"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
Licence
"GNU / FDL"
attribution
pas de modification
pas d'usage commercial
Copyleft 2001 /2014

Moteur de recherche
interne avec Google
Le travail, comme lieu de construction du sujet, entre émancipation et aliénation
Vincent de Gaulejac

Origine : http://dc152.4s.io/doc/FpB2rWX0/preview.html

Vincent de Gaulejac
Professor da Universidade Paris Diderot    Professeur à l'Université Paris Diderot
Diretor do Laboratório de mudança social    Directeur du Laboratoire de changement social
Membro fundador do Instituto internacional de sociologia clínica    Membre fondateur de l'Institut international de sociologie clinique

<vincentdegaulejac.com>

"L'homme qui travaille reconnaît dans le Monde effectivement transformé par son travail sa propre œuvre : il s'y reconnaît soi-même, il y voit sa propre réalité humaine, il y découvre et y révèle aux autres la réalité objective de son humanité, de l'idée d'abord abstraite et purement subjective qu'il se fait de lui-même."

Alexandre Kojève, 1947

Le travail est une notion complexe et polysémique qui recouvre un ensemble d'éléments, de nature différente, intriqués dans un ensemble. Il évoque une activité économique, il est un élément nodal de l'existence sociale, mais aussi un étayage de la construction de soi. L'analyse du travail conduit à mettre en rapport ces éléments hétérogènes et révèle des transformations qui préfigurent un nouveau monde, que nous avons proposé d'identifier comme hypermoderne.

Comment définir le travail? L'étymologie renvoie l'image du tripalium, un instrument de torture composé de trois pieux (tripalis), qui assimile travail et souffrance avec l'image de l'esclave corvéable à merci. Le terme a été longtemps associé à la souffrance et à la peine. Le petit Robert donne comme première définition "État de celui qui souffre, qui est tourmenté ; activité pénible" (1970, p.1823). La genèse, lorsque Adam et Ève sont chassés du Paradis, évoque l'exigence, en forme de punition, de "gagner son pain à la sueur de son front". À la douleur de l'enfantement, réservée aux femmes, vient en écho la souffrance au travail pour les hommes. Le travail paysan s'inscrit dans un rapport de soumission à la nature, rythmé par les saisons et les aléas du temps. Le paysan est possédé par sa terre plus qu'il ne la possède, remarque Marx. Le travail ouvrier évoque l'exploitation et l'aliénation de l'homme rivé à la machine et soumis à des cadences imposées par les ingénieurs mécaniciens qui règlent le travail à la chaîne. Les employés de bureaux ou de service sont, eux aussi, l'objet d'un contrôle tatillon et de conditions de travail qui exigent une soumission à une hiérarchie rigide, autant d'images du travail qui évoquent l'oppression. Pendant des siècles, les hommes ont rêvé de se libérer du travail. Chez les Indiens d'Amérique, la recherche de l'Eldorado, correspondait à ce rêve : une terre où la nature était si généreuse qu'elle pourvoyait aux besoins des hommes qui n'avaient plus besoin de travailler pour survivre. Le travail était alors associé à l'idée de contrainte, d'obligation, et de servitude. Il s'opposait au temps du loisir, à la liberté, à la vie insouciante et heureuse.

À cette vision négative du travail s'oppose l'idée que la liberté est une conquête dont le travail est le vecteur : conquête sur la nature qui doit être dominée pour la mettre au service de l'homme ; conquête sur sa vie qui doit être maîtrisée au risque de sombrer dans l'ennui et l'inutilité ; conquête sociale, le travail étant source de richesse et de considération. Par le travail, on peut acquérir une situation, une position, un statut, une respectabilité. L'éthique protestante semble bien s'être imposée : le pauvre est considéré comme un oisif ou un paresseux, donc un misérable, qui mérite son sort puisqu'il ne fait pas l'effort pour sortir de sa condition par le travail.

Comme Janus, le travail a donc deux visages, d'un côté la servitude et la souffrance, de l'autre la libération et la réussite. Cette contradiction apparente est l'expression de la multidimensionalité du travail :
* Il représente une activité, qui nécessite un certain savoir faire à travers lequel s'accomplit une tâche plus ou moins valorisante et se fabrique une œuvre plus ou moins durable.

