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Origine : http://marcalpozzo.blogspirit.com/slavoj_zizek/
Il nous reste deux écrivains capables de décrypter
avec intelligence la « postmodernité » : Michel
Houellebecq et Maurice G. Dantec. Ces deux-là, armés
de leur talent respectif, et de leur vision décalée
jetée sur notre époque en forme de « fin de
l’histoire », diffusent leurs idées à
travers de sombres et lumineux romans. En philosophie, il nous reste
également un grand penseur de la « postmodernité
» : celui-ci nous vient de l’Est, et répond au
nom de Slavoj iek. Jusqu’au dernier ouvrage de
ce psychanalyste et philosophe, c’est dans l’ignorance
quasi totale des Français, que la Slovénie abritait
l’un des intellectuels les plus repris dans le monde, et déjà
culte en Europe de l’Est et aux États-Unis. Mais aujourd’hui,
depuis la parution de son dernier essai chez Flammarion, c’est
chose réparée.
Le nouvel opus de Slavoj iek, Bienvenue dans le désert
du réel[1], parait ces jours-ci. Voici quelques lignes de
présentation de l’éditeur Flammarion : «
Dans ces cinq essais, l'auteur revient sur les évènements
du 11 septembre dans une approche politique et psychanalytique.
Il explique pourquoi la capitalisme est un intégrisme et
comment les Etats-Unis ont encouragé l'émergence de
l'intégrisme musulman et analyse la façon dont cet
évènement a été exploité notamment
pour justifier et légitimer la torture ». On retrouve
là l’obscénité de la société
du spectacle, de la communication, des simulacres. La dérive
de notre démocratie est-elle entamée ? Celle qui prône
fièrement une « tolérance universelle »
d’un côté, tout en excluant et en inventant l’homme
sans droits de l’autre.
Intolérable tolérance
Comment alors penser dans les décombres de notre idéal
des lumières ? Quelle méthode de combat ? Comment
survivre à cette « tolérance universelle »
aux accents totalitaires ? Seule solution envisageable : émettre
une forte dose d'intolérance nécessaire pour élaborer
une critique pertinente de l'ordre présent des choses. Cette
idée « géniale » de Slavoj iek
(prononcer « slavoï jijèk ») est d’autant
plus problématique que l’époque actuelle tend
à diaboliser toute pensée qui chercherait à
s’élever au-delà d’une norme balisée
et « bien pensante » élaborée par des
censeurs de la morale, gardiens de la « tolérance »
et du « politiquement correct ». Pour le comprendre,
il suffit de se référer à la mise au pilori
récente de Maurice G. Dantec après son entrée
en dialogue avec les Identitaires. Raison donc pour laquelle il
semble nécessaire de reposer derrière Slavoj iek
la définition même des termes d'une véritable
politique d'émancipation.
Car avez-vous déjà réfléchi à
ce qui pouvait bien se cacher réellement derrière
le langage feutré de la tolérance contemporaine ?
Si la réponse ne vous vient pas naturellement, Slavoj iek
peut vous y aider. Regardez seulement ce qui se dissimule derrière
ce principe d'indulgence : un processus de dépolitisation
généralisé. Un multiculturalisme dépolitisé
qui est la nouvelle idéologie du capitalisme global. Cette
dénonciation de la supercherie profondément hypocrite
qui se retrouve dans l'idée bombardée tout azimut
aujourd’hui, que le plus grand danger réside dans les
différentes formes d'intolérance, de nature ethnique,
religieuse ou sexuelle, se présente comme la plus brillante
dénonciation des disfonctionnements de nos sociétés
modernes. Exit donc, le ton professoral des ouvrages universitaires
saturés d’un jargon philosophique à l’usage
des initiés. Certes, la prose de Slavoj iek est
radicale, mais c’est pour nous amener à fermement nous
interroger sur une époque fertile en contradictions. Exit
également l’exigence moderne ultime du « politiquement
correct ». Ni marketing philosophique comme l’initièrent
les « nouveaux philosophes », ni école philosophique,
la pensée de Slavoj iek échappe aux travers
d’une philosophie de l’instantanée, à
une pensée imprécise car utilisant ce que Gilles Deleuze
dénonçait à propos des « nouveaux philosophes
», à savoir les « gros concepts »[2].
Slavoj iek initie une méthode : penser radicalement.
Ainsi se risque-t-il sans craintes à reposer les définitions
exactes de termes parasités par un vocabulaire intellectuel
qui rend l’usage de notions tels les mots « totalitarisme
» ou « proto-fascisme »[3] impropre, termes utilisés
aujourd’hui de façon très fréquente pour
diaboliser une thèse mal acceptée ou dérangeante.
