
" (10) Et c'est, à ce titre que Pierre Parlebas conteste le recours
unique au modèle compétitif
Contre cette évidence, il étudie sociologiquement les jeux sportifs
pour préciser l'apport mais aussi les limites des sports en matière
d'éducation de l'enfant. Il distingue deux types de jeux: les jeux
sportifs institutionnels et les jeux sportifs traditionnels.
Les jeux sportifs institutionnels (ou sports) constituent pour Pierre
Parlebas une classe particulière des jeux corporels existants dans
la société. Ils tirent leur force du dispositif institutionnel qui les
codifie et les organise au point que " hors du règlement, rien ne
prend sens. " Les fédérations imposent en quelque sorte un jeu "
officiel ", qui ne supporte pas de négociation. Mais rien ne permet
d'affirmer que ces jeux institués possèdent une valeur éducative supérieure.
Car les jeux qualifiés par Pierre Parlebas de traditionnels
possèdent eux aussi un système de règles très élaborées. En revanche,
ce système réglementaire n'est ni imposé aux joueurs de l'extérieur,
ni établi une bonne fois pour toutes. Il est d'une certaine manière
auto-codifié, au gré de l'engagement et des désirs des joueurs. De plus,
contrairement aux jeux sportifs institutionnels, " le Jeu sportif traditionnel
est un Pays des Merveilles ". Par cette formule Pierre Parlebas
indique que l'imaginaire y est plus riche, plus débridé. Les enfants
peuvent y laisser libre cours à leurs rêves, à leurs fantasmes et à
leurs désirs. En définitive, les règles s'inventent au fur et à mesure
du jeu pour accroître le plaisir de jouer.
Rien de tel dans l'univers sportif où la loi pose les situations
de jeu. Complémentairement à celle de Pierre Parlebas, l'analyse
de Daniel Denis dans Aux chiottes l'arbitre s'attache
à saisir ce qui fonde l'orthodoxie ludique. L'invention historique des
sports à la fin du XIXè siècle par la classe dominante a permis à cette
dernière d'imposer une manière de jouer. Elle a alors légué " ses
équipements normalisés, ses terrains traces et ses cadres temporels
impératifs". En conséquence, le pratiquant sportif " ne crée
pas le code de sa pratique. Il est soumis à la loi définie, certes amendable
sur certains points [ .. ] mais intouchable dans son essence. On ne
joue pas impunément avec le corps de la règle!" (11)
Le sport est un système de jeux codifiés par un corps de légistes.
Les pratiquants sont ainsi tenus à distance "d'une loi incontestable,
tombée du ciel, à laquelle il faut bien se plier [...] " que
voulez-vous, c'est la loi du sport" (Daniel Denis). Or, ceci
ne peut être admis dans le cadre d'une mise en cause du pouvoir des
institutions. D'autant plus que cette double réalité des sports (institutionnelle
et historique) engendre une standardisation réglementaire, une normalisation
technique et une mécanisation du corps.
1-2 - Standardisation réglementaire
Les règles des jeux sportifs quadrillent en effet minutieusement l'espace
et structurent scrupuleusement le temps de la pratique. Ceci fait de
l'univers sportif un " univers de la règle et du compas " (Pierre
Parlebas). Le monde de l'éducation physique et sportive fait de
l'enseignant un " arpenteur du corps " qui fonctionne au chronomètre
et au décamètre car " la mesure du corps, de ses performances, est
prévalente. " (Claude Pujade-Renaud). Il en résulte pour
Daniel Denis une " négation du droit à l'imprévisible
". Le corps est " passé [ ... ] au crible de la Raison
". Rien n'est laissé au hasard. Et les acquisitions motrices sont tout
à la fois programmées selon un ordre immuable et guidées par l'exigence
d'efficacité et de performance.
En fait, les jeux sportifs de fédération ou jeux institutionnels
- codifiés par les fédérations sportives et enseignés en éducation
physique scolaire - s'opposent aux jeux traditionnels de l'enfant ou
" jeux de règles " (Jean Le Boulch ) notamment parce qu'ils
survalorisent la dimension compétitive. " La performance qui à l'origine
n 'était que l'occasion du jeu, note Jean Le Boulch, est
devenue progressivement le but absolu à quoi souvent tout est sacrifié
y compris le plaisir. Actuellement, poursuit-il, l'éducation
physique se confond à peu près exactement avec l'initiation à la pratique
compétitive et son corollaire l'apprentissage des gestes spécifiques.
" (12) Il en résulte une nécessaire mécanisation du corps et la mise
en place de pédagogies proches du dressage dans le but d'accroître l'efficacité
motrice.
1-3 Normalisation technique et mécanisation du corps
Jean Le Boulch note en effet que la recherche de l'efficacité
sportive privilégie la transmission de " réponses ou " savoir-faire "
permettant à l'organisme-machine, de faire face à un certain nombre
de situations bien codifiées. " L'apprentissage des techniques sportives
cherche à faire du corps un " bon instrument " (Jean Le Boulch),
un "instrument qu'il faut dominer " (Claude Pujade-Renaud),
un " système clos où il n'y aura pas de bavures " (Ginette
Berthaud et Jean-Marie Brohm). Le domptage du corps exercé
par les méthodes traditionnelles d'éducation physique s'y rejoue sous
une nouvelle forme. L’enseignement sportif agit sur l'homme machine
qu'il contribue à conditionner de manière à le rendre efficace sur des
tâches spécialisées, normalisées, codifiées.
Et il ne peut en être autrement puisque la tendance du sport est
" la standardisation du milieu dans lequel évolue le sportif
" (Pierre Parlebas). Cette standardisation est rendue nécessaire
par le principe organisateur de la compétition sportive qui commande
la comparaison des performances et l'objectivation de la mesure des
résultats (Jean-Marie Brohm). De la sorte, tous les comportements
sont soumis à l'efficacité. Pierre Parlebas montre à ce propos
que la seule communication qui puisse être tolérée dans les sports-collectifs
par exemple est celle qui contribue à accroître la performance collective.
Pas de fioritures. La communication, qu'elle soit verbale ou gestuelle,
ne supporte pas d'autres fins que d'améliorer la communication entre
partenaires et de perturber la communication vis-à-vis des adversaires
(feintes, messages codés, combinaisons numérotées). Dans ce registre,
la communication acceptée dans le sport est une communication utilitaire
qui fonctionne sur la base de signes (regard, doigt tendu, mouvement
de tête, etc.)
Or, ce que rappelle Claude Pujade-Renaud dans Expression
corporelle langage du silence, c'est que " le corps ne parle
pas par signaux. Il est porteur d’une symbolique. " Réduire
la communication corporelle aux gestes nécessaires à l'accroissement
de l’efficacité individuelle ou collective revient à exercer une
censure sur le corps par le gommage ou le refoulement des significations
non utilitaires ou parasites.
1 Critiques des pédagogies sportives
Fort logiquement donc, les critiques dénoncent les pédagogies sportives.
