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Loïc Wacquant
La marchandise et la canonnière

Origine : http://www.humanite.presse.fr/journal/2003-04-09/2003-04-09-370011

Premier acte planétaire du nouvel impérialisme unipolaire, la guerre américaine manifeste le paradoxe de l’hyper puissance militaire et de la fragilité symbolique du pouvoir qu’elle sert, souligne le sociologue Loïc Wacquant.

Sociologue formé en France et aux États-Unis, élève et collaborateur de Pierre Bourdieu, Loïc Wacquant est aujourd’hui professeur à l’université de Californie, à Berkeley, et chercheur au Centre de sociologie européenne, Paris. Ses travaux portent sur l’inégalité urbaine, la domination raciale, les politiques pénales, la violence et le corps. Le regard qu’il porte sur la réalité politique et sociale américaine du moment est particulièrement critique.

Vous êtes un observateur averti de la société américaine, de ses contradictions sociales et politiques. En quoi l’engagement dans cette guerre exprime-t-il à votre avis ses tensions et ses contradictions ?

Loïc Wacquant. La société des États-Unis est travaillée par deux courants. D’un côté une réaction viscérale, alimentée par le besoin émotionnel de surmonter le traumatisme du 11 septembre, de restaurer et de démontrer avec éclat la force américaine, de rétablir fût-ce temporairement et de manière quasi magique le sentiment de sécurité sinon d’invincibilité que cet événement inouï a brisé. Pour cela les États-Unis entendent montrer et démontrer qu’ils ne dépendent et ne dépendront plus de rien ni de personne : la nation fixera seule son propre sort, en utilisant tous les moyens dont elle dispose pour réaffirmer son hégémonie, y compris en engageant une guerre d’invasion qui viole la charte des Nations unis et bafoue la loi internationale, et qui est assurée d’avoir des conséquences géopolitiques catastrophiques à court et à long terme.

D’un autre côté un courant rationnel qui essaie de construire une argumentation pour expliquer la guerre, soupeser le pour et le contre, opération particulièrement délicate en raison de l’incohérence même des arguments avancés par le gouvernement Bush. Ce dernier a tour à tour donné pour justification à la guerre la destruction des armes dites de destruction massive détenues par Bagdad, puis le " changement de régime " en Irak après que l’action des inspecteurs eut montré que le problème des armes pouvait être résolu par des moyens pacifiques, enfin les liens " possibles " - c’est-à-dire virtuels, imaginaires, voire à venir - de Saddam Hussein avec al Qaeda quand l’objectif de déstabiliser le pouvoir irakien a semblé ne plus suffire. Le gouvernement Bush joue habilement avec ces deux courants, en utilisant la force de l’émotion chaque fois qu’un argument est affaibli, notamment par la résistance internationale, au besoin en produisant des faux documents pour légitimer sa thèse - comme cela fut le cas devant le Congrès américain à propos du soi-disant achat de tubes d’aluminium par l’Irak pour construire une bombe nucléaire : la CIA savait que ces documents étaient des faux et l’administration Bush aussi, c’est pourquoi des députés et des juristes s’interrogent aujourd’hui sur la possibilité d’entamer une procédure d’impeachment (destitution) contre George W. Bush sur cette base.

Bush peut-il compter sur la presse pour légitimer ce point de vue ?

Loïc Wacquant. L’administration Bush a trouvé un allié de poids dans une presse et une télévision dont la myopie et la servilité atteignent des sommets. Et pour cause : les grands médias américains appartiennent à une poignée d’entreprises multinationales qui ont toutes raisons de voir la guerre d’un oil favorable. L’ouverture d’un conflit armé fait l’effet d’une " fête patriotique " et permet d’amplifier le sentiment de solidarité nationale né du 11 septembre et, ce faisant, d’augmenter l’Audimat à court terme. C’est ainsi que, d’après les sondages, près de la moitié des Américains croient que Saddam Hussein est personnellement impliqué dans l’attaque d’al Qaeda sur le World Trade Center, alors que même le gouvernement Bush n’a jamais prétendu cela.

Mais surtout, ces médias interviennent dans un contexte de dépolitisation profonde de l’opinion, comme on a pu le voir dans l’apathie avec laquelle le pays a réagi à l’avortement de fait de l’élection présidentielle et au " coup d’État juridique " qui a porté Bush au pouvoir. La guerre est ainsi vendue par ces médias grâce à un discours moral beaucoup plus que selon une logique proprement politique ou géopolitique. Lancer la lutte contre l’" axe du mal ", envers et contre la " défaillance ", voire la trahison des autres pays qui refusent la guerre comme la France (dépeinte comme faible, féminine, veule, et mercantile), c’est s’affirmer comme porteur du " bien ", comme défenseur des valeurs viriles de courage et d’honneur, et cela pour l’humanité tout entière. Le dispositif médiatique mis en place réactive ainsi le vieux mythe politico-religieux de la " nation élue ", dotée d’une " destinée manifeste ", qui fait de l’Amérique non pas un pays parmi d’autres mais le pays suprême.

