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“ Du racisme biologique au racisme culturel ! ”
Intervention d’Edouardo COLOMBO
à la FASTI le 2 Mars 1997


On m’avait proposé comme thème “ Du racisme biologique au racisme culturel ”. Les problèmes qui touchent à ce sujet à mon avis sont complexes parce que ce n’est pas seulement le problème de la race, c’est aussi le problème de la culture, de la différence culturelle et derrière tout cela il y a le problème des valeurs, c’est à dire de quelle façon nous pouvons concevoir l’humanité et un espace politique social, où la liberté et l’égalité peuvent se construire. Cette dimension qui a des aspects épistémologiques, philosophiques, sociologiques, psychologiques, qui sont énormes, c’est un point de vue qui exige une clarification avec un point de départ clair. Je veux parler si la discussion le permet du problème des valeurs.

Par rapport au racisme biologique et au racisme culturel il faudrait déjà voir si ces mots conviennent, mais en tout cas on peut commencer par là, ce que nous pouvons constater c’est le changement récent dans la façon qu’a eu la droite de poser le problème de la différence. Du point de vue traditionnel la différence était posée à l’origine par la question sociale. Les premiers qui ont été discriminés d’une façon directe et claire ce sont les prolétaires. Le prolétariat s’est formé en France à partir de ce qu’on peut considérer la prise du pouvoir de la bourgeoisie à partir de 1830. La date importante c’est la révolution de 1848. A ce moment là les prolétaires du prolétariat industriel étaient considérés comme “ des nomades sans foyer ni patrie ” et c’est un argument qui va revenir toujours dans le discours de la droite. Un prolétariat qui en grande partie était formé par l’émigration de la campagne sur la ville et il y a des données de l’époque qui montrent la préoccupation de la bourgeoisie pour exclure un prolétariat qui crée des problèmes. En 1840 il y a un comité du travail tout à fait officiel et qui dépend du gouvernement, qui pose la question suivante en terme d’enquête quel serait le moyen d’arrêter l’immigration vers la ville des travailleurs des campagnes. A la même époque il y a les grandes enquêtes sur les classes laborieuses, d’où viennent le mot utilisé après de “ classes dangereuses ”, avec l’équivalence “ classes laborieuses = classes dangereuses ”, le premier qui l’utilise c’est Fraisier, le chef du bureau de la préfecture de la seine qui écrit :
“ les classes pauvres et vicieuses sont toujours, ont toujours été et seront toujours la pépinière la plus productive de toutes sortes de malfaiteurs ce sont elles que nous désignerons particulièrement sous le titre de classes dangereuses.”

A la même époque et la même année en 1840, Buret écrit le fameux travail sur la misère dans les villes où il écrit “ les ouvriers isolés de la nation (déjà l’idée “isolé de la nation ”) mise en dehors de la communauté sociale et politique, seul avec leurs besoins et leur misère il s’agit pour sortir de leur effrayante solitude et comme les barbares auxquels on les a comparés, ils manient peut-être l’immigration ”.
Sur cette base de l’exclusion des gens considérés comme dangereux parce qu’ils n’ont ni les conditions de vie ni les conditions économiques ni les conditions d’instruction nécessaires pour être intégrés à la culture bourgeoise à ce moment là parce que c’est le moment de l’exode des campagnes vers la ville à ce moment là la question sociale pose le problème de l’exclusion. Mais les idéologies de l’exclusion vont partir de là, disons qu’on peut partir de là pour voir l’évolution actuelle même si on sait que l’exclusion a toujours existé en particulier dans l’antiquité grecque ou romaine.

Avec quelques problématiques que je vais essayer de montrer ce qui est naturel et ce qui n’est pas naturel. Dans l’époque moderne à partir de la révolution industrielle c’est la question sociale qui pose les problèmes, sur cette question sociale va se greffer ce que je pourrais dire plutôt que des idéologies d’exclusion, des rhétoriques d’exclusion, je voudrais expliquer ce mot de rhétorique d’exclusion parce que l’idéologie de la droite sur ça a été plus ou moins constante, mais elle a changé sa rhétorique, sa façon de dire aux autres ce qu’elle pense. Vous savez la rhétorique est considéré comme la façon de dire quelque chose aux autres, c’est la façon de s’exprimer de convaincre l’autre.

