La machine à expulser
Les expulsions sont le fait majeur de la situation. Le débat
ou plutôt l'absence de débat sur les "charters"
montre leur banalité et la puissance de leur réalité.
Debré estime qu'il faut atteindre le rythme de "un par semaine".
D'autre part beaucoup d'expulsions vers le Maghreb se font par le train
et le bateau et on en parle moins.
La seule nouveauté serait organisationnelle, on réserve
l'avion et ensuite on le remplit. Les pays de départ peuvent
être multiples avec les "charters européens"
(merci Schengen), les pays de destination peuvent être multiples
également.
Ce qui surprend et provoque débat ce sont les modalités,
pas l'existence des charters, l'argument massue c'est que si on accepte
la fermeture des frontières, les expulsions sont une conséquence
logique de cette politique légalisée par les lois Pasqua.
Le peu de critique de la "gôche" vaut de fait une acceptation,
les critiques émises viennent surtout de certaines associations,
de l'extrême gauche et des milieux radicaux. Leurs forces étant
très faibles, ceci n'a eu aucune conséquence sur la réalité.
Si nouveauté il y a, c'est effectivement révélé
par l'organisation de ces expulsions, mais c'est une nouveauté
politique. Si on réserve l'avion avant d'avoir de quoi le remplir,
c'est bien que la volonté d'expulser précède le
stock de personnes expulsables. C'est bien une anticipation, un volontarisme
politique qui doit être admis comme tel et qui est significatif
d'un changement de période.
Les chiffres des expulsions parlent eux aussi. On est passé de
quelques milliers par an, il y a quelques années, à plusieurs
dizaines de milliers par an aujourd'hui.
De plus le taux de reconduites effectuées par rapport aux reconduites
prononcées a très largement augmenté, puisque maintenant
il est extrêmement difficile d'échapper à l'expulsion
quand on est pris par la police.
Le Canard Enchainé cite le chiffre de 5500 personnes expulsées
depuis la mise en place des contrôles suites aux attentats. Sous
Rocard il y a eu 8 000 expulsions, maintenant le chiffre de 20 000 est
dépassé, on va atteindre sans difficulté les 25
000, voire les 30 000 ou 35 000 cette année.
Les expulsions n'ont pas lieu que sur le territoire métropolitain,
elles existent aussi dans les DOM-TOM, où, par exemple aux Antilles,
on est en train d'expulser 12000 personnes suite au typhon Luis.
Le nombre des expulsions n'est pas anodin, il prouve bien qu'en matière
de gestion de population la volonté politique a une efficacité,
que les gouvernements successifs se sont donné les moyens de
leur politique. Auparavant le leitmotiv était la fermeture des
frontières, aujourd'hui le nombre des personnes expulsées
montre qu'on a changé d'époque. La tendance s'est inversée.
Le "clandestin" ne vient plus de l'extérieur, mais
de l'intérieur.
Les frontières sont effectivement fermées, les diverses
mesures sur les visas, le transport, le contrôle a déporté
le blocage dans les pays de départ et transformer les compagnies
de transport en auxiliaires de police. Quoiqu'en disent les phantasmes
de nos xénophobes nationaux, il n'est pas si facile que cela
de passer clandestinement les frontières et c'est souvent assez
dangereux.
Si les "clandestins" ne viennent plus du dehors, il faut bien
les trouver chez nous. Pour les débusquer et les créer
la machine à expulser fonctionne bien.
Au niveau international cela a demandé quelques aménagements
du droit, le principal concerne les accords de réadmission. Avec
ce genre de texte un pays permet à la France d'expulser vers
son territoire des personnes même si leur nationalité n'est
pas prouvée formellement. Ce genre d'accord a eu lieu avec la
Roumanie pour tenter de résoudre le problème de Rohms
et des demandeurs d'asile roumains. Il y a eu une contre-partie financière
à cet accord, la Roumanie étant en situation délicate
il lui était difficile de refuser.
Un autre accord de ce type a été passé avec l'Algérie,
c'est certainement la suite du soutien de la France aux militaires algériens.
C'est une nouveauté importante, c'est une entorse au droit international
où, en principe, les pays n'acceptent de reprendre chez eux lors
de retour forcé, que les ressortissants dont la nationalité
est clairement établie. Sinon on autoriserait toutes sortes de
déplacements arbitraires de populations.
C'est en partie pour résoudre ce problème que Pasqua avait
créé les camps de rétention, où on peut
retenir les personnes expulsables sans jugement par périodes
allant jusqu'à trois mois renouvelables. Pour l'instant cette
solution ne semble pas avoir été mise en oeuvre à
grande échelle.
Par contre la rétention est un maillon important dans la chaîne
des expulsions. Pour organiser le départ il faut parfois du temps.
Pour empêcher les personnes de fuir, il faut pouvoir les retenir
et les maintenir à disposition de la police. Le problème
a été résolu par la création des centres
de rétention et ce par un gouvernement de gauche. Aujourd'hui
il semble qu'une partie des expulsables ne passe plus par les centres,
faute de place et suite à l'accélération des procédures
d'expulsion.
