"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
Licence
"GNU / FDL"
attribution
pas de modification
pas d'usage commercial
Copyleft 2001 /2014

Moteur de recherche
interne avec Google

L’autogestion ?  Un art difficile !



§ La délégation se pratique pour des tâches précises, pas pour des personnes. Le retour devant le groupe permet de rendre compte devant les personnes qui mandatent. Le regroupement collectif essaie de garder le contrôle sur ce qui est dit en son nom. Ensuite, la révocabilité peut devenir nécessaire, si l’écart devient trop important. Mais, comme cela peut faire très mal, la discussion reste le moyen privilégié pour débattre des divergences.

§ Distribuer l’autorité au plus grand nombre permet ne pas encourager la monopolisation de l’autorité dans la durée. La rotation des tâches et des postes est une méthode toujours valable, malgré les difficultés que nous rencontrons pour la mettre en œuvre.

§ Quand on se trouve en position d’autorité, il est important de consulter d’autres personnes.

§ Il est possible d’acquérir des responsabilités, même quand on n’en jamais pris. Nous pouvons développer différentes facettes de nos compétences. Il est possible de se former pour acquérir de nouvelles capacités. L’apprentissage est normal et nécessaire. Pour apprendre, il faut du temps et parfois faire des erreurs. Il faut donc laisser les autres apprendre et leur en donner les moyens.

§ L’accès aux ressources doit être égalitaire. Les groupes peuvent essayer de s’organiser pour que cela soit possible, ce qui peut demander plus de temps pour la réalisation des tâches.

§ Le processus essais / erreurs, la méthode “ Recherche / Action ” permettent l’auto-formation, la diffusion des acquis et le développement de l’esprit critique.

§ Il est possible d’éviter l’institutionnalisation et y veiller contribue à maintenir la démocratie en bon état. La question des permanents est en débat. Les anarcho-syndicalistes refusent les permanent/es, symptôme de la bureaucratisation des syndicats. La notion de permanent/e politique renvoie à celle de révolutionnaire professionnel/le et d’avant-garde, c’était la théorie léniniste du parti. La question des permanents techniques reste en discussion, nous savons qu’il n’est pas si simple de différencier les deux. Pourtant, il arrive que dans nos collectifs nous en ayons besoin et les solutions ne sont pas évidentes. En n’en discutant pas, on nie le problème, et quand nous en parlons, nous avons beaucoup de mal à trouver des solutions viables dans la durée. Nous sommes donc face à une difficulté assez délicate à résoudre.

§ Quand on ne trouve pas de volontaire, certains groupes proposent le tirage au sort pour la distribution des responsabilités.

§ Le système d’autorité est souple, ouvert et temporaire, ce qui n’est jamais gagné !

§ La question : “ Qui décide de l’autorité au sein du groupe ? ” reste centrale. Nous pouvons l’examiner régulièrement.

§ La “ parité ” femmes / hommes est un objectif à ne pas oublier, de même que toutes les parités, qui concernent les autres différences liées à la domination des groupes humains les uns sur les autres.

§ La transmission des personnes un peu expérimentées vers les personnes qui débutent est à reprendre à l’arrivée de chaque nouvelle génération militante, c’est à dire souvent.

§ L’information est à diffuser à tout le monde et tout le temps. Ceci est valable pour toutes les infos.

§ Les Zapatistes ont proposé une méthode d’expression avec les mains, pour que les discussions collectives se déroulent plus démocratiquement et pas seulement avec la parole et en fonction de la distribution habituelle du pouvoir machiste. L’emploi de cette méthode permet de se sentir plus en confiance et d’être, à moyen terme, plus efficaces en donnant la parole à tout le monde, même si cela prend du temps.

§ Les méthodes actives de l’éducation libertaire peuvent nous servir, elles ne sont pas seulement destinées aux jeunes en vacances ou à l’école primaire.