Dans la rhétorique d’exclusion on va trouver ce changement “ du biologique au culturel ” mais à la base de cela l’idéologie de la droite a toujours considéré et c’est ça le point fondamental qu’il y a une hiérarchie qu’il faut respecter et cette hiérarchie c’est une hiérarchie au fond naturelle, mais qui en condition de la vie historique, de la vie sociale dans l’histoire doit se justifier de différentes façons. Mais c’est l’effet réel de la domination politique, économique, qui doit être rationalisé et défendue au niveau d’une idéologie hiérarchique. L’appréciation hiérarchique, l’exclusion vont toujours se lier avec des processus psychosociologiques, qui sont les mêmes. Toujours les mêmes, des processus, des mécanismes qui vont apparaître immédiatement comme défenses de la hiérarchie c’est de trouver l’ennemi visible, c’est de trouver quelqu’un qui est responsable des maux, c’est à dire la bien connue théorie du bouc émissaire.

Mais le bouc émissaire a une fonction fondamentale qui habituellement qui n’est bien appréciée parce que la fonction du bouc émissaire n’est pas seulement de désigner l’ennemi, c’est fondamental pour exclure de l’intérieur du groupe le mal et le mettre dehors, si on trouve un ennemi dehors on arrive également à justifier toutes les actions contre l’autre parce qu’on l’a désigné, on l’a identifié mais en plus on a fermé la frontière de son propre groupe, entre nous nous n’avons pas d’ennemi, les ennemis sont dehors. Quand l’ennemi est dehors se produit un autre fait psychologique important, au niveau de la religion c’est l’apostat celui qui pense dans les termes d’un autre groupe, ça c’est l’ennemi à combattre mais l’hérétique c’est quelqu’un qui est dedans dans son propre groupe mais qui pose des questions, c’est quelqu’un qui met des alternatives au dogme, c’est ça la chose la plus dangereuse, parce que l’autre il est exclut il a déjà toutes les caractéristiques du diable : le mal absolu on le combat sans problème. Là il y a une problématique qui va réapparaître dans al question de l’identité culturelle. C’est que si on solidifie le groupe de cette façon là si on met l’ennemi dehors tout ce qui est à nous est bon d’une certaine façon, ce peut-être mauvais dans des situations particulières relatives à un combat donné, mais comme l’a dit Max Gallo à la fin de l’année dernière “ on assume tout ! ”. Celui-ci a soulevé un tollé avec toutes les justifications appropriées, il dit dans l’article du monde paru en décembre 96 :
“ qu’il était du coté des énarques et de Versailles, du coté des paysans et de Louis XVI, du coté de Robespierrre et de Napoléon, de Moulin et de Gaulle ” et il a ajouté “ j’assume Thiers, Céline et Brasillach ! ”.

Vous voyez l’importance que l’on peut donner à cela, parce que ce “ j’assume ! ” signifie que “ l’identité nationale ” est supérieure à la bonne critique des dissensions et aux arguments en faveur d’une idéologie différente, tandis que là il y a quelque chose qui est supérieur à tout : la nation, l’identité culturelle, les traditions, tout ce qui va faire la base du fondamentalisme culturel. Quand nous posons cette problématique du fondamentalisme culturel nous voyons immédiatement que là se produit une distorsion dans la rhétorique de la droite surtout à partir des années 70.

Dans le siècle dernier la race biologique était considérée comme une donnée scientifique, il y avait des races, et il y avait une hiérarchie des races. La race biologique était toujours considérée au niveau du sang, la tradition au niveau génétique, à l’époque parlait du “ sang ” qui donnait les caractéristiques particulières de certains groupes humains. Le racisme qui était l’idéologie des races a pris des caractéristiques très particulières dans l’explication des faits sociaux. Par exemple au siècle dernier Le Bon, que tout le monde connaît par son livre sur la psychologie des foules, la psychologie des masses a pris comme cible l’égalité ce qui est inacceptable c’est l’idéal d’égalité et pour ça il avançait sa défense de l’individu responsable basé sur la critique de la masse. La critique de la foule qui viennent de là et qui arrivent en particulier jusqu’à Freud, reprennent cette critique de le Bon, sa théorie de la masse de la psychologie des foules était dirigée contre le mouvement ouvrier c’est à dire contre le mouvement socialiste de l’époque.

