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Origine : http://dc152.4s.io/doc/FpB2rWX0/preview.html
Vincent de Gaulejac
Professor da Universidade Paris Diderot Professeur
à l'Université Paris Diderot
Diretor do Laboratório de mudança social Directeur
du Laboratoire de changement social
Membro fundador do Instituto internacional de sociologia clínica
Membre fondateur de l'Institut international de
sociologie clinique
<vincentdegaulejac.com>
"L'homme qui travaille reconnaît dans le Monde effectivement
transformé par son travail sa propre œuvre : il s'y
reconnaît soi-même, il y voit sa propre réalité
humaine, il y découvre et y révèle aux autres
la réalité objective de son humanité, de l'idée
d'abord abstraite et purement subjective qu'il se fait de lui-même."
Alexandre Kojève, 1947
Le travail est une notion complexe et polysémique qui recouvre
un ensemble d'éléments, de nature différente,
intriqués dans un ensemble. Il évoque une activité
économique, il est un élément nodal de l'existence
sociale, mais aussi un étayage de la construction de soi.
L'analyse du travail conduit à mettre en rapport ces éléments
hétérogènes et révèle des transformations
qui préfigurent un nouveau monde, que nous avons proposé
d'identifier comme hypermoderne.
Comment définir le travail? L'étymologie renvoie
l'image du tripalium, un instrument de torture composé de
trois pieux (tripalis), qui assimile travail et souffrance avec
l'image de l'esclave corvéable à merci. Le terme a
été longtemps associé à la souffrance
et à la peine. Le petit Robert donne comme première
définition "État de celui qui souffre, qui est
tourmenté ; activité pénible" (1970, p.1823).
La genèse, lorsque Adam et Ève sont chassés
du Paradis, évoque l'exigence, en forme de punition, de "gagner
son pain à la sueur de son front". À la douleur
de l'enfantement, réservée aux femmes, vient en écho
la souffrance au travail pour les hommes. Le travail paysan s'inscrit
dans un rapport de soumission à la nature, rythmé
par les saisons et les aléas du temps. Le paysan est possédé
par sa terre plus qu'il ne la possède, remarque Marx. Le
travail ouvrier évoque l'exploitation et l'aliénation
de l'homme rivé à la machine et soumis à des
cadences imposées par les ingénieurs mécaniciens
qui règlent le travail à la chaîne. Les employés
de bureaux ou de service sont, eux aussi, l'objet d'un contrôle
tatillon et de conditions de travail qui exigent une soumission
à une hiérarchie rigide, autant d'images du travail
qui évoquent l'oppression. Pendant des siècles, les
hommes ont rêvé de se libérer du travail. Chez
les Indiens d'Amérique, la recherche de l'Eldorado, correspondait
à ce rêve : une terre où la nature était
si généreuse qu'elle pourvoyait aux besoins des hommes
qui n'avaient plus besoin de travailler pour survivre. Le travail
était alors associé à l'idée de contrainte,
d'obligation, et de servitude. Il s'opposait au temps du loisir,
à la liberté, à la vie insouciante et heureuse.
À cette vision négative du travail s'oppose l'idée
que la liberté est une conquête dont le travail est
le vecteur : conquête sur la nature qui doit être dominée
pour la mettre au service de l'homme ; conquête sur sa vie
qui doit être maîtrisée au risque de sombrer
dans l'ennui et l'inutilité ; conquête sociale, le
travail étant source de richesse et de considération.
Par le travail, on peut acquérir une situation, une position,
un statut, une respectabilité. L'éthique protestante
semble bien s'être imposée : le pauvre est considéré
comme un oisif ou un paresseux, donc un misérable, qui mérite
son sort puisqu'il ne fait pas l'effort pour sortir de sa condition
par le travail.
Comme Janus, le travail a donc deux visages, d'un côté
la servitude et la souffrance, de l'autre la libération et
la réussite. Cette contradiction apparente est l'expression
de la multidimensionalité du travail :
* Il représente une activité, qui nécessite
un certain savoir faire à travers lequel s'accomplit une
tâche plus ou moins valorisante et se fabrique une œuvre
plus ou moins durable.
* Il apporte des avantages en nature et financiers qui offrent
des moyens de subsistance et qui mesurent la valeur du travail effectué
en termes d'avoir. Ce que l'on reçoit, en particulier en
termes de rémunération, est une composante essentielle
du travail. Ces rétributions peuvent êtres également
symboliques, ce qui ne veut pas dire sans valeur.
* Enfin, le travail confère une identité. Il est
au fondement de l'existence sociale, en termes d'insertion comme
d'intégration. Il spécifie l'être social de
chaque individu au regard de sa place dans la société.
Il est un facteur de développement personnel et de construction
de soi, donc un élément essentiel de l'être
de l'homme.