Toutefois la grande innovation de cette guerre au plan de la propagande reste l’" embedding " (littéralement l’" encastrement ") des journalistes au sein des unités militaires, c’est-à-dire l’intégration de fait de l’appareil médiatique à l’administration de la guerre. Ce dispositif a permis de soumettre durant trois mois ceux qui allaient partir avec les troupes à une préparation physique et psychologique intense qui fait qu’ils s’identifient avec " leurs hommes ", sont dépourvus de toute autonomie d’action et d’enquête, et se retrouvent totalement dépendants de l’information fournie par leur officier sur le tas. Ils deviennent de fait et de leur plein vouloir des agents publicitaires du Pentagone. Pensez qu’avec 600 journalistes ainsi " encastrés ", on n’a pratiquement pas vu d’images de victimes civiles en deux semaines de combats.

Comment s’y prennent les médias pour expliquer les difficultés rencontrées par l’armée américaine - puisqu’on sait que Rumsfeld espérait que les combats durent quelques jours à peine ?

Loïc Wacquant. Ils cumulent trois techniques assez simples : la censure, la distorsion et le délai. Quand les choses vont bien on diffuse pléthore d’images mais quand les difficultés s’affirment, on fait distraction. Quand les frappes sur Bagdad ont commencé, elles étaient diffusées en continu sur toutes les grandes chaînes en clair. Le Wall Street Journal avait annoncé que Bassora allait ouvrir ses portes aux " libérateurs ", un pool de journalistes internationaux avait été dépêché sur place pour filmer les scènes attendues de liesse populaire. Mais les choses ne se sont pas passées comme escompté et donc on n’a rien montré. Au bout de trois jours, comme la guerre éclair annoncée n’était pas au rendez-vous, les " networks " sont tout simplement revenus à leurs programmes habituels : football, basket-ball, soap opera et talk-show sirupeux. Comme si de rien n’était. Au point assez extraordinaire que dès la première semaine du conflit, les États-Unis étaient le seul grand pays au monde où la guerre n’était pas diffusée en continu sur une chaîne libre d’accès : ni NBC, ni ABC, ni CBS, ni Fox ne proposaient plus de couverture spéciale.

La " couverture " de la guerre est totalement centrée sur la confrontation entre l’Amérique et l’Irak, laissant de côté le reste du globe et ses réactions. J’ai chronométré le temps consacré par le journal télévisé d’ABC (qui est le plus regardé) aux manifestations mondiales antiguerre des premiers jours : quinze secondes de travelling à travers trois pays en tout et pour tout ! Et quand dans le monde entier on parle de la guerre, il faut voir les trésors de rhétorique déployés pour ne jamais employer le terme d’" invasion " absolument banni du vocabulaire, ou les slogans qui s’affichent en incrustation sur les images des télés : ici " strike on Irak " (la frappe de l’Irak), là " war in Irak " (la guerre en Irak et non pas contre l’Irak), ou encore " la marche sur Bagdad " comme une espèce de bande-annonce de film péplum.

Néanmoins, l’opposition à la guerre s’exprime quand même. Comment l’expliquez-vous ?

Loïc Wacquant. Elle s’exprime avec une vigueur et une ampleur sans précédent dans l’histoire des États-Unis : c’est la première fois qu’un mouvement antiguerre s’affirme avant même la déclaration des hostilités. Un gros tiers de l’opinion continue de se déclarer opposée à l’" opération liberté iraquienne " (selon le vocable officiel du Pentagone). Cette opposition a deux points d’ancrage. Elle est très forte dans les zones inférieures de l’espace social : le (sous-)prolétariat, notamment immigré, et la communauté noire sont positionnés contre la guerre. Ainsi, les trois quarts des Noirs américains sont hostiles à l’invasion de l’Irak, alors que les trois quarts des Blancs lui sont favorables ! À cela deux raisons : les Noirs sont les premiers à payer l’" impôt du sang " puisqu’ils sont majoritaires parmi les troupes d’infanterie, et ils sont aussi en première ligne quand il s’agit de payer le coût de la guerre sur le front intérieur puisque, dans un contexte de crise budgétaire sans précédent depuis les années trente, les dépenses militaires se traduisent déjà par des coupes claires dans les programmes visant les plus défavorisés (en matière d’éducation, de santé, d’aide sociale, etc.).