Dans ces centres ou dans les commissariats on peut retenir des gens
enfermés sans jugement. La procédure d'expulsion est administrative,
l'arrêté qui permet la "reconduite à la frontière"
est promulgué par l'autorité préfectorale, c'est
à dire par le Ministère de l'Intérieur. Le seul
recours possible c'est le Tribunal Administratif. Outre la durée
de 24 heures du délai qui ne permet pas une défense correcte,
ce recours est devenu une mascarade. C'est sur la forme et la procédure
que le tribunal administratif se prononce. Jamais le fond de l'affaire
ne peut être examiné correctement puisqu'il ne s'agit pas
de cela.
L'administration est donc juge et partie, c'est elle qui décide
du droit au séjour et du droit d'expulser. Le poids de l'administration
du Ministère de l'Intérieur est à souligner. La
police, comme l'armée, est un bras armé de l'Etat. Ici
la fonction administrative et la fonction policière sont étroitement
liées. La police et l'administration font le même travail,
l'une s'occupe des papiers et de la bureaucratie, l'autre de poursuivre,
d'arrêter et d'expulser les étrangers.
En principe la police opère sur plainte des particuliers et sur
demande de l'appareil judiciaire, mais dans le cas des expulsions la
séparation des pouvoirs n'existe plus. Le contrôle démocratique
et judiciaire ne peut s'exercer. Ceci explique certainement pourquoi
maintenant la comparaison entre la rétention actuelle et les
camps de la période de Vichy est un délit.
Pour atteindre les objectifs du plan xénophobe, pour remplir
les "charters", il faut donc organiser la chasse aux "clandestins".
Dans cette chasse il y a les chasseurs et des rabatteurs, le gibier
est très mobile, intelligent, pas toujours facile à identifier,
il bénéficie d'aide de temps en temps, il se défend
souvent, parfois des enfants et des malades compliquent la prise.
Parmi les chasseurs un rôle particulier est dévolu à
la DICILEC (l'ex-Paf Police de l'Air et des Frontières). Ce service
s'illustre souvent dans la chasse aux déboutés du droit
d'asile et dans la chasse aux mariages mixtes.
En effet avant la fin de la première année de mariage
les conjoints de personnes françaises (sauf pour les personnes
algériennes) n'ont droit à une carte de 10 ans qu'au bout
d'un an de vie commune. Officiellement il s'agit de lutter contre les
mariages blancs, mais de fait il s'agit de bloquer la possibilité
d'obtenir la carte de 10 ans et de devenir inexpulsable. Alors quand
la police n'essaye pas empêcher les mariages, elle tente d'expulser
les conjoints ou conjointes avant la fin de la première année
de mariage. L'examen de la publication de bans suffit à établir
la suspicion, l'aide de beaucoup de mairies contribue bien sûr
à faciliter la tache de nos valeureux chasseurs en signalant
les mariages mixtes au Procureur de la République.
Souvent aussi les intéressés eux-mêmes se font connaître
des services préfectoraux en tentant de régulariser leur
situation (en effet dans le passé de plein droit on obtenait
une carte par mariage). Comme toujours en pareil cas, pour contrôler
quelques mariages on suspecte tous les mariages mixtes.
C'est ainsi que la marche vers la pureté ethnique est déjà
l'oeuvre en France, c'est un non-dit de la société française
qui est opérant et efficace. Le fameux métissage célébré
par certaines personnes n'est pas facile à réaliser dans
ces conditions.
Un autre maillon important de la machine à expulser c'est la
fabrication des clandestins par l'administration. En fait elle s'auto-alimente,
car dans la très grande majorité des cas celle ou celui
que l'on nomme "clandestin" est identifiable. Au contraire
d'être inconnu, c'est une personne qui a demandé une carte
et qui s'est vu refusée le droit au séjour, ou alors c'est
une personne régulière qui est passée en situation
irrégulière.
On peut citer au moins deux cas où la fabrication des "clandestins"
est patente :
* Les jeunes qui en raison de leur âge d'arrivée (après
10 ans) ou de l'application du nouveau code de la nationalité
se retrouvent en situation irrégulière à 18 ans
alors qu'avant ils étaient en règle.
Les dégâts causés par le nouveau code de la nationalité
sont importants, on en ne mesure pas encore complètement les
effets, car cette nouvelle loi commence seulement à être
mise en application. Le nombre de jeunes qui ne demandent pas la nationalité
ou qui ne l'obtiennent pas sont très nombreux, à tel point
que cela inquiète les services gouvernementaux.
Beaucoup de ces jeunes peuvent être explusables et fournissent
un contingent important des suspects aux yeux des chasseurs. S'ils sont
expulsés cela donne des drames car leur pays c'est la France,
leur scolarité ils l'ont effectué ici, leur attaches avec
le pays d'origine sont assez ténues, ils n'auront qu'une hâte
c'est de revenir. Ce qui nous donnera ultérieurement de belles
parties de chasse à l'homme.