* Il apporte des avantages en nature et financiers qui offrent des moyens de subsistance et qui mesurent la valeur du travail effectué en termes d'avoir. Ce que l'on reçoit, en particulier en termes de rémunération, est une composante essentielle du travail. Ces rétributions peuvent êtres également symboliques, ce qui ne veut pas dire sans valeur.

* Enfin, le travail confère une identité. Il est au fondement de l'existence sociale, en termes d'insertion comme d'intégration. Il spécifie l'être social de chaque individu au regard de sa place dans la société. Il est un facteur de développement personnel et de construction de soi, donc un élément essentiel de l'être de l'homme.

La crise du travail touche tous ces registres, le faire, l'avoir et l'être. Le mal-être au travail est, à ce titre, un symptôme. Il est la conséquence d'un déficit de reconnaissance sur les trois plans : une activité dévalorisée, non reconnue, ou qui perd son sens ; des rétributions qui ne sont pas ou plus à la hauteur des contributions attendues ; une vulnérabilité identitaire qui provoque un manque à être, un conflit entre les aspirations existentielles et leurs réalisations, une rupture interne entre le moi et l'idéal qui fragilise les assises narcissiques.

Le faire : travailler c'est produire

Le travail peut se définir comme un acte. Il se caractérise en premier lieu dans le registre du faire, de la production concrète de biens et de services.

Hannah Arendt distingue deux forme d'action dans le registre du travail, l'animal laborans et l'homo faber. L'animal laborans "qui peine", effectue un travail laborieux, servile, pénible, dont l'objectif est de produire des biens et des services destinés à être consommés. L'homo faber "qui ouvrage", se réalise dans la production d'une œuvre, de biens durables, qui enracinent l'homme dans l'action par une inscription symbolique (Arendt, 1958, p.187). Alors que le travail (Arbeit) est décrit comme le processus de reproduction organique du genre humain par lequel l'homme obtient les produits nécessaires à la vie, dans l'œuvre (Herstellens), il crée à partir des marériaux du monde naturel, un environnement durable (Honneth, 2007, p.37). Le travail est alors un élément de médiation essentiel au fondement de l'être au monde, dans un rapport d'aliénation lorsqu'il se réduit au labeur servile et d'accomplissement de soi lorsqu'il réalise une oeuvre. La fabrication d'objets change le rapport au monde et contribue à faire société. Ces objets vont permettre de construire un cadre de vie, et servir de base matérielle au développement d'une culture.

Le monde des objets se constitue à partir du registre matériel -soumis à la logique d'utilité - du registre économique - soumis à la logique de l'échange - et du registre symbolique - soumis à la logique des signes. Ces trois registres spécifient la valeur accordée au travail en fonction de son utilité concrète (à quoi ça sert?), de la valeur d'échange du produit (qu'est-ce que ça rapporte?) et de sa signification symbolique (quel est le sens de l'activité et de ce qu'elle produit?).

La production a évolué dans le temps, transformant en profondeur la valeur du travail. Jusqu'au XIXe siècle, la fabrication était le fait d'individus qui maîtrisaient un savoir faire sur le modèle du chasseur, du pêcheur, de l'agriculteur ou de l'artisan. L'outil et la machine ont transformé les façons de faire. Plus récemment les nouvelles technologies d'information et de communication ont bouleversé les processus de production. L'émergence d'organisations complexes, hypermodernes, fait disparaître le travail comme activité individuelle et le travailleur indépendant comme modèle pour l'organisation de l'activité. La grande majorité des travailleurs sont insérés dans des réseaux et des systèmes organisés qui encadrent et normalisent l'activité. Dans le monde contemporain, la relation de service et l'activité intellectuelle sont dominantes. "L'importance du travail intellectuel et des processus cognitifs engagés dans l'activité déstabilise en profondeur l'équation entre le travail comme effort et le temps de travail, dans la mesure où l'effort est discontinu et où la charge physique se double maintenant d'une charge mentale, voire d'une charge psychique" (Dejours, 2003, p.12). Au sein des organisations hypermodernes, le travail ne s'appréhende plus en termes de charge, d'exécution d'une tâche, d'effort pour produire un objet, cultiver la terre ou produire à la chaîne. Il se caractérise par la mobilisation d'un sujet pour remplir des objectifs, appliquer des prescriptions, suivre des consignes. Dans cet univers, l'œuvre n'est plus un objet concret réalisé par un individu isolé, mais le résultat d'une production systémique qui nécessite la collaboration directe ou indirecte de milliers de personnes indifférenciées.

