Le thème de ces journées était
le pouvoir.
Michèle Riot-Sarcey est professeure à l’Université
Paris VIII, elle a publié récemment une “ Histoire
du féminisme ” aux éditions La Découverte,
dans la collection de poche Repères.
Elle commence par expliquer qu’elle n’est pas philosophe mais
historienne. Elle dit vouloir interroger le pouvoir depuis une position
féministe. De ce point de vue, le problème c’est la
domination. Elle pense que ce qui fait problème c’est le
pouvoir réel à l’œuvre ainsi que sa reproduction.
Pour Michèle Riot-Sarcey, le rapport homme / femme pose le problème
des modèles et des valeurs. L’être au monde est le
pouvoir.
Elle commence son argumentation en séparant la puissance et le
pouvoir. Le pouvoir c’est le gouvernement, le commandement. La puissance,
c’est l’effort de persévérer dans son être.
Elle se réfère à Spinoza qui a formulé cette
définition. Ensuite, elle dit s’appuyer sur les travaux de
Françoise Héritier, qui constate que les femmes sont exclues
à la fois de la puissance et du pouvoir.
Elle situe son premier repère historique chez Spinoza, qui parle
de la possession des femmes par les hommes, au sens de la propriété.
La grande rupture est celle de la fin du XVII° avec la modernité.
Elle explique qu’elle ne discutera pas ici la notion de modernité.
Elle semble employer ce terme par commodité. Elle note qu’à
ce moment là, à la fin du XVII° siècle, il s’est
produit une ouverture radicale. Le mode de pensée a changé,
mais sans changer les rapports sociaux de sexe. La femme était
alors devenue comme les hommes, potentiellement libre. A cette époque,
il a fallu réinventer les catégories sociales. Il fallait
rendre conciliable la rupture avec une certaine continuité. La
liberté était une pensée, cette pensée rendait
possible la liberté pratique. Le système de représentation
sur la souveraineté avait été bouleversé.
Les représentations collectives vont devoir être remise en
ordre. Le contenu de ces représentations pour les femmes est simple
: les femmes sont mineures et elles doivent le rester.
Pour Michèle Riot-Sarcey, pour comprendre la mise en place du pouvoir
réel, il est nécessaire de partir de la combinaison entre
le mental et la pratique. Elle dit alors qu’elle va développer
trois points pour étudier la relation des femmes au pouvoir :
1 / Le pouvoir de faire et d’agir dénié aux femmes
;
2 / L’impossible du dire pour les femmes ;
3 / La voix des femmes, un “ je ” difficile à faire
entendre.
1 / Le pouvoir de faire
Elle pense qu’il faut établir un lien entre la représentation
politique dans la vie publique et les représentations collectives
intériorisées par les personnes. Pour elle, la démocratie
telle qu’elle fonctionne depuis cette date est un problème.
Il y a encore des Bastilles à prendre. Les grands principes sont
toujours valables. Nous sommes dans un système non contraint, où
la place des femmes est un pilier fondamental pour légitimer le
pouvoir.
Les femmes ont le même pouvoir que les hommes, si on parle des capacités.
L'association en assemblée, pour parler de des affaires de la cité,
est une réponse politique et une réponse qui émane
des humains eux-mêmes. La différence des sexes est novatrice.
Elle est le résultat d’une construction sociale. L’identité
des femmes est construite afin de réserver l’espace public
aux hommes. Avec la révolution l’idée d’émancipation
devient possible à vivre. Michèle Riot-Sarcey note l’importance
de cette rupture. Pendant quarante ans l’idée pratique d’émancipation
était là. On peut le voir chez Kant, par exemple. Mais il
fallait aussi vivre avec le traumatisme de la mort de Dieu. Cette rupture
c’est la fin de la légitimation de l’ordre des choses
par Dieu. Le langage est d’origine humaine, Herbert le démontre.
Comme le dit Foucault, les humains arrivent dans un monde préconstruit.
Il est important de prendre en compte cette mutation. La solitude de l’individu/e
est un choc mental. C'est une époque où l’on se suicide
beaucoup. Les intellectuels découvrent le peuple et la misère
et ne savent pas comment aborder ce problème. Le paupérisme
est connu, mais comment le penser reste une question non résolue.