Car ce sont elles qui sont à l'origine de l’instrumentalisation
du corps. Observant les propositions pédagogiques disponibles dans la
revue EPS, Jean Le Boulch évoque à leur propos " les expériences
de Munn sur le rat blanc dans les labyrinthes ", alors que Pierre
Parlebas note que " la pédagogie du sport la plus permissive
ne peut-être en profondeur qu’une pédagogie autoritaire : c'est
la pédagogie du modèle et de la norme. " Ces remarques vont bien
delà de la critique des pédagogies. Elles permettent de rappeler que
l'élève n’est pas un être sur lequel il suffirait d’imprimer
sa marque. Comme le rappelle Pierre Parlebas, " l'individu
agissant n'est pas un chien de Pavlov; les conduites d'apprentissage
moteur ne sont pas réductibles à un montage rationnel de conditionnements.
" ( 15) Rat blanc en labyrinthes, chien de Pavlov, le modèle d'inculcation
des techniques sportives est mis à mal.
Dans la revue Partisans, François Gantheret dénonce
ce caractère aliénant de la pédagogie sportive. A partir d'un point
de vue psychanalytique, il met en évidence les conséquences fantasmatiques
des pédagogies véhiculées dans le milieu sportif: elles imposent "non
seulement un système de conduites, mais aussi un système de névroses.
" (16) Pour lui, le mode d'organisation réel et symbolique de l'éducation
physique et du sport dans notre société privilégie en effet " un
mode sadomasochique du rapport de l'individu à son corps et au corps
d'autrui. " (17) Cet aspect donne d'ailleurs lieu à une question
dans l'ouvrage Questions réponses sur l'éducation physique et sportive,
publié une dizaine d'années plus tard : " La pédagogie de l'E.P.S.
implique-t-elle une valorisation de l'effort et de la souffrance ?
".
La réponse de François Gantheret est claire : " l'idée d'un
plaisir corporel gratuit est proprement inconcevable pour l'éducateur
physique, il y voit, scandalisé, le gaspillage de quelque chose. " Il
en résulte une morale de l'effort dont le critère est la souffrance,
illustrée par une anecdote " Nous avons vu récemment un jeune stagiaire
faire trimer la classe qui lui était confiée jusqu 'à la limite de l'épuisement.
Pourquoi ? " Je n'ai pas l'impression de les avoir fait travailler,
si elles n'ont pas souffert". Cette attitude traduit les implications
inconscientes de l'éducateur, imprégné des valeurs du sport mais aussi
de l'école. A son tour, il les transmet par l'effort qu'il impose. Le
corps ainsi mobilisé " est le médiateur privilégié de cette intériorisation
" par laquelle chaque individu apprend et s'approprie les logiques des
rapports de production.
Ces critiques sont à replacer dans le contexte de l'époque. Deux tendances
majeures sont repérables. Tout d'abord, toutes les institutions sont
soumises au feu de la dénonciation des pouvoirs. L'institution scolaire
comme l'institution sportive ont donc été passées à la moulinette de
l'accusation d'aliénation. Lieux d'imposition d'un pouvoir, elles ne
pouvaient pas être épargnées par la critique. Lieux de diffusion et
de reproduction de l'idéologie dominante, elles ont été dénoncées quant
à leur organisation, leur fonctionnement, leurs normes, leur discours....
Bref leur double réalité (objective et subjective) a subi une analyse
critique dont la conséquence fut la dénonciation des mécanismes inconscients
grâce auquel les pouvoirs s'inscrivent dans les corps.
Et c'est justement la compréhension du corps qui traduit la seconde
tendance de l'époque. Une collection riche d'ouvrages majeurs a, durant
une petite décennie, posé les bases d'une mise en question radicale
des représentations du corps qui avaient cours jusque là dans le domaine
de l'éducation physique : la collection " Corps et culture " aux éditions
universitaires.
2 - Corps et culture : de la compréhension du corps à la critique
d'un enseignement
2-1 Compréhension du corps
Le directeur de cette collection était Michel Bernard dont
l'influence sur la pensée critique concernant le sport et l'éducation
physique est indéniable. Il a enseigné la psychopédagogie à l’ENSEPS
où Jean-Marie Brohm et Georges Vigarello suivirent son
enseignement. En 1972, il publie un ouvrage majeur, Le Corps
qui inaugure la collection Corps et culture (18). Son projet
est aussi clair que critique puisqu'il s'agit de " démystifier une
certaine image du corps ". A une époque où les sciences humaines
commencent à peine à organiser les réflexions de l'éducation physique,
Michel Bernard met en évidence la pluralité des dimensions du
corps et s'attache à atténuer la portée du corps anatomique et physiologique
(le corps machinal) qui prévaut alors sous l'influence des sciences
de la vie.
"Nous nous proposons de montrer et expliquer au lecteur, écrit-il,
comment son expérience corporelle, qu'il croit être sa chose propre,
sa citadelle inexpugnable, est investie et façonnée dès son origine
par la société dans laquelle il vit. ( ... ) Nous découvrirons ainsi
au centre de notre corporéité l'impact sociologique et idéologique d'une
société omniprésente. " Le concept de corporéité apparaît pour rendre
compte de ce travail de la culture sur les corps qui ne peut plus être
appréhendé comme une " évidence chiffrée, classée, répertoriée
" (19) et coupée de l'histoire.
Dans cette logique, une série d'ouvrages va être publiée. Ils mettront
en évidence la manière dont la société investit les corps et leur impose
ses normes, sans que les individus n'en ait conscience. (20) Le poids
de l'idéologie et des institutions est ainsi relevé pour indiquer comment
ce qui nous paraît le plus naturel (notre corps) est en fait structuré
par la société et les mythes qui la traversent. L'article de Marcel
Mauss sur les techniques du corps est sorti des oubliettes pour
rappeler que le corps est un montage symbolique, un entrelacs de significations.
Les évidences sont ainsi mises à l'épreuve des sciences socio-historiques.
Dans cette perspective, Georges Vigarello dévoile comment depuis
le XVIème siècle se norment les corps (21). En étudiant le discours
pédagogique de la rectitude et les techniques proposées à cet effet,
il permet de comprendre les conditions d'apparition d'une pratique sociale
de transformation des corps, les mutations qu'elle subit et les justifications
qui lui permettent de se reproduire. Son analyse ne s'arrête pas aux
méthodes d'une autre époque. Au contraire, il utilise les apports de
l'histoire pour discuter les effets normalisants des pratiques les plus
récentes comme la psychomotricité ou l'expression corporelle.
De la sorte, l'analyse du discours menée au sein de Corps et Culture
ne se réduit pas à une analyse des idées éducatives. Elle permet de
saisir l'efficacité du discours lui-même dans la mise en œuvre
des pratiques d'éducation physique. " Le mirage d'un savoir total
sur le corps " (22) est dénoncé. Georges Vigarello, Jean-Marie
Brohm, Daniel Denis, Yves Le Pogam ou Michel Bernard
interrogent finalement les présupposés les plus ancrés dans le discours
d'éducation physique. À partir des sciences sociales, leur travail théorique
bouscule les évidences et interdit de recourir à la seule force de l'affirmation
pour justifier une éducation physique sportive. La mise en évidence
des normes corporelles et des processus de pouvoir par lesquels elles
se reproduisent autorise une prise de conscience permettant de s'en
dégager. Les normes du corps redressé, du corps maîtrisé, du corps performant
ne vont plus de soi. Elles résultent d'un processus social et ne peuvent
plus être considérées comme des invariants culturels.