* Les personnes à qui les préfectures n'ont pas renouvelé
la carte de 10 ans ou à qui on l'a retiré. La loi Pasqua
ne prévoit plus le renouvellement automatique des cartes de 10
ans. Cette possibilité est largement utilisée par l'administration
qui trouve là un excellent moyen de réexaminer la situation
des étrangers et de transformer les réguliers en irréguliers
c'est à dire en "clandestins". La place de l'arbitraire
n'est pas négligeable, surtout quand la notion d'ordre public
est invoquée. Mais la loi républicaine permet cela et
on ose encore parler d'Etat de droit.
Dans ce cadre il faut parler des tracasseries administratives, des
demandes tatillonnes, des mensonges, des abus de pouvoirs, des refus
de droit dont sont coutumières les administrations, dès
qu'elles ont à traiter avec des personnes étrangères.
C'est devenu une banalité si répandue, qu'il devient difficile
de lutter contre ce phénomène, c'est une "normalité"
qui ne surprend plus personne.
La gestion différentielle est tellement admise que l'abaissement
du seuil de légalité qui se pratique années après
années passe inaperçue. Après les APS (autorisation
provisoire de séjour) de trois mois, on est passé à
celles d'un mois de façon courante. Maintenant il est banal de
se voir délivrer une convocation qui tient lieu de carte de séjour
et qui est renouvelée si besoin. La loi n'a pas prévu
ce genre de document, mais l'administration est inventive dès
qu'il s'agit de restreindre le droit des étrangers.
La multiplication des demandes de certificats d'hébergement est
un autre signe du droit différentiel et de la créativité
du Ministère de l'Intérieur. Auparavant un seul certificat
d'hébergement suffisait pour une demande d'asile, aujourd'hui
il en faut un par mois.
Les arrestations au guichet ne sont plus exceptionnelles. La pratique
du piège est une méthode de chasse ancestrale, ici le
gibier est humain et l'appât c'est la carte de séjour,
en général il est camouflé sous le vague libellé
: "affaire vous concernant !".
La délation et la suspicion sont donc une nécessité
pour alimenter de façon régulière la machine à
expulser de l'administration française. La délation peut
prendre de multiples formes. Il y a bien sûr les corbeaux classiques,
l'aide spontanée de la population française à sa
police ; c'est une vielle tradition dans notre pays. Ce phénomène
étonne certaines personnes, mais il n'y a pas à s'étonner
de cela, dénoncer les "clandestins" c'est devenu un
devoir civique, c'est un délinquant, un danger pour la société,
dixit la loi!
Les autres formes consistent en la transformation des services publics
en auxiliaires de police. Il s'agit en général de services
chargés d'appliquer des droits sociaux qui sont devenus des rabatteurs
dans la chasse aux expulsables. Parmi eux :
* les mairies qui inscrivent les enfants à l'école,
* les services de l'Education Nationale pour le contrôle de la
réalité des études des étudiants étrangers
et l'inscription aux examens (où une pièce d'identité
est devenue nécessaire),
* les divers services sociaux des municipalités, * les CAF, *
la sécu, qui fournissent une aide précieuse à l'administration
préfectorale,
* les contrôleurs des transports publics,
* etc.
Les droits sociaux deviennent de fait dépendants du droit au
séjour.
Bien sûr la lutte contre la drogue est un excellent prétexte
pour contrôler les populations étrangères. La dernière
trouvaille en date c'est évidement le terrorisme, celui-ci a
légitimé les contrôles permanents, le faciès
est un critère de fait même si à l'entrée
de certains bâtiments publics et des administrations tout le monde
est contrôlé.
Pour l'instant on n'a pas arrêté de dangereux terroriste,
mais suite aux 450 000 contrôles d'identité effectués
par la police nationale on a expulsé plus de 5 500 personnes
depuis le début de cette affaire. L'efficacité est réelle,
même si elle n'est pas là où on le dit. En ce sens
Vigie-Pirate était bien une nécessité pour la société
française, une nécessité pour alimenter la machine
à expulser et légitimer la chasse systématique
et permanente aux "clandestins". Cette chasse qui avait eu
lieu de la même manière l'an dernier à la même
époque, semblait être, comme toutes les chasses, saisonnière,
maintenant elle est ouverte toute l'année. De plus comme il faut
augmenter d'un degré de temps en temps, on peut se demander ce
que nos chers technocrates vont réussir à inventer de
plus fort que l'armée dans les rues, l'usage des blindés
et des hélicos peut-être.
Tout ceci est le résultat d'une complémentarité
des textes, du fonctionnement de divers organismes et de techniques
modernes. Nous sommes face à une gestion des populations où
chaque rouage de la machine joue son rôle. La grande force est
organisationnelle et technique. Chaque action est technicisée,
ainsi la portée des actes est neutralisée, la dimension
humaine et politique est évacuée par le fonctionnement
administratif (l'application de la loi) et les réponses idéologiques.