Sa première hypothèse est que la parole des femmes existe,
malgré cela celle-ci reste inintelligible, il est impossible qu’il
soit entendu. Pour comprendre ce phénomène il me semble
nécessaire d’étudier comment après la rupture
de la révolution la société a essayé de reconstruire
le lien social. Pour reconstruire ces liens, la famille a joué
un rôle primordial. On a conféré aux femmes la puissance
du spirituel. En travaillant sur la domination patriarcale Elle pensait
au début qu’il s’agissait seulement de l’aspect
naturel, tel qu’on le dit depuis longtemps. Elle dit s'être
aperçue que le rôle du spirituel est essentiel. Il y a un
double mouvement pour définir la féminité. Il existe,
à son avis, deux composantes dans le féminin : la dimension
spirituelle et l’assujettissement à la nature, bien connu
dans la famille.
Le 19° siècle est celui de la femme religieuse. La multiplication
du nombre de saintes et le rôle de la vierge Marie à cette
époque dans le catholicisme sont significatifs de tout cela. L’âme
des femmes est celle de la vierge magnifiée. Dans ce cadre, le
devenir des femmes est à la fois celui de mère et celui
de pilier dans la médiation entre les hommes et Dieu. Il faut noter
l’importance du modèle qu’a été Thérèse
de Lisieux. Celle-ci est très vite devenue une figure de femme
célébrée et largement diffusée.
On peut également se référer à Hegel. Il a
été l’inventeur de la philosophie de l’histoire.
Il a préconisé le retour au passé pour comprendre
le présent et agir sur lui. Il revient sur la définition
de la liberté, ce concept si important à l’époque.
Pour lui, le féminin c’est celui de la sœur, ce qui
compte pour les femmes c’est la loi de la famille, l’essence
de la femmes c’est l’intérieur.
La femme est assujettie à la fois à la nature et à
la spiritualité. Il faut essayer de comprendre comment se sont
forgées les représentations collectives du féminin.
Toute parole hors du cadre des valeurs dites féminines est incongrue
et inaudible, ou n’existe pas. Avec ces valeurs, il y a une assignation
des femmes à une fonction précise : la famille et les enfants.
Pour illustrer son propos, Michèle Riot-Sarcey cite le cas de Georges
Sand, qui a été violemment attaquée comme l’exemple
même à ne pas imiter. Depuis 1848, elle figurait la femme
libre. Sa vie et sa liberté étaient devenus un symbole.
Elle a été critiquée tout le long de son existence.
Il faut savoir qu’à ce moment là l’esprit de
liberté court partout.
Rousseau a été la référence pour les révolutionnaires
avec son Contrat social et le Discours sur l’origine de l’inégalité,
il a mis en forme une partition entre les hommes et les femmes. On peut
même dire qu’il est l’inventeur de la modernité
pour les femmes.
La recherche d’absolu était assez répandue à
cette période. On la trouve en Allemagne, en Angleterre. L’idée
et l’esprit de liberté étaient l’horizon. Il
s’agissait d’une recherche pour la fabrication de l’homme
sans divinité.
Le “ féminin ” est en même temps une méthode
efficace et un système absurde d’une grande bêtise
par rapport à l’humanité. L’idée du féminin
ne va pas de soi à ce moment là. Aujourd’hui, cela
va de soi et c’est le résultat de la modernité.
L’impossible de pouvoir faire est lié au problème
des représentations. Il n’y a pas d’auteure femme,
ce n’est pas possible, et quand cela existe elles sont combattues,
comme l'a été Georges Sand. Les femmes dans le travail ce
n’est pas envisageable, elles n’y ont pas droit. Les femmes
travaillent et de tout temps elles ont travaillé, mais c’est
nié. Michèle Riot-Sarcey estime que la parole des femmes
est dans la même situation que le “ prolétariat ”
qu’il fallait gommer et pour qui il a fallu insister longtemps et
avec force pour le faire admettre dans la société, Pour
les femmes c’est identique. Tout cela se confirme et converge dans
le même sens avec le mouvement industriel. Le mouvement ouvrier
s’est construit sans les femmes. Lors de la création de la
Première Internationale, il est explicitement dit que les femmes
ne doivent pas travailler et ce pour deux raisons : tout d’abord
elles font concurrence aux hommes sur le marché du travail et en
second lieu c’est déconsidérer les hommes qui n’ont
que leurs mains. On constate donc que le cadre de pensée chez les
ouvriers et chez les bourgeois est le même.