Par là, il s’agit de réaffirmer l’usage
des passions politiques fondées sur la discorde, l’usage
de l'intolérance pour questionner le totalitarisme mou annoncé
par Tocqueville, de nos démocraties libérales, penser
à coups de marteau pour échapper aux glissements sémantiques
orchestrés par la nouvelle idéologie du capitalisme
global. Notre époque à besoin d’une boite à
concepts ; une boite à pharmacie et idées pour affronter
l’ordre présent des choses :
« À l’aune des critères politiques traditionnels,
nous vivons sans aucun doute des temps étranges. Penchons-nous
sur la figure paradigmatique de l’extrême droite d’aujourd’hui,
les milices fondamentalistes millénaristes aux Etats-Unis.
N’apparaissent-elles pas souvent comme une version caricaturale
des groupuscules séparatistes de l’extrême gauche
militante des années soixante ? Dans les deux cas, nous avons
affaire à la logique anti-institutionnelle radicale : l’ennemi
ultime est l’appareil d’État répressif
(FBI, armée, système judiciaire) qui menace la survie
même du groupe, organisé comme un corps extrêmement
discipliné afin d’être capable de résister
à cette pression. L’exact contraire de cela, c’est
un gauchiste comme Pierre Bourdieu qui défendait l’idée
d’une Europe unifiée en tant qu’« État
social » fort, « garantissant le minimum de droits sociaux
et la sécurité sociale contre l’offensive de
la globalisation » : il est difficile de s’abstenir
d’ironiser devant un intellectuel d’extrême gauche
élevant des remparts contre le pouvoir corrosif global du
Capital tant loué par Marx. »[4]
Le modèle de tolérance multiculturelle dominant auquel
nous avons aujourd’hui affaire n’est pas si innocent
qu’on veut le faire croire ; le monde post-politique qui est
le nôtre s’appuie sur un pacte social basique à
partir duquel les décisions sociales ne sont plus l’objet
de débats et conflits politiques. Cela entraîne Slavoj
iek à utiliser plusieurs outils philosophiques
afin de déconstruire les idées reçues et mettre
en lumière le marasme idéologique dans lequel nous
baignons : ses principaux outils sont la dynamite, le paradoxe,
la conciliation des contraires, sans compter l’humour, ? humour
que détenait déjà Socrate en son temps.
Le capitalisme global
Penser radicalement son époque, c’est avant tout penser
« le nouvel ordre mondial ». A savoir, le capitalisme
global. « Le phénomène habituellement désigné
du nom de « nouvel ordre mondialisé » et la nécessité,
par la « mondialisation », de s’en accommoder.
Pour le dire franchement, si le nouvel ordre mondial émergeant
est le système non négociable qui est imposé
à tous, alors l’Europe est perdue. »[5]
Mais que veut l’Europe ? A-t-elle un objet ? Une finalité
qui lui serait propre ? Les questions restent ouvertes quant à
cette Union européenne dont l’identité culturelle
est profondément menacée par « l’«
américanisation » culturelle comme le prix à
payer de leur immersion dans le capitalisme global. »[6] L’erreur
que tendent à faire certains est de penser que le monde nouveau
qui s’annonce et dans lequel nous entrons est universel. Faux,
dit iek. Il n’est pas universel, il est «
global ». Dans cet ordre nouveau, nous ne perdrons rien des
particularismes dans lesquels chacun trouve une place bien définie.
Car, la globalisation ne menace pas les particularismes, elle ne
menace que l’universalisme.
De fait, « la véritable opposition aujourd’hui
n’est pas celle existant entre le Premier Monde et le Tiers-monde,
mais existant entre la Totalité du Premier Monde d’un
côté, le Tiers-monde (l’Empire global américains
et ses colonies) et le Second Monde restant (l’Europe) de
l’autre. »[7]
De fait, il s’agit de penser l’Europe. Non pas comme
le firent les « biens pensants » ? encore eux ! ? durant
toute la campagne du « Oui » qui ne nous laissaient
aucune alternative dans un choix qui se révélait être
un « non choix » ! Il faut être sévère
à l’égard de la vision de l’Europe telle
qu’elle est envisagée par nos élites politiques
: Que veut l’Europe ? Comment faire pour qu’elle ne
débouche pas sur une arrogance à l’américaine
? Un dialogue extrêmement critique avec ce projet s’impose.
Car comment se permettre de critiquer les États-Unis sans
critiquer dans un premier temps l’Europe ?[8] Pour cela, une
fois de plus, il s’agit de « penser radicalement ».
Ce qui semble impossible aujourd’hui selon Slavoj iek
dans l’état de la démocratie actuelle.