Ce que chacun fait n'est plus aussi facilement repérable et visible. Il y a une intrication des activités productives. Les process formalisés et les référentiels se substituent à la transmission des savoirs faire par l'exemple et l'identification. La formalisation et l'abstraction changent le rapport à l'acte de travail dont une partie dépend des nouvelles technologies. L'informatique, l'électronique, la megatronique, la robotique transforment l'activité mentale comme l'activité manuelle. Un hybride "homme-machine", mélange d'humanité flottante, d'organisation instrumentalisante et d'électronique virtuelle, se développe au point que les conséquences de l'acte sont absorbées par un système incommensurable dont la maîtrise échappe aux différents travailleurs qui l'utilisent.

Le faire devient plus flou, plus abstrait, moins visible. Le travail devient plus difficile à décrire. L'activité concrète est moins perceptible. L'activité se diffracte en une multiplicité d'actions sérialisées, plus ou moins reliées. La disjonction et la diversité se substituent à la continuité et la cohérence.


L'avoir : travailler c'est subvenir à ses besoins

Le registre de l'avoir est un aspect essentiel du travail par tout ce qu'il permet d'obtenir comme éléments nécessaires pour subvenir à ses besoins. Avoir un emploi, avoir un salaire, avoir une formation, avoir des compétences, avoir une protection sociale, avoir des droits, avoir une place dans une organisation, avoir des relations, autant d'éléments nécessaires pour vivre dans les sociétés contemporaines. Robert Castel évoque à ce propos les "supports" (matériels et juridiques) indispensables pour avoir une existence sociale reconnue (2003).

Le travail est une activité effectuée en vue d'obtenir un certain nombre de rétributions en argent et en avantages divers. Il permet de créer de la richesse et d'acquérir des moyens de subsistances nécessaires à la vie en société. Adam Smith en fait l'élément clé de l'économie et de la production de la richesse. "L'homme est riche ou pauvre selon la quantité (…) de travail qu'il peut se permettre d'acheter. La valeur de toute marchandise, pour celui qui la possède (…) est donc égale à la quantité de travail qu'elle lui permet d'acheter ou de commander. Le travail est la mesure réelle de la valeur échangeable de toutes les marchandises" (Smith, 1776). Mais la dimension économique n'est qu'un aspect de sa valeur. P. Bourdieu parle à ce propos de "capitaux" afin d'élargir une notion au départ exclusivement économique à d'autres champs. Le travail ne présente pas seulement un "intérêt" parce qu'il rapporte de l'argent. Il rapporte bien d'autres choses encore, un statut, des relations sociales, des compétences, de la reconnaissance, autant de "capitaux" qui fondent l'existence sociale :

* Le capital économique recouvre des revenus qui prennent différentes formes. Le salaire est un élément clé du contrat de travail. Le salarié vend sa force de travail en contrepartie d'une rémunération. Les honoraires, pour les activités libérales, couvrent non seulement la rémunération de l'acte mais également la prise en charge des frais liés à l'activité. Les dirigeants et les cadres supérieurs reçoivent par ailleurs des indemnités, des stocks options, des avantages complémentaires qui vont de la voiture de fonction à la prise en charge de frais de voyages, jusqu'à une prise en charge de toutes les dépenses courantes comme le logement ou l'habillement. La possession de biens immobiliers et mobiliers est, par ailleurs, un élément déterminant du capital économique.

* Le capital social dépend de la nature de l'emploi occupé. L'emploi est devenu un élément déterminant pour avoir une existence sociale, un statut, une place dans une organisation, des protections juridiques et sociales, une sécurité objective et subjective. Par ailleurs l'insertion professionnelle donne l'accès à des réseaux sociaux, des collectifs, à un ensemble de relations sociales qui sont nécessaires pour développer une vie sociale. Avoir "des relations" est un élément important pour mettre en œuvre les bonnes stratégies dans la "lutte des places". Cela favorise l'accès aux "bonnes filières" scolaires, la connaissance des bonnes recettes pour "faire carrière" et pour faire face aux accidents de la vie.