C'est en ce sens que leur travail sapant les croyances les plus profondes
car les moins questionnées - rencontre bon nombre de résistances. En
pensant l'impensé (le corps), ces auteurs bousculent l'idéologie de
l'éducation physique. Corps et culture fait ainsi office de laboratoire
à une époque où la recherche n'existe pas dans les UEREPS fraîchement
instituées. Mais il faut du temps pour que des analyses critiques portant
sur les processus invisibles de l'éducation deviennent des vérités collectives.
2-2 Critiques d'un enseignement
Lorsque ces critiques portent sur l'institution scolaire elles se
heurtent en effet au poids des traditions et des habitudes. Néanmoins,
les positions critiques à propos de l'éducation physique entrent en
résonance avec celles qui se développent au même moment dans le champ
des sciences de l'éducation. Elles indiquent le foisonnement intellectuel
des années soixante -dix qui se joue autour de l'analyse institutionnelle
et des travaux de Georges Lapassade, René Lourau, Jacques
Ardoino, Cornelius Castoriadis, Rémi Hess, etc. Elles
mettent en évidence que les règles de la vie collective traduisent le
plus souvent l'imposition d'un pouvoir. Toute institution fonctionne
sur un ordre établi, certes. Mais il est également possible d'instituer
collectivement les règles, dans l'ici et le maintenant d’une expérience.
Ce que Georges Lapassade et René Schérer appellent
le champ neutralisé de l'éducation (23) rencontre ainsi les analyses
de Daniel Denis dans le corps enseigné (24) ou de Claude Pujade-Renaud
sur la place du corps dans la relation pédagogique (25).
Au sein de l'école, et a fortiori au sein des leçons d'éducation
physique, " au lieu de laisser les enfants vivre 1'espace et le temps,
les éducateurs le leur donnent à apprendre: cela conduit à fabriquer
un système simpliste de repérage, un quadrillage figé et clos. Il existe
un espace-temps pédagogique " (Daniel Denis). Le corps
enseigné est un corps qui échappe tout autant aux élèves qu'aux
enseignants qui prétendent le modifier pour son plus grand bien.
L'institution scolaire neutralise en effet la relation maître-élève
et neutralise les corps, Il en découle la neutralité dont la signification
profonde est sans doute la neutralisation des affects générateurs de
conflit qui va fonctionner pour l'élève sur le mode de non-implication
affective. " (26) Les rationalisations pédagogiques qui prétendent régler
jusque dans le moindre détail le déroulement des leçons et par suite
les acquisitions des élèves construisent cette neutralité, autant qu'elles
en sont le résultat. Faire porter le débat sur des techniques d'enseignement
et sur les "recettes " demandées par les enseignants pour " " faire
leur cours " contribue à taire la réalité de cet enseignement faite
de conflits, de pouvoirs et de contre-pouvoirs, de désirs et de non-désirs,
de soumission et d'insoumission, d'ordre et de chahut, de labeur et
d'indolence, de motivations et d'indifférence.
La mise en cause des traditions pédagogiques de l'éducation physique
et du sport intègre les points de vue critiques sur l'institué pédagogique.
C'est ainsi qu'apparaissent des articles sur la non-directivité dans
la revue Éducation physique et sport ( 1970) (27). Le recours aux sciences
humaines amène de plus à se questionner sur les stratégies d'intervention
dans la classe, groupe institué sur un mode hiérarchique. Comme l'écrit
Jean Le Boulch, " une attitude pédagogique non directive suppose
une formation à la pratique de techniques propres et la prise de conscience,
par l'éducateur, de sa propre responsabilité à l'intérieur du groupe
" (28). Les références aux travaux d'Anzieu et Martin,
les analyses de Jacques Ardoino et les travaux de la pédagogie
institutionnelle sont ainsi utilisés pour mettre en question les usages
les plus convenus des pédagogies corporelles.
Ces critiques dépassent la seule volonté de rénover les pédagogies
traditionnelles de l'éducation physique qui apparaissent désormais comme
un problème plus profond lié au fonctionnement de l'institution scolaire
elle-même. Car, contrairement à ce qu'affirme Jacques de Rette
au même moment, l'utilisation du sport n'entraîne pas en elle-même un
bouleversement des pédagogies traditionnelles. Penser " qu'il suffisait
d'organiser l'éducation physique sur le mode compétitif pour résoudre
les problèmes de fond de la discipline [est] une idée simpliste
" (29).ce n'est pas en changeant l'objet de l'enseignement que se modifient
les pédagogies. La critique de l'éducation physique sportive est aussi
une critique institutionnelle. C'est la raison pour laquelle les fonctionnements
pédagogiques institués sont condamnés. Ginette Berthaud montre
par exemple comment l'enseignant institue l'autorité. " Le professeur
ou l'entraîneur-éducateur devient dans cet ensemble sportif un " super-administrateur-stratège-leader "
chargé de diriger, de contrôler, d'animer l'ensemble de " l'entreprise
sportive " dont il est le responsable. Il devient nécessairement
une autorité, un chef le centre même du processus de mobilisation physique
qu'il impulse. Il incarne l'unité du système sportif. Même un leader
"non-autoritaire " (extérieurement du moins) devient dans cet ensemble
un facteur d'ordre et d'autorité. " (30). Les déterminants inconscients
de la relation pédagogique sont ainsi dénoncés tout comme l'est l'illusion
de penser changer la pédagogie sans que l'appareil scolaire ne soit
radicalement transformé. François Gantheret indique ainsi l'enjeu
du projet critique de la revue Partisans : " Il n'y a pas [
.. ] d'étude critique de l’Éducation physique et sportive sans
une pédagogie critique : à savoir la possibilité de la reconnaissance,
dans le rapport pédagogique, et d'abord pour l'éducateur, de ses implications
affectives, et de la place qu'il tient comme travailleur dans le système
des rapports de production et d'échange. La mise en œuvre d'une
telle analyse, des transformations des institutions qui permettront
de parvenir, constitue le premier objectif révolutionnaire concret des
professeurs et futurs professeurs d’Éducation physique. "
(31)
Cet objectif produit une vérité quasi schizophrénique : Peut-on enseigner
dans une institution dont on sait par ailleurs qu'elle est l'appareil
reproducteur de l'idéologie que l'on condamne ? L'article paru dans
la revue Quel Corps ? en 1975, "Autour de la pratique quotidienne
de l'enseignant en éducation physique et sportive " traduit cette contradiction
: " où en est la théorisation sur la pédagogie de rupture en E.P.S.
? Quelle est (quelle pourrait être) la pratique quotidienne d'un enseignant
d'E.P. révolutionnaire ? " (32) Les critiques de l'institution scolaire
issues de 1968 entraînent une lecture explicitement politique de l'éducation
physique. Cependant, le projet de fonder une pédagogie critique se heurte
à la force de l'institué pédagogique.