L’autre pôle d’opposition à la guerre est formé par les fractions éduquées des classes moyennes et supérieures, celles qui disposent d’un capital culturel leur permettant d’échapper à la myopie nationaliste et de se " mettre à la place de l’autre " pour comprendre la situation d’un point de vue élargi. Et qui s’inquiètent du retournement brutal qui s’est produit dans l’opinion internationale à l’égard des États-Unis : il y a un an, l’Amérique disposait d’un " capital de sympathie " au zénith ; aujourd’hui, l’image du pays est plus négative encore qu’au plus noir de la guerre du Vietnam. Le sentiment d’empathie et de solidarité qui s’était manifesté dans le monde entier à leur égard après les attentats du 11 septembre s’est complètement évaporé.

Dans quelle mesure la voix de cette opposition américaine peut-elle se faire entendre ?

Loïc Wacquant. Son problème, c’est qu’elle tourne en quelque sorte à vide : elle est dépourvue de relais efficients dans les champs journalistiques et politiques. Elle se voit réduite aux manifestations de rue et aux " happenings " symboliques, ponctuels et limités (par exemple, sur les campus universitaires). Elle n’a pas les moyens de traduire cette mobilisation en pression sur l’appareil d’État, car celui-ci est parfaitement isolé de la société par une machine électorale contrôlée par les intérêts d’argent : hormis le gouverneur Dean, aucun candidat à l’investiture démocrate pour la prochaine présidentielle n’ose élever la voix à propos de la guerre de peur de faire fuir les " donateurs " de fonds dont les millions sont nécessaires pour faire campagne.

Les grandes manifestations pacifistes planétaires, mais aussi ce qui s’est déroulé à l’ONU avant le déclenchement de la guerre ont été des manières de dire " trop c’est trop " aux Américains. Comment les États-Unis en sont-ils arrivés à leur politique ?

Loïc Wacquant. Dans la foulée de la chute du mur de Berlin et de l’effondrement de l’Empire soviétique, et bien plus que le 11 septembre, l’invasion de l’Irak par l’Amérique est à mon sens l’événement pivot de l’histoire du monde des cinquante dernières années. Elle révèle et cristallise un processus jusque-là souterrain et qui est désormais clairement visible : l’adoption franche par les États-Unis d’une vision unilatéraliste du monde qui, combinée au rejet de l’isolationnisme rendu nécessaire par l’internationalisation de son économie et dramatisée par le 11 septembre, débouche sur une politique impérialiste au sens premier du terme. Cette politique rend obsolètes les catégories de pensée et les cadres juridiques hérités de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide qui lui a succédé. On pouvait déjà discerner ce glissement à une accumulation de signes, le retrait du traité de Kyoto, la dénonciation des accords russo-américains sur les missiles balistiques, la réaffirmation d’une politique protectionniste dans des secteurs comme l’agriculture et l’acier, en dépit des édits de l’Organisation mondiale du commerce : les États-Unis ne prennent en comptent ces organes internationaux et leurs règles qu’à la seule condition qu’ils épousent leurs intérêts politiques ou économiques.

L’arrivée de Bush et de son équipe - qui est la moins " cosmopolite " en un demi-siècle : pensez que, petit-fils de sénateur et fils de président, l’actuel président des États-Unis n’avait jamais mis les pieds en Europe avant son élection ! - a constitué de ce point de vue un accélérateur : avant lui, les pièces du puzzle étaient sur la table, mais là où Clinton mettait les formes, habillait le regain impérialiste d’un dehors légaliste et internationaliste, Bush met les pieds dans le plat et " abat les cartes " de l’Amérique, comme il aime à dire lui-même. En quelques mois, son comportement a fait plus pour faire comprendre l’indifférence, voire le mépris dans lequel l’Amérique tient le reste du monde que trente années de négociations internationales ! C’est pourquoi le grand tournant historique depuis 1945, la fin du XXe siècle à vrai dire, c’est la bataille perdue par les États-Unis à l’ONU, leur humiliation au Conseil de sécurité devant lequel ils ne reviendront d’ailleurs plus pour cette raison même.

Cette guerre manifesterait donc à la fois le premier acte du monde unipolaire américain et l’impossibilité pour le reste du monde de s’y soumettre ?

