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Le vent nous portera…



Le vent nous portera…

"Ce parfum de nos années mortes, ce qui peut frapper à ta porte
Infinité de destins, on en pose un et qu'est-ce qu'on en retient?
Le vent l'emportera…
Pendant que la marée monte, (et) que chacun refait ses comptes
J'emmène au creux de mon ombre des poussières de toi
Le vent les portera, tout disparaîtra, le vent nous portera…"

Noir Désir.

Il semble qu'il faille comprendre la soirée du premier tour de l'élection présidentielle de manière maritime : ce qui s'est passé, c'est un reflux des gens vis-à-vis de la pratique politique d'une gauche gouvernementale et gestionnaire, qui laisse à découvert le récif Le Pen. C'est bien ce double processus qui constitue l'événement de dimanche dernier.

Colmater ou recoder n'est pas créer
Comment en est-on arrivé là? Depuis 30 ans, les différents pouvoirs en place se sont efforcés de colmater les fuites et les lames de fond produites par les luttes des différents mouvements minoritaires (lutte contre le taylorisme, lutte des femmes, des "immigrés" et sans-papiers, des précaires et chômeurs, des malades du SIDA…)
Les nouveaux armateurs, ceux qui restent à terre, construisent des digues pour recoder et détourner ces courants vers l'entreprise, la restructuration du capitalisme, l'Europe économique. Ces nouveaux armateurs prennent désormais figure de managers carnassiers au teint de soleil, de cadres stressés en manquent de sommeil.
Nos désirs de mobilité sont alors recodés en précarité professionnelle, en flexibilité. Nos envies de coopération sociale et d'échanges sont muées en concurrence généralisée et en motivations managériales. Nos aspirations d'une sexualité plus riche et diversifiée sont captées au travers de caricatures de corps publicitaires normalisés. Nos expérimentations vers d'autres sensations et perceptions par l'usage de drogues sont rabattues comme conduites à risques.

S'enliser n'est pas résister

En même temps, et comme souvent, ces digues entraînent et structurent la production de sables mouvants où s'enlisent les gens dans un présent qui n'est déjà plus. Beaucoup se réfugient sur des épaves pour ne pas boire la tasse. C'est pour certains, les plus tristes et les plus réactifs, la nostalgie d'une France et d'une identité nationale sans s'apercevoir que celle-ci n'est désormais qu'une pièce secondaire dans la construction d'un empire. C'est aussi le soutien à des pratiques sécuritaires qui lissent et aseptisent l'espace public. On considère ainsi l'expression de modes de vie, comme "faire salon" dans les cages d'escalier, ou écouter de la musique un peu forte dans les transports en commun ou encore manifester comme étant des marques d'incivilités et d'insécurité.
D'autres s'accrochent à des dispositifs dépassés comme celui du plein emploi, d'une socialisation par le travail au travers de politiques d'insertion ou de retour à l'emploi. D'autres, encore, s'échouent sur une conception défensive des conquêtes sociales pour ne pas avoir aperçu et pratiqué les dynamiques socio-politiques qui soufflent actuellement (par exemple la revendication par des précaires d'un revenu garanti…).
Mais nous sommes déjà beaucoup à savoir et à sentir que ces propositions de reconversions et ces enlisements ne sont pas notre propos.

Accélérer la recréation politique

Cette recréation politique est déjà en cours depuis un certain temps, même si on tente encore de la rendre invisible. Ainsi, nous étions déjà plus concernés par ce qui s'est passé à Seattle, à Millau ou encore à Gênes, par ces nouvelles pratiques politiques émergeantes, que par l'application des 35 heures. Même les emploi-jeunes, faits pour capter à bas prix les "compétences" de certains, n'ont pas réussi à empêcher la prolifération d'un autre usage du travail et du temps en rapport avec nos désirs.
Cette création politique s'accentue sous nos yeux, dans nos rencontres, dans les grondements de manifs joyeuses de ces derniers jours, dans les moyens de penser ce qui se passe, dans la circulation de la parole. Il ne nous viendrait plus à l'esprit d'attendre que quelqu'un nous dise ce qu'il faut faire, nous le créons collectivement en nous donnant les moyens de faire ce qui se passe (manifs spontanées, occupations de l'espace public, discussions entre inconnus, tracts). Tous ces instants, ces échanges participent à la recréation politique qui se répand et s'éprend de l'espace public.
Même le vote pour le deuxième tour semble pris dans cette recréation politique où les problèmes de représentations (mes intérêts sont représentés par qui? ) sont transformés en pratiques stratégiques (lutter contre la droite radicale et nationale).

Ce que nous avons à faire ne ressemble en rien à un programme politique, mais plutôt à une conjonction de nos désirs, des micros agencements collectifs déjà réels, déjà présents….

C'est le moment de la recréation politique, à la prochaine sonnerie, on ne remontera pas, on sera déjà loin…

Une multitude de gens


Contact :  mailto:arsenalpolitique @ caramail.com
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