Quoiqu'il en soit, les points de vue militants et les analyses institutionnelles
ont permis " la reconnaissance d'une normativité de l'éducation
" (33).
Toute éducation est transmission de valeurs. En conséquence, il est
nécessaire de s'entendre sur les valeurs éducatives que l'on vise à
inculquer. Mais ce principe s'accompagne tout aussi nécessairement de
leur discussion. La question est donc de savoir quelles sont celles
que véhiculent les moyens retenus et les pédagogies mises en place.
C'est dans le cadre de cette problématique que s'établissent les critiques
sur les valeurs du sport et de leur intérêt pour l'éducation des enfants
scolarisés.
2-3 Critiques portant sur les valeurs du sport. Le sport pour quoi
faire ?
Des questions sont posées qui ne l'étaient pas jusqu'à présent. Qu'est-il
souhaitable d'inculquer aux élèves ? Quel type d'individu espère-t-on
former par la pratique des sports ? Contre les idées reçues, le doute
porte désormais sur les effets éducatifs du sport. Car en effet, nul
ne discute de son caractère éducatif. " Éducatif, certes....
dit Daniel Denis, mais par rapport à quel projet d'éducation
? "
En fait la question qui commence à se poser concerne le projet de
société que vise une éducation physique sportive. Les critiques militantes
et résolument politiques de l'extrême gauche ont introduit à la fin
des années soixante le questionnement sur les fins implicites de l'éducation
physique et sportive. Dans le cadre d'un projet révolutionnaire, l'élucidation
des mécanismes d'aliénation de la société capitaliste s'impose. Ainsi
pour Ginette Berthaud, " "l Homme " que l'éducation doit réaliser
(et surtout l'éducation sportive) est l'homme tel que la société capitaliste
veut qu'il soit. C'est pourquoi toutes les forces liées au système bourgeois,
qui préconisent ce moyen de formation des individus particulièrement
efficace " quant à la préparation au travail et à l'intégration sociale,
justifient toutes en chœur l'éducation comme "adaptation " sans
préciser les finalités réelles de l'adaptation. Adaptation à quoi et
à qui ? [ ... ] Sport éducatif pour quoi faire, et pour qui ? Telle
est la question centrale" (34) Ce questionnement sur les fins politiques
de l'éducation justifiera le titre de la revue Quel corps ?
créée en 1975 par Jean-Marie Brohm " Quel corps, pour quel
individu, pour quelle société ? ". La critique politique de mai
1968 s'insinue dans le débat d'éducation physique et dénonce les fins
comme les moyens de cet enseignement.
Mais la critique politique n'est pas la seule à questionner les valeurs
supposées du sport. Pour Jean Le Boulch, " il faut [ ...
] dépasser cet esprit compétitif en cultivant l'esprit de coopération
" (35) de manière à contribuer à l'apprentissage d'autrui. Certes,
la compétition développe bien un tel apprentissage, puisque selon Pierre
Parlebas, " le sport inscrit dans le comportement moteur les
normes désirées de l'affrontement et de la concurrence " (36).
Mais en toute logique, le type de relations à autrui induit par la compétition
valorise l'antagonisme entre les individus et les groupes et inculque
concrètement l'idéologie d'une lutte permanente. Or, rien ne justifie
a priori un tel choix de société. Et la question posée alors consiste
à se demander pourquoi il est préférable de former les citoyens aux
valeurs de l'antagonisme plutôt qu'à celles de la coopération. Car la
coopération qui s'institue dans les sports-collectifs se fonde toujours
sur la rivalité.
En outre les valeurs qui président aux progrès sportifs érigent une
morale du plaisir mérité. " Il s’agit d'accepter, à des niveaux
différents certes, le labeur, la somme de fatigue sans cesse niée ",
le déplaisir, la peine de l'effort et même la souffrance. La morale
de l'effort sportif sert dans tous les cas à cautionner l’existence
du labeur qui attend l'enfant. C’est elle qui permet de justifier
moralement dès l'école le travail comme le contenu même de la vie.
" (37) Le sport et l'éducation physique concourent de concert à modeler
moralement les plaisirs. Les plaisirs sains deviennent ceux qui nécessitent
un travail préalable, un ascétisme initial, un retard à jouir. Et c'est
à cette morale - qui est aussi celle de l'école que forme l'éducation
physique sportive.
Sous la double influence des dénonciations gauchistes de la revue
Partisans et des analyses du corps de Michel Bernard se joue
finalement " le procès du sport " (38) . La " critique fondamentale
du sport " à laquelle invite Pierre Laguillaumie dans Partisans
(39) dénonce " l'aliénation du corps dans le travail et dans le sport
" décrite par Michel Bernard et Jean-Marie Brohm. L'analyse
philosophique sur les fins de l'éducation physique se nourrit des prises
de position militante (40) . La critique du sport et la compréhension
du corps se rejoignent dans la dénonciation de la mise en conformité
idéologique qu'exerce l'institution sportive (41).
2-4 Vers une éducation physique ouverte grâce à une éducation physique
critique
Finalement, les critiques sur l'enseignement sportif' obligatoire
au sein de l'enseignement français traduisent un espoir de changer l'éducation
physique. Comme le souligne Daniel Denis, la perspective d'une éducation
physique massivement envahie par le sport est " contestée en tant que
système privilégié d'intégration aux normes sociales dominantes. Un
désir - parfois furieusement exprimé - d'autre chose s'exprime en un
lancinant leitmotiv. "
Autre chose, oui mais quoi ? Car critiquer l'usage des sports ne signifie
pas renoncer à la nécessité d'éducation physique, y compris pour les
approches les plus radicales (42).
Après la démission de Jean Le Boulch de l’Éducation nationale
en 1969, deux orientations se dessinent pour proposer des alternatives
à un enseignement sportif. D'une part, les pratiques corporelles privilégiant
l'expression, l'imagination, la créativité, sont sollicitées. Par ailleurs,
des réflexions visant à instituer une " pédagogie aléatoire"
(Daniel Denis) préconisent un refus des règles définies a priori
par les règlements sportifs au profit de celles qui s'instituent au
fur et à mesure de l'expérience du groupe.
2-5 L'expression corporelle
Une ouverture possible pour l'éducation physique est apparue du côté
des pratiques d'expression corporelle. Présentes dans les Instructions
officielles de 1967, elles sont préconisées pour l'éducation physique
des jeunes filles, selon une vision sexuée et sexiste de l'enseignement.