« A l’instant où l’on présente
le plus petit signe d’engagement politique dans un projet
politique entendant remettre sérieusement en question l’ordre
existant, la réponse fuse immédiatement : “Aussi
chargé de bonnes intentions cela soit-il, tout cela finira
nécessairement par un nouveau Goulag !”»[9]
Si l’on veut philosopher à coups de marteau, il y
a alors un certain nombre de bonnes questions à se poser
: Sommes-nous en guerre, et avons-nous un ennemi ? Pour quelles
raisons adorons-nous tous détester Jorg Haider ? Comment
et pourquoi Vaclav Havel a abdiqué face à la logique
du capitalisme ? Comment pouvons-nous nous approprier l’histoire
européenne d’une manière radicalement nouvelle
? Peut-être pourrons-nous alors créer une Europe à
visage humain contre la pire des tentations, « une mondialisation
à visage européen »[10].
La société du spectacle
Il est d’autant plus nécessaire de se poser toutes
ces questions que le spectacle continue. « La réalité
n’a pas fait irruption dans l’image, c’est l’image
qui a fait irruption dans notre réalité »[11].
Cette réflexion de iek en appelle une autre :
le réel est-il réel ? N’y a-t-il pas un glissement
dans notre perception du réel, qui tient du fantasme, des
peurs, de l’imaginaire ? Faux-semblant, simulacres, apparences,
manipulation du réel par le détournement de l’image.
Tout cela ressemble à une constatation réaliste et
avérée.
La crise d’aujourd’hui, est bien une crise de la représentation.
Dans cette « passion du réel »[12], on trouve
une passion pour les faux-semblant. Lorsque le chef des rebelles,
Morpheus, accueille Néo, le héros (malgré lui)
du film Matrix, il prononce cette phrase curieuse : « Bienvenue
dans le désert du réel ». C’est ainsi
que l’on peut probablement décrire le monde réel
que Néo croyait encore vrai jusqu’à ce qu’il
réalise le simulacre, engendré par un gigantesque
ordinateur, d'un univers depuis longtemps dévasté
par une guerre atomique.
« Le désert du réel » ou le réel
falsifié ! Tout est falsifié : de la liberté
d’expression, jusqu’à la tolérance universelle.
Dans notre époque « postmoderne », le nouvel
ordre mondial, et le délitement de la démocratie dans
laquelle l’impasse nihiliste, son idéologie multiculturaliste,
sa tolérance posée comme un mot d’ordre doivent
être critiquées, voire combattues. Car cette subjectivation
mondialisée a englouti la subjectivité elle-même.
L’homme est asservi à la dictature de la tolérance,
de l’expression de soi, de la liberté de penser : demander
à un esclave « de s’interroger sur son désir
d’être libre et il ne se libérera pas »[13].
Nous sommes entré dans l’ère postmoderne, ère
du spectaculaire : « spectacle théâtral des défilés
staliniens aux actes terroristes spectaculaires »[14]. Que
ce soit dans sa réalité consumériste totale,
dans la vie sociale, dans sa vie personnelle, l’homme occidental
est aux prises des caractéristiques du spectacle : une hyperréalité
irréel privé de substance matérielle. L’ère
post-politique a ainsi dilué la politique, la gestion de
l’économie, le projet des lumières, l’imaginaire
occidental dans ses représentations idéologiques durables
telles Hollywood, le Pentagone, ou encore les Gauches européennes
et américaines. Tout est déspiritualisé, dématérialisé,
utilitariste. On peut penser à l’impuissance des pacifistes,
et l’hypocrite empathie pour la souffrance du peuple irakien
que ressentirent de nombreux médias, de nombreux régimes
démocratiques alors qu’en Irak la guerre continue et
le terrorisme grandit et sévit presque quotidiennement[15].
Cela relève encore et toujours de la « tolérance
multiculturelle » que nous prétendons tous défendre,
cet hypocrite respect de l’autre, des minorités, etc.
qui masque en réalité une terrible indifférence,
voire la crainte du harcèlement de l’autre. «
Le totalitarisme du XXème siècle et ses millions de
victimes nous montrent bien le danger qu’il y a à suivre
jusqu’au bout ce qui nous apparaît comme une «
action subjectivement juste ». »[16] Il suffit d’observer
le détournements des mots, les abus de langage, la puissance
de la communication sur le discours, pour comprendre l’horizon
du désert moderne : voilà notre siècle, une
époque troublée et saturée d’informations
toujours contradictoires, trop souvent « fausses ».
Prenez l’Irak, ce « chaudron cassé », selon
les mots mêmes de Slavoj iek. Rapide explication
dès son introduction à l’ouvrage : « Afin
de mettre à jour l’étrange logique des rêves,
Freud recourait à la vieille blague du chaudron cassé.