Au bout de quelque temps on peut observer que l’esprit de liberté
est réservé à une élite. La capacité
de raisonner avec ses pairs concerne des hommes dans la cité. L’homme
politique est celui qui sait, qui est éduqué et qui a le
temps. Cette façon d’exercer sa liberté est un modèle
fort pour le pouvoir. La famille est synonyme de propriété,
y compris pour l’ouvrier. On voit donc que le fait d'avoir du temps
libre pour faire de la politique implique de se libérer des tâches
domestiques. D’où la revendication d’avoir un salaire
suffisamment élevé pour pouvoir faire vivre tous les membres
de la famille qui ne travaillent pas.
Michèle Riot-Sarcey pense que l’impossible pouvoir de faire,
qui caractérise les femmes, est dû à la puissance
symbolique des représentations. La notion de “ femme publique
” est significative de cela. Si les femmes font quelque chose, elles
le font par effraction. L’idée du féminin est intériorisée
par les femmes et les hommes. En conséquence, l’expression
d’une femme ne peut être que celle d’une mère.
Le sacrifice de soi est la règle dans les valeurs féminine
et la femme se doit de parler et d’agir depuis cette place.
2 / L’impossible pouvoir de dire
Il existe un rapport inégal dans la famille. Depuis le début
du 19° siècle, les libéraux comme Guizot, parlent de
la raison supérieure du père. Ils sont contre le suffrage
universel, parce qu’il faut réserver le pouvoir aux hommes.
Le droit est interdit aux mineurs, aux femmes et aux étrangers.
Il est reconnu une capacité supérieure à l’homme.
Comme la démocratie est une soumission sans contrainte, il faut
compter sur le processus éducatif pour juguler la révolte.
Il y a eu un élargissement de l’élite avec la révolution
mais la femme est considérée comme inférieure et
doit le rester. Si les femmes vont au-delà, elles déstabilisent
la famille. En 1848, les femmes sont actives et constatent cet écart
entre les mots et les choses, dont a parlé Foucault. De quelle
universalité on parle ? Les femmes sont interdites de club. Si
cela arrive elles sont ridiculisées. Le centre de la famille est
la femme. C’est une condition indispensable du fonctionnement social
et politique. Mais les règles ainsi définies échappent
aux femmes, elles sont définies par les hommes. La pensée
est interdite aux femmes.
Il y a un problème d’analyse. De fait, les femmes sont le
pilier nécessaire à la philosophie et à la politique,
sans elles, les hommes n’auraient pas le temps ni le soutien pour
réaliser ces activités tant valorisées. Le droit
à la parole publique est refusé aux femmes. Il n’y
a pas de femmes dans la rédaction de l’encyclopédie
philosophique. Michèle Riot-Sarcey remarque que s’il y a
eu si peu de femmes philosophes depuis la révolution, c’est
principalement dû au fait qu'elles n’avaient pas droit à
l’éducation philosophique comme les garçons. Foucault
parle de l’écart entre les mots et les choses au XIX°
siècle. Il y a cette découverte que le mouvement s’effectue
hors des humains. On arrive dans un monde déjà construit,
où les mots ne correspondent pas aux choses. Il y a un problème
de pertinence. N’oublions pas que 1848 est qualifié de “
printemps des peuples ”. Les femmes elles-mêmes le disent.
La république démocratique et sociale est à l’ordre
du jour. La mobilisation est forte. La mise en cause des anciens discours
existe partout. Pourtant, à l’issue d’un long combat
contre les femmes, le pouvoir est entre les mains des hommes. Les femmes
écrivent, leurs textes sont refusés. Notre démocratie
est le résultat de cette évolution, C’est l’opinion
qui est plus fort que la raison. Les hommes cherchent maintenir leur place
prépondérante. Les femmes n’ont pas conscience qu’il
se construit ainsi une science du pouvoir contre elles.
Michèle Riot-Sarcey se réfère à Walter Benjamin
et à son livre sur les passages, où il se définit
comme un chiffonnier de l’histoire. Il essaie de recueillir et de
garder les traces de ce qui disparaît avec l’histoire officielle
des vainqueurs. L’avis des perdant/es est rejeté et le passage
du temps efface tout cela. L’avenir des femmes c’est un devenir
d’effacement dans le mouvement de l’histoire. Pour Michèle
Riot-Sarcey, il faut étudier l’histoire des femmes comme
une histoire tracée dans le devenir de l’histoire contre
le mouvement même de l’histoire. Cette histoire est la construction
représentative de la place des femmes. On ne comprend pas si on
confond le féminisme avec les valeurs attribuées au féminin.
Ces représentations agissent avec force et elles sont inconscientes.