Le Bon dit par exemple deux choses qui sont caractéristiques de cette idéologie qui sont les suivantes : dans le premier livre qui date de 1894 qui s’appelle “ Les lois psychologiques de l’évolution des peuples ” où il récapitule sa théorie des différences crâniennes, il affirme que :
“ les dimensions du crâne sont en rapport avec le degré de l’intelligence. Et à mesure que l’on s’élève dans l’échelle de la civilisation depuis les races inférieures les noirs en passant par les races intermédiaires, chinoises japonaises, arabes ou sémites jusqu’à la race supérieure, l’indice céphalique de l’homme augmente de façon spectaculaire, mais il ajoute : pas celui de la femme ”, après dans “ La psychologie de foules ” il dit : “ la criminalité augment e avec la généralisation de l’instruction, (...) les pires ennemis de la société les anarchistes se recrutent maintenant parmi les diplômés des facultés et des universités, c’est à l’école que se forment aujourd’hui les socialistes de demain et les anarchistes et où se prépare pour les peuples latins la décadence de demain ”. Il y a encore ceci : “ c’est en son nom [l’idée d’égalité] que la femme moderne nie la différence fondamentale qui la sépare de l’homme réclame les mêmes droits la même instruction et finira si elle triomphe par faire de l’européenne un nomade sans foyer ni patrie ”.

Je maintiens cela parce que cette idée “ de nomade sans foyer ni patrie ni famille ” c’est l’idée qui va être derrière toutes les idéologies d’expulsion, c’est le nomade c’est la personne qui n’est pas de chez nous, c’est ça l’ennemi je ne vais pas rajouter trop de chose sur cela parce que c’est connu et même très connu, mais vous avez vu dernièrement que en 84 a paru aux Etats unis un livre qui a obtenu une énorme répercussion qui s’appelle “ la courbe en cloche ” qui montre que la différence entre les blancs et les noirs la différence de QI et d’intelligence mesurée par le QI des noirs et des blancs diffère et que comme communauté les blancs sont plus intelligents que les noirs même si il y a quelques noirs qui sont intelligents et c’est cela la courbe en cloche qui montre une population blanche plus intelligente que les noirs. Bien sur c’est une absurdité qui a été critiquée abondamment, mais qui montre comment ça revient de façon permanente l’idée de la race biologique le contenu naturel était repris dernièrement par Le Pen, parce que c’était oublié cette histoire surtout après le génocide hitlérien, le massacre du peuple juif de la dernière guerre mondiale, toutes les idéologies de type raciste nationaliste ont été bannies mais maintenant elles reviennent, elle reviennent avec une idée rhétorique nouvelle parce que elle n’était pas utilisé par exemple par Le Pen actuellement, le texte de Catherine Mégret dans la déclaration qu’elle a fait au journal allemand, elle dit qu’il y une différence entre les races et il y a des différences dans les gènes, mais ils n’essayent pas de refonder l’idéologie sur une théorie scientifique, c’est purement politique, c’est une définition de la race purement politique, mais qui a un intérêt de renouveler ce fond ancestral de l’expulsion.

La race a la caractéristique extérieure ce qui fait la différence ce n’est pas l’instruction, ou même la façon de faire la cuisine, ce qui fait la différence c’est la couleur de la peau, la forme du nez, n’importe quoi, il faut chercher quelque chose qui montre que c’est biologique. et derrière ça il apparaît comme l’a dit Le Pen hier dans ce qui est rapporté par le Monde et Libération, il y a l’idée du complot, le protocole des sages de Sion, l’idée que il y a un complot qui des gens le judaïsme maçonnique qui complote dans ce qui se passe par exemple en France pour donner des gages à ce courant Chirac refuse l’alliance avec le FN et une fois qu’il a gagné ils maintiennent l’expulsion. A partir de là il reconnaît sa filiation fasciste avec la collaboration au moment de la guerre, mais il juge que c’est utile, je crois que s’il le fait c’est qu’il suppose que les effets positifs sont plutôt favorables pour lui que les effets négatifs, et que les effets positifs de ces déclarations l’emportent sur le contenu négatif que nous pourrions supposer.