(1) Je ne t’ai jamais emprunté un chaudron, (2) Je
te l’ai rendu intact, (3) Le chaudron était déjà
cassé lorsque tu me l’as confié. Naturellement,
une telle succession d’arguments inconséquents confirme
exactement ce qu’ils sont censés nier – le fait
que je t’ai rendu un chaudron cassé… »
Cette société du spectacle, que l’on peut sans
mal reconnaître dans les inconséquences de l’administration
Bush à propos de la guerre en Irak, avec l’argument
par exemple du « lien existant entre le régime de Saddam
et Al-Qaeda (qui fut bientôt abandonné), par la force
des choses, au profit de celui de la menace représentée
par ce pays pour la région, menace qui pesa ensuite sur l’humanité
entière (mais surtout sur les Américains et les Anglais),
précisément sous la forme des armes de destruction
massive »[17], nous oblige naturellement à nous interroger
sur ce que l’on doit conserver de la politique américaine
qui a fait suite aux attentats terroristes du 11 septembre 2001.
D’autant que « tout ce que nous savions provenait des
médias officiels »[18]. Pouvons-nous dire que nous
sommes entrés avec les attentats et la politique mise en
place au lendemain des attaques dans quelque chose de plus fantastique
encore que ces tours qui tombent : « le spectre d’une
guerre « immatérielle », où l’attaque
est invisible et le virus, les poisons, partout et nulle part »[19]
?
Slavoj iek s’interroge sur la nature de la nouvelle
guerre invisible dans laquelle l’occident à mis les
pieds : « Rien ne se passe au niveau de la réalité
matérielle visible, aucune explosion massive ; pourtant l’univers
connu commence de s’effondrer, la vie se désintègre.
»[20]
Quelle est donc la nouvelle alternative qui est nous est proposée
depuis cette entrée dans un réel dont les frontières
avec le fantasme, l’irréel, le fantastique sont de
plus en plus fragiles. Nous ne sommes pas frappés par la
force du réel, mais par la force de l’irréel.
N’avons-nous pas déjà assisté des milliers
de fois aux attentats du 11 septembre ? « Où avons-nous
vu cela mille fois ? »[21] Slavoj iek parle alors
de « l’effet du réel ». Que dire des multiples
mensonges de l’administration Bush, du pouvoir des médias,
de la réalité de ces attentats, de leurs impacts sur
nos modes de vie ? « C’est la conscience de vivre dans
un univers artificiel et isolé qui entraîne l’idée
qu’un agent mauvais nous menace tout le temps de destruction
totale. »[22] Avons-nous atteint comme le prévoyait
Samuel P. Huntington, un véritable choc des civilisation,
ou plutôt un choc à l’intérieur des civilisations
?
« Le vrai choc des civilisations ne pourrait être qu'un
choc au à l'intérieur de chaque civilisation. L'alternative
idéologique opposant l'univers libéral, démocratique
et digitalisé, à une radicalité prétendument
"islamiste" ne serait en définitive qu'une opposition,
masquant notre incapacité à percevoir les vrais enjeux
politiques contemporains. Le seul moyen de nous extraire de l'impasse
nihiliste à laquelle nous réduit cette fausse alternative
est une sortie de la démocratie libérale, de son idéologie
multiculturaliste, tolérante et post-politique. »[23]
Ainsi les vrais enjeux politiques contemporains tendent à
masquer combien nos sociétés qui s’enorgueillissent
à défendre la liberté de penser, le droit des
personnes, la liberté d’entreprendre, la défense
de la démocratie, ont mis en place un système de plus
en plus serré de contrôle sociaux. Peu importe le degré
d’expression qu’il nous a été donné
en aval par ces sociétés dites « démocratiques
», il nous manque en amont les mots pour le dire, tous prisonniers
d’un système forclos qui nous enferme dans un cadre
qui est par avance prédéfini, malgré les fausses
alternatives qu’il prétend offrir.
« Et si le vrai problème n’était pas
la fragilité du statut des exclus mais plutôt qu’au
niveau le plus élémentaire, nous soyons tous «
exclus », au sens où cette position zéro, celle
de l’exclusion généralisée, est devenue
l’objet de la biopolitique, et que le possible politique et
le droit du citoyen ne nous sont accordés que dans un geste
second, conformément aux attentions stratégiques du
biopouvoir ? »[24]
Les accents foucaldiens de Slavoj iek, nous emmènent
de l’Homo sucker, celui qui croit se jouer du système
alors qu’il n’est que le jouet du système, à
l’homo sacer, la parfaite figure de l'ennemi politique forclos
dans l'espace politique. Des individus sans aucun droit. Nous retombons
là dans la barbarie, celle d’une démocratie
qui exclut. Des sans-papiers en France aux ghettos afro-américains
aux Etats-Unis. « Homo sacer qui, morts ou vifs, en tant qu’êtres
humains, ne font pas partie de la communauté politique »[25].
Le constat est amer : notre réelle acceptation de l’autre
ne produit finalement que du « vide » car nous n’acceptons
l’autre que si cet autre nous ressemble, mais cette fausse
acceptation masque en réalité l’absence d’idéologies
qui étaient naguère nos chaises roulantes.