La crise du travail touche tous ces registres, le faire, l'avoir
et l'être. Le mal-être au travail est, à ce titre,
un symptôme. Il est la conséquence d'un déficit
de reconnaissance sur les trois plans : une activité dévalorisée,
non reconnue, ou qui perd son sens ; des rétributions qui
ne sont pas ou plus à la hauteur des contributions attendues
; une vulnérabilité identitaire qui provoque un manque
à être, un conflit entre les aspirations existentielles
et leurs réalisations, une rupture interne entre le moi et
l'idéal qui fragilise les assises narcissiques.
Le faire : travailler c'est produire
Le travail peut se définir comme un acte. Il se caractérise
en premier lieu dans le registre du faire, de la production concrète
de biens et de services.
Hannah Arendt distingue deux forme d'action dans le registre du
travail, l'animal laborans et l'homo faber. L'animal laborans "qui
peine", effectue un travail laborieux, servile, pénible,
dont l'objectif est de produire des biens et des services destinés
à être consommés. L'homo faber "qui ouvrage",
se réalise dans la production d'une œuvre, de biens
durables, qui enracinent l'homme dans l'action par une inscription
symbolique (Arendt, 1958, p.187). Alors que le travail (Arbeit)
est décrit comme le processus de reproduction organique du
genre humain par lequel l'homme obtient les produits nécessaires
à la vie, dans l'œuvre (Herstellens), il crée
à partir des marériaux du monde naturel, un environnement
durable (Honneth, 2007, p.37). Le travail est alors un élément
de médiation essentiel au fondement de l'être au monde,
dans un rapport d'aliénation lorsqu'il se réduit au
labeur servile et d'accomplissement de soi lorsqu'il réalise
une oeuvre. La fabrication d'objets change le rapport au monde et
contribue à faire société. Ces objets vont
permettre de construire un cadre de vie, et servir de base matérielle
au développement d'une culture.
Le monde des objets se constitue à partir du registre matériel
-soumis à la logique d'utilité - du registre économique
- soumis à la logique de l'échange - et du registre
symbolique - soumis à la logique des signes. Ces trois registres
spécifient la valeur accordée au travail en fonction
de son utilité concrète (à quoi ça sert?),
de la valeur d'échange du produit (qu'est-ce que ça
rapporte?) et de sa signification symbolique (quel est le sens de
l'activité et de ce qu'elle produit?).
La production a évolué dans le temps, transformant
en profondeur la valeur du travail. Jusqu'au XIXe siècle,
la fabrication était le fait d'individus qui maîtrisaient
un savoir faire sur le modèle du chasseur, du pêcheur,
de l'agriculteur ou de l'artisan. L'outil et la machine ont transformé
les façons de faire. Plus récemment les nouvelles
technologies d'information et de communication ont bouleversé
les processus de production. L'émergence d'organisations
complexes, hypermodernes, fait disparaître le travail comme
activité individuelle et le travailleur indépendant
comme modèle pour l'organisation de l'activité. La
grande majorité des travailleurs sont insérés
dans des réseaux et des systèmes organisés
qui encadrent et normalisent l'activité. Dans le monde contemporain,
la relation de service et l'activité intellectuelle sont
dominantes. "L'importance du travail intellectuel et des processus
cognitifs engagés dans l'activité déstabilise
en profondeur l'équation entre le travail comme effort et
le temps de travail, dans la mesure où l'effort est discontinu
et où la charge physique se double maintenant d'une charge
mentale, voire d'une charge psychique" (Dejours, 2003, p.12).
Au sein des organisations hypermodernes, le travail ne s'appréhende
plus en termes de charge, d'exécution d'une tâche,
d'effort pour produire un objet, cultiver la terre ou produire à
la chaîne. Il se caractérise par la mobilisation d'un
sujet pour remplir des objectifs, appliquer des prescriptions, suivre
des consignes. Dans cet univers, l'œuvre n'est plus un objet
concret réalisé par un individu isolé, mais
le résultat d'une production systémique qui nécessite
la collaboration directe ou indirecte de milliers de personnes indifférenciées.
Ce que chacun fait n'est plus aussi facilement repérable
et visible. Il y a une intrication des activités productives.
Les process formalisés et les référentiels
se substituent à la transmission des savoirs faire par l'exemple
et l'identification. La formalisation et l'abstraction changent
le rapport à l'acte de travail dont une partie dépend
des nouvelles technologies. L'informatique, l'électronique,
la megatronique, la robotique transforment l'activité mentale
comme l'activité manuelle. Un hybride "homme-machine",
mélange d'humanité flottante, d'organisation instrumentalisante
et d'électronique virtuelle, se développe au point
que les conséquences de l'acte sont absorbées par
un système incommensurable dont la maîtrise échappe
aux différents travailleurs qui l'utilisent.
