Origine : http://www.syndicat-magistrature.org/article/791.html
Quand la police ignore le droit, il faut aussi parler de zones de
non-droit. La Ligue des droits de l´homme, le Syndicat de
la magistrature et le Syndicat des avocats de France viennent de
publier leur enquête relative à l´application
de la loi sur le racolage.
En 2003, cette loi devait servir à lutter contre le proxénétisme.
Une circulaire du garde des sceaux imposait même de rechercher
le proxénétisme dans chaque procédure de racolage.
Elle n´a guère été appliquée.
Aucun décret n´est intervenu pour organiser la protection
de celles qui ont dénoncé leur proxénète.
Le préfet de police a même refusé un titre de
séjour à certaines prostituées qui avaient
pourtant utilement collaboré avec la police : elles n´avaient
pas promis de renoncer à la prostitution.
La lutte contre le racolage se confond avec la lutte contre les
prostituées ; la lutte contre les prostituées tient
lieu de lutte contre le proxénétisme. Et après
trois ans d´imposture, l´Observatoire national de la
délinquance constate que l´activité des réseaux
en provenance de l´Europe de l´Est, des Balkans et de
l´Afrique se poursuit.
Mais au quotidien, les prostituées interpellées sont
menottées, insultées, fouillées à corps
avant d´être placées en garde à vue. Quant
aux transsexuelles, elles sont le plus souvent totalement déshabillées,
humiliées, scrutées comme des bêtes curieuses.
Et il n´est pas rare que la garde à vue se prolonge
bien au-delà des nécessités de l´enquête.
Les condamnations sont peu nombreuses, car la justice fait une
application stricte de la loi pénale. Néanmoins, les
interpellations se multiplient. C´est pour la police un moyen
facile de gonfler les statistiques.
La qualité d´une société se révèle
au sort qu´elle réserve aux plus vulnérables.
Pour les prostituées, un ordre injuste et hypocrite s´est
mis en place. Les principes qui fondent l´Etat de droit sont
méprisés : tout se passe comme si la garantie des
droits, le respect de la dignité des personnes, la présomption
d´innocence ne les concernaient pas.
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