A la fois philosophe mais aussi psychanalyste, les analyses de
Slavoj iek, en deviennent d’autant plus intéressantes
qu’elles dévoilent un autre aspect de notre nouvel
ordre mondial qu’il dit façonné par des investissements
pulsionnels et idéologiques. L’examen des lendemains
qui déchantent du 11 septembre 2001 est alors l’occasion
pour iek, de souligner combien nos rapports avec l’islam
relèvent d’un fonctionnement particulier de nos sociétés
capitalistes et démocratiques : depuis la chute du mur de
Berlin, et l’effondrement du pire ennemi du capitalisme qu’était
autrefois le communisme, l’occident, et particulièrement
la fière Amérique, ne laissent à ses concitoyens
que cette seule alternative : le capitalisme ou l’islamisme.
Choc des civilisations ou choc des idéologies ? Choc des
cultures ou plutôt choc des intégrismes, des dictatures,
des totalitarismes ? Comment sortirons-nous de l’impasse ?
Contre la pensée unique, l’intoxication volontaire
des masses par la société du spectacle, il ne devrait
y avoir de maison pour la tolérance. Beau retour donc dans
les « simulacres du réel », une réalité
qui nous prépare un capitalisme « mondialisateur »
triomphant ou peut-être à un désastre total…
Mehdi Belhaj Kacem a sans doute raison : « On ne devrait
pas avoir à présenter Slavoj iek. On ne
devrait pas avoir à apprendre aux lecteurs français
le nom de l’intellectuel le plus influent aux États-Unis
depuis Jacques Derrida. » En effet ! Le style direct de Slavoj
iek, et son ironie feinte à la Socrate en font
un penseur inimitable, un écrivain au regard fin et rigoureux
qui décrypte avec une pertinence, et une originalité
de toute première catégorie une actualité et
une époque que l’on tait dans les quotidiens et les
journaux de 20 heures.
Bibliographie indicative :
Slavoj iek a déjà publié en français
: Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Lacan sans jamais
oser le demander à Hitchcock (Paris, Navarin, 1988) ; Ils
ne savent pas ce qu’ils font. Le sinthome idéologique
(Paris, Point Hors Ligne, 1990) ; Un essai sur Schelling : le reste
qui n’éclôt jamais (Paris, Harmattan, 1996) ;
Le spectre rôde toujours. Actualité du Manifeste du
parti communiste (Paris, Nautilus, 2002) ; La subjectivité
à venir, Plaidoyer en faveur de l’intolérance
et Que veut l’Europe ? (Castelnau-le-Lez, Climats, 2004 et
2005), ainsi que Lacrimae rerum, essais sur Kieslowski, Hitchcock,
Tarkovski et Lynch (Paris, Éditions Amsterdam, 2005). Et
tout récemment, Bienvenue dans le désert du réel,
(Paris, Flammarion, 2005).
Cet article a été publié pour la première
fois dans la revue La Presse Littéraire n°3 de février
2006.
[1] Paris, Flammarion, 2005.
[2] « Je crois que leur pensée est nulle. Je vois
deux raisons possibles à cette nullité. D’abord
ils procèdent par gros concepts, aussi gros que des dents
creuses, LA loi, LE pouvoir, LE maître, LE monde, LA rébellion,
LA foi, etc. Ils peuvent faire ainsi des mélanges grotesques,
des dualismes sommaires, la loi et le rebelle, le pouvoir et l’ange.
En même temps, plus le contenu de pensée est faible,
plus le penseur prend d’importance, plus le sujet d’énonciation
se donne de l’importance par rapport aux énoncés
vides (« moi, en tant que lucide et courageux, je vous dis...,
moi, en tant que soldat du Christ..., moi, de la génération
perdue..., nous, en tant que nous avons fait mai 68..., en tant
que nous ne nous laissons plus prendre aux semblants... »).
Avec ces deux procédés, ils cassent le travail. »
Gilles Deleuze, Deux régimes de fous, Paris, Editions de
minuit, 2003.
[3] « Le prédicat « proto-fasciste » lui-même
devrait être abandonné : c’est l’exemple
même du pseudo-concept dont la fonction est de bloquer toute
analyse conceptuelle. » Slavoj iek, Bienvenue
dans le désert du réel, Paris, Flammarion, 2005.
[4] Slavoj iek, Castelnau-le-Lez, Climats, Plaidoyer
en faveur de l’intolérance, 2004.
[5] Slavoj iek, Bienvenue dans le désert du
réel, Paris, Flammarion, 2005.
[6] Slavoj iek, Que veut l’Europe ? Réflexion
sur une nécessaire réappropriation, Castelnau-le-Lez,
Climats, 2005.
[7] Slavoj iek, Op. cit.
[8] Toutes ces questions sont développées dans :
Que veut l’Europe ? Réflexion sur une nécessaire
réappropriation, Castelnau-le-Lez, Climats, 2005.
[9] Slavoj iek, Op. cit.