Le faire devient plus flou, plus abstrait, moins visible. Le travail
devient plus difficile à décrire. L'activité
concrète est moins perceptible. L'activité se diffracte
en une multiplicité d'actions sérialisées,
plus ou moins reliées. La disjonction et la diversité
se substituent à la continuité et la cohérence.
L'avoir : travailler c'est subvenir à ses besoins
Le registre de l'avoir est un aspect essentiel du travail par tout
ce qu'il permet d'obtenir comme éléments nécessaires
pour subvenir à ses besoins. Avoir un emploi, avoir un salaire,
avoir une formation, avoir des compétences, avoir une protection
sociale, avoir des droits, avoir une place dans une organisation,
avoir des relations, autant d'éléments nécessaires
pour vivre dans les sociétés contemporaines. Robert
Castel évoque à ce propos les "supports"
(matériels et juridiques) indispensables pour avoir une existence
sociale reconnue (2003).
Le travail est une activité effectuée en vue d'obtenir
un certain nombre de rétributions en argent et en avantages
divers. Il permet de créer de la richesse et d'acquérir
des moyens de subsistances nécessaires à la vie en
société. Adam Smith en fait l'élément
clé de l'économie et de la production de la richesse.
"L'homme est riche ou pauvre selon la quantité (…)
de travail qu'il peut se permettre d'acheter. La valeur de toute
marchandise, pour celui qui la possède (…) est donc
égale à la quantité de travail qu'elle lui
permet d'acheter ou de commander. Le travail est la mesure réelle
de la valeur échangeable de toutes les marchandises"
(Smith, 1776). Mais la dimension économique n'est qu'un aspect
de sa valeur. P. Bourdieu parle à ce propos de "capitaux"
afin d'élargir une notion au départ exclusivement
économique à d'autres champs. Le travail ne présente
pas seulement un "intérêt" parce qu'il rapporte
de l'argent. Il rapporte bien d'autres choses encore, un statut,
des relations sociales, des compétences, de la reconnaissance,
autant de "capitaux" qui fondent l'existence sociale :
* Le capital économique recouvre des revenus qui prennent
différentes formes. Le salaire est un élément
clé du contrat de travail. Le salarié vend sa force
de travail en contrepartie d'une rémunération. Les
honoraires, pour les activités libérales, couvrent
non seulement la rémunération de l'acte mais également
la prise en charge des frais liés à l'activité.
Les dirigeants et les cadres supérieurs reçoivent
par ailleurs des indemnités, des stocks options, des avantages
complémentaires qui vont de la voiture de fonction à
la prise en charge de frais de voyages, jusqu'à une prise
en charge de toutes les dépenses courantes comme le logement
ou l'habillement. La possession de biens immobiliers et mobiliers
est, par ailleurs, un élément déterminant du
capital économique.
* Le capital social dépend de la nature de l'emploi occupé.
L'emploi est devenu un élément déterminant
pour avoir une existence sociale, un statut, une place dans une
organisation, des protections juridiques et sociales, une sécurité
objective et subjective. Par ailleurs l'insertion professionnelle
donne l'accès à des réseaux sociaux, des collectifs,
à un ensemble de relations sociales qui sont nécessaires
pour développer une vie sociale. Avoir "des relations"
est un élément important pour mettre en œuvre
les bonnes stratégies dans la "lutte des places".
Cela favorise l'accès aux "bonnes filières"
scolaires, la connaissance des bonnes recettes pour "faire
carrière" et pour faire face aux accidents de la vie.
* Le capital culturel s'acquiert par l'acquisition de compétences,
l'accès à des formations, la maîtrise de savoir
faire, la participation quotidienne à des activités
qui apportent l'expérience, l'accès à des nouveaux
savoirs. Autant d'éléments qui viennent compléter
le capital culturel initial, reçu à sa naissance dans
la famille, du moins pour certains, et le capital scolaire qui se
mesure par le ou les diplômes obtenus pendant la scolarité.
La valeur des diplômes sur le marché du travail est
aujourd'hui un élément essentiel pour obtenir un emploi.
* Le capital symbolique est attaché au statut socioprofessionnel
et à la reconnaissance sociale dont il bénéficie.
Certains statuts sont valorisés, d'autres stigmatisés.
Certaines carrières professionnelles sont le signe de la
réussite ou de l'échec, sources de fierté ou
de honte, de considération ou d'invalidation, de respect
ou d'exclusion. La reconnaissance dépend essentiellement
de la valeur de ce capital symbolique qui est au fondement de l'estime
de soi et de l'estime des autres. Estime et estimation ont la même
racine. C'est dire que la valeur travail à une dimension
symbolique incontournable qui se "calcule" au croisement
du psychique, du côté de l'estime de soi et des enjeux
narcissiques, et du social, du côté du regard des autres
et du statut social attaché à chaque profession.