Il y a bien une synergie entre le texte qui régit l'entrée
et le séjour des étrangers (nommée communément
loi Pasqua), le nouveau code pénal, le nouveau code de la nationalité
qui a cassé l'automaticité du droit du sol, les préfectures,
la police, les mairies, les Caf, les caisses de sécu, les services
sociaux, l'Ofpra, les ordinateurs et l'interconnexion des divers fichiers,
la vidéosurveillance, les contrôles policiers dans la rue
ou les contrôles dans les transports publics et évidement
l'aide spontanée de la population.
C'est un filet maillé de façon serrée qui enserre
les populations étrangères ou reconnues comme telles.
Le critère physique et celui du nom restent de fait les critères
de reconnaissance les plus utilisés, même si on se défend
de l'accusation de racisme. La machine est maintenant bien huilée
et effectivement l'efficacité est au rendez-vous.
Pour arriver à un tel résultat les autorités ont
pris soin de réduire au minimum les obstacles qui pourraient
entraver une si belle mécanique, un si bel échafaudage
administratif, une si performante adaptation à une certaine analyse
de la situation. La modernisation du service public est bien là,
même si ce n'est pas celle qu'on aurait pu espérer.
L'obstacle principal est celui de la solidarité, il a été
combattu de plusieurs manières et en particulier par la criminalisation.
Auparavant c'était l'hébergement de personnes en situation
irrégulière qui était délictueuse, comme
dans le cas des basques. Maintenant depuis la fin Décembre 94,
c'est l'aide au séjour irrégulier qui est condamnable,
c'est à dire que toutes les activités de solidarité
sont illégales. Ceci inclut les personnes morales que sont les
associations, puisque le nouveau code pénal permet leur poursuite,
leur condamnation et leur dissolution.
Dans ce cadre la répression contre les associations de solidarité
prend une forme judiciaire ou financière selon les moments et
les endroits. Cela est le cas pour un certain nombre d'Asti et la Fasti
elle-même récemment ou une membre du Mrap dans le sud de
la France. Il faut casser les assos pour que celles-ci cessent d'être
des bases arrière pour les "clandestins" sur le plan
pratique et sur le plan politique.
A ce titre il y a eu un renversement au niveau du droit parce que une
activité d'aide n'était pas sanctionnable dans le passé.
En principe, seules les activités de violence, de destruction
ou de vol étaient considérées comme des crimes
et des délits. Ici le positif est devenu négatif, une
belle oeuvre dialectique, où la raison en acte (l'Etat selon
Hegel) condamne une activité positive au regard de l'universalité
du droit naturel.
L'attaque de la solidarité a aussi lieu au niveau des communautés
et des familles. La notion de "filière" est symptomatique
de cela. Ici encore la DICILEC joue un rôle primordial car au
nom de la lutte contre le travail clandestin elle pratique une chasse
à la solidarité entre personnes étrangères.
D'autre part les préfectures ont la possibilité de retirer
les cartes de séjour et ainsi ont un bon moyen de pression pour
limiter la solidarité familiale ou communautaire. Ceci peut créer
des drames familiaux si la personne en situation irrégulière
appartient au cercle restreint de la famille, c'est à dire si
c'est l'un de parents ou l'un des enfants. On peut se voir retirer sa
carte parce qu'on héberge son conjoint ou ses enfants.
Des conséquences graves
Cette machine à expulser produit de nombreux scandales humains.
Sans faire de hiérarchie, celui de la double peine devient assez
massif, certains le nomme aussi "bannissement". Ici la complémentarité
entre les divers textes législatifs est remarquable. L'effet
cumulé du nouveau code pénal et de la loi Pasqua permet
l'expulsion des personnes ayant été condamné à
plus de 6 mois de prison ferme et des catégories protégées
(conjoints de français, parents d'enfants français, enfants
arrivés avant 6 ans, etc) qui ont écopé de plus
de 5 ans ferme.
Les étrangers ou considérés comme tels sont toujours
condamnés avec les peines les plus lourdes, ils sont condamnés
deux fois, à la prison et à l'expulsion et ce du simple
fait qu'ils sont étrangers ou d'origine étrangère.
La notion de bannissement fait référence à des
peines qui avaient cours avant la Révolution Française,
c'était la condamnation à l'exil. Ce genre de peines a
été supprimé au XVII° siècle, jugées
alors comme iniques.
Aujourd'hui ceci est accepté sans discussion, bel exemple d'avancée
de la civilisation. La double peine est un scandale humain qui ne choque
pas les humanitaires, ni presque personne d'ailleurs, pourtant voilà
bien un exemple de discrimination patente.
Autre scandale humain, celui des malades étrangers. En liaison
avec la double peine on parle maintenant de la triple peine pour les
condamnés étrangers victimes du Sida. Seul le MIB et le
Comité contre la double peine ont dénoncé cela.