§ Nous ne militons pas que par altruisme, nous le faisons aussi par désir et parce que nous en avons besoin. Nous faisons de la politique aussi pour nous-mêmes, et pour de multiples raisons, raisons que, parfois, nous ignorons au niveau conscient.

§ L’identification et la projection sont des phénomènes psychiques liés à notre vie sociale. Ils peuvent conduire à annihiler toute distance entre soi et le groupe. Ceci peut provoquer des drames existentiels en cas de conflit. C’est aussi ce qui explique pourquoi nous nous sentons attaqué/es personnellement, quand il y a des tensions entre les groupes ou entre les personnes militantes.

§ Nos affects, nos émotions font partie de notre vie militante. Eduardo Colombo, psychanalyste et théoricien libertaire, parle des groupes politiques comme des “ chaudrons affectifs ”, où les tensions d’amour ou de désamour se portent sur la politique et l’idée libertaire, parce que c’est la définition de nos regroupements. Il explique que dans le passé, ces tensions se vivaient souvent à l’intérieur de groupes religieux et les débats portaient sur la religion qui était la base des collectifs de cette époque. La notion d’hérésie servait de prétexte à la liquidation symbolique des personnes ou des groupes. Les querelles ont, pour partie, un contenu humain et affectif.

§ Autogérer les activités collectives nous confrontent à la question des figures d’autorité. Gérard Mendel, autre psychanalyste engagé dans les années soixante-dix au côté des autogestionnaires, remarque que ceci peut provoquer une culpabilité que l’on ne comprend pas et qui s’exprime par des conflits irrationnels, en nous-mêmes et dans les groupes. C’est notre façon de nous construire face à l’autorité des parents lorsque nous sommes enfants, qui se rejoue sans que nous en ayons conscience. De plus, comme nous sommes partisan/nes de l’autogestion, c’est à dire de l’autonomie politique, nous ne pouvons pas accuser une instance extérieure à nous-mêmes pour rejeter la responsabilité et l’origine de nos problèmes hors de nous. C’est en interne, individuellement et collectivement que nous avons à résoudre ces difficultés.

§ Il n’y pas de garanties, jamais et nulle part. En conséquence, développer l’esprit critique est fondamental. La diffusion des résultats des sciences humaines dans l’étude du pouvoir et du comportement humain au niveau individuel et collectif est une nécessité. Ceci fait partie de la recherche / action que nous mettons en œuvre. Le travail pour se former peut être important, comme celui nécessaire pour acquérir la maîtrise des techniques, dont nous avons besoin pour notre autonomie. Comme le dit Sloterdijk, nous pouvons essayer de penser froid et de vivre chaud, même si ce n’est pas toujours facile. En faisant l’inverse, la vie froide nous rend déprimé/es et pas toujours très fier/ères de notre existence.

§ La cohérence entre nos idées et nos actes est un objectif toujours devant nous L’étude et le bilan de nos activités peut permettre de prendre un peu de distance de temps en temps et de ne pas reproduire toujours les mêmes erreurs.

Philippe Coutant Nantes le 6 Octobre 2003
Cet ensemble est largement inspiré du texte de Jo Freeman, une féministe américaine, qui a écrit “ La tyrannie de l’absence de structures ”, et plus particulièrement de sa conclusion sur les “ Principes de structuration démocratique ”.
Notre différence porte sur la notion de “ garantie ”. Elle pense que les méthodes qu’elle a collecté et qu’elle propose sont une garantie. Pour ma part, je pense qu’il n’existe aucune garantie.

Le texte de Jo Freeman est publié sous forme de brochure par IOSK Editions de Grenoble et diffusé par l’Infokiosque :
Squat des 400 Couverts, 10 traverse des 400 Couverts, 38000 Grenoble.

Il est disponible sur Nantes auprès des membres d’IndyMédia et sur Internet :
http://infokiosques.net/IMG/rtf/la_tyrannie_de_l_absence_de_structure.rtf

et sur : JFreeman01.html