L’idée de nature va être présente aussi dans les manifestations du culturalisme, mais avant de parler de “ nature ” je voudrais dire qu’elle est la différence qui va s’insinuer dans les années soixante dix dans l’idéologie de la droite. Toute cette dimension biologisante elle est cachée par une autre façon de poser le problème qui était basée dans l’idée des occidentaux qui a commencé en France avec l’idée de la nation ou l’Etat nation, je crois que cela aura des répercutions après de type culturaliste extérieur, dans le premier moment c’est l’arrivée nouvelle d’une dialectique de l’exclusion et de l’inclusion qui aura assimilé la culture et le territoire, cela c’est fondamental cette relation entre la culture et le territoire, c’est à dire les “ racines ”, on parle toujours des racines de quelqu’un et nous-mêmes nous avons tendance à employer ce terme comme si les hommes étaient des plantes. Nous sommes des animaux qui marchent qui avons le tête remplie (je signale en passant que cromagnon était un émigrant) cette relation entre la culture et le territoire va avoir comme résultat l’identité nationale et l’institutionnalisation des spécificités de la culture et ça va se renfermer dans l’Etat nation, l’idée de l’Etat nation a été construite en Europe à partir du 14° siècle puis au XVI et XVII° siècle mais ce sont les rois qui ont donné la frontière nationale et l’idée de l’Etat qui ont construit l’Etat nation et qui a été définitivement imposé par le jacobinisme de la révolution française. L’idée qui vient de là c’est la suivante et je vais en donner deux exemples : “ l’identité nationale est le modèle idéologique de la forme dure de la conception républicaine de l’intégration ” xxx yyyy directeur de l’institut des études politiques en Angleterre en 1978 a écrit la chose suivante :
“ la conscience nationale est l’ancre du salut d’une loyauté inconditionnelle et de l’acceptation des lois et des règlements placée sous l’identification personnelle avec la communauté nationale ”

Cette idée d’identification personnelle avec la communauté nationale est très importante nous le verrons après “ qui sont les fondements du devoir civique et du patriotisme ”.

J’ai retenu cela parce que cette idée d’identification personnelle avec la communauté nationale parce que toutes les réclamations de l’identité comme quand il est dit qu’on a besoin de notre culture, de ne pas perdre notre culture, notre identité, c’est l’idée de nous enraciner dans une culture qui n’est pas acceptable, parce qu’avec cette culture il y a identité globale, ce n’est pas l’individu qui a une identité c’est la culture qui est l’identité, la culture et le territoire parce que c’est baser sur le territoire, et là la tradition, la représentation du peuple ethos de la culture c’est l’ennemi, le caractère même de cette culture c’est l’ennemi c’est cette relation globale va faire que tous les mouvements de libération nationale une fois qu’ils ont triomphé, ils ont utilisé cette dimension pendant le guerre, la lutte de libération nationale de façon positive vont ensuite l’utiliser pour opprimer son peuple, parce que l’identité a été retournée par les groupes qui contrôle l’état national. Je voudrais bien que l’on discute de toutes ces choses après, mais cette conception prédominante dans le modèle républicain va donner deux logiques.

Une logique d’intégration qui va éradiquer les différences culturelles intégrer signifie alors abolir les différences et d’abandonner toutes ses caractéristiques d’avant pour reprendre les caractéristiques de la culture dans laquelle on s’intègre. L’autre logique qui est la logique de la tolérance, c’est à dire on permet toutes les divergences mais à condition que petit à petit qu’elles disparaissent par l’intégration dans la communauté nationale. dans ce modèle par exemple ce serait faire courir à la collectivité nationale, la démocratie un immense danger que d’envisager de reconnaître les particularismes culturels dans la vie politique ou dans les institutions où ils ne peuvent qu’exercer des effets ravageurs. ces particularismes n’ont pas à s’épanouir en dehors en l’espèce en dehors de la sphère privée et toute demande identitaire ou communautaire qui tendrait sa chance dans l’espace public doit être rejeté, refoulée et condamnée, au nom de la (et on va voir comment se mélange les positions idéologiques avec Max gallo qui représente la gauche jacobine) l’idée républicaine a d’un coté l’identité nationale et de l’autre coté l’universalisme abstrait, l’universalisme qui est toujours critiqué par la droite depuis la révolution française c’est à dire ce type d’universalisme considéré comme abstrait dans le sens où tous les hommes sont égaux par nature hommes et femmes et il ne prend pas en considération cet universalisme les différences de culture, les différences de forme de vie d’instruction, de tradition, ou autre, ..... On verra qu’il y a une autre façon de voir l’universalisme et pas au niveau de cette critique là.