Le seul souci du Ministère de l'Intérieur vis à
vis des malades étrangers expulsables consiste à savoir
s'ils sont capables de voyager.
Le fait qu'on expulse des personnes étrangères gravement
malades a donné lieu à un regroupement : l'Admef à
l'initiative Act-Up. Après, avoir nié le fait les autorités
le minimise tout en continuant à le pratiquer sans états
d'âme. Pour beaucoup de ces malades l'expulsion est une condamnation
à mort qui ne s'avoue pas, car peu de pays du Sud ou de l'Est
ont les moyens médicaux de soigner les cancers ou le Sida. L'expulsion
des malades étrangers est un scandale humain à dénoncer,
surtout dans un pays qui se flatte d'être la patrie des droits
de l'homme.
Autre scandale, celui de la séparation des familles. Raoult
est bien devenu le ministre de la désintégration, il n'hésite
pas à justifier l'expulsion de parents ayant des enfants même
si ceux-ci sont en bas âge. On pratique ainsi l'expulsion d'un
ou des deux parents et on met les enfants en foyer au bon soin des services
de l'aide à l'enfance.
On a accusé Ken Loach d'exagérer dans son film "Lady
Bird", mais ici tout en reconnaissant la nécessité
de protéger le droit de vivre en famille on sépare sans
sourciller des familles. De fait le droit de vivre en famille semble
plus solide pour les blancs de souche européenne que pour les
autres. La référence à la Convention Européenne
des droits de l'homme est inutile et confirme qu'il y a un droit pour
les européens et un droit pour les autres.
Autre conséquence de cette politique c'est la quasi-disparition
du droit d'asile. Le taux de refus de l'Ofpra ne s'est pas amélioré,
plus de 90 %. Au mieux c'est une politique des quotas déguisée.
En plus maintenant il faut dénoncer la procédure express
effectuée par la Paf (devenue DICILEC). Cette procédure
est faite depuis le point d'entrée à la frontière
elle-même et ce par fax en 24 H. La réponse est donnée
elle aussi en 24 heures.
Ceci se cumule avec la transformation des compagnies de transport en
auxiliaires de police. Celles-ci ont la charge de contrôler l'embarquement
au départ des pays d'origine en vérifiant les visas. Alors
pour ne pas avoir d'ennuis ensuite en arrivant en Europe elles s'assurent
que les quelques personnes qui voudraient demander l'asile ont de bonnes
raisons de le faire ou si elles ont des papiers en bonne et due forme.
Sinon elles sont pénalisées par la prise en charge du
retour et par une amende, ceci est régi par une texte européen
et confirmé par Schengen.
En clair l'asile politique est devenu exceptionnel en France, même
si la France continue de profiter de son image, même si elle engendre
de très nombreuses désillusions pour les personnes déboutées
ou refoulées. Les mythes ont la peau dure.
Cette situation est particulièrement graves vis à vis
de ce qui se passe dans certains pays. Par exemple on refuse les visas
aux démocrates algériens et aux femmes algériennes
qui souhaitent s'installer en France. Les demandes d'asile acceptées
pour ce pays se compte en dizaines. Il semble aussi que les intégristes
aient plus de facilités que les femmes et les démocrates
pour rentrer en France et y obtenir l'asile. Scandale donc ! Scandale
humain et scandale politique, car rappelons le mot d'ordre de la manifestation
du printemps 95 contre la politique des visas vis à vis de l'Algérie
à Nantes : "Un visa, une vie!".
Sans forcement être exhaustif nous évoquerons un dernier
scandale, celui des "sans-droits". C'est une nouvelle catégorie
de population qui n'existait pas dans le passé, parmi ces personnes
:
* les personnes déboutées du droit d'asile,
* les victimes de la double peine,
* les personnes conjoint de personnes française,
* les enfants arrivés après l'âge de dix ans,
* les jeunes n'ayant pas la nationalité après 18 ans,
* certaines femmes de polygames,
* des expulsés revenus en France,
* des personnes qui se sont absentées plus de 6 mois hors de
France,
* des personnes à qui on a retiré la nationalité
française (leur nombre semblerait être de plusieurs milliers
de personnes, voire de 10 000),
*des personnes parents d'enfants français à qui on refuse
le plein droit (les guinéennes et les guinéens par exemple),
* etc.
Certaines de ces personnes sont inexpulsables, d'autres étaient
classées comme "en situation d'inconfort administratif".
Le nombre des "sans-droits" augmente sans arrêt. Leurs
droits sociaux dépendent en fait de leur droit au séjour.
Le droit à la santé est de plus en plus contrôlé
par les préfectures, bafouant ainsi le droit démocratique
du secret médical. Les droits sociaux sont secondaires par rapport
au droit du séjour. De ce fait les services sociaux tendent à
passer sous tutelle du Ministère de l'Intérieur pour les
populations considérées comme étrangères.