* Le capital culturel s'acquiert par l'acquisition de compétences, l'accès à des formations, la maîtrise de savoir faire, la participation quotidienne à des activités qui apportent l'expérience, l'accès à des nouveaux savoirs. Autant d'éléments qui viennent compléter le capital culturel initial, reçu à sa naissance dans la famille, du moins pour certains, et le capital scolaire qui se mesure par le ou les diplômes obtenus pendant la scolarité. La valeur des diplômes sur le marché du travail est aujourd'hui un élément essentiel pour obtenir un emploi.

* Le capital symbolique est attaché au statut socioprofessionnel et à la reconnaissance sociale dont il bénéficie. Certains statuts sont valorisés, d'autres stigmatisés. Certaines carrières professionnelles sont le signe de la réussite ou de l'échec, sources de fierté ou de honte, de considération ou d'invalidation, de respect ou d'exclusion. La reconnaissance dépend essentiellement de la valeur de ce capital symbolique qui est au fondement de l'estime de soi et de l'estime des autres. Estime et estimation ont la même racine. C'est dire que la valeur travail à une dimension symbolique incontournable qui se "calcule" au croisement du psychique, du côté de l'estime de soi et des enjeux narcissiques, et du social, du côté du regard des autres et du statut social attaché à chaque profession.

L'emploi est un vecteur de l'ensemble de ces capitaux. Lorsqu'on le perd, on ne perd pas seulement un revenu, on est dépossédé d'un ensemble d'éléments qui lui sont attachés. D'où le drame que représente la perte de son travail, surtout pour tous ceux qui n'ont pas d'autres filets de protection. Dans les sociétés contemporaines, le travail est associé à l'emploi (1) comme facteur essentiel de l'insertion sociale. Les entreprises sont des "bureaux de placement" régulateur de la distribution anthroponomique, c'est-à-dire de la façon dont les individus se distribuent dans l'espace social, le moyen par lequel ils y trouvent une place (Bertaux, 1977). C'est d'ailleurs à partir des positions et des catégories socioprofessionnelles que les statisticiens vont tenter de situer les individus dans la société. Le travail apporte un statut, une position, un réseau social, un revenu, autant d'éléments objectifs et symboliques, essentiels pour exister à part entière dans la société (Gaulejac, Taboada-Leonetti, 1994).


De l'avoir à l'être : travailler pour exister

Ce passage de la possession à l'existence avait été mis en évidence par Marx à propos de l'argent. "Du fait qu'il possède la qualité de tout acheter et de s'approprier tous les objets, l'argent est l'objet dont la possession est la plus éminente de toutes (…) Ce que l'argent peut acheter, je le suis moi-même, moi, le possesseur de l'argent" (Marx, 1848, p.114). Dans ce texte, Marx s'appuie sur une citation de Goethe dans Faust : "Allons donc! Tes mains, tes pieds, ta tête et ton derrière t'appartiennent sans doute, mais ce dont je jouis allègrement m'en appartient-il moins? Si je puis me payer six étalons, leurs forces ne sont-elles pas miennes? Je galope, et me voici un rude gaillard, comme si j'avais vingt-quatre jambes". La puissance de l'argent tient dans cette alchimie qui permet au possesseur de s'attribuer les qualités de ce qu'il possède. "Ce que je suis, et ce que je puis, n'est donc nullement déterminé par mon individualité. Je suis laid, mais je puis m'acheter la plus belle femme; aussi ne suis-je pas laid, car l'effet de la laideur, sa force rebutante est annulée par l'argent (…) Je suis un homme mauvais, malhonnête, sans scrupule, stupide, mais l'argent est vénéré, aussi le suis-je de même, moi qui en possède (…) Moi qui, grâce à mon argent, suis capable d'obtenir tout ce qu'un être humain désire, n'ai-je pas en moi tous les pouvoirs humains? Mon argent ne transforme-t-il pas toutes mes impuissances en leur contraire?" (Marx, 1848, p.115) Il y a une identification entre la personne et les objets qu'il peut s'approprier par l'argent. L'argent possède le sujet autant qu'il le possède. Entre l'argent, le travail et la personne, qui possède l'autre? Lorsque l'on dit "j'ai un travail", n'est-ce pas une inversion du sens? C'est peut être "le travail qui me possède". Ainsi, entre le faire, l'avoir et l'être, les intrications sont permanentes.