L'emploi est un vecteur de l'ensemble de ces capitaux. Lorsqu'on
le perd, on ne perd pas seulement un revenu, on est dépossédé
d'un ensemble d'éléments qui lui sont attachés.
D'où le drame que représente la perte de son travail,
surtout pour tous ceux qui n'ont pas d'autres filets de protection.
Dans les sociétés contemporaines, le travail est associé
à l'emploi (1) comme facteur essentiel de l'insertion sociale.
Les entreprises sont des "bureaux de placement" régulateur
de la distribution anthroponomique, c'est-à-dire de la façon
dont les individus se distribuent dans l'espace social, le moyen
par lequel ils y trouvent une place (Bertaux, 1977). C'est d'ailleurs
à partir des positions et des catégories socioprofessionnelles
que les statisticiens vont tenter de situer les individus dans la
société. Le travail apporte un statut, une position,
un réseau social, un revenu, autant d'éléments
objectifs et symboliques, essentiels pour exister à part
entière dans la société (Gaulejac, Taboada-Leonetti,
1994).
De l'avoir à l'être : travailler pour exister
Ce passage de la possession à l'existence avait été
mis en évidence par Marx à propos de l'argent. "Du
fait qu'il possède la qualité de tout acheter et de
s'approprier tous les objets, l'argent est l'objet dont la possession
est la plus éminente de toutes (…) Ce que l'argent
peut acheter, je le suis moi-même, moi, le possesseur de l'argent"
(Marx, 1848, p.114). Dans ce texte, Marx s'appuie sur une citation
de Goethe dans Faust : "Allons donc! Tes mains, tes pieds,
ta tête et ton derrière t'appartiennent sans doute,
mais ce dont je jouis allègrement m'en appartient-il moins?
Si je puis me payer six étalons, leurs forces ne sont-elles
pas miennes? Je galope, et me voici un rude gaillard, comme si j'avais
vingt-quatre jambes". La puissance de l'argent tient dans cette
alchimie qui permet au possesseur de s'attribuer les qualités
de ce qu'il possède. "Ce que je suis, et ce que je puis,
n'est donc nullement déterminé par mon individualité.
Je suis laid, mais je puis m'acheter la plus belle femme; aussi
ne suis-je pas laid, car l'effet de la laideur, sa force rebutante
est annulée par l'argent (…) Je suis un homme mauvais,
malhonnête, sans scrupule, stupide, mais l'argent est vénéré,
aussi le suis-je de même, moi qui en possède (…)
Moi qui, grâce à mon argent, suis capable d'obtenir
tout ce qu'un être humain désire, n'ai-je pas en moi
tous les pouvoirs humains? Mon argent ne transforme-t-il pas toutes
mes impuissances en leur contraire?" (Marx, 1848, p.115) Il
y a une identification entre la personne et les objets qu'il peut
s'approprier par l'argent. L'argent possède le sujet autant
qu'il le possède. Entre l'argent, le travail et la personne,
qui possède l'autre? Lorsque l'on dit "j'ai un travail",
n'est-ce pas une inversion du sens? C'est peut être "le
travail qui me possède". Ainsi, entre le faire, l'avoir
et l'être, les intrications sont permanentes.
Je suis ce que je fais. Les qualités et la puissance de
l'être de l'homme sont très liées au travail
qu'il effectue et aux qualités et à la puissance attribuées
à la fonction occupée. Grégoire Philonemko,
chef de rayon chez Carrefour, en donne un témoignage saisissant
(Philonemko, Guienne, 1997). Il décrit parfaitement le processus
par lequel un employé qui a le désir de bien faire
son travail se retrouve pris dans un système qui va le conduire
à sacrifier sa vie, sa famille et sa santé. On peut
ici parler de possession tant l'emprise du travail est forte. Dans
la même veine, Hélène Weber témoigne
de la passion qui va l'amener à adhérer corps et âme
à MacDonald (Weber, 2004). Elle décrit avec force
les liens étroits qui s'établissent entre son être
profond et "l'être de l'organisation". À
propos du système IBM, nous avions décrypté
les mécanismes par lesquels les employés deviennent
possédés par leur entreprise tout en ayant le sentiment
que celle-ci leur permet de réaliser leurs aspirations et
leurs désirs les plus profonds (Pagès et alii, 1979).
Je suis ce que je gagne. Comment comprendre autrement la folie
des grandeurs et la course au toujours plus qui imprègnent
les grands patrons et les traders à propos de leurs rémunérations.
Ce n'est pas la valeur en soi de l'argent touché qui est
alors déterminant, la consommation et le confort auxquels
il permet d'accéder, mais la puissance potentielle que donne
à celui qui les touche, le montant faramineux de ces rémunérations.