C'est une dérive assez inquiétante et un mécanisme
dangereux. Il y a peu on dénonçait le totalitarisme où
les services de sécurité avaient un rôle déterminant
dans la vie humaine. Ici on ne peut nier que c'est le cas pour les dits
"étrangers" ou "d'origine". En clair il faut
regarder en face notre démocratie qui est en partie totalitaire.
Ce n'est pas admis publiquement, mais les faits sont têtus.
Ces "sans-droits" sont les proies idéales pour la chasse
aux "clandestins". Ils constituent un réservoir qui
se remplit petit à petit au fur et à mesure qu'on le vide.
C'est pour cela qu'il n'y a pas besoin de grandes rafles comme sous
Vichy, mais d'un contrôle permanent et systématique, d'une
suspicion généralisée vis à vis de tous
les "étrangers".
De l'immigration zéro à l'immigration négative
: une purification ethnique ?
Pour interpréter ces faits il est nécessaire, à
mon avis, d'examiner l'ordre mondial et local. L'étude de la
domination actuelle permet de comprendre ou d'essayer de comprendre
pourquoi tout cela se met en place. En quelques années nous sommes
passés de la fermeture des frontières aux nouveaux arrivants
à la diminution du nombre de personnes "étrangères"
vivant en France.
Il s'agit bien d'une modification de nature, d'un changement qualitatif.
Du temps de Rocard on parlait de "maîtrise des flux migratoires".
Pasqua justifiait son action par "l'immigration zéro".
Aujourd'hui il faut regarder les choses en face, c'est une immigration
négative qui est l'objectif. C'est bien d'un racisme d'Etat qu'il
est question.
De fait on prétend combattre Le Pen en appliquant sa politique.
Le contexte européen légitime cette orientation. Les accords
de Dublin, de Schengen, le fichier SIS sont des mesures européennes.
Maintenant les charters sont européens. L'ordre mondial est un
ordre impérialiste, la participation de l'Europe à cet
ordre est clair. L'appartenance au camp du "Nord" ne fait
pas de doute. La volonté de s'affirmer comme une grande puissance
implique de se protéger des flux de populations qui arrivent
du "Sud" et de l'Est. En participant à l'économie
mondiale actuelle avec la place que nous avons, nous récoltons
certaines richesses, mais nous devons également nous protéger
des dégâts que nous contribuons à produire, c'est
à dire des effets de notre propre puissance.
Notre domination économique, technique, diplomatique, militaire
et politique a des effets désastreux sur la nature et sur les
humains. Comme il n'est pas question d'assumer les conséquences
de nos actes, de nos destructions, de nos ventes d'armes, de notre soutien
aux dictateurs, de notre habitude coloniale et néocoloniale à
asservir des populations, nous devons trouver des méthodes pour
continuer à profiter de la situation en rejetant les responsabilité
sur d'autres.
Le jeune Rohm bosniaque qui a été tué par la Paf
à Nice cet été témoigne bien de cela. L'ordre
européen est xénophobe. Les parents de cet enfant de 8
ans ont été refoulés alors qu'ils avaient sollicité
l'asile. Les services de police ont été couverts et légitimés
parce qu'ils n'avaient fait que leur devoir. Tirer sur des personnes
et éventuellement les tuer alors qu'elles veulent franchir la
frontière est un devoir national, peu importe qu'il s'agisse
d'un enfant et de demandeurs d'asile.
Le maintien de la domination actuelle prend la forme de la protection,
de la préservation, de la sécurité. La notion de
développement séparé est ici très pertinente.
L'Europe et la France ont intérêt à la fermeture
de frontières. Certaines analyses parlent de notre aire géographique
comme "d'un camp de consommation". Cette nomination est exacte
au détail près qu'il s'agit d'un développement
séparé pour l'extérieur, mais aussi pour l'intérieur.
Tous ceux qui sont "hors-normes", c'est à dire les
personnes qui n'appartiennent pas à la classe moyenne ou à
la classe supérieure sont à traiter différemment,
ce sont les SDF, les "exclus", les "immigrés",
une partie des jeunes, etc.
La justification idéologique s'appuie sur le racisme
différentialiste, même si dans la pratique quotidienne
le racisme "ordinaire" se mélange et se confond avec
le néoracisme. Le thème de la différence alimente
celui du danger et fonde le besoin de sécurité. Effectivement
on est passé de la sécurité pour l'avenir à
la sécurité pour le présent et à la préservation
des acquis.
La conjonction de la reprise des essais nucléaires et de Vigie-Pirate
montre bien en quoi il faut trouver de nouvelles solutions à
la situation critique dans laquelle nous sommes. Le nucléaire
et la xénophobie sont liées parce que nous sommes dans
un pays impérialiste, un pays qui veut essayer de monnayer sa
puissance militaire et camoufler sa faiblesse économique pour
maintenir sa place en Europe et dans le monde. C'est ce que font déjà
les Usa en faisant payer aux autres leur déficit et au Sud son
parasitisme par le biais de l'indexation des fonds de retraite sur la
dette des pays du tiers-monde (cf l'exemple du Mexique).