Je suis ce que je fais. Les qualités et la puissance de l'être de l'homme sont très liées au travail qu'il effectue et aux qualités et à la puissance attribuées à la fonction occupée. Grégoire Philonemko, chef de rayon chez Carrefour, en donne un témoignage saisissant (Philonemko, Guienne, 1997). Il décrit parfaitement le processus par lequel un employé qui a le désir de bien faire son travail se retrouve pris dans un système qui va le conduire à sacrifier sa vie, sa famille et sa santé. On peut ici parler de possession tant l'emprise du travail est forte. Dans la même veine, Hélène Weber témoigne de la passion qui va l'amener à adhérer corps et âme à MacDonald (Weber, 2004). Elle décrit avec force les liens étroits qui s'établissent entre son être profond et "l'être de l'organisation". À propos du système IBM, nous avions décrypté les mécanismes par lesquels les employés deviennent possédés par leur entreprise tout en ayant le sentiment que celle-ci leur permet de réaliser leurs aspirations et leurs désirs les plus profonds (Pagès et alii, 1979).

Je suis ce que je gagne. Comment comprendre autrement la folie des grandeurs et la course au toujours plus qui imprègnent les grands patrons et les traders à propos de leurs rémunérations. Ce n'est pas la valeur en soi de l'argent touché qui est alors déterminant, la consommation et le confort auxquels il permet d'accéder, mais la puissance potentielle que donne à celui qui les touche, le montant faramineux de ces rémunérations. La valeur d'usage est ici sans intérêt par rapport à la valeur symbolique. C'est la grandeur, la puissance et la gloire qui sont essentielles. Ce n'est pas la valeur de ce que ces patrons produisent qui justifie le montant du salaire, mais son montant qui confère de la valeur à celui qui le touche et, par extension, à tout ce qu'il fait. Le travail n'est plus alors seulement un moyen de subsistance mais une finalité de l'existence. Il devient, comme l'argent qu'il rapporte, un élément essentiel de la définition et de la réalisation de soi.

Entre "ce que je fais" et "ce que je gagne", le travail donne une position, un statut, une identité qui permet de définir sa place dans la société en comparaison avec d'autres. Le métier exercé et la position professionnelle indiquent une classe d'appartenance et une identité sociale. "Le travail est bien plus que le travail : c'est un signe d'appartenance, un marqueur, un statut" (Méda, 2010, P.77). L'essentiel n'est plus seulement d'avoir un travail que d'être par le travail.

De l'éthique du devoir à l'accomplissement de soi

Les éléments objectifs se mêlent à des éléments subjectifs. Le travail n'est pas seulement un moyen matériel de subsistance mais aussi un moyen d'exister subjectivement. Dans Le coût de l'excellence nous évoquions un "contrat narcissique" en complément du contrat de travail (Aubert, Gaulejac, 1991). Ce dernier décrit les apports respectifs de l'employé et de l'entreprise, les droits et les devoirs de chacun, les contributions et les rétributions attendues. Dans le contrat narcissique, il s'agit d'autre chose. L'entreprise propose aux employés un défi qui est de l'ordre de l'idéal. Elle lui offre le moyen de se dépasser, de se surpasser, d'atteindre l'excellence. Ce contrat imaginaire réside sur la concordance entre les valeurs de performance et d'excellence présentées par l'entreprise et les désirs de toute puissance, les idéaux de perfection plus ou moins inconscients. Ce n'est plus seulement la force de travail qui est sollicitée mais l'énergie libidinale. Le travail n'est plus principalement une activité physique mobilisée pendant un temps limité par la pointeuse, il est un idéal de réalisation de soi. Le désir de faire carrière produit une mobilisation psychique intense sur les objectifs fixés par l'entreprise. Le travail devient l'élément clé d'un renforcement des liens entre des processus intrapsychiques d'idéalisation, de projection et d'introjection, de sublimation, et des processus organisationnels de sélection, d'évaluation, de répartition, d'ordonnancement, de classification, de production. L'individu cherche à satisfaire ses désirs inconscients, à canaliser ses pulsions et ses angoisses dans le travail. La mobilisation psychique devient un élément déterminant du rapport à l'entreprise.

