C'est toujours « un nouveau qui court les rues ». Tout le monde connaît
la psychanalyse. Pourtant ce nouveau ne s'est pas présenté dans « les
clameurs agitatoires » d'une révolution, même si l'on en parle parfois
comme d'une révolution.
Une toujours nouvelle pratique, et depuis Lacan, un nouveau lien social
déterminé par cette pratique « qui vaut d'être porté à la hauteur des
plus fondamentaux parmi les liens qui restent pour nous en activité ».
Mais arrêtons-nous à nous demander ce que vaut ce nouveau, à L'heure actuelle.
Quel crédit lui accorde-t-on ? Quelle place dans le marché absolutisé
du savoir ? Quel est son avenir ? Questions d'école Pour les psychanalystes
car, « la psychanalyse ne vaudra », dit Lacan à :celui qui demande à être
psychanalyste, a que ce que tu vaudras quand tu seras psychanalyste.»
« Ce n'est pas moi qui vaincrai mais le Discours que je sers »: Lacan
nous donne à entendre que le discours analytique a, comme on dit, un bel
avenir, qu'il va son train... malgré - oserions-nous dire - l'option obscurantiste
des analystes qui laissent leur acte dans l'ineffable et qui se contentent
de ce qu'en effet l'acte psychanalytique n'ait pas besoin d'être éclairé
pour opérer. Mais qui dit « victoire » dit bataille à livrer. Encore faut-il
savoir à quoi.
Lacan a démontré que la psychanalyse n'implique d'autre sujet que : celui
de la science, et que c'est ce seul sujet qui peut la faire scientifique.
II n'empêche que ce qui lui est donné de contrer, c'est le projet de la
science de venir à bout de la sexualité, ou celui du capitalisme de «
mettre le sexe au rancart » - c'est son idéologie universalisante qui,
au nom du bien de tous, veut annuler les particularités subjectives, les
façons particulières de jouir (où l'on conçoit bien que les femmes soient
particulièrement visées), engendrant les racismes, puisqu'au « tous pareils
», à l'uniformisation des modes de jouissance, répondent de nouvelles
ségrégations qui e construisent autour « du retour du passé funeste de
Dieu ».
On peut dire que la psychanalyse a jusqu'ici échappé à sa résorption dans
les diverses thérapeutiques, soit à devenir une caution de plus pour la
théorie de l'exploitation sociale qui perfectionne ses moyens d'imposer
«un mode de jouissance normé, uniformisé. Elle y a échappé malgré
la pente qu'elle a prise du côté de l'Ego-psychologie, de s'attacher à
produire des moi-forts, « sexolo-éduqués », bons pour le service de l'exploitation
inter-humaine » - ou malgré la pente à la dénonciation de cette exploitation
au nom d'une libération du désir, où l'analyste collabore dans la méconnaissance
au discours du capitalisme, « parce qu'à le dénoncer (il) le renforce,
de le normer, soit de le perfectionner ».
Il y a pour la psychanalyse un côté « garde-toi à droite, garde-toi à
gauche » dans la bataille qui se livre depuis Freud, pour que la voie
ouverte par lui le reste et que le discours analytique, doté par Lacan
de concepts nouveaux, continue d'ex-sister dialectiquement aux autres
discours .
Nous devons à Lacan d'avoir préservé le sens subversif du freudisme,
n'ayant su s'opposer aux déviations comme Freud lui-même, avec « une
sûreté sans retard et une rigueur inflexible ». Saurons-nous, en cette
fin de siècle, prendre la relève de leur courage logique ?
La page d'origine de ce texte http://members.aol.com/bosson/gilet1.htm
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