Cet ordre de domination agit encore par la fuite en avant, on le constate
dans le domaine économique par le renouvellement perpétuel
de la dette et par son augmentation constante. Dans le domaine politique
on essaie de masquer l'incapacité à résoudre les
problèmes par la fuite dans le militarisme et la paranoïa
sécuritaire.
Il s'agit, comme en Serbie et au Rwanda de détourner l'attention
du public des vraies difficultés et de leurs causes par la désignation
d'un bouc émissaire et d'une militarisation outrancière.
On comprend alors pourquoi les essais nucléaires sont si importants
pour la France et pourquoi le terrorisme est excellent pour instituer
une société de contrôle. Bien sûr le problème
c'est la durée puisque la militarisation et la sécurité
sont des activités parasitaires qui accentuent forcément
les déficits et on ne peut indéfiniment laisser l'armée
dans la rue dans une démocratie libérale.
Mais en attendant cela ne marche pas si mal que cela, l'ennemi public
numéro un c'est maintenant un "individu de type maghrébin",
alors que quelques semaines auparavant c'était soi-disant le
chômage. L'incapacité des Etats et des gouvernements à
peser réellement sur l'économie capitaliste, sur l'action
de la "bulle financière" et ses conséquences
désastreuses trouve ici un bon dérivatif.
On peut alors comprendre l'appréciation d'Hirochirac sur l'Europe,
c'est bien quand on ferme les frontières extérieures et
qu'on expulse, c'est mauvais quand on ouvre les frontières intérieures
et que l'économie allemande devient dominante.
Un point dans cette situation est étonnant. Nous sommes face
à une purification ethnique qui ne s'assume pas. On constate
un consensus qui légitime publiquement le racisme d'Etat et l'immigration
négative, la gestion différentielle des populations. Dans
le même temps on remarque un besoin de secret pour cacher les
expulsions dans la réalité, il y a une nécessité
de silence sur la machine à expulser.
L'opacité pratique se double donc d'une transparence politique.
Notre société refuse de voir en face ses peurs et les
conséquences que cela provoque. Si on évoque la comparaison
avec d'autres temps, aussitôt les "mauvais souvenirs"
apparaissent et tout le monde se fâche.
Si effectivement nous ne sommes pas dans le même contexte politique
et économique, certaines pratiques sont similaires. C'est pour
cela que la notion d'Etat de droit pose problème. L'écart
entre la légalité et la légitimité est clair.
Le racisme d'Etat est légal, le racisme "banal" s'adjoint
au racisme institutionnel pour la mise en oeuvre de l'exclusion et des
expulsions.
La question de la légitimité de tels textes et de telles
pratiques est à l'ordre du jour. En ce qui me concerne la réponse
est simple, la loi française est illégitime. Dans notre
situation nous ne sommes pas soumis à un autre pays, c'est un
problème interne, une volonté de maintenir une domination
locale et mondiale.
C'est pour cette raison que, pour ma part, je n'appuierais pas mon engagement
sur la notion de droit, mais sur une analyse de la domination.
L'inexorable polarisation
Les conséquences de cette politique sont graves sur le plan
de déstructuration de la société, la principale
étant la polarisation entre au moins deux mondes. La coupure
entre les "étrangers" et les "français"
se renforce et c'est normal puisqu'on met en situation d'infériorité
une partie de la population et qu'on la désigne comme responsable
de nos maux.
Sur le plan de la citoyenneté les "étrangers"
n'ont toujours pas le droit de vote, cette inégalité est
accentuée par le nouveau code de la nationalité où
les jeunes "étrangers" ou "d'origine" doivent
être plus français que les français de souche, ils
doivent manifester leur volonté et on a la possibilité
de leur refuser la nationalité après 18 ans.
Comme si une marque substantielle les rendait différents, et
on prend bien soin d'appuyer sur la différence au lieu de renforcer
ce que nous avons de commun. Ensuite on s'étonne que les jeunes
ne demandent pas la nationalité, mais c'est en fait la fin de
la voie fondée sur l'assimilation, la fin de "l'intégration"
tant célébrée par les diverses tendances sociales
démocrates ou par SOS Racisme, les jeunes l'ont bien compris.
Quel espoir, quelle identité sera à l'horizon ? L'exclusion,
les banlieues, le chômage, la galère, les contrôles
au faciès, eux, sont bien au rendez-vous.
Comment alors être surpris que les recours communautaires se renforcent,
comment ne pas voir que la seule possibilité dans cet univers
bouché c'est la désespérance et la violence, pourquoi
s'offusquer de la montée des intégristes religieux, on
a tout fait pour cela.
C'est un cercle vicieux qui s'est installé, on leur ouvre la
voie en prétendant les combattre. Maintenant on peut s'appuyer
sur leur présence pour diaboliser un peu plus encore les "étrangers".
