Message Internet sur Lutecium.org dans l'espace consacré à
Freud et Lacan
From: Philippe Garnier
To: freud-lacan @ imag.fr
Subject: sexualité infantile
Date: 19 Decembre 1996
Nous avons écrit ce texte pour provoquer un débat sur une question difficile
:
peut-on, au point où nous en sommes en 1996, continuer à parler d'une
"sexualité infantile"...?
Nous l'avons envoyé aussi à Libé (Rebonds), sans espoir...
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Les théories freudiennes, en introduisant la notion de sexualité infantile,
firent scandale..
Mais, précisément, s'agit-il de sexualité au sens où nous, adultes, nous
en parlons ?
A l'époque, c'était dire que l'enfant pouvait être pris dans des désirs
-mais pas nécessairement par les idées que les adultes se font de la sexualité
dite génitale.
L'enfant désire des mots d'amour, des mots d'altérité, des mots pour se
regarder - mots qui le font advenir comme sujet.
Il apprend à reconnaitre les orifices, les spécificités de son corps,
sans pour autant les parer des fantasmes que peuvent construire les adultes:
l'enfant ne lie des fantasmes pour jouir à aucun de ses lieux pulsionnels-sauf
dans des cas de grande pathologie ou de détournement (inceste, pédophilie,
abus sexuels).
Bien sur il existe des lieux du corps surévalués par les adultes sur lesquels
l'enfant sent bien qu'il ne peut ni dire ni faire n'importe quoi, mais
en aucun cas (sauf pathologie), il ne peut en jouir sur le mode de l'adulte.
On ne saurait donc parler de "sexualité infantile" au sens où les psychanalystes
ont -trop facilement- repris ce terme pour, d'une théorie, faire un dogme.Les
problêmatiques dites orales, anales,... qui certes formeront la trame
de l'érotisme adulte ne sont pas "sexuées" -ni "sexuelles", stricto sensu,..
à moins de confondre deux registres.
De plus, à 4 ou 5 ans, age du complexe d'Oedipe, aucun enfant n'a d'érection
en voulant baiser maman ni ne veut tuer papa -pas plus qu'un nourrisson
n'a d'érection en pensant à Claudia Schiffer...: le complexe d'Oedipe
n'a rien à voir avec une mise en scène qui est malheureusement prise à
la lettre par les thérapeutes d'enfant.Cette mise en scène s'accompagnerait
d'une culpabilité inconsciente liée à un désir monstrueux que l'enfant
aurait sans le savoir et que ces thérapeutes seraient près à faire deviner...
Rappelons que l'idée même de séduction d'un adulte par un enfant est,
elle aussi, une monstruosité: un enfant ne désire jamais "sexuellement"
un adulte -"sexuel" est un mot d'adulte plaqué sur l'enfant. Pour faire
bref: la confusion entre les différents sens de ce qui se désigne par
sexualité ne fait-elle pas le bonheur des pédophiles et du "nouvel amour" ?
..
de ceux qui veulent permettre à un enfant "d'épanouir sa sexualité" dès
le plus jeune age -puisque sexualité il y aurait, si injustement réprimée,
disent-ils, par les familles, par l'ordre social, par les censeurs d'un
autre age ?.. et ce, d'autant plus que l'enfant est, toujours d'après
Freud, un "pervers polymorphe" -alors pourquoi se géner entre pervers
!?.Ici encore, on est dans la confusion des registres :est-ce fortuit
? Ferenczi, au plus près de la clinique de l'enfant mit les pieds dans
le plat dans un article sans ambiguité :
il n'y a aucune mesure entre ce que les adultes entendent par sexualité
et ce qui s'élabore chez l'enfant, même si les différentes composantes
pulsionnelles qui se construisent chez celui-ci forment le socle de l'exercice
sexuel de ceux-là et le leur sexuation (Confusion de langue entre les
adultes et les enfants,1933).Il ne fut pas entendu.
Le terme de sexualité infantile restera donc sacré, au grand dam des enfants
auxquels on continuera de prêter, au nom de la théorie, des intensions
de séduction sexuelle envers les adultes ou les parents -si prompts à
croire et à faire croire que leurs passages à l'acte réels ne sont que
des fantasmes, un avatar de l'Oedipe, ou une réponse enfin libre dans
la vraie amour...
Pour ceux qui ne voudraient pas l'entendre,rappelons que les initiateurs
de la sexualité de l'enfant, les touristes pédophiles, sont appelés, par
les petits thailandais, "les crocodiles"..: vieux reste d'une sexualité
orale ?
Tristan Foulliaron
Philippe Garnier
psychanalystes
Le lien d'origine : http://www.lutecium.org/arc/freud-lacan@lutecium.fr/1996-12/msg00009.html
Ce texte a été écrit pour prendre position dans le débat sur la pédophilie.
Dans la mouvance libertaire, au nom de la sexualité libre, d'un refus
de la répression une tolérance existait et existe encore vis à
vis de la sexualité entre adultes et les jeunes, voire les enfants.
Philippe Garnier précisera sa pensée sur ce sujet
en 2002 . Le Monde Libertaire en ligne 2002 n° 1273 (21-27 mars 2002)
De la pédophilie
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