La valeur d'usage est ici sans intérêt par rapport
à la valeur symbolique. C'est la grandeur, la puissance et
la gloire qui sont essentielles. Ce n'est pas la valeur de ce que
ces patrons produisent qui justifie le montant du salaire, mais
son montant qui confère de la valeur à celui qui le
touche et, par extension, à tout ce qu'il fait. Le travail
n'est plus alors seulement un moyen de subsistance mais une finalité
de l'existence. Il devient, comme l'argent qu'il rapporte, un élément
essentiel de la définition et de la réalisation de
soi.
Entre "ce que je fais" et "ce que je gagne",
le travail donne une position, un statut, une identité qui
permet de définir sa place dans la société
en comparaison avec d'autres. Le métier exercé et
la position professionnelle indiquent une classe d'appartenance
et une identité sociale. "Le travail est bien plus que
le travail : c'est un signe d'appartenance, un marqueur, un statut"
(Méda, 2010, P.77). L'essentiel n'est plus seulement d'avoir
un travail que d'être par le travail.
De l'éthique du devoir à l'accomplissement
de soi
Les éléments objectifs se mêlent à des
éléments subjectifs. Le travail n'est pas seulement
un moyen matériel de subsistance mais aussi un moyen d'exister
subjectivement. Dans Le coût de l'excellence nous évoquions
un "contrat narcissique" en complément du contrat
de travail (Aubert, Gaulejac, 1991). Ce dernier décrit les
apports respectifs de l'employé et de l'entreprise, les droits
et les devoirs de chacun, les contributions et les rétributions
attendues. Dans le contrat narcissique, il s'agit d'autre chose.
L'entreprise propose aux employés un défi qui est
de l'ordre de l'idéal. Elle lui offre le moyen de se dépasser,
de se surpasser, d'atteindre l'excellence. Ce contrat imaginaire
réside sur la concordance entre les valeurs de performance
et d'excellence présentées par l'entreprise et les
désirs de toute puissance, les idéaux de perfection
plus ou moins inconscients. Ce n'est plus seulement la force de
travail qui est sollicitée mais l'énergie libidinale.
Le travail n'est plus principalement une activité physique
mobilisée pendant un temps limité par la pointeuse,
il est un idéal de réalisation de soi. Le désir
de faire carrière produit une mobilisation psychique intense
sur les objectifs fixés par l'entreprise. Le travail devient
l'élément clé d'un renforcement des liens entre
des processus intrapsychiques d'idéalisation, de projection
et d'introjection, de sublimation, et des processus organisationnels
de sélection, d'évaluation, de répartition,
d'ordonnancement, de classification, de production. L'individu cherche
à satisfaire ses désirs inconscients, à canaliser
ses pulsions et ses angoisses dans le travail. La mobilisation psychique
devient un élément déterminant du rapport à
l'entreprise.
Ces remarques illustrent l'évolution de la place du travail
dans nos sociétés. "Historiquement, le travail
s'inscrirait d'abord dans un système de croyance et de respect
de l'autorité. Il correspondrait alors à une "éthique
du devoir", une obligation envers la société
; ensuite, avec le développement de valeurs individualistes
et rationnelles, le travail revêtirait une valeur instrumentale
: il serait recherché pour la sécurité et le
revenu qu'il peut apporter ; enfin, aujourd'hui, le travail devrait
avant tout permettre aux individus de s'épanouir, la sécurité
économique dans les pays riches n'étant plus une priorité
et la qualité de la vie et le bien-être subjectif devenant
des valeurs majeures" (Méda, 2010, p.18).
Dés le XIXe siècle, le rapport au travail va se modifier
en profondeur pour devenir "l'essence de l'homme". Deux
auteurs vont accompagner cette révolution. Hegel qui considère
que le travail est à la fois ce qui transforme le monde à
l'image de l'homme et ce qui le transforme lui-même. Marx
va encore plus loin en affirmant que le travail est la seule activité
humaine qui importe, la seule qui définit vraiment l'homme.
Pour Marx, le travail est une condition indispensable de l'homme,
une nécessité éternelle qui sert de médiateur
entre l'homme et la nature (Marx, Le Capital, 1867). Il est donc
essentiel de désaliéner le travail pour qu'il permette
aux hommes d'exprimer pleinement leur personnalité et leur
contribution à la production de la société.
Pour que les hommes puissent vraiment produire comme des êtres
humains, il convient donc, selon Marx, de faire la révolution
pour sortir de l'exploitation de l'homme par l'homme et abolir le
salariat qui crée un lien de subordination à l'employeur.
Deux éléments vont changer la donne depuis la fin
du XIXe siècle. Le salariat va se généraliser
et devenir le support de protection sociale, de droits importants
qui donnent aux salariés une sécurité objective
dont ils ne peuvent se passer au risque de basculer dans la désaffiliation
(Castel, 2003). L'exploitation est alors contrebalancée par
la sécurité qu'apporte le fait d'avoir un emploi.