[10] Slavoj iek, Bienvenue dans le désert du
réel, Paris, Flammarion, 2005.
[11] Slavoj iek, Bienvenue dans le désert du
réel, Paris, Flammarion, 2005.
[12] Alain Badiou, Le siècle, Paris, Le Seuil, 2005.
[13] Gilbert Keith Chesterton, cité par Slovoj Zizek, Op.
cit.
[14] Slavoj iek, Op. cit.
[15] Ce problème est admirablement développé
dans Irak, le chaudron cassé, Castelnau-le-Lez, Climats,
2005.
[16] Bienvenue dans le désert du réel, Paris, Flammarion,
2005.
[17] Slavoj iek, Irak, le chaudron cassé, Castelnau-le-Lez,
Climats, 2005.
[18] Slavoj iek, Bienvenue dans le désert du
réel, Paris, Flammarion, 2005.
[19] Slavoj iek, Op. cit.
[20] Slavoj iek, Op. cit.
[21] Slavoj iek, Op. cit.
[22] Slavoj iek, Op. cit.
[23] Slavoj iek, Op. cit.
[24] Slavoj iek, Op. cit.
[25] Slavoj iek, Op. cit.
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21 juin 2005
Il faut penser l’Europe radicalement !
medium_zizek.jpg
« Oui, l'Europe serait la panacée contre tous les maux.
En attendant, l'atmosphère est de plus en plus anti-élitiste.
C'est dans cette perspective qu'il faut souligner le rôle
particulier de l'Internet dans l'organisation du non français.
Sur le Réseau se propageaient les rumeurs les plus paranoïaques,
mais les utilisateurs du Net avaient la conviction jubilatoire d'être
plus malins que la presse écrite. Alors que celle-ci était,
dans sa majorité, sage et proeuropéenne, le Net était
presque entièrement négatif. Et cette négativité
était fondée sur la célébration de sa
propre intelligence. C'est pour cela que le non français
est en partie un non d'enfants gâtés et d'enfants terribles.
» Peter Sloterdijk
Dans le débat contradictoire qui survient au lendemain du
grand raz-de-marée à propos de la Constitution européenne,
dans la cacophonie générale, dans laquelle on entend
désormais beaucoup d'intellectuels pro-oui prendre la parole
pour accabler le peuple français, peuple de pauvres plaisantins,
de farceurs, d'enfants gâtés, de décérébrés,
cherchant par ailleurs à utiliser les difficultés
récentes de la communauté européenne à
retrouver une cohérence, afin de dénoncer l'irresponsabilité
notoire des tenants du Non, nous cherchions une voix différente,
un penser autre, radical...
Or, il en fut une. Celle d'un philosophe contemporain : Slavoj
Zizek. Déjà l’une des voix majeures du débat
sur la post-modernité, sa pensée est forte, en ce
sens qu’elle se présente comme une grille de lecture
pertinente de notre époque trouble et complexe, et plus encore
qu’elle offre un univers conceptuel riche, volontiers dérangeant
et très souvent provocateur, sans jamais manquer de lucidité
ou de finesse, tant sa lecture est aiguë et rigoureuse à
propos de notre ère dans le corpus philosophico-politique
actuel.
Slavoj Zizek s’interroge autour de cette Europe précisément
celle de l’Union européenne, dont l’identité
culturelle risque d’être profondément menacée
par « l’« américanisation » culturelle
comme le prix à payer de leur immersion dans le capitalisme
global. »
Or, sa thèse est la suivante : le monde nouveau qui s’annonce
et dans lequel nous entrons est global, pas universel. Cet ordre
nouveau, nous ne devrions le nier, car nous ne perdrons rien dans
ce nouveau monde à venir des particularismes dans lesquels
chacun trouve une place bien définie. La globalisation ne
menace pas les particularismes, elle ne menace que l’universalisme.
De fait, « la véritable opposition aujourd’hui
n’est pas celle existant entre le Premier Monde et le Tiers-monde,
mais existant entre la Totalité du Premier Monde d’un
côté, le Tiers-monde (l’Empire global américains
et ses colonies) et le Second Monde restant (l’Europe) de
l’autre. »
Il s’agit donc de penser l’Europe. C’est ce que
Slavoj Zizek tâche de faire par sa fine capacité à
poser les bons problèmes. Et il nous met en garde : il faut
être sévère à l’égard de
la vision de l’Europe telle qu’elle est envisagée
par nos élites politiques : Que veut l’Europe ? Comment
faire pour qu’elle ne débouche pas sur une arrogance
à l’américaine ? Un dialogue extrêmement
critique avec ce projet s’impose. Car comment se permettre
de critiquer les États-Unis sans critiquer dans un premier
temps l’Europe ?
Pour cela, il s’agit de « penser radicalement ».
Ce qui semble impossible aujourd’hui selon Slavoj Zizek dans
l’état de la démocratie actuelle.