Ces remarques illustrent l'évolution de la place du travail dans nos sociétés. "Historiquement, le travail s'inscrirait d'abord dans un système de croyance et de respect de l'autorité. Il correspondrait alors à une "éthique du devoir", une obligation envers la société ; ensuite, avec le développement de valeurs individualistes et rationnelles, le travail revêtirait une valeur instrumentale : il serait recherché pour la sécurité et le revenu qu'il peut apporter ; enfin, aujourd'hui, le travail devrait avant tout permettre aux individus de s'épanouir, la sécurité économique dans les pays riches n'étant plus une priorité et la qualité de la vie et le bien-être subjectif devenant des valeurs majeures" (Méda, 2010, p.18).

Dés le XIXe siècle, le rapport au travail va se modifier en profondeur pour devenir "l'essence de l'homme". Deux auteurs vont accompagner cette révolution. Hegel qui considère que le travail est à la fois ce qui transforme le monde à l'image de l'homme et ce qui le transforme lui-même. Marx va encore plus loin en affirmant que le travail est la seule activité humaine qui importe, la seule qui définit vraiment l'homme. Pour Marx, le travail est une condition indispensable de l'homme, une nécessité éternelle qui sert de médiateur entre l'homme et la nature (Marx, Le Capital, 1867). Il est donc essentiel de désaliéner le travail pour qu'il permette aux hommes d'exprimer pleinement leur personnalité et leur contribution à la production de la société. Pour que les hommes puissent vraiment produire comme des êtres humains, il convient donc, selon Marx, de faire la révolution pour sortir de l'exploitation de l'homme par l'homme et abolir le salariat qui crée un lien de subordination à l'employeur.

Deux éléments vont changer la donne depuis la fin du XIXe siècle. Le salariat va se généraliser et devenir le support de protection sociale, de droits importants qui donnent aux salariés une sécurité objective dont ils ne peuvent se passer au risque de basculer dans la désaffiliation (Castel, 2003). L'exploitation est alors contrebalancée par la sécurité qu'apporte le fait d'avoir un emploi. Par ailleurs le lien de subordination va se transformer avec "la révolution managériale". Il ne s'agit plus comme dans l'univers taylorien et disciplinaire de "rendre les corps utiles dociles et productifs" (Foucault, 1975) mais de réconcilier l'homme et l'entreprise. L'exercice du pouvoir au sein des entreprises va profondément évoluer. La gestion managériale préfère l’adhésion volontaire à la sanction disciplinaire, la mobilisation à la contrainte, l’incitation à l’imposition, la gratification à la punition, la responsabilité à la surveillance. Sa force s’enracine dans un système de valeurs qui favorise l’engagement individuel dans lequel la recherche du profit est couplée à un idéal. Le travail doit devenir le lieu de l’épanouissement de chacun, de la performance individuelle et collective, du dynamisme et de l'émulation pour la réussite de tous, de l’amélioration de l’existence des clients comme des collaborateurs. Il s’agit enfin de conduire ces activités avec le sens de l’éthique. Projet et idéal vont de pair. Personne ne peut se satisfaire de se consacrer totalement à son travail pour une finalité uniquement financière. Depuis Max Weber (1920), on a compris que les hommes travaillent pour leur salut et pas seulement pour de l’argent.

L’entreprise hypermoderne propose un idéal commun qui doit devenir l’idéal des employés. Cette captation de l’Idéal du Moi de chaque individu ne s’effectue pas mécaniquement. Il convient d’abord que les valeurs individuelles ne soient pas trop en rupture avec celles de l’organisation. Sur ce point, les procédures de sélection sont très sophistiquées. Elles opèrent un ajustement entre la « personnalité » des candidats et les attentes de l’organisation. Des tests, des entretiens, des mises à l’épreuve, des analyses graphologiques et psychologiques, permettent de décrire, mesurer, évaluer, classer, comparer, jauger, ceux qui ont les meilleures caractéristiques pour s’adapter au modèle de comportement attendu. Les élèves des écoles d’ingénieur et des écoles de commerce sont, a priori, les plus aptes à opérer l'intériorisation des façons de faire et de penser conformes aux attentes de l’entreprise. Les cours de formation internes, les dispositifs d’évaluation et les procédures de promotion tiennent compte des apprentissages et des savoirs accumulés, mais également et peut-être surtout, des « motivations », c’est-à-dire de l’aptitude et de la volonté à se mobiliser pour remplir les objectifs et pour adhérer aux projets de l’entreprise. Le travail devient un "challenge", un moyen de dépassement de soi.