Par ailleurs le lien de subordination va se transformer avec "la
révolution managériale". Il ne s'agit plus comme
dans l'univers taylorien et disciplinaire de "rendre les corps
utiles dociles et productifs" (Foucault, 1975) mais de réconcilier
l'homme et l'entreprise. L'exercice du pouvoir au sein des entreprises
va profondément évoluer. La gestion managériale
préfère l’adhésion volontaire à
la sanction disciplinaire, la mobilisation à la contrainte,
l’incitation à l’imposition, la gratification
à la punition, la responsabilité à la surveillance.
Sa force s’enracine dans un système de valeurs qui
favorise l’engagement individuel dans lequel la recherche
du profit est couplée à un idéal. Le travail
doit devenir le lieu de l’épanouissement de chacun,
de la performance individuelle et collective, du dynamisme et de
l'émulation pour la réussite de tous, de l’amélioration
de l’existence des clients comme des collaborateurs. Il s’agit
enfin de conduire ces activités avec le sens de l’éthique.
Projet et idéal vont de pair. Personne ne peut se satisfaire
de se consacrer totalement à son travail pour une finalité
uniquement financière. Depuis Max Weber (1920), on a compris
que les hommes travaillent pour leur salut et pas seulement pour
de l’argent.
L’entreprise hypermoderne propose un idéal commun
qui doit devenir l’idéal des employés. Cette
captation de l’Idéal du Moi de chaque individu ne s’effectue
pas mécaniquement. Il convient d’abord que les valeurs
individuelles ne soient pas trop en rupture avec celles de l’organisation.
Sur ce point, les procédures de sélection sont très
sophistiquées. Elles opèrent un ajustement entre la
« personnalité » des candidats et les attentes
de l’organisation. Des tests, des entretiens, des mises à
l’épreuve, des analyses graphologiques et psychologiques,
permettent de décrire, mesurer, évaluer, classer,
comparer, jauger, ceux qui ont les meilleures caractéristiques
pour s’adapter au modèle de comportement attendu. Les
élèves des écoles d’ingénieur
et des écoles de commerce sont, a priori, les plus aptes
à opérer l'intériorisation des façons
de faire et de penser conformes aux attentes de l’entreprise.
Les cours de formation internes, les dispositifs d’évaluation
et les procédures de promotion tiennent compte des apprentissages
et des savoirs accumulés, mais également et peut-être
surtout, des « motivations », c’est-à-dire
de l’aptitude et de la volonté à se mobiliser
pour remplir les objectifs et pour adhérer aux projets de
l’entreprise. Le travail devient un "challenge",
un moyen de dépassement de soi.
On comprend mieux pourquoi, dans ces entreprises, les revendications
des travailleurs s'expriment moins sur les registres quantitatif
et matériel que sur les registres qualitatifs et subjectifs.
Dans le capitalisme industriel, l'essentiel des conflits se cristallisait
sur les conditions de travail, l'augmentation des salaires, la diminution
du temps de travail. Il s'agissait surtout de gagner plus et de
travailler moins. Aujourd'hui, même si ces revendications
restent absolument d'actualité pour bon nombre de salariés,
on voit émerger des revendications plus existentielles en
termes de malaise subjectif et de souffrance au travail. Ce déplacement
des plaintes du registre de l'avoir au registre de l'être
met les organisations syndicales comme les directions d'entreprises
en difficulté parce qu'elles échappent aux modes habituels
de régulation. L'être est du côté de la
subjectivité, de l'ineffable, des sentiments, de l'intériorité,
autant de dimensions qui ne sont pas du registre de l'action syndicale
traditionnelle ni de celle des patrons. Et pourtant les symptômes
du malaise ne peuvent les laisser indifférents tant ils deviennent
incontournables.
D'abord facteur de production de richesse et moyen de subsistance,
le travail devient un élément central de l'accomplissement
de soi. Il est au cœur du rapport entre l'être de l'homme
et l'être de la société. Il invite les individus
à se réaliser tout en contribuant à produire
la société en se produisant eux-mêmes. Il obéit
moins à l'éthique du devoir et de l'obéissance
qu'à l'aspiration au développement personnel. La question
identitaire devient alors centrale. L'identité professionnelle
a toujours été un élément essentiel
de l'existence sociale. Aujourd'hui ce n'est plus seulement "l'identité
au travail" (Sainsaulieu, 1976) qui est en jeu que le sujet
dans toute son existence. La distinction travail / hors travail
n'est plus évidente. Entre la vie privée et la vie
au travail, les frontières sont de moins en moins nettes.
L'intrication entre le travail et les autres secteurs de l'existence
s'accentue en permanence. Le travail et la vie sont devenus indissociables.