Pour le définir de façon plus concrète quand il n’existe pas ces tendances (celles qui me convienne mieux et dont je parlerai tout à l’heure) la droite extrême va profiter pour construire une nouvelle théorie de la différence et de la différence hiérarchique qui était basée non pas sur la biologie mais sur la culture. La différence est importante parce que les théories de types racistes ou biologiques traditionnelles proposaient une différence asymétrique, c’est à dire les cultures comme les individus formaient une hiérarchie mais la nouvelle position de la droite que l’on pourrait définir selon Taguieff comme différentialiste je préfère l’appeler un fondamentalisme culturel comme l’emploie Vérena Stolcke dans le livre qui vient de paraître aux éditions ACL “ Tout est relatif. --- Peut-être. ”.

Pour ce fondamentalisme culturel la différence n’est plus asymétrique, la différence est symétrique c’est à dire ce qui existe entre les cultures ce n’est pas une différence hiérarchique qui expliquerait qu’une culture est meilleure que l’autre, ce qui existe c’est l’incommensurabilité c’est à dire qu’il n’y pas de possibilité de mettre en relation une culture avec une autre, il n’y a pas de mesure commune. Toutes les cultures s’équivalent mais chacune dans sont territoire c’est pour cela que l’idée du territoire lié à la culture c’est important. La différence devient symétrique entre les cultures mais les cultures sont incompatibles, chacun sur son lieu a la possibilité de s’épanouir dans sa culture, mais s’il va dans une autre culture il n’existe pas la possibilité de s’épanouir sauf de s’intégrer totalement ou bien de s’en aller.

L’importance de cette idée vient de deux choses et on va essayer de le définir un peu plus clairement. L’idée c’est que les cultures sont différentes de ce point de vue dans ce relativisme culturel place chaque individu dans sa propre culture mais en plus tout le monde devient étranger de quelqu’un parce que chaque individu comme il a par nécessité une culture une nation parce qu’il est né quelque part il est étranger s’il sort de chez lui et comme nous nous rejetons les étrangers, les étrangers vont nous rejeter nous aussi, tout le monde se retrouve dans la situation d’étranger. Cette idée va se lier à une autre qui fonde à nouveau et c’est cela qui à mon avis est intéressant qui fonde à nouveau l’expulsion sur une base naturaliste sur la nature, parce qu’est qu’il y a derrière, pourquoi tout le monde rejette l’étranger qu’il soi étranger d’accord, mais pourquoi ils sont rejetés parce qu’il y a quelque chose qui fonde l’être humain : la xénophobie, c’est à dire que tout individu considère que ce qui est différent doit être rejeté après la culture peut lui faire apprendre que c’est mieux de tolérer les différences, de s’accepter, d’abord ce qui est la base de la culture humaine c’est de rejeter l’autre. La naturalisation, dire que c’est de nature ce rejet donne à nouveau une base biologique mais maintenant qui appartient à la totalité de l’humanité.

Je veux faire une petite parenthèse là la première c’est cette idée de nature de naturalisation naturaliser comme terme juridique signifie légalement rendre membre d’une nation mais également du point de vue étymologique c’est le rapport de la nature, à ce qui est naturel dans l’origine de la naissance, nature et naître viennent de la même racine indo-européenne naître et nature les deux font référence à cette idée de quelque chose qui vient et qui n’est pas acquis mais de ce qui est imposé par le biologique la nature, d’appartenir à la nature ce qui donne comme résultat cette conception à mon avis à combattre qui énonce que les hommes comme les animaux ainsi que le montre l’éthologie ont une façon de se comporter qui a ses racines son explication dan la génétique dans la biologie dans le comportement biologique ce qui a donné les théorisations que vous connaissez bien de la sociobiologie mais dans l’idée de nature qui réapparaît dans le fondamentalisme culturel avec la xénophobie et qui n’est pas seulement dans le fondamentalisme culturel parce qu’il y a des gens qui parlent de “ seuil d’intégration ”, il y a un texte de Dany Coben Dhit qui défend un seuil d’intégration, parce que si on passe à 25 % d’étrangers la population a tendance à se décomposer selon la loi ”scientifique ” qui était basée sur l’éthologie parce qu’il y a des groupes d’animaux qui si on fait entrer dans un territoire plus de 25% d’une autre espèce ils ont tendance à disparaître.
Laissons de coté les explications de ce type, mais c’est vrai qu’il y a cette idée de nature. Les racines biologiques mais les droits de l’homme aussi ont la même tendance. On a dit à partir de la révolution française que les droits de l’homme sont des droits de nature, donc les hommes naissent libres et égaux, quand on dit les hommes naissent libres et égaux on doit comprendre que c’est une décision que nous prenons que les hommes naissent libre et égaux, c’est une convention sociale, une valeur que nous voulons défendre, pas que l’homme est libre par nature parce que il naît libre, ceci c’est la théorie libérale traditionnelle. L’homme ne naît pas libre, l’homme naît comme n’importe quelle espèce dans un milieu qui pour l’homme est culturel et qui en fonction de cette dimension culturelle va créer des valeurs et des formes de vie.