D'autre part il est évident que ce genre de solution ne touche
pas aux causes réelles de la crise actuelle (l'économie
capitaliste et ses effets), alors un jour ou l'autre il faudra renforcer
la chasse au bouc émissaire et attaquer un peu plus ces fameux
"étrangers". Les peurs de nos sociétés
ont un effet paradoxal, qui va en fait alimenter ces peurs à
cause de la déstructuration qu'elles provoquent.
On retombe dans le vieux phantasme :"classes pauvres = classe dangereuses
!".
Ce traitement différentiel développe la pluralité
des mondes qui se côtoient sans se rencontrer ni échanger.
La coupure renforce les deux pôles : les fascistes et les islamistes
intégristes. Ils se retrouvent d'accord au moins sur un point:
"la différence est irrémédiable".
Ce qui fait les frais de tout cela ce sont bien sûr la voie de
la solidarité, l'interculturel, la multiculturalité, le
mélange, l'échange, le métissage, la pluri-appartennance,
la citoyenneté active contre le système capitaliste. A
terme on fait le lit de Le Pen, on ouvre des autoroutes au Fis. Même
si les péripéties politiciennes font que Juppé
est remplacé par Seguin, ou que Jospin cohabite, les conditions
de la déflagration ou des déflagrations violentes sont
là, et ce tant sur le plan local que sur le plan mondial. Les
contradictions de ce système ne seront pas résolues par
le maintien de la domination et par ce gendre de politique, qui accentue
les difficultés plutôt que de préparer leur résolution.
La solidarité en question ?
Nous sommes dans une nouvelle situation et cela implique de réfléchir
à notre engagement.
Comment qualifier cette période ? Le mot fascisme ne convient
pas, la différence historique est trop grande. La barbarie se
renforce et elle prend multiples visages (F.N., intégristes catholiques,
anti-Ivg, divers sectes, groupuscules fascistes, sous-marins du FN,
FIS, GIA, etc.), d'autre part nous ne devons pas que le totalitarisme
est aussi surtout celui de la marchandise.
La défense humaniste et juridique montre ses limites, limites
fixées par "l'Etat de droit". Comment mettre en oeuvre
la solidarité dans le cadre d'une loi illégitime ?
Ceci va inévitablement se heurter à la légalité.
On voit bien que si on laisse faire on laisse les mains libres à
la police et à l'administration. L'articulation entre le travail
de dossier et la lutte politique n'est pas toujours évidente
à mettre en oeuvre. A force d'accepter les demandes de l'administration
on recule perpétuellement, pourtant on le fait pour en "sauver"
quelques-uns.
La minorisation et l'isolement sont réels.Il est impossible d'accompagner
tout le monde aux guichets et pourtant il y a danger. Que faire avec
et pour les "sans-droits ? Comment lutter contre la double peine
? Comment défendre les malades "étrangers" ?
On peut toujours affirmer haut et fort qu'on va héberger des
"clandestins", le réaliser est une autre affaire, car
cela demande une prise en charge financière et pratique qui est
lourde, il faut également être capable de le défendre
publiquement de façon politique, la possibilité de répression
n'est pas un mythe.
Le développement de la crise touche de plus en plus de gens et
la liste des victimes s'allonge. La solidarité a tendance à
être englobée dans la lutte contre l'exclusion. L'inconvénient
de cette approche c'est qu'elle ne s'attaque qu'aux conséquences
de la domination actuelle. Vis à vis des "étrangers"
le recours à l'Etat providence est inutile.
Pour avancer il faut donc dépasser la notion de victime, ne pas
en rester aux droits de l'homme ou à l'humanitaire. Si on se
focalise sur le refus des victimes on espère un capitalisme sans
victimes. Au contraire il faut relier la question du racisme d'Etat
et du racisme banal à la question de la domination.
Ainsi, on peut comprendre comment s'articule la domination mondiale
impérialiste et la domination locale xénophobe, la domination
économique et la domination politique, la domination patriarcale
et la domination militaire.
La conjonction entre ces dominations explique pourquoi le racisme institutionnel
rejoint le racisme "ordinaire" pour renforcer la discrimination
d'un partie de la population qui vit ici.
C'est une solution pour relier la solidarité concrète
avec la question des changements de société. L'exemple
de la revendication du statut de réfugiée pour les femmes
victimes de mauvais traitements en raison de leur sexe est un bon exemple
de cette articulation.
Nous pourrions également réfléchir à ce
que veut l'emploi des termes comme : "étranger", "immigré",
"d'origine", etc.
Est-ce un problème de temps de présence, vingt ans après
est-on toujours un "étranger" ? Comment va-t-on construire
l'Europe si cela est exact ?
Ne faut-il pas plutôt accepter la multiplicité, à
la fois dans la société en pour nous-mêmes ? Car
en matière humaine ce qui est étrange en fait c'est l'unicité,
la pureté !
Philippe Coutant Nantes le 27/09/95
Ce texte a été publié dans la revue Reflexes et a servi de base à plusieurs
débats en France