Le travail, lieu de tensions contradictoires
Le travail est un facteur de production créateur de richesse
pour soi et pour la société, dans le registre du faire,
un élément central pour avoir des moyens de subsistance
et accéder à la protection sociale, dans le registre
de l'avoir, une des voies pour exister, se développer et
s'accomplir, dans le registre de l'être. Ces dimensions sont
contradictoires.
Marx avait bien mis en évidence la dualité irréductible
du travail comme support de l'émancipation et comme facteur
d'aliènation. Pour l'auteur du Capital, le travail est au
fondement du pouvoir d'agir sur soi et sur le monde. C'est "un
processus de formation dans lequel les sujets peuvent se reconnaître
eux-mêmes individuellement et collectivement comme des sujets
de l'action, construisant l'histoire, grâce à l'expérience
qu'ils font d'eux-mêmes dans le produit de leur travail"
(Honneth, 2007, p.24). Par le travail, le sujet peut advenir et
se constituer en collectif pour agir comme sujet socio-historique.
Mais ce processus de subjectivation et d'émancipation est
aliéné par le capitalisme qui réifie le travail,
le mécanise, le fragmente. Le capitalisme produit un renversement
par lequel "l'activité de travail structurant la subjectivité
devient une activité dirigée par l'objet", écrit
Axel Honneth (op cit, p.26). Le travail devient alors facteur d'aliénation
et d'exploitation. C'est à partir de ce double mouvement
qu'il faut penser le travail. La constitution d'une classe de travailleurs
va les conduire à s'organiser pour lutter contre l'exploitation
et l'instrumentalisation dont ils sont l'objet, pour reconquérir
une possibilité d'action sur leurs conditions de travail
et sur la société. "À mesure que diminue
régulièrement le nombre des magmats du capital qui
usurpent et monopolisent tous les avantages de ce procès
de mutation continue, s'accroît le poids de la misère,
de l'oppression, de la servitude, de la dégénérescence,
de l'exploitation, mais aussi de la colère d'une classe ouvrière
en constante augmentation, formée, unifiée et organisée
par le mécanisme même du procès de production
capitaliste" (Marx, 1867, édition PUF, p.856). Ainsi,
la logique capitaliste devrait aboutir, inéluctablement,
à une révolution menée par le prolétariat.
L'exploitation et la réification suscitent la colère
qui génère la révolte et l'organisation du
prolétariat en classe sociale pour lutter contre les propriétaires
des moyens de production et renverser l'ordre capitaliste.
L'analyse marxiste du travail a été l'objet de débats
multiples. L'histoire nous a montré sa puissance et ses limites.
Sans entrer dans la discussion sur son actualité, on retiendra
l'intérêt d'une approche dialectique pour mieux comprendre
en quoi le travail est toujours traversé par une dualité
irréductible entre émancipation et aliénation,
entre libération et oppression : il est un support essentiel
de réalisation de soi et un facteur de contrainte, d'empêchement
à vivre. Il convient donc de mieux comprendre les dynamiques
contradictoires qui traversent le rapport au travail aujourd'hui.
S'il est un motif de souffrance, il est aussi un lieu de plaisir.
S'il est porteur d'aliénation, il est également un
moyen de réalisation de soi-même. Il est fondateur
de l'existence sociale, par les droits et la protection qu'il génère,
et facteur d'insécurité puisque la perte d'emploi
est un drame qui peut prendre la forme d'une "mort sociale".
La peur de perdre son emploi est un facteur d'insécurité
important. "Perte d'emploi, perte de soi", écrit
Danièle Linhart à ce propos (Linhart, 2002). Le contrat
de travail implique la subordination, mais il est aussi un élément
nodal de l'autonomie. Le travail reste une valeur importante et
sa place est essentielle dans la vie comme lieu d'épanouissement,
comme vecteur de socialisation, comme moyen de subsistance, comme
plaisir de la rencontre, comme lieu de développement personnel.
Il est un élément d'étayage qui fonde la confiance
en soi et en même temps il suscite une dépendance intellectuelle
et affective qui peut saper l'estime de soi. La plainte de ne pas
recevoir suffisamment de reconnaissance est le revers d'une attente
forte de tout ce que le travail peut apporter. Le tripalium origine
le travail dans le registre du poteau de torture et de la souffrance,
mais le travail représente également un élément
essentiel de la construction de soi et de l'épanouissement
des individus.
La formule, "on ne veut pas perdre sa vie à la gagner"
exprime parfaitement l'intrication du travail et de la vie, du travail
comme moyen pour subsister et du travail comme finalité de
l'existence. Entre travailler pour vivre et vivre pour travailler,
le balancement est permanent. C'est bien parce que le travail fait
vivre qu'il fait souffrir. Il ne peut, du moins aujourd'hui, être
pensé comme une sphère séparée des autres
dimensions de la vie personnelle et de la vie sociale. La distinction
travail / hors travail devient floue. Les transformations constatées
dans le monde du travail se répercutent dans les autres sphères
de l'existence.