Cette distinction entre ce qui est de nature et ce qui est par convention c’est fondamental c’est la position qui vient de l’origine de la démocratie grecque qui a posé les différences entre ce qui est par nature et ce qui par convention, ce qui est nomos loi, convention et ce qui phusis par nature. Vous vous souvenez de la discussion sur a définition de l’esclave, est on esclave par nature ou par convention, d’un coté les sophistes disait la condition d’esclave c’est une convention humaine , c’est un fait humain et de l’autre on affirme non ils sont esclaves par nature, ils sont nés pour obéir. J’ai repris cette distinction parce que je pense qu’elle est à la base d’une quantité de malentendus fondamentaux, mais l’autre problème qui est lié à l’identité nationale, Vous voyez peut-être que dans la discussion on pourrait le différencier plus clairement, quand je parle de l’identité nationale, il est évident que j’utilise un mot qui peut être utilisé par ceux qui défendent le fondamentalisme culturel que par ceux qui défendent un État républicain, parce que je crois que c’est un concept de passage qui permet aussi bien d’enraciner la nation dans le modèle républicain dans lequel la nation c’est la nature mais c’est aussi la citoyenneté ce qui est la liberté de choisir si on veut, mais une fois qu’on fait entrer la tradition l’identité la vie commune l’histoire commune on donne une autre dimension à cette citoyenneté on donne une dimension nationale qui est la même d’une façon plus complexe la même : les différentes cultures dont le fondamentalisme culturel parle tant, par exemple quand Malcom X et le pouvoir noir aux États-Unis veut prendre tout e la mythique afro-américaine pour défendre la différence avec les blanc américains il reprend un idée de la naturalisation de la culture qui est lié à cette identité profonde dans laquelle le tout forme la base culturelle qui permet à l’individu d’exister et ce tout c’est l’autre volet inacceptable de la position identitaire, essentialiste ou fondamentaliste qui voit la culture comme une unité un bloc comme si par exemple quand nous critiquons la culture occidentale en disant c’est une culture blanche, impérialiste, colonialiste nous oubliions que cette culture a aussi créée les valeurs, de l’universalisme, la possibilité individuelle d’exister les luttes contre le pouvoir et tout, le relativisme des autres cultures c’est une critique interne dans sa propre culture, la culture occidentale a développé une lutte fondamentale contre le pouvoir et c’est une tradition opposée à une autre tradition, quand Max gallo dit “ j’assume tout ” je peux lui répondre “ non tu n’assumes pas tout ! ” parce qu’il y a une tradition conservatrice réactionnaire mais il y a aussi une tradition révolutionnaire dans la culture occidentale, j’assume seulement la tradition révolutionnaire de la culture occidentale . L’idée de concevoir la culture comme une unité premièrement est fausse car il n’existe pas de culture sans conflit interne mais même la culture dite primitive a un degré de complexité moins grande que les cultures chinoise ou autres, ont toutes la contradiction en leur sein, les acquis de type valeur quand les grecs inventent la démocratie ils posent la liberté comme une condition et une conséquence nécessaire de l’égalité tous ces types de valeur deviennent des valeurs de l’humanité toute entière ils ne sont pas posées comme une valeur d’une seule culture ou d’une culture particulière, mais ça c’est fondamentalement un crise interne conflictuelle et de dure lutte propre à la culture, toute culture est ouverte et fragmentée.