Hors des représentations collectives des valeurs dites féminines
il est impossible de parler pour les femmes. Les femmes parlent la langue
avec les valeurs des hommes.
Il faut imaginer une déconstruction et aborder le problème
des contraintes qui vont de soi. En nommant Foucault, Michèle Riot-Sarcey
affirme, que pour travailler à l’émancipation, il
faut se poser la question de ces valeurs inconscientes. Les femmes doivent
se poser la question : “ Pourquoi je pense ce que je ne pense pas
? ”.
Elle cite Michèle Ledoeuff (auteure du livre "Le sexe du savoir",
éditions Aubier, Paris, 1998) sur la nécessité de
comprendre le sens commun. Le sens commun est le sens dominant. Pour Michèle
Riot-Sarcey, le problème peut se résumer à la question
de savoir pourquoi quand on parle d’un homme public il s’agit
d’un homme qui fait de la politique et quand on parle d’une
femme publique il s’agit d’une prostituée. Ainsi la
moitié de la nation est niée. Elle cite les travaux à
paraître de Édith Taïeb sur “ La citoyenne Hubertine
Auclert ”.
Ce système s’impose et elle se pose la question de savoir
d’où vient la révolte. Elle pense que l’invention
du féminin a créé une particularité, qui est
une mise à l’écart de l’espace public. Elle
estime que l’harmonie entre les sexes dont parle Mona Ouzouff, vision
qui présente une histoire harmonieuse n’est pas juste. Dans
un autre texte, elle parle explicitement d’une histoire conflictuelle.
Pour Michèle Riot-Sarcey, l’histoire est celle de l’effacement
des femmes, l’effacement des paroles et des représentations
des femmes elles-mêmes.
3 / Un “ Je ” difficile à faire entendre
Michèle Riot-Sarcey estime, comme l’a bien montré
Nicole Claude Mathieu, que les femmes sont dans une situation telle que
l’on peut caractériser leur position de cette façon
“ quand céder n’est pas consentir ”.
Elle explique que lorsque l’on veut être aimé on essaie
de correspondre à ce qu’on attend de vous. Le poids des modèles
identificatoires est important. Il existe un discours qui attend que l’on
soit ainsi. La question alors est celle de savoir ce que veut dire “
qu’est-ce qu’être femme ? ” L’universalité
échappe aux femmes. La construction de la catégorie “
femme ”, c’est le genre. La question devient alors : qui parle
?, Est-ce les femmes ? Ou n’est-ce pas plutôt les hommes ?
Michèle Riot-Sarcey cite l’exemple de Cécile Brunswick
qui en 1936 devient ministre en admettant les valeurs féminines.
Elle parle des travaux de Christine Bars sur la radicalité de Madeleine
Pelletier, qui n’a pas choisi cette voie et qui a été
complètement oubliée et niée.
Elle remarque qu'au quotidien, il faut faire avec la société.
Le rapport au genre humain pose problème. Le devenir femme se fait
en fonction des valeurs du “ féminin ”. La formule
“ je est un autre ” est pertinente pour les femmes. On les
inclut dans la totalité des humains, à condition qu’elles
acceptent ce qu’elles ne sont pas. Du point de vue des femmes, il
existe une différence entre ce qui doit être dit et ce qu’on
pense réellement.
Pour avancer vers l'égalité, Michèle Riot-Sarcey
propose aux femmes d’exercer leur capacité critique. Elle
se place dans une posture de résistance, tant sur le plan des valeurs
dites féminines, que sur le plan de l’espace public. Le féminin
étant construit par les hommes, les femmes se demandent comment
être ce genre qui leur est assigné ? La correspondance entre
le “ je ” et l’être est une difficulté.
Michèle Riot-Sarcey pense qu’il faut développer une
conscience de la résistance pour aller vers une subjectivation.
Le devenir sujet pour les femmes passe par la critique des catégories
dans lesquelles elles sont enfermées, cette fameuse féminité.
Il y a toujours ce problème de la construction des représentations
collectives qui sont intériorisées par les femmes dans leur
devenir femme. Penser le pouvoir dans ce cadre, c’est penser la
domination. Elle estime qu’il faut exercer la raison critique constamment.
Cela vaut pour les femmes et pour les hommes, affirme-t-elle. Les hommes
sont eux aussi pris dans ce modèle. Elle énonce alors clairement
sa position féministe, féministe radicale.