Les débats sur le mal-être au travail expriment des
positions antagonistes révélatrices de ces tensions
contradictoires : le travail est-il un moyen ou une finalité,
un lieu d'aliénation ou d'émancipation, un facteur
d'épanouissement ou d'anxiété, un vecteur de
subjectivation ou d'instrumentalisation? La réponse est dans
la question. Il suffit de remplacer le "ou" par un "et".
Ces différents pôles opposés sont indissociables.
La tension entre eux est toujours présente. Le mal-être
n'est compréhensible qu'en tant que le travail peut-être
facteur de bien-être. Les mêmes situations peuvent apporter
du plaisir et/ou de la souffrance, de la sécurité
et/ou de l'insécurité, du dynamisme et/ou de l'inhibition,
de la santé mentale et/ou de la dépression, du bonheur
et/ou du malheur. Pour autant, il ne faudrait pas minimiser les
conditions objectives de travail qui sont plus ou moins contraignantes,
plus ou moins pénibles, plus ou moins stressantes. Il convient
donc de mieux comprendre l'articulation entre les conditions concrètes,
matérielles, objectives (souvent évoquées comme
"réelles") et les conditions subjectives, éprouvées,
vécues, dont la réalité n'est pas moins tangible.
Dans cette perspective, certains défendent l'idée
d'un travail soutenable, "un travail qui au lieu de briser,
fatiguer, abaisser, abrutir, user, permettrait au contraire de s'exprimer,
de nouer des contacts, d'être utile, d'être un opérateur
de santé" (Méda, 2010, p.54). Force est de constater
que les deux aspects de cette alternative, le travail qui use et
celui qui épanoui, coexistent en proportion variable selon
la nature de l'emploi et selon le type de rapport que l'individu
entretient avec son activité. La plupart des emplois sont
à la fois un lieu de fatigue, de contrainte, voire d'aliénation,
et un lieu d'expression, d'accomplissement de soi, voire de libération.
Par ailleurs, un même travail peut-être vécu
à certains moments comme un lieu de souffrance ou d'abrutissement
et, à d'autres, comme un élément essentiel
de réalisation, d'épanouissement et de rencontres.
Il y a là une dynamique contradictoire qui articule des éléments
objectifs et subjectifs.
° ° ° °
Longtemps les revendications des travailleurs ont essentiellement
porté sur le premier point : les salaires, les conditions
de travail, les avantages dits "sociaux". Les organisations
syndicales ne savaient pas comment aborder les secondes considérées
comme du domaine psychologique, intime, personnel. Elles commencent
à se rendre compte que ces dimensions subjectives sont tout
aussi essentielles, qu'elles sont indissociables des conditions
de travail, et que les salariés attendent de leurs représentants
qu'ils les défendent et les protègent de la violence
et de la souffrance engendrées par ces conditions. Il faut
alors changer les modes d'action, trouver d'autres modalités
de mobilisation. Après le suicide d'un collègue, la
grève n'est sans doute pas la meilleure réponse pour
affirmer une solidarité et dénoncer les causes qui
ont conduit au passage à l'acte. Et pourtant, il est essentiel,
face à un acte profondément individuel et destructeur,
de trouver des modalités d'action pour exprimer de la solidarité,
donner une expression symbolique au malaise ressenti, favoriser
une élaboration collective.
Le travail a donc des visages opposés. D'un côté
il est un élément nodal de la construction de soi
comme sujet, il apporte du plaisir, du sens, des éléments
objectifs de bien-être; de l'autre, il peut être le
lieu de l'aliénation, de l'oppression, il génère
de la souffrance, de l'incohérence, des éléments
subjectifs de mal-être. Alors que globalement les conditions
de travail se sont améliorées, que le temps de travail
a diminué, les indicateurs de santé au travail se
dégradent et les symptômes d'un malaise s'accentuent.
Si les contradictions entre émancipation et aliénation,
sur le plan social, entre plaisir et souffrance sur le plan existentiel,
ne sont pas nouvelles, c'est leur intensité, leur intrication
et leur exacerbation qui sont devenues aujourd'hui un phénomène
social.
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Note
1 L'association emploi / travail peut-être facteur de confusion.
On peut en effet travailler sans avoir pour autant un emploi. Le
travail domestique en est l'exemple le plus évident. Beaucoup
de retraités n'ont plus d'emploi, mais développent
des activités qui leur permettent de continuer à travailler
activement. À l'heure ou les emplois deviennent précaires
et le travail intense, la dissociation entre les deux est de plus
en plus net.
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