Deux expérimentations vont poser les bases d'une réflexion sur leur
portée éducative. En 1969, le GREC (Groupe de recherche en expression
corporelle) est créé à l'IREPS de Toulouse. Entre 1969 et 1971, Claude
Pujade-Renaud expérimente la pratique de l'expression corporelle
dans le cadre de l'université (à l'UER des sciences humaines de Paris
VII et à l'UEREPS de Paris V). Les théorisations qui accompagnent ces
expériences posent l’enjeu d'une éducation artistique pour enrichir
l'inventaire des possibles corporels. La dimension expressive, grande
oubliée de l'instruction sportive, est ainsi réhabilitée dans la formation
de l'homme. Pour Jean-Benard Bonange, fondateur du GREC. Préparé
par l’expression et préparé à l’expression, cet homme sera
en état de mieux vivre. " (43)
Des valeurs comme là créativité, l'imagination, l'improvisation,
la liberté sont affirmées. (44) La vision mécaniste du corps de l'éducation
physique sportive est dépassée. Le mime, le théâtre et toutes les formes
d'expressivité sont envisageables dès lors qu'elles favorisent un processus
dont la finalité consiste à présenter un spectacle, une chorégraphie
à partir de la production des élèves et non pas de l'apprentissage du
vocabulaire technique de la danse. Car la question de la technique est
centrale. Si les pédagogies qui découlent de cette ligne d'analyse refusent
de considérer la technique comme un "savoir clos " dont l'enseignant
serait le dépositaire. Mais, rappelle Claude Pujade-Renaud, "
l'expression corporelle ne bascule pas pour autant vers une libération
anarchique (...) Elle renvoie bien à une maîtrise (mais à une maîtrise
non répressive ".
Dans une ligne psychanalytique, Claude Pujade-Renaud introduit
des dimensions du corps occultées jusqu'alors. La prise en compte d'un
corps désirant, d'un corps sexué, d’un corps érotisé est revendiquée.
Et c’est pour cela que " l'expression corporelle rompt dans un
premier temps avec les techniques constituées " de manière à se libérer
du " carcan instrumental " de l'apprentissage moteur. Cette approche
permet aux enseignants comme aux étudiants d'éducation physique d'avoir
une vision moins négative du corps de leurs élèves dont ils ont moins
tendance à évaluer les manques par rapport aux techniques les plus efficaces.
2-6 Pour des règles instituantes
Dans un autre registre, les enseignants d'éducation physique rassemblés
sur l'initiative de Daniel Denis autour du SGEN-CFDT (45) préconisent
de " substituer à ce règlement universel, obligatoire etfigé des règles
qui n'auront plus ce caractère permanent mais qui seraient issues du
groupe, avec possibilité d'être à tout moment remises en cause. " (46)
Il s'agit d'accepter des pratiques corporelles n'excluant pas le plaisir,
y compris si elles produisent un certain désordre. Autour du SGEN et
de " la nouvelle ENSEP " se nouent des réflexions qui articulent les
points de vue historiques et sociologiques les plus récents (47) et
les engagements politiques pour penser l'éducation du corps en tentant
d'intégrer des questionnements sur la société (le travail, l’urbanisme,
la médecine, la prison, etc.). Les thèses qui se dégagent des nombreux
lieux de discussion rappellent une évidence oubliée : l'éducation du
corps se fait de plusieurs manières et les enseignants d'éducation physique
n'en sont pas les seuls artisans. Elle se réalise aussi dans l'anodin,
l'imperceptible, tout autant que dans les projets les plus rationnels
de l'institution.
La position du SGEN à propos du sport en éducation physique est claire.
Le but ne consiste pas à enseigner des techniques développées selon
les principes de rendement et d'efficacité mais plutôt d'utiliser le
sport pour participer à la revendication corporelle de la jeunesse française.
" Le sport est là et nos élèves en demandent ? Il faut savoir
l'utiliser pour le défigurer, en démonter les mécanismes et les contradictions,
en faire un tremplin de mise en question et d'élucidation "
(48) Le sport s'affirme ainsi comme un moyen d'éducation et non pas
comme une fin en soi. La critique développée ne se cible pas sur le
sport de compétition. Elle s'inscrit dans un projet politique plus large
visant à militer pour d’autres conditions de travail, de logements,
de transport, bref, à mener la " lutte sur tous les fronts où le
corps est impliqué dans une société fondée sur la division sociale du
travail". En ce sens ces critiques traduisent moins l'opposition
systématique au sport que la volonté d'analyser l'éducation physique
sportive, ses implications philosophiques et politiques et ses effets
sur les imaginaires. Le point de vue adopté est un point de vue désaxé.
Ces réflexions traduisent un recul vis-à-vis de l'objet sport et l'usage
des sciences sociales et humaines pour penser l'éducation physique
plutôt que pour la justifier.
Ce qui est acquis du débat, c'est que les sports sont une invention
culturelle récente. Leur dimension est profondément historique. En outre,
le corps est pluridimensionnel. Il est marqué, modelé par la société
et investi de symboliques. Il est le lieu où se concrétise le jeu des
pouvoirs.
Néanmoins, vingt ans après, l'analyse critique a déserté l'éducation
physique (49). Les IUFM soumis à l'exigence d'efficacité dans la préparation
aux concours n'ont pas le loisir de produire autre chose que du prêt
à penser (50). La complémentarité des perspectives critiques avait pourtant
entraîné un questionnement radical sur l'enseignement de l'éducation
physique. Les questions formulées alors ont été effacées de la mémoire
collective des enseignants d'éducation physique. Leur préoccupation
actuelle porte sur la mise en œuvre des programmes. L'élucidation
des axiologies secrètes (51) de cet enseignement, est reléguée
aux oubliettes. Tout se passe aujourd'hui comme si l'éducation physique
était une évidence. Obligatoire au baccalauréat, elle est devenue un
nouvel outil de la normalisation scolaire à laquelle se livrent les
enseignants persuadés d'œuvrer pour l'éducation d'élèves qu'ils
ne font qu'instruire.
Et finalement, malgré les incantations verbales et les nouvelles lubies
comme la citoyenneté, malgré l'ambition de son projet explicite et la
certitude qu'elle est nécessaire, elle est en proie à une sorte de pensée
magique par laquelle il suffirait d'énoncer ses objectifs, pour évaluer
ses effets. Le débat sur les valeurs - préalable à toute stratégie résolument
éducative – est évacué. Face à l'aveuglement de la pensée éducative
au bénéfice des rationalités pédagogico-didactiques, " la voie se
dessine donc avec clarté : il faut souhaiter la fin de l'éducation
physique " (52)
Philippe Liotard
1 - un slogan est un message simple et simplificateur qui formule une
idée comme évidente et indiscutable.
2 - Ainsi que l’écrivent Henri Vaugrand et Jean-Pierre Escriva,
L’opium sportif. La critique radicale du sport de l’extrême
gauche à Quel corps ?, Paris, L’Harmattan, 1996 ou H.
Vaugrand, Patrick Vassort et Fabien Ollier, L’illusion sportive.
Sociologie d’une idéologie totalitaire, in Les cahiers de
l’IRSA, n°2, février 1998.
3 – Pour un panorama de ce débat, le lecteur peut se reporter
à Quelles pratiques corporelles maintenant ? sous la direction
de Michel Bernard, Paris, JP Delarge édit 1978 ou encore aux articles
de JM Brohm dans Quel corps ?, n° 12-13, 1979.
4 – La demande de Thiérry Terret quant à ma contribution était
explicite. Il s’agissait de rédiger un article sur la dialectique
des modèles dominants et des modèles dominés à propos de l’éducation
physique.