Loïc Wacquant. En tout cas la volonté clairement affirmée par les États-Unis d’imposer un tel monde unipolaire et le défi sans précédent que cela pose au reste de la planète. C’est le paradoxe de ce moment historique : d’un côté l’hyper puissance militaire américaine, l’affirmation éclatante d’un pouvoir impérialiste qui se trouve sans rival au plan matériel (il n’y a plus d’autre empire capable de s’y opposer) ; de l’autre l’extrême fragilité symbolique de cette même Amérique, révélée par la débâcle diplomatique devant les Nations unis : qui aurait pu croire que des pays vassaux comme la Turquie, le Mexique, le Chili et le Pakistan auraient l’audace d’aller contre ses diktats ? Nous avons affaire à une domination si brutale et ouverte qu’elle ne parvient pas à se draper de légitimité. Elle s’avère incapable, au moment crucial, d’imposer ses catégories de perception (notamment l’opposition morale entre le " bien et le mal "), et ainsi de générer le consentement du dominé à sa domination. Un indice sur la scène française : le même directeur d’un grand journal du soir qui proclamait : " Nous sommes tous Américains " il y a moins de deux ans insiste aujourd’hui dans ses éditoriaux sur " les raisons du non à l’Amérique ". Au lendemain de l’invasion de l’Irak, le New York Times présentait un graphique montrant à ses lecteurs comment en l’espace de neuf mois l’image des États-Unis s’était renversée auprès des pays proches ou alliés (France, Allemagne, Italie, Turquie, Espagne, Russie, et même Grande-Bretagne) : partout les opinions négatives sont passées de 25 % à 30 % à 70 % à 80 % ! Un tel effondrement de l’image d’un empire ne s’est jamais produit dans l’histoire - même l’Allemagne nazie jouissait d’une aura international plus grande en 1940 au moment de l’Anschluss.

Quel avenir alors pour ce monde " unipolarisé " ?

Loïc Wacquant. Il est toujours hasardeux de prédire l’avenir et c’est d’autant plus vrai aujourd’hui que les institutions et les instruments de pensée hérités du siècle passé sont remis en cause, sinon définitivement caduques. Les États-Unis sont manifestement disposés à payer le prix de leur messianisme politico-moral en désordres et incertitudes de tous ordres qu’il implique sur la scène internationale pourvu qu’il se traduise par une cohésion et un assentiment renforcés au plan intérieur. De fait, le discours et la politique néo-impérialistes de Bush ont un effet sécurisant sur une société rongée par l’insécurité sociale - alors qu’on arrose Bagdad de bombes, le chômage continue de monter et la précarité salariale s’amplifie - et par sa dépendance objective, économique notamment, envers le reste du monde. D’une certaine manière, plus les États-Unis seront contestés internationalement et plus la contestation qu’ils susciteront servira de ciment intérieur pour réaffirmer l’unicité et la mission civilisatrice du pays. On pourrait imaginer que se reconstruise par ce biais la mentalité d’assiégé qui a si bien fonctionné durant les quatre décennies de confrontation avec l’Union soviétique (que Reagan et Bush père appelaient déjà " l’empire du mal "), bref que se reconstitue le même type d’hégémonie idéologique et politique basée sur une opposition bipolaire entre partisans de la " liberté " (du marché et du bulletin de vote) et les autres. Et cela d’autant plus que la figure de l’universel américain, incarnée par le couple contre nature de la marchandise et de l’élection, se trouve aujourd’hui sans rivale. Il n’y a plus de projet alternatif de transformation de l’humanité à lui opposer. En se convertissant à la vision néolibérale du marché roi et de la " responsabilité individuelle ", les autres gouvernements, notamment ceux de la gauche social-démocrate en Europe, ont préparé le terrain de l’hégémonie américaine. Ils ont en tout cas empêché la constitution d’un contre-pouvoir symbolique crédible, porteur d’un autre projet de " civilisation " vers lequel se tourner.

En dépit de cette limite, comment pourrait néanmoins se dessiner une alternative politique internationale ?

Loïc Wacquant. Le monde sait maintenant à quoi s’en tenir : l’intérêt historique de cette crise est d’avoir clarifié la situation et accéléré la mise en place des éléments cadres du nouvel ordre, ou du nouveau désordre international du XXIe siècle. Tous les pays de la planète sont avertis : ils savent désormais comment le gouvernement des États-Unis est prêt à les instrumentaliser, sans leur reconnaître la moindre autonomie ni dignité, dans le cadre d’une politique qui allie la " main invisible " du marché et la canonnière. La vision militariste des Américains apparaît comme le complément nécessaire d’un monde économique dérégulé dans lequel la marchandise est reine, et l’ordre est le produit non d’un consensus mais d’un rapport de force nu.

Entretien réalisé

par Lucien Degoy

Avertissement
Mail de Loïc Wacquant septembre 2010
Merci de retirer toute mention de l'ouvrage PUNIR LES PAUVRES de votre site: il s'agit d'une version contrefaisante, version truquee et tronquee de mon travail publiee sans contrat ni bon a tirer par Agone, contre ma volonte explicite et expresse. Cet ouvrage est une tromperie; ce n'est pas le mien; il ne figure pas a ma bibliographie, merci de ne pas me l'attribuer. Vous pouvez lire la version complete et conforme de mon travail en anglais, PUNISHING THE POOR, Duke University Press, 2008.
Cordialement,
Loïc Wacquant
Professor, University of California, Berkeley Chercheur, Centre de sociologie européenne, Paris http://sociology.berkeley.edu/faculty/wacquant/
Department of Sociology University of California-Berkeley Berkeley CA 94720 USA fax 510/642-0659