On comprend mieux pourquoi, dans ces entreprises, les revendications des travailleurs s'expriment moins sur les registres quantitatif et matériel que sur les registres qualitatifs et subjectifs. Dans le capitalisme industriel, l'essentiel des conflits se cristallisait sur les conditions de travail, l'augmentation des salaires, la diminution du temps de travail. Il s'agissait surtout de gagner plus et de travailler moins. Aujourd'hui, même si ces revendications restent absolument d'actualité pour bon nombre de salariés, on voit émerger des revendications plus existentielles en termes de malaise subjectif et de souffrance au travail. Ce déplacement des plaintes du registre de l'avoir au registre de l'être met les organisations syndicales comme les directions d'entreprises en difficulté parce qu'elles échappent aux modes habituels de régulation. L'être est du côté de la subjectivité, de l'ineffable, des sentiments, de l'intériorité, autant de dimensions qui ne sont pas du registre de l'action syndicale traditionnelle ni de celle des patrons. Et pourtant les symptômes du malaise ne peuvent les laisser indifférents tant ils deviennent incontournables.

D'abord facteur de production de richesse et moyen de subsistance, le travail devient un élément central de l'accomplissement de soi. Il est au cœur du rapport entre l'être de l'homme et l'être de la société. Il invite les individus à se réaliser tout en contribuant à produire la société en se produisant eux-mêmes. Il obéit moins à l'éthique du devoir et de l'obéissance qu'à l'aspiration au développement personnel. La question identitaire devient alors centrale. L'identité professionnelle a toujours été un élément essentiel de l'existence sociale. Aujourd'hui ce n'est plus seulement "l'identité au travail" (Sainsaulieu, 1976) qui est en jeu que le sujet dans toute son existence. La distinction travail / hors travail n'est plus évidente. Entre la vie privée et la vie au travail, les frontières sont de moins en moins nettes. L'intrication entre le travail et les autres secteurs de l'existence s'accentue en permanence. Le travail et la vie sont devenus indissociables.

Le travail, lieu de tensions contradictoires

Le travail est un facteur de production créateur de richesse pour soi et pour la société, dans le registre du faire, un élément central pour avoir des moyens de subsistance et accéder à la protection sociale, dans le registre de l'avoir, une des voies pour exister, se développer et s'accomplir, dans le registre de l'être. Ces dimensions sont contradictoires.

Marx avait bien mis en évidence la dualité irréductible du travail comme support de l'émancipation et comme facteur d'aliènation. Pour l'auteur du Capital, le travail est au fondement du pouvoir d'agir sur soi et sur le monde. C'est "un processus de formation dans lequel les sujets peuvent se reconnaître eux-mêmes individuellement et collectivement comme des sujets de l'action, construisant l'histoire, grâce à l'expérience qu'ils font d'eux-mêmes dans le produit de leur travail" (Honneth, 2007, p.24). Par le travail, le sujet peut advenir et se constituer en collectif pour agir comme sujet socio-historique. Mais ce processus de subjectivation et d'émancipation est aliéné par le capitalisme qui réifie le travail, le mécanise, le fragmente. Le capitalisme produit un renversement par lequel "l'activité de travail structurant la subjectivité devient une activité dirigée par l'objet", écrit Axel Honneth (op cit, p.26). Le travail devient alors facteur d'aliénation et d'exploitation. C'est à partir de ce double mouvement qu'il faut penser le travail. La constitution d'une classe de travailleurs va les conduire à s'organiser pour lutter contre l'exploitation et l'instrumentalisation dont ils sont l'objet, pour reconquérir une possibilité d'action sur leurs conditions de travail et sur la société. "À mesure que diminue régulièrement le nombre des magmats du capital qui usurpent et monopolisent tous les avantages de ce procès de mutation continue, s'accroît le poids de la misère, de l'oppression, de la servitude, de la dégénérescence, de l'exploitation, mais aussi de la colère d'une classe ouvrière en constante augmentation, formée, unifiée et organisée par le mécanisme même du procès de production capitaliste" (Marx, 1867, édition PUF, p.856). Ainsi, la logique capitaliste devrait aboutir, inéluctablement, à une révolution menée par le prolétariat. L'exploitation et la réification suscitent la colère qui génère la révolte et l'organisation du prolétariat en classe sociale pour lutter contre les propriétaires des moyens de production et renverser l'ordre capitaliste.

