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Origine : http://destroublesdecetemps.free.fr/Limites_de_la_psychanalyse.htm
La psychanalyse est étroitement associée au concept
de maladie, dans le sens d’un dérèglement du
psychisme qui agit sur le corps, par psycho-somatisation, et influence
le comportement, de telle sorte que l’individu se manifeste
de manière irrationnelle, c’est-à-dire dans
un rapport qui n’est pas immédiatement saisissable.
La psychanalyse n’est pas, comme l’affirment ses adeptes,
une étude critique et analytique de l’esprit, et bien
qu’elle se veuille une prophylaxie des penchants morbides
du comportement qui va au-delà du béhaviorisme.
Il ne faut pas croire, cependant, que toutes les manifestations
morbides sont le fait d’un dérèglement psychologique
; et même, le plus souvent, elles y sont étrangères.
Il s’agit de ne pas tomber dans le travers séduisant,
mais néanmoins erroné, d’une sorte d’anthropologie
systématique, qui voit dans les manifestations morbides la
marque d’un dérèglement strictement psychologique.
Ce serait ignorer la nature organique de l’esprit, et confondre
la nature psychologique de l’esprit avec l’idéologie
qu’évoquent les spiritualités fondées
sur la croyance en la primauté de l’esprit et l’assujettissement
du corps organique à cet esprit, alors que rien ne justifie
l’idée de séparer le corps de l’esprit
qui l’anime.
La psychanalyse est un outillage qui n’apporte de réponses
qu’aux situations adéquates à sa formulation.
La psychanalyse n’est qu’une branche de la philosophie.
Elle n’est pas une science, parce qu’elle ne se vérifie
pas de façon universelle. Elle est une spéculation
méthodologique, mais non une ontologie. La psychanalyse n’est
donc pas une métaphysique, au sens strict, mais une interprétation
particulière des rapports humains, fondée sur des
interdits, et non sur la liberté. La psychanalyse suppose
que le respect des interdits fondamentaux, que l’on retrouve
dans les Tables de la Loi, fonde la cohérence des rapports
humains. Mais, un interdit ne saurait se faire respecter autrement
que par l’autorité qui juge de l’empêchement
de son application ; le premier effet d’un interdit est d’empêcher
tout dialogue possible. Le dialogue n’intervenant plus, dans
cette condition, que comme justification, et non comme conviction.
Dit autrement, c’est la conviction à coup de pied au
cul.
De plus, comme on n’utilise pas que l’outillage du
maçon pour bâtir une maison, ni réduire un bâtiment
à sa maçonnerie, on ne saurait utiliser l’outil
psychanalytique pour rendre compte de toutes les situations. Par
ailleurs, ce n’est pas à l’outil de se rendre
maître de la main qui le conduit, mais bien, à l’inverse,
de se laisser guider par cette main experte. Il en va de même
pour les connaissances cognitives. Tout interpréter sous
l’angle de la psychanalyse est abusif, et comme tel, renvoi
à de fausses réponses. Enfin, il y a des gens et des
situations pour lesquelles la psychanalyse est tout simplement,
et dans la définition exacte du mot, insensée.
La psychanalyse n’est pas une science, mais une interprétation
théorique et spéculative du comportement que l’on
observe essentiellement dans les grands centres urbains, dans les
pays dont la religion monothéiste, qui symbolise le Père,
fonde l’Etat. Dans les pays d’Extrême-Orient,
qui font appellent aux bouddhismes fondés sur la réincarnation,
et dans ceux dont le fondement se trouve dans les religions polythéistes,
la psychanalyse ne présente aucun sens, à l’inverse
du christianisme qui fonde ses principes sur la filiation linéaire,
de parents à enfants. Enfin, la psychanalyse est inadéquate
aux systèmes tribaux, lesquels sont une communauté
et non des familles atomisées, et pour lesquels il n’est
pas rare que les enfants soient élevés par d’autres
membres de la tribu, et non par les parents directs.
Enfin, la psychanalyse utilise le langage comme élément
qui la fonde ; élément étranger au prolétaire
ordinaire qui n’a reçu pour toute éducation,
que le minimum lui permettant de parler, de manière rudimentaire,
sa propre langue afin d’être opérationnel dans
l’exécution du travail auquel il est soumis. L’interprétation
des rêves et les lapsus lui sont comme une langue étrangère,
et donc, parfaitement incompréhensible. Il lui préfèrera
de très loin, le langage de l’alcool, la soumission
au patron et la reconnaissance de son travail, jusque dans la délinquance,
où le patron s’identifie au bosse, le travail, à
une activité non déclarée, et l’alcool,
au langage grossier de la nuit.
C’est pourquoi, il est abusif d’utiliser les rodomontades
de la psychanalyse pour chaque problème rencontré.
L’Etre humain ne se réduit pas à son psychisme,
quoique la psychanalyse tente de l’enfermer dans une telle
circularité. L’abus de l’usage des concepts de
la psychanalyse atteint bien souvent des sommets méprisants,
semblable à une secte prétendant détenir la
seule vérité possible pour laquelle tout le reste
doit se plier. Le ton hautain de Lacan, là, fait référence.
Freud, pourtant, avait mis en garde contre l’abus de sa découverte.
Il semble que cette mise en garde est ignorée de ses disciples
mêmes.