Penser radicalement ? En effet, la formule est brillante. Penser
en marge ! Penser en contre ! Ou tout juste penser par soi-même
! Re-mettre en doute ! Et se poser les bonnes questions !
Voilà donc ce que le peuple français, peuple d’«
enfants gâtés » selon la formule de Sloterdijk
lui-même aurait fait au grand dame de la classe politique,
et précisément à son corps défendant.
N’avons-nous pas vu tout un tas de « spécialistes
» ou consacrés tels débouler manu militari sur
les plateaux de télévision, sur les antennes de radio,
dans la presse nous expliquer pourquoi le choix proposé devenait
un « non choix », puisque la seule réponse, selon
eux, acceptable, salvatrice, « raisonnable » était
: « Oui » !
Pas de chance, le peuple s’est mis subitement à réfléchir.
A se poser les bonnes questions. Les questions liées à
la politique intérieure (d’où la mini-émeute
électorale ! Oui !) mais également à l’Europe
et le projet européen lui-même. Ce que la classe (décadente)
politique n’avait pas anticipé, ce fut le rôle
qu’allait jouer l’Internet, -vrai jouet entre les mains
d’enfants gâtés jusqu’à plus soif
?- véritable machine de guerre, arme de destruction massive
des illusions de l’élite dominante.
Contre la fronde, et dans un débat quasi-hystérique
ou les vrais problèmes sont finalement noyés au final,
cet article signé Zizek paru dans The Guardian vient à
point nommé pour nous révéler des points différents,
hors des sentiers battus et rabattus ces jours derniers, quelques
enseignements certainement valables à tirer du terrible «
Non » à la ratification du traité de la Constitution
européenne. Loin des cris d'alarme, des vociférations
pétaradantes. Contre les agitateurs d’épouvantails,
les cassandres, les acteurs propagandistes qui sévirent durant
la campagne pour faire gagner le « Oui » et qui, désormais,
en chiens du ressentiments, tâchent par tous les moyens de
faire naître en chaque citoyen porteur du « Non »,
mauvaise conscience et inquiétude. Slavoj Zizek nous parle,
et recentre le débat.
Je vous le cite in extenso.
« La constitution est morte. Vive le retour au politique,
par Slavoj Zizek
Quand les commentateurs disent que la victoire du non délivre
un message des plus effrayés, ils se trompent. La vraie peur
que nous rencontrons est celle que le non provoque dans la nouvelle
élite politique. C’est la peur de ne plus pouvoir convaincre
si facilement les gens d’adopter leur vision " post-politique
"
Il existe chez les Amish une institution qu’ils nomment RUMSPRINGA.
Leurs enfants sont d’abord soumis à une stricte discipline
familiale. A 17 ans, ils sont libres. On leur permet, on les y encourage
même, de partir et de faire l’expérience du monde
moderne : conduire une voiture, écouter de la musique pop,
regarder la TV, s’adonner à la boisson, aux drogues,
à une sexualité débridée.
Au bout de deux ans, ils doivent décider : ou rentrer et
devenir un membre à part entière de la communauté
amish, ou partir à jamais et devenir des américains
ordinaires.
Mais, bien loin d’être libérale, et de permettre
aux jeunes gens de choisir vraiment librement, une telle solution
est biaisée de la façon la plus brutale qui soit.
Pour autant qu’il en soit un, le choix est factice. Un adolescent
amish, après des années de discipline pendant lesquelles
il a imaginé les plaisirs interdits de l’ailleurs,
ne pourra faire autrement que d’aller aux extrêmes dès
qu’il sera dehors. Il voudra tout essayer, le sexe, les drogues
et la boisson. Et, puisqu’il vivra des expériences
qu’il ne sait modérer, il en deviendra malade. Il connaîtra
en retour une anxiété insupportable. Aussi il y a
gros à parier qu’au bout des deux ans, il retournera
dans le giron protecteur de sa communauté.
Personne ne s’étonnera que 90% des enfants d’amish
agissent ainsi.
C’est une illustration parfaite des difficultés qui
accompagnent l’idée d’un " libre choix ".
On donne, certes, aux adolescents amish la possibilité d’un
libre choix. Mais ils sont mis dans des conditions telles, que le
choix lui-même n1est pas libre. Le libre choix effectif demanderait
qu’ils connaissent clairement toutes les options. Mais, pour
ceci, il faudrait qu’on les retire de la communauté
amish dans laquelle ils sont immergés.
Quel rapport cela a-t-il avec le non français, qui continue
à faire des vagues et a booster derechef les Hollandais,
dont le pourcentage à rejeter la constitution a été
encore supérieur à celui des Français ? Tout.