Je voudrais finir pour pouvoir donner un espace à la discussion, je dirai seulement cela si nous pensons au problème des différentes cultures et de l’intégration culturelle, nous avons habituellement trois réponses globales je dis trois même si une de ces trois est refoulée, n’est pas prise en considération et est cachée.
La première réponse qui est à la base du mouvement que je viens de citer ici comme une position radicale c’est le multiculturalisme en mosaïque, c’est le modèle de la mosaïque, chaque culture a une politique identitaire propre et ils vivent les unes à coté des autres, l’intégration est rejetée et les valeurs de chaque culture est défendue comme totalité qui donne l’identité de l’individu. Les effets négatifs de cette position sont l’assujettissement de l’individu produit par la relation à sa propre culture.

L’autre réponse à cela c’est traditionnellement le libéralisme ou l’internationalisme abstrait. Le modèle républicain c’est entre les deux, la réponse du libéralisme ou du nationalisme c’est tous les hommes sont égaux nous devons vivre ensemble nous devons construire une culture commune, le libéralisme gomme les différences et essaye d’intégrer dans un espace politique de la démocratie occidentale les différences.
Les critiques du libéralisme sont toutes liées à cette idée de l’abstraction de l’idée de liberté alors que l’on sait que la liberté est historiquement construite. Quand je dis qu’il y a une autre solution du coté de l’universalisme et de l’internationalisme, du cosmopolitisme dans le sens où le territoire n’est pas forcément lié à la culture de façon univoque. Le cosmopolitisme c’est l’altérité assumée, où la solidarité vise l’émancipation. C’est une modalité du vivre ensemble qui pense le lien avec les différences, qui accepte les différences comme un plus dans les relations humaines, où le corps social est le résultat de ce mélange des différences. L’enjeu c’est la construction de l’espace commun qui doit lutter contre l’aliénation au contraire du différentialisme qui implique la soumission de l’individu à la totalité plus l’exclusion. Le combat pour la liberté et l’égalité c’est cette dynamique en construction par la création d’un espace commun, c’est la connivence en vue d’un monde juste

Nous devons faire attention à ne pas opposer relativisme culturel et universalisme. Sans nous en rendre compte nous acceptons un glissement sémantique partisan car relatif s’oppose à absolu, universel s’oppose à singulier. Si on garde cette opposition l’universalisme devient un totalitarisme; Alors que l’universel c’est ce qui est relatif à l’ensembles des humains. Si on reconnaît une valeur universelle cela veut dire que c’est une nécessité pour l’humanité. La notion de liberté n’appartient pas à une culture en particulier, c’est une rationalisation, une construction humaine. Une valeur de ce type c’est une construction historique qui s’est faîte par la lutte. Les valeurs sociales sont toujours historiquement définies, elles sont postulées valeurs universelles, mais ce n’est jamais éternel, c’est là que l’on voit que ce n’est pas un naturalisme, c’est une conception en mouvement.

Le lien entre le racisme et la culture comment se fait-il ? Le concept de passage c’est l’idée républicaine qui définit l’idée d’identité, la réponse commune au deux tendances c’est l’idée de nation. La xénophobie est alors une conséquence de la situation, une réponse politique, sociale, culturelle, etc...

L’exemple qui illustre cela c’est l’affaire du foulard et la défense de la laïcité républicaine. Nous sommes bien face à un conflit de valeurs. C’est la contradiction du libéralisme qui annonce : “ notre culture est la meilleure ” et en conséquence on doit s’intégrer ! A l’avance la relation entre l’individu et la culture est définie, cela exclut la rencontre, on ne laisse pas la liberté à la différence pour s’établir. Dans toute culture on a droit à une multitude de différences pas forcément reconnues, il y a nécessité d’un débat. On constate que l’intégration ou la mosaïque multiculturelle ça ne marche pas. Les modifications perpétuelles de la culture et les emprunts successifs le prouve.

Débat :

Roger Matthieu pose la question d’une population qui veut en écraser une autre, elle prend appui sur la culture. Si on veut résister l’écrasement le maintien de la situation est important.
Edouardo Colombo : Ceci pose la question de la séparation des cultures pour la résistance. L’exemple des femmes est éclairant en particulier aux USA. Les femmes à juste titre critiquent la hiérarchie sociale, puis certaine prônent le replis identitaire et le rejet des valeurs machistes masculines et le replis sur des valeurs féministes. Ceci s’est accompagné d’une reconstruction du féminin et d’un essentialisme sur la définition d’un être femme, le ghetto est le résultat de cette attitude. La défense se fait alors avec les démons traditionnels de la culture. Le problème c’est de savoir comment échapper au repli pour ne pas se retrouver avec une perte. La conscience de l’oppression sexiste peut conduire à une critique globale de l’autorité, un certain nombre d’hommes aussi sont opprimés. La question des quotas pour l’égalité montre aussi l’absurdité des solutions formelles doit-on revendiquer une ouvrière pour un ouvrier, une générale pour un général ?
Le problème c’est celui des bases sinon c’est l’enfermement.