Il est prudent de rappeler que Freud a toujours affirmé
que l’instance psychique d’inconscient n’est qu’une
hypothèse qui n’est pas prouvable, sinon par la négative,
par l’interprétation des traces qu’elle inscrit
dans le comportement et qui l’influence, c’est-à-dire,
par l’interprétation des ratés que la conscience
produit lorsque ses manifestations sont sollicitées sous
la forme d’acte manqué, de trou de mémoire,
de lapsus, d’obsessions diverses qui se caractérisent
par leur manière répétitive, et notamment des
phobies. C’est une sorte de trou noir dont on distingue les
manifestations, mais non l’objet lui-même. Hors, il
s’agit de ne pas confondre cause et effet. Le trou noir que
l’on désigne par l’inconscient n’est que
l’effet de notre observation des difficultés à
entreprendre une relation mettant en jeu la sensibilité,
et non la cause de cette difficulté. Dans ce que Freud nomme
inconscient, ne se trouve pas la cause de nos difficultés
à entreprendre des relations humaines, parce que c’est
précisément l’inverse, l’inconscient est
le produit de ces difficultés ; il agit comme une mémoire
secrète, mais n’est pas à l’origine de
ce qu’il mémorise. L’inconscient est le produit
de l’interdit et d’un trie sélectif que la mémoire
opère, et non la cause de l’interdit ni de la mémoire.
D’ailleurs, il est prudent de rappeler que, pour ce qu’il
en est de la mémoire et de la structure du cerveau, nous
ne savons encore que peu de chose.
Ce qui n’est pas conscient se développe en même
temps et de la même manière que tout ce qui apparaît
à la conscience, parce que le cerveau opère un trie
et fait apparaître la réponse qui se trouve être
la plus performante face à des problèmes rencontrés,
même lorsqu’elle semble n’être qu’une
catastrophe ou dérisoire. Et cette réponse est celle
qui nous satisfait le plus, et qui peut n’être que celle
du moindre dégât devant une adversité puissante,
ou une difficulté insurmontable. La conscience n’est
qu’une réponse possible, non l’apparition de
ce que l’on tient pour vrai, parce qu’il n’existe
nulle part quelque chose de vrai qui pourrait se distinguer, et
pour laquelle aucun être humain n’interviendrait. Tout
simplement parce que tout ce qui existe et que nous savons exprimer,
n’existe que parce que la Terre est occupée par l’esprit
de ses habitants, et qui s’autodétermine comme l’homme,
dans un mouvement qui s’inscrit dans une durée. En
effet, sans la durée, la mémoire, et la conscience
qui lui est associée, n’aurait aucun sens. C’est
pourquoi chacun est conscient de son existence, et quoique à
des degrés divers relevant du besoin, plutôt que du
désir. C’est, évidemment, parce que le besoin
est devenu le centre des préoccupations, que la conscience
est liée à un système utilitariste. La conscience
n’est pas associée, comme on pourrait le supposer,
à la manifestation sensible que l’on rencontre dans
l’art, ni dans le désir que les sentiments font naître,
mais à la démonstration logique que l’on rencontre
dans l’économie, cette pensée nobellisée
en 1968 qui se fait passer pour une science, alors qu’elle
n’est qu’une justification de la misère. Aujourd’hui,
on associe à la conscience, la responsabilité que
l’on croie rencontrer à travers le travail, de sorte
que tout ce qui n’entre pas dans cette vision du monde est
violemment rejeté. C’est aussi la conclusion qu’en
fait le thérapeute lorsqu’il justifie sa rémunération
par la responsabilité dont il prétend faire preuve
lorsqu’un patient fait appel à son service, service
qui devient pour le coup, du travail. Pour le psychanalyste, la
notion de gratuité et de potlatch est un non sens. La psychanalyse
comme pratique, est donc d’abord un travail, c’est-à-dire
une activité dont le but est l’argent, et non une guérison
quelconque de patients fortunés. C’est parce que la
psychanalyse est d’abord un travail, qu’elle n’est
pas une prophylaxie, un heureux événement de libération.
La psychanalyse est aussi un mensonge par ce simple fait qu’elle
met sur le même niveau la rémunération et le
potlatch. Hors, l’argent ne peut pas remplacer un cadeau de
bienvenue ou de reconnaissance, parce qu’il provient de l’esclavage,
et produit la misère. On ne saurait fonder un heureux événement
sur le don d’argent, parce que l’argent n’est
pas le produit du désir, mais celui de l’exploitation.
C’est un abus de langage que de parler de don d’argent,
parce que l’argent est du profit pour les uns, et de la misère
pour les autres. L’argent procure le pouvoir de quelques-uns,
et la soumission du plus grand nombre. Voilà pourquoi la
psychanalyse n’a d’effet que parmi la clientèle
la plus fortunée. En cela, la psychanalyse est un formidable
système d’escroquerie. Voilà pourquoi elle ne
s’adresse pas à la population laborieuse, mais plutôt
à la famille Bonaparte.
Le don d’argent existe, cependant, mais entres pauvres, parce
que le sens qu’ils lui attribuent est celui d’un sacrifice
personnel. Tandis qu’entres gens riches, c’est juste
une gâterie, un caprice, voir un investissement, mais non
un sacrifice. C’est aussi pour cela que la psychanalyse n’a
aucune renommée solide en dehors du cercle restreint d’une
bourgeoisie fortunée ; c’est pourquoi elle a surtout
un effet envers ceux pour qui la conservation d’un héritage
substantiel les préoccupent plus que d’être auréolés
d’une réputation de grande générosité.
C’est en ce sens qu’il faut comprendre la notion de
transfert. Voilà une prédisposition bien naturelle
pour gens de même condition, c’est-à-dire justement,
qui ne sont pas soumis à des conditions, sinon à l’impétuosité
de leur tempérament et à l’égoïsme
de leur ambition.
Gilles Delcuse
Fait le 11 août 2004,
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