5 – P. Parlebas, Jeu sportif, rêve et fantaisie, in Esprit, n°5,
1975.
6 – Les acteurs dont il est question dans cet article sont tous
enseignants d’éducation physique de formation, à l’exception
de M. Bernard, philosophe qui enseignait la psychopédagogie à l’ENSEP.
7 – P. Seurin (dir.), Vers une éducation physique méthodique,
Tome1, " Principes généraux et progressions d’exercices ",
Bordeaux, Bière, 1955.
8 - Jean Le Boulch, Face au sport, Paris, ESF, 1977.
9 - Claude Pujade-Renaud, Vers une éducation Physique et sportive critique
?, conclusion à Questions réponses sur l'éducation Physique et sportive,
Paris, ESF, 1979.
10 - P. Parlebas, Jeu sportif, rêve et fantaisie, in Esprit, n°5, 1975.
11 - Daniel Denis, Aux Chiottes l'arbitre. A l'heure du Mundial,
ces footballeurs qui nous gouvernent, Supplément à Politique
aujourd'hui, n°5, juin 1978.
12 - Jean Le Boulch, Vers une science du mouvement humain, Paris, ESF,
1971.
13 – P. Parlebas, Activités physiques et éducation motrice, Paris,
Ed. revue EPS, (supplément au n° 139), mai juin 1976.
14 – JM Brohm Sociologie politique du sport, Paris, Ed. Univ,
(Collection " Corps et culture "), 1976, réédité aux PUN,
1992).
15 - Pierre Parlebas, Jeu sportif, rêve et fantaisie, in Esprit, n°
5, 1975.
16 - François Gantheret, Psychanalyse institutionnelle de l'éducation
physique et des sports, in Partisans, (" Sport, culture et répression
"), n° 43, juillet-septembre 1968, (Réédition Maspero, 1972). Article
réédité dans Quel Corps n° 43-44, ( Sciences humaines cliniques et pratiques
corporelles, Tome 1), février 1993.
17 - Pour une analyse récente de cette dimension, voir mon article L'entraîneur
l'emprise , dans Frédéric Baillette, Philippe Liotard, Sport et virilisme,
Montpellier, Éditions Quasimodo & fils, 1999.
18 - Michel Bernard, Le Corps, Paris, Jean-Pierre Delarge éditeur, (Collection
" Corps et culture "), 1976 (lere, édit 1972).
19 -Ginette Berthaud et Jean-Marie Brohm, " Présentation " à Partisans,
n° 43, 1968.
20 - Jean-Marie Brohm, Corps et politique, Paris, Éditions Universitaires,
(Collection " Corps et culture "), 1975.
21 - Georges Vigarello, Le Corps redressé : histoire d'un pouvoir péda-gogique,
Paris, Éditions Jean-Pierre Delarge, (" Corps et culture "), 1978.
22 - Georges Vigarello, Éducation physique et revendication scientifique,
in Esprit, n° 5, 1975.
23 - Georges Lapassade, René Schérer, Le Corps interdit. Essais sur
l’éducation négative, Paris, ESF, 1976.
24 - Daniel Denis, Le Corps enseigné, Paris, Ed. Universitaire (Collection
Cors et culture), 1974
25 - Les réflexions de cette auteure exposées dans des ouvrages peu
connus du monde de l'éducation physique : Claude Pujade-Renaud
et Daniel Zimmermann, Voies non verbale de la relation pédagogique,
Paris, ESF 1979, Claude Pujade-Renaud, Le corps de l’enseignant
dans la classe, et le corps de l'élève dans la classe, Paris, ESF, 1983.
26 - Jacques Ardoino, Éducation et politique, Paris, Gauthier-Villars,
1977.
27 - Paule Paillet, " Autour du non directivisme ", Éducation physique
et sport, n° 102, juillet 1970 , Collectif, " A propos de la non-directivité
", Éducation physique et sport, n° 103, 1970.
28 - Jean Le Boulch, L'éducation physique et sportive voie d'intégration
sociale, in Les Cahiers scientifiques d'éducation physique, juin-septembre
1967.
29 - Jean Le Boulch, Face au sport, Paris, ESF, 1977
30 - Ginette Berthaud, Éducation sportive et sport éducatif, in Partisans,
n° 43, 1968.
31 - François Gantheret , Psychanalyse institutionnelle de l'éducation
physique et des sports, in Partisans, n° 43.
32 - G. Aubarbier, F. Linol, J. Maillet, Autour de la pratique quotidienne
de l'enseignant en éducation physique et sportive, in Quel Corps
?, n° 2, septembre-octobre 1975.
33 - Michel Bernard, Introduction à Quelles pratiques corporelles
maintenant ?
34 - Ginette Berthaud, Éducation sportive et sport éducatif, op. cit.
35 - Jean Le Boulch, L'éducation physique et sportive voie d'intégration
sociale, op. cit.
36 - Pierre Parlebas, Pourquoi fait-on pratiquer le plus souvent des
jeux de fédération 9 Ont-ils une valeur éducative supérieure aux jeux
traditionnels ?, in Questions réponses sur l'éducation physique et sportive,
Paris, ESF, 1979.
37 - Ginette Berthaud, Éducation sportive et sport éducatif, op. cit.
38 - Titre du deuxième chapitre de Quelles pratiques corporelles maintenant ?
39 - Pierre Laguillaumie, Pour une critique fondamentale du sport, in
Partisans, n° 43.
40 - Qui trouvent leur origine dans l'article de Jean-Marie Brohm, Forger
des corps pour forger des âmes, in Partisans, n° 15, avril-mai 1964.
41 - Le débat reste ouvert trente ans après, puisque très récemment,
dans Sport et plein-air (n° 440, janvier-février 2000), René Moustard
tente de faire le bilan de l'idéologie du sport aujourd'hui.
42 - Voir sur ce point : Pour un changement radical en éducation
physique et sportive, in Quel Corps ?, n° 23-24, avril 1983
et le manifeste de Quel Corps ? : Pour un autre sport, pour une
autre éducation, pour une autre société, in Jacques Ardoino, Jean Marie
Brohm, Anthropologie du sport. perspectives critiques, Paris, AFIRSE-Quel
Corps?, 1991.
43 - Jean-Bernard Bonange. L'activité expression corporelle à l’IREPS,
in Les Cahiers du GREC, n° 1, avril 1969.
44 - Claude Pujade-Renaud. Expression corporelle langage du silence,
Paris, ESF, 1977 (4è édition).
45 - Syndicat autour duquel se retrouvent à l'époque Georges Vigarello,
Daniel Denis, Nancy Midol, Claude Pujade-Renaud, Paule Paillet, etc.
46 - Compte-rendu du colloque SGEN-CFDT organisé en septembre 1975,
rapporté dans Quel Corps ?, n° 3, novembre-décembre 1975.
47 - C'est ainsi qu'une interview du philosophe Michel Foucault est
réalisée par Jean-Marie Brohm, Daniel Denis et Georges Vigarello et
publiée dans Quel Corps ? (n°2, 1975), juste après la parution
de son ouvrage Surveiller punir, Paris, Gallimard, 1975.