Elle constate que les tenants de la lutte de classe ont reproduit ces
schémas machistes. Le féminisme va l’encontre de tout.
Pour Michèle Riot-Sarcey, le féminisme est une utopie de
ce temps. L’égalité et la liberté c’est
pour toutes et tous. Ces notions sont compatibles avec la différence.
Le féminisme est une voie pour que les femmes se sente à
l’aise dans leur “ je ”. Le problème de représentations
à questionner doit être porté dans tous les domaines
de la société. Le féminisme reste une utopie pour
l’instant. Pour la mise en cause du pouvoir, il faut aller voir
les féministes.
L’utopie c’était le problème de la place dans
le devenir. La crise contemporaine est forte, l’avenir possible
est devant nous. Elle dit que dans le contexte contemporain, il existe
des forces vives qui veulent changer les choses. C'est assez souterrain
pour l'instant, mais c'est assez vif et dynamique. Le féminisme
vit dans ce mouvement. Thomas More a écrit le mot Utopie dans le
trouble de son époque pour dévier l’ordre. L’utopie
apparaît quand on n’a pas d’espace dans un monde ordonné.
A une question sur le lien entre critique interne et une critique externe
elle répond que le féminisme est une critique pour retrouver
ce qui est interne au genre humain, mais une distance critique par rapport
aux valeurs actuelles du “ féminin ”. Elle pense que
les outils des Lumières, la raison critique, la théorie
critique à la manière de l’École de Francfort
sont une bonne voie. Elle cite Condorcet :
"[…] les droits des hommes résultent uniquement
de ce qu'ils sont des êtres sensibles, capables d'acquérir
des idées morales et de raisonner sur des idées. Ainsi les
femmes ayant ces mêmes qualités, ont nécessairement
des droits égaux. Ou aucun individu de l'espèce humaine
n'a de véritables droits, ou tous ont les mêmes ; et celui
qui vote contre le droit d'un autre, quels que soient sa religion, sa
couleur ou son sexe, a dès lors abjuré les siens."
Condorcet, Essai sur l'admission des femmes aux droits de cité.
Texte écrit en 1790.
Elle aborde à propos des principes et de l’écart entre
les mots et les choses la question de la différence entre la parité
et l’égalité. Pour Michèle Riot-Sarcey, la
parité est un moyen de couvrir l’inégalité.
C’est une légalisation de l’égalité impossible.
Cette légalisation exclue les femmes de l’universel. Elle
plaide pour le droit de cité pour les femmes. Elle pense qu'après
la révolution, la morale a remplacé la religion. Pour les
femmes on parle toujours de dévouement, de don de soi. Elle rappelle
que Nietzsche a dit que “ le refus de soi, c’est le refus
de vivre ! ”
Le modèle de Hegel pour l’homme libre c’est la propriété.
C’est un mode d’être au monde assez particulier tout
de même. Elle cite la critique de la philanthropie que Baudelaire
développe dans son poème “ Assommons les pauvres !
”. Elle lit ce texte comme une critique virulente de ce qui se passe
à ce moment là.
La parole publique des femmes est une parole bloquée. Elle revient
une seconde fois sur la figure de Walter Benjamin pour dire que, comme
lui, il faut être attentif aux mots. Elle estime que le système
représentatif est en cause, à la fois au niveau des mots
et au niveau politique. Les femmes doivent prendre la parole et développer
la critique du pouvoir.
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La discussion a continué après mon départ. L’heure
m’imposait un changement de situation.
Notes personnelles :
Dans la salle il y a avait une majorité de femmes. Beaucoup d’hommes
sont partis quand elle a annoncé qu’elle était féministe
radicale. La philosophie sérieuse et masculine ne doit pas être
compatible avec le féminisme. Enfin pour ma part, j’ai beaucoup
apprécié son intervention.
Philippe Coutant Nantes le 10 Février 2003
Ce texte est un essai de compte-rendu de l'intervention
de Michèle Riot-Sarcey lors des Escales Philosophiques de Nantes
2003, le Dimanche 2 Février 2003, au Lieu Unique.
Le lien pour le poème de Baudelaire http://www.poetes.com/baud/BAssomm.htm
Des textes de Michèle
Riot-Sarcey :
Le réel de l'utopie, l'Utopie et le réel : "Le
réel de l'utopie"
Retour critique : "Retour
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Le féminisme est toujours une utopie : "
Le féminisme est toujours une utopie "
Le féminisme, une utopie ? : "Le
féminisme, une utopie ?"
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