Martine : Quid de la société interculturelle ? Avec le racisme différentialiste il y deux sens possibles, qu’est ce qu’on met dans ce mot (interculturel) ?

Pierre Jourdain : Si on prend l’exemple du CID on voit que c’est un choix, c’est le débat insertion assimilation qui est en cause. Il s’agit d’une interactivité, il n’y a pas de règles générales, les modifications sont perpétuelles.

E. C. : Que met-on dedans ce mot ? Il y a bien un mélange dans la culture entre le peuple, la domination, la nation, même parfois la religion. L’important je crois c’est de ne pas fermer les choses avant que ça commence, on ne doit pas se bloquer sur une quelconque exclusion sinon c’est le ghetto. Si on prend le cas de la culture religieuse, on voit bien qu’il est impossible de la détruire de l’extérieur, si cette culture est en plein renouveau c’est qu’il s’agit d’une façon de voir le monde, pour la combattre il faut augmenter les échanges culturels.

Claude soulève la question de la forteresse blanche.

E. C. : Le problème c’est qu’elle est attaquée de l’intérieur et que ceci renforce le sentiment d’attaque extérieure. Dans l’histoire la culture dominante a été souvent mise en cause de l’intérieur, on peut citer le mouvement ouvrier, la lutte pour la liberté de conscience ou de comportement sexuel, les luttes des femmes, les luttes des minorités. Les mises en cause peuvent être extérieures comme c’est le cas dans les luttes anticolonialistes ou anti-impérialistes. Évidemment le repli interne tente de résoudre les mises en cause.

Aujourd’hui on assiste à un renforcement des conflits externes avec l’ouverture du marché, mais on voit bien que si le niveau de vie des ouvriers monte cela dépend de l’impérialisme. Ensuite cela crée des tensions énormes avec l’immigration. Quand on voit que 16% de la population mondiale utilise 90% de l’énergie du monde on comprend le scandale. Le besoin de déplacement est crée par cela, le marché s’ouvre et ça explose partout, la situation devient insoutenable un peu partout. La réponse des dominants c’est la frontière aussi bien aux USA qu’en Europe. Mais le résultat c’est la perte de civilisation humaniste. Alors soit il y a une modification interne à nos société soit on évolue vers un fascisme.

La question du sens de l’universel est posé. Ce n’est pas une abstraction, certaines valeurs ont un sens pour toute l’humanité et ces valeurs ne peuvent pas être particulière à une culture. On les propose à toute l’humanité, l’exemple de la démocratie inventée en Grèce le montre, c’est bon encore aujourd’hui pour nous. Par contre nous devons sortir de la mythification des valeurs républicaines. Certes la lutte pour la laïcité, la lutte contre la religion a une valeur universelle, la critique de la religion a un contenu universel. La religion c’est la loi fondée en extériorité qui implique que les humains se soumettent à une certaine hiérarchie. Les valeurs que nous pensons universelles sont le résultat d’une décision, c’est un choix humain qui vient en intériorité dans l’humanité, qui est autoréférentiel.

La solution c’est de ne pas tout assumer, dans l’identité française par exemple il y a à la fois la Vendée réactionnaire et La Commune. Doit-on reprendre la notion de patrie ? Je crois qu’il faut refuser toute idée d’identité nationale basée sur le fondamentalisme, une identité qui serait close et unicitaire.
La différence en rapport avec l’uniformité demande qu’on s’interroge sur quelle différence est importante. Chez les humains la différence existe vraiment, il s’agit de savoir de quel degré de différence on parle pour ne pas suivre Alain De Benoist et la Nouvelle Droite dans son utilisation du droit à la différence.

Pour moi le droit à la différence c’est le droit à l’égalité dans l’espace commun !

Compte-rendu Philippe Coutant. revu par Edouardo Colombo, Paris Fasti Mars 97