48 - SGEN-CFDT, Pour une autre éducation physique, Bulletin syndicale
non daté (probablement 1977).
49 - Frédéric Baillette, Jean-Marie Brohm, Traité critique d'éducalion
physique, Montpellier, Quel Corps ?, 1994.
50 - Pour s'en convaincre, il suffit de consulter - sans l'acheter -
le consternant petit livre rose publié chez Vigot qui pompe allégrement
(et mal) les travaux d'auteurs reconnus et fournit comme vérités historiques
aux étudiants, des erreurs grossières enfantées de la méconnaissance
et de l'inculture sociohistorique de son auteur.
51 - Michel Bernard, Critique des fondements de l'éducation, Paris,
Chiron, 1989.
52 - Daniel Denis, Le succès damné du corps, in Quelles pratiques corporelles
maintenant, op cit.
Annexe : Que sont-ils devenus ?
Les auteurs dont il a été question ont poursuivi une carrière universitaire
en dehors des STAPS.
Michel Bernard est professeur émérite des Universités (philosophie
et esthétique).
Jean-Marie Brohm est professeur de sociologie à l'Université
Paul Valéry (Montpellier). Outre le combat qu'il continue à mener contre
l'institution sportive (Les Meutes sportives, Paris, L'Harmattan,
1993 ; collaboration à Manières de voir, " Le Sport c'est la guerre
" , Les Shootés du stade, Paris Méditerranée, 1998), il est
directeur de publication de deux revues de sociologie : Prétentaine
(dernier numéro, n° 12-13, mars 2000, intitulé " Corps ") et Les
Cahiers de l'IRSA. Il vient également de diriger l'édition des
textes posthumes de Louis-Vincent Thomas dont il a rédigé la préface
: Les Chairs de la mort, Paris, Institut d'édition Sanofi-Synthé
labo, 2000.
Daniel Denis est Maître de conférences à l’IUFM de Versailles
et chercheur au Centre de Recherches sur les Cultures Sportives de l'Université
de Paris-Sud-Orsay. Il vient de diriger l'ouvrage collectif À l'école
de l'aventure. Vie sportive et idéologie de la conquête du
monde, 1890-1940, Voiron, PUS, 2000.
Jean Le Boulch vient de publier Le Corps du XXIeme siècle,
Paris, PUF, 1998. Il travaille actuellement en Italie où il est directeur
de l'école du mouvement éducatif de Florence (ancienne école de psychomotricité)
et directeur scientifique de l'école de psychomotricité de Pavie. À
ce titre, il participe au programme européen Socratès qui a pour objectif
de lutter contre la violence scolaire, en relation avec les universités
de Bologne (sur la dynamique des groupes) et de Cologne (sur les problèmes
d'inter cultures). En Amérique du Sud, ses travaux continuent à recevoir
une réception favorable et une école Jean Le Boulch existe même à Lima
au Pérou.
Pierre Parlebas est professeur de Sociologie à la Sorbonne
(Université Paris V). Il a publié récemment chez L'Harmattant : Le
Corps et le langage, 1999 et Éducation, langage et sociétés,
1998.
Claude Pujade-Renaud est actuellement romancière. Un de ses
romans a été couronné par le prix Goncourt des lycéens (Belle-Mère
chez Actes Sud). Elle a publié de nombreux romans et recueils de nouvelles
chez Actes Sud dont plusieurs sont disponibles en collection
de poche. À consulter pour le plaisir : Le Sas de l'absence (un
remarquable texte sur la mort et la vieillesse), Vous êtes toute
seule ? (nouvelles) ; Martha ou le mensonge du mouvement
(sur Martha Graham) ; La Nuit, la neige (roman historique), et
son dernier ouvrage, Celles qui savent.
Georges Vigarello est professeur des Universités (Sciences
de l'éducation) à l'Université Paris V et directeur d'étude à l'École
des Hautes Études en Sciences Sociales. Derniers ouvrages : Histoire
du Viol. XVIè-XXè siècles, Paris Seuil, 1998 (réédité en livre
de poche, points histoire, 2000) ; Histoire des pratiques de santé,
Paris, Seuil, 1999.
COMPREHENSION DU CORPS ET DÉNONCIATION DU SPORT (1968-1979),
par Philippe Liotard · EP, Sport et loisirs 1970-2000 Edit. AFRAPS
juin 2000.
Ce point de vue sur l' histoire des théories critiques sur le
sport a été trouvé à cette adresse :
http://perso.guetali.fr/castjpau/Resscom/LIOTARD.htm
Pour compléter cette position plusieurs textes sur les thèses
de J. M. Brohm sont disponibles sur ce site. Les voici :
Jean Marie Brohm développe depuis de nombreuses années
une démarche originale et en particulier une critique du sport.
Il a animé pendant longtemps la revue Quel corps ?
Sur cette page vous trouverez une présentation d'un livre qui
reprend des textes de cette revue et un historique de son évolution
et surtout de son auto-dissolution.
Quel Corps ? Que reste-t-il
de cette revue critique ? Un livre et un peu d'histoire
Le lien de cette présentation du livre
http://www.editions-passion.com/html/socio/auteur27.html
Le document sur l'auto-dissolution date de Février 1998, il est
extrait d'un document sur l'histoire des critiques sur l'enseignement
de l'EPS à l'école. Il a été écrit
par F. LINOL. Il était disponible à cette adresse :
http://www.educnet.education.fr/eps/administ/R_gene_1/limoges/fiches.htm#r
Frédéric Baillette nous fournit une étude historique
et un panorama des enjeux des discussions qui ont lieu autour
de la revue Quel corps ? au moment où il y participait encore.
On ne civilisera jamais
les yétis, La Revue
Quel Corps ? (L’EPS au XXe siècle)
L'article sur la revue "Quel Corps ?, On ne civilisera jamais
les yetis" est disponible à cette adresse :
http://perso.guetali.fr/castjpau/Resscom/BAILLETTE.html
Pour connaître les thèses développées par
J. M. Brohm vous pouvez consulter cette page, qui lui donne la parole
et présente "Les enjeux de la critique du sport",
puis un document intitulé "Pour une anthropologie critique
du sport" et une partie de la préface de son ouvrage
"Sociologie politique du sport".
Les enjeux de la critique du sport,
Pour une anthropologie critique du sport, Sociologie politique
du sport ( Préface )
Le lien d'origine de ces textes : Une critique du sport http://perso.guetali.fr/castjpau/Resscom/Brohm.htm
Lors d'un débat à Nantes en 1994 il a développé
sa critique centrée sur "Corps et capitalisme".
CORPS ET CAPITALISME, Jean-Marie BROHM, Comité Malgré
Tout Nantes le 29/10/94
Le Monde Diplomatique a publié un article de J. M. Brohm en Juin
2000 "La loi de la jungle, stade suprême du sport ?"