On a traité les votants exactement comme les adolescents
amish, on ne leur a pas donné un choix symétrique
et clair. Les termes même du choix ont privilégié
le oui. L’élite a proposé au peuple un choix
qui, de fait, n’en était pas un. On demandait au peuple
de ratifier l’inévitable. Les média et l’élite
politique ont présenté l’alternative comme un
choix entre connaissance et ignorance, entre expertise et idéologie,
entre une gestion post-politique et les vieilles passions politiques
de droite et de gauche.
On a voulu réduire le non à une réaction à
courte vue, ignorante des conséquences qu’elle allait
provoquer. On l’a caricaturé en l’accusant d’être
une réaction trouble de peur devant l’émergence
d’un nouvel ordre mondial, un instinct de protection des traditions
confortables de l’Etat Providence, un acte de refus, sans
programme alternatif positif. Il n’y avait pas à s’étonner
que les seules forces politiques qui aient pris officiellement parti
pour le non se soient situées aux deux extrêmes du
spectre politique.
De plus, nous disait-on, le non était en réalité
un non à bien d’autres chose : au néo-libéralisme
anglo-saxon, au gouvernement, à l’immigration et ainsi
de suite.
Bien qu’il puisse y avoir une part de vérité
dans tout cela, c’est dans le fait même que le non,
dans aucun des deux pays, n’ait pas été soutenu
par une alternative cohérente que réside la condamnation
majeure des élites politique et médiatique. C’est
un monument à leur inaptitude à traduire les aspirations
et les insatisfactions populaires. Au contraire, elles ont réagi
aux résultats favorables au non en traitant les peuples comme
des élèves retardés qui ne comprennent pas
les leçons des experts.
Quoiqu’il ne se soit pas agi de choisir entre deux options
politiques, ce ne fut pas plus un choix entre la vision éclairée
d’une Europe moderne, prête à embarrasser le
nouvel ordre mondial, et de vieilles passions politiques confuses.
Quand les commentateurs disent que la victoire du non délivre
un message des plus effrayés, ils se trompent. La vraie peur
que nous rencontrons est celle que le non provoque dans la nouvelle
élite politique. C’est la peur de ne plus pouvoir convaincre
si facilement les gens d’adopter leur vision " post-politique
".
Et de la sorte, pour tout autre, le non est un message et une expression
d’espoir. C’est l’espoir que la politique soit
toujours vivante, et possible, et que le débat sur ce que
sera et deviendra l’Europe, soit toujours ouvert.
C’est pourquoi nous, la gauche, devons rejeter les insinuations
méprisantes des libéraux qui prétendent que
nous allons au lit avec de drôles de concubins néo-fascistes.
Ce que la droite populiste et la gauche ont en commun n’est
que ceci : la conscience que la politique, au sens propre du mot,
est toujours vivante.
A la fin de sa vie, FREUD a posé la fameuse question Was
will das Weib ? (Que veut la femme ?).
Par quoi, il admettait que l’énigme de la sexualité
féminine le laissait perplexe.
L’imbroglio de la constitution européenne n’est-il
pas l’indice d’une question similaire : Quelle Europe
voulons-nous ?
Clairement, voulons-nous vivre dans un monde où le seul
choix serait entre la civilisation américaine et celle du
capitalisme autoritaire émergeant chinois ?
Le Tiers Monde ne peut produire une résistance assez forte
à l’idéologie du rêve américain.
Tel qu’est le monde actuel, il n ’y a que l’Europe
qui puisse le faire. La vraie opposition aujourd’hui n’est
pas entre le premier et le troisième monde, plutôt
entre le premier joint au troisième monde (l’ Empire
global américain et ses colonies) et le deuxième monde,
l’ Europe.
A la suite de Freud, Théodor ADORNO disait que ce à
quoi nous assistions dans le monde contemporain, avec la "
désublimation répressive ", n’est plus
la vieille logique de la répression du ça et de ses
pulsions, mais un pacte pervers entre le sur-moi (l’autorité
sociale) et le ça (les pulsions agressives illicites) au
dépens du moi.
Ne se produit-il pas, au niveau politique, quelque chose de structurellement
similaire aujourd’hui : le pacte étrange entre le capitalisme
global post-moderne et les sociétés pré-modernes
au détriment de la modernité même ?
L’Empire multiculturaliste global américain peut intégrer
facilement les traditions locales pré-modernes. Le corps
étranger qu’ill ne peut vraiment pas assimiler est
la modernité européenne.
Le message du non à tous ceux d’entre nous qui se
préoccupent de l’Europe est : non, les experts anonymes
dont la marchandise nous est vendue sous un emballage multiculturaliste
libéral chamarré ne nous empêcheront pas de
penser.
Il est temps que nous, les citoyens d’Europe, soyons convaincus
que nous avons à prendre une décision exclusivement
politique sur ce que nous voulons. Aucun administrateur éclairé
ne fera le travail pour nous. »
Slavoj Zizek
Traduction Jack Jedwab
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