Procédure contre les vols de matériel vidéo par la police
Document réalisé en Belgique, il peut être utile
ailleurs en l'adaptant
Les passages à tabac "à l'aveugle", et la "confiscation" par la
police de cassettes vidéo contenant des images d'exactions policières
filmées lors de manifestations sont devenues aujourd'hui des pratiques
courantes. Il faut également constater que la police ne se prive
pas, quant à elle, de filmer de façon systématique les manifestantEs,
ce qui est interdit sans l'autorisation d'un juge.
Les vols de cassettes vidéo sont généralement commis par des groupes
de deux ou trois policiers en civil sans brassard les identifiant
comme policiers, et armés de matraques rétractables. Le vidéaste
est très vigoureusement maîtrisé (et insulté), la caméra lui est
arrachée des mains, la cassette est sortie, puis les policiers s'en
vont très rapidement en emportant la cassette. Tout cela se passe
en moins d'une minute.
Il s'agit là de pratiques illégales extrêmement graves qui suppriment
notre liberté d'expression. Ce sont des méthodes qui relèvent du
fascisme et non de la démocratie. Il apparaît également que les
personnes qui sont victimes de ces méfaits ne se défendent pas efficacement,
voire pas du tout. CertainEs se limitent à rapporter les faits auprès
des legal teams, mais ce n'est pas suffisant car, en parallèle d'actions
groupées, il est nécessaire que les citoyenNEs fassent aussi valoir
leurs droits individuellement, notamment en portant plainte.
Voici donc une procédure en 6 points pour les personnes victimes
de vols de matériel vidéo par la police :
1. Si des policiers tentent de vous voler vos cassettes
ou votre caméra, tenez fermement votre caméra en criant de toutes
vos forces "au vol, à l'aide !" afin d'attirer l'attention
sur vous, notamment d'autres vidéastes/cameramen. Lorsque les policiers
s'éloignent avec votre matériel suivez-les en les pointant du doigt
et en criant "ils m'ont volé du matériel vidéo, arrêtez-les !".
Cela aura pour effet que d'autres manifestantEs se joindront à vous.
Si un policier vous demande de lui remettre votre cassette, refusez
car il n'en a pas le droit. S'il vous menace de vous arrêter parce
que vous refusez, répondez-lui que s'il vous prend du matériel,
vous porterez plainte contre lui personnellement pour vol,
ainsi que pour chantage s'il y a eu menace d'arrestation
injustifiée. Demandez-lui alors qu'il vous décline son nom, matricule
et unité, il est tenu de le faire (ayez toujours un bic et du papier
sur vous). S'il refuse, dites-lui que vous mentionnerez également
ce fait dans votre plainte. Ne résistez pas à une arrestation, restez
toujours calme et poliE, mais soyez très ferme pour défendre vos
droits.
2. Déposez plainte pour vol au commissariat de police
de la municipalité/commune où se sont déroulés les faits. Portez
également plainte pour chantage s'il y a eu menace d'arrestation
injustifiée, ainsi que pour destruction de biens privés si
votre cassette vous est rendue après avoir été effacée; dans ce
dernier cas, si possible, n'oubliez pas de faire constater la destruction
des données par un témoin au moment où l'on vous rend la cassette
--> veillez à être accompagnéE). Faites votre déposition au plus
tard dans les sept jours. Mentionnez-y les nom, matricule et unité
du policier contre qui vous portez plainte. Si ce dernier a refusé
de s'identifier, mentionnez également ce fait car cela aggravera
son cas s'il est finalement identifié après enquête. Ne vous laissez
pas intimider lors de la rédaction de votre déposition par le policier
de service. Relisez attentivement votre plainte avant de la signer
et veiller à ce que les termes vol et éventuellement chantage
et destruction de bien privé soient mentionnés dans la plainte.
S'il refuse, menacez-le de porter plainte contre lui pour faux.
N'oubliez pas de demander au policier qui a pris votre déposition
de vous communiquer son nom, ainsi que le code d'identification
de votre plainte. S'il refuse d'obtempérer, menacez-le de déposer
plainte contre lui. Restez toujours calme et poliE, mais soyez ferme.
3. Racontez les faits sur le site Indymedia
de votre pays, et faites un copier/coller dans votre agenda de l'adresse
de la page Web de votre article. Ce sera votre dossier en ligne.
4. Demandez ensuite par eMail à un parlementaire de votre
choix qu'il demande au ministre concerné de s'expliquer sur ces
faits devant le parlement (procédure courante, appelée "question
parlementaire"). C'est à cela que sert aussi le parlement, qui est
(censé être) la voix du peuple. Dans le mail que vous enverrez au
parlementaire, mentionnez : - le code d'identification de votre
plainte auprès de la police ; - le nom du policier qui a pris déposition
de votre plainte ; - le nom, adresse, numéro de téléphone et adresse
eMail de témoins éventuelLEs des faits dont vous avez été victime
; - l'adresse de la page Web de votre article.
5. Ajoutez en copie du mail que vous envoyez au parlementaire,
les adresses eMail : - de journalistes d'au moins trois grands journaux
de votre pays ; - du maire/bourgmestre (= chef de la police) de
la municipalité/commune où se sont déroulés les faits ; - du legal
team des organisateurs de la manif ; - du/de la responsable d'Amnesty
International, et de la ligue des Droits de l'Homme dans votre pays.