La loi de la jungle, stade
suprême du sport ?JEAN-MARIE BROHM
Cet article est paru dans LE MONDE DIPLOMATIQUE de JUIN 2000
Le lien d'origine
Le monde diplomatique JUIN
2000
Juste avant la récente coupe du monde le journal Le Monde a publié
un article qu'il signe avec Marc Perelman "Football : de
l'extase au cauchemar", il est disponible sur cette page
Football : de l'extase au cauchemar
Le lien d'origine : Le Monde Foot extase et cauchemar http://www.lemonde.fr/
En Suisse Le Temps des livres a publié "Culture-foot:
De la Coupe du monde s'élève la fumée de l'opium
du peuple", par Isabelle Rüf. C'est une note de lecture
qui encourage à lire Jean Marie Brohm et Marc Pérelman,
en prévention à l'overdose de rhétorique sportive
à venir :
Culture-foot: De la Coupe du monde s'élève la fumée de l'opium du peuple
Le lien d'origine : http://www.letemps.ch/livres/Critique.asp?Objet=1071
Le site Le temps des livres : http://www.letemps.ch
Cet auteur croise les approches pour développer sa critique.
Ici il part de la toxicomanie pour mettre en lumière les aberrations
du dopage sportif.
Compétition : La vraie
toxicomanie, Michel Gandilhon (un interview de J M Brohm)
Le lien d'origine de ce texte
http://publications.lecrips.net/
Article paru dans le Revue SWAPS Nº9 Octobre / Novembre 98 SWAPS
nº 9 (Santé, Réduction des Risques, Usages de Drogues).
Le site de Swap http://publications.lecrips.net/swaps/
Cette revue est publiée par Association P.I.S.T.E.S. : Promotion
de l'Information Scientifique, Thérapeutique, Epidémiologique
sur le Sida. Le nom est défini ainsi : "SWAP : nom masculin
d'origine anglaise qui signifie : troc, échange, crédit
réciproque. "
J. M. Brohm estime que le freudo-marxisme n'est pas à rejeter.
Il se réfère explicitement à Wilhelm Reich sur
le thème de la Psychologie de masse du fascisme. Le Freudo-marxisme
a soulevé beaucoup de polémiques. Il nous propose de faire
le point pour comprendre les enjeux des débats, enjeux qui nous
concernent encore aujourd'hui, notamment à propos de la fascisation
de notre société. Jean Marie Brohm revient sur les tentatives
de compréhension de la psychologie collective liée au
fascisme. Il constate que ces études ont été menées
par le freudo-marxisme et l'École de Francfort.
Il s'agit d'essayer de comprendre comment la population peut accepter
le fascisme. Le lien entre la structure psychologique, les croyances
et les propositions fascistes sont l'hypothèse de base. On peut
ainsi essayer de répondre à la question de savoir pourquoi
une grande partie d de la population peut s'identifier aux démagogues
fascistes.
Les effets de l'éducation autoritaire sont en cause. La notion
de "fausse conscience" est employée ici pour essayer
d'expliquer pourquoi la haine est apparue au sein même de la civilisation
occidentale. Il plaide pour une approche croisée entre la sociologie,
la psychanalyse, la philosophie politique et l'étude des représentations.
Il estime que la recherche théorique est impliquée dans
la vie sociale et qu'elle se doit d'exprimer sa solidarité de
"sujet vivant" avec les victimes du fascisme.
Sur la psychologie de
masse du fascisme
Le lien d'origine de ce document de Jean Marie Brohm sur Reich et Marcuse,
sur le freudo-marxisme et la psychologie de masse du fascisme : http://www.anti-rev.org/textes/Brohm00a/index.html
Les approches d'autres courants critiques viennent souvent féconder
le travail critique de J. M. Brohm, c'est le cas ici avec la présentation
des thèses de Michel Foucault. Il avait publié un interview
de Michel Fouacult dans la revue Quel Corps après la publication
de "Surveiller et punir". Nous proposons ici une présentation
des thèses de Michel Foucault est publiée sur un site
qui fournit beaucoup d'éléménts aux étudiant/es
en EPS. Ce document est disponible sur cette page
SEPT CONCEPTS MAJEURS, SURVEILLER et PUNIR, COMPRENDRE Michel FOUCAULT,
Le lien d'origine est disponible à cette adresse :
http://perso.guetali.fr/castjpau/resscom/foucault.htm#2
J. M. Brohm cherche aussi à développer ses idées
dans d'autres domaines. Il s'appuie sur l'oeuvre de Louis Vincent Thomas
pour présenter une "Ontologie de la mort".
Ontologie de la mort,
J. M. BROHM
Le lien d'origine Jean Marie Brohm "Ontologie de la mort"
:
http://www.philagora.net/philo-fac/brohm.htm
Page offerte à la Revue Prétentaine par Philagora
http://www.philagora.net/
et Philagora.org http://www.philagora.org/
La revue Quel Corps ? n'existe plus, il a fondé la revue Prétentaine
à l'Université de Montpellier. Une note de lecture présente
le contenu du numéro consacré aux étrangers.
"Etranger, fascisme, antisémitisme, racisme", G. Bertin
Le lien d'origine :
http://www.espritcritique.org/0203/crc01.html
L'article de Georges Bertin : "Etranger, fascisme, antisémitisme, racisme",
Esprit critique, vol.02 no.03, Mars 2000, consulté sur Internet:
http://www.espritcritique.org
La revue électronique de sociologie Esprit critique
Sa démarche critique continue de se développer dans Prétentaine,
dans les Cahiers de l'Irsa et dans plusieurs livres encore disponibles.
Quelques présentations et notes de lecture sont présentes
sur cette page .
Sociologie politique du sport,
Prétentaine, Les cahiers de l'Irsa, Les shootés du stade, Le corps analyseur
Le lien d'origine de la première note de lecture :
http://www.revues.org/corpsetculture/numero1/notelecture.html#nl3
Le lien de l'éditeur de "Sociologi politique du sport"
http://forum.irts-lorraine.fr/publications/sport.htm
Le lien d'origine de la note sur Prétentaine
http://www.revues.org/corpsetculture/numero1/notelecture.html#nl7
Les coordonnées actuelles de la revue Prétentaine: Prétentaine,
Jean-Marie Brohm, Département de Sociologie, Université
Paul Valéry, Route de Mende, 34199 Montpellier Cedex 5
Le liens Les cahiers de l'Irsa n°2 1998 "illusion sportive,
sociologie d'une idéologie toatalitaire"
http://alor.univ-montp3.fr/irsa/cah_irsa-n2.htm
Les coordonnées de l'Institut de Recherches Sociologiques et
Anthropologiques, Centre de Recherche sur l'Imaginaire, 17 rue Abbé
de l'Epée, 34 090 Montpellier, mail : irsa@univ-montp3.fr
Le lien de la revue "Les cahiers de l'Irsa":
http://alor.univ-montp3.fr/irsa/cah_irsa.htm
Le lien d'origine Les shootés du stade,
http://www.federation-anarchiste.org/ml/numeros/hs10/article_7.html
Le lien d'origine "Le corps Analyseur"
http://www.philagora.net/comedie/brohm.htm