NB : Vous trouverez les adresses eMail des personnes décrites ci-dessus,
sur le site Web de leur organisation. Si ces adresses eMail ne sont
pas publiées sur le site Web, téléphonez à ces organisations afin
qu'on vous communique les adresses eMail professionnelles de ces
personnes. (Evitez les adresses générales du genre contact@xyz.org).
Pour trouver les sites Web : http://www.google.com/advanced_search?hl=fr.
6. Publiez une copie de ce mail (avec les noms et adresses
eMail des destinataires) en commentaires de votre article sur Indymedia.
PS : Parfois la police, lorsqu'elle a pris l'identité du vidéaste,
contacte ce dernier pour lui demander de venir chercher sa cassette,
dont ils ont fait une copie. Cela n'y change rien : si je vole ta
voiture et te la rends quelques jours plus tard, il y a quand même
vol. Quant à la copie par la police de données informatiques privées,
si elle n'est pas autorisée par un juge, alors il s'agit également
d'un vol.
Ce sont les chefs qu'ils faut punir
La procédure ci-dessus a pour objectif final de punir les chefs
qui ont donné à leurs subordonnés l'ordre de commettre des actes
illégaux :
(Code pénal belge) Art. 260. Lorsqu'un fonctionnaire ou officier
public, un dépositaire ou agent de la force publique, aura ordonné
ou fait quelque acte contraire à une loi ou à un arrêté royal, s'il
justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs, pour des objets
du ressort de ceux-ci et sur lesquels il leur était dû une obéissance
hiérarchique, il sera exempt de la peine, qui ne sera, dans ce cas,
appliquée qu'aux supérieurs qui auront donné l'ordre.
L'article ci-dessus ne diminue cependant en rien la responsabilité
de chaque policier : en tant que citoyens, ceux-ci devraient s'opposer
à ces pratiques illégales, par exemple au travers d'un syndicat.
Comment faire avec la police
L'idéal est de constituer des équipes de deux vidéastes plus une
troisième personne. La vidéaste 2 (une femme) suit le vidéaste 1
(un homme) à distance, sans jamais l'approcher, et cache sa caméra
tout en étant prête à filmer en quelques secondes dès que le vidéaste
1 se fait agresser par la police. Dans ce cas, le vidéaste 1 devra
crier "à l'aide, au vol !", comme expliqué dans le point
1 ci-dessus. Dès que les images sont tournées, la troisième personne
(un homme, qui doit suivre la vidéaste 2 aussi à distance) vient
chercher la cassette pour aller la mettre très vite en lieu sûr
(de préférence chez unE amiE qui habite tout prêt). Si des flics
tombent aussi sur la vidéaste 2, celle-ci devra également crier
"au vol, à l'aide !", et la troisième personne devra alors
venir lui porter secours.
Solidarité : il faut défendre les manifestants qui sont agressés
par la police
Théoriquement, la loi nous oblige à porter assistance à toute personne
en danger (ex : une personne qui crie au secours, alors qu'elle
fait l'objet d'une agression). Et pour ce faire, le recours éventuel
à la force relève de la légitime défense. Le fait que ces personnes
soient membres des forces de police n'y change rien : la police
n'est pas autorisée à voler. N'oubliez pas cependant que la force
utilisée pour porter secours à une personne agressée doit être proportionnelle
à celle utilisée par l'agresseur : l'idéal est de ne pas chercher
la confrontation directe avec la police mais d'aller chercher et
libérer, par la force s'il le faut, des personnes agressées par
la police. Cela requiert d'être en surnombre par rapport à la police
dans votre environnement immédiat : l'idéal est de constituer plusieurs
groupes d'au moins vingt personnes, très mobiles (ça gêne les flics,
qui eux sont toujours moins mobiles car ils doivent obéir à leurs
chefs) et communiquant entre eux par SMS ou autre moyen de communication.
Ces groupes spontanés de défense n'ont pas de chef, leurs
membres viennent et partent volontairement. Nous pensons qu'il est
préférable de se concentrer sur la défense des manifestantEs agresséEs
par la police, plutôt que de briser des vitrines devant les caméras
de TV. C'est une bonne façon d'éviter d'être manipulés par des flics-provocateurs
déguisés en manifestants. Sachez cependant que vous courrez des
risques : coups de matraque, arrestation pour rébellion, etc
--> si vous y aller quand même, ayez sur vous le numéro de GSM
d'un
legal team
en Belgique
et d'un
medical team
en Belgique
pour constater d'éventuelles traces de mauvais traitement.
Un témoignage de vol de cassette vidéo par la police
en Belgique -
Un témoignage de provocation policière
en Belgique
Et pour terminer, un document à lire absolument avant de se rendre
à une manif (imprimez-le et emportez-le avec vous) :
les 10 droits des manifestants en Belgique
La démocratie ne sert que si on l'utilise. Et s'il s'avère impossible
de faire valoir nos droits, il importe d'acter cette impossibilité
par des documents crédibles, vérifiables et publiés sur le Net.
C'est très important de constituer des dossiers étoffés pour prouver
au reste de la population qu'il se passe des choses graves.
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