L'analyse marxiste du travail a été l'objet de débats multiples. L'histoire nous a montré sa puissance et ses limites. Sans entrer dans la discussion sur son actualité, on retiendra l'intérêt d'une approche dialectique pour mieux comprendre en quoi le travail est toujours traversé par une dualité irréductible entre émancipation et aliénation, entre libération et oppression : il est un support essentiel de réalisation de soi et un facteur de contrainte, d'empêchement à vivre. Il convient donc de mieux comprendre les dynamiques contradictoires qui traversent le rapport au travail aujourd'hui. S'il est un motif de souffrance, il est aussi un lieu de plaisir. S'il est porteur d'aliénation, il est également un moyen de réalisation de soi-même. Il est fondateur de l'existence sociale, par les droits et la protection qu'il génère, et facteur d'insécurité puisque la perte d'emploi est un drame qui peut prendre la forme d'une "mort sociale". La peur de perdre son emploi est un facteur d'insécurité important. "Perte d'emploi, perte de soi", écrit Danièle Linhart à ce propos (Linhart, 2002). Le contrat de travail implique la subordination, mais il est aussi un élément nodal de l'autonomie. Le travail reste une valeur importante et sa place est essentielle dans la vie comme lieu d'épanouissement, comme vecteur de socialisation, comme moyen de subsistance, comme plaisir de la rencontre, comme lieu de développement personnel. Il est un élément d'étayage qui fonde la confiance en soi et en même temps il suscite une dépendance intellectuelle et affective qui peut saper l'estime de soi. La plainte de ne pas recevoir suffisamment de reconnaissance est le revers d'une attente forte de tout ce que le travail peut apporter. Le tripalium origine le travail dans le registre du poteau de torture et de la souffrance, mais le travail représente également un élément essentiel de la construction de soi et de l'épanouissement des individus.

La formule, "on ne veut pas perdre sa vie à la gagner" exprime parfaitement l'intrication du travail et de la vie, du travail comme moyen pour subsister et du travail comme finalité de l'existence. Entre travailler pour vivre et vivre pour travailler, le balancement est permanent. C'est bien parce que le travail fait vivre qu'il fait souffrir. Il ne peut, du moins aujourd'hui, être pensé comme une sphère séparée des autres dimensions de la vie personnelle et de la vie sociale. La distinction travail / hors travail devient floue. Les transformations constatées dans le monde du travail se répercutent dans les autres sphères de l'existence.

Les débats sur le mal-être au travail expriment des positions antagonistes révélatrices de ces tensions contradictoires : le travail est-il un moyen ou une finalité, un lieu d'aliénation ou d'émancipation, un facteur d'épanouissement ou d'anxiété, un vecteur de subjectivation ou d'instrumentalisation? La réponse est dans la question. Il suffit de remplacer le "ou" par un "et". Ces différents pôles opposés sont indissociables. La tension entre eux est toujours présente. Le mal-être n'est compréhensible qu'en tant que le travail peut-être facteur de bien-être. Les mêmes situations peuvent apporter du plaisir et/ou de la souffrance, de la sécurité et/ou de l'insécurité, du dynamisme et/ou de l'inhibition, de la santé mentale et/ou de la dépression, du bonheur et/ou du malheur. Pour autant, il ne faudrait pas minimiser les conditions objectives de travail qui sont plus ou moins contraignantes, plus ou moins pénibles, plus ou moins stressantes. Il convient donc de mieux comprendre l'articulation entre les conditions concrètes, matérielles, objectives (souvent évoquées comme "réelles") et les conditions subjectives, éprouvées, vécues, dont la réalité n'est pas moins tangible.

Dans cette perspective, certains défendent l'idée d'un travail soutenable, "un travail qui au lieu de briser, fatiguer, abaisser, abrutir, user, permettrait au contraire de s'exprimer, de nouer des contacts, d'être utile, d'être un opérateur de santé" (Méda, 2010, p.54). Force est de constater que les deux aspects de cette alternative, le travail qui use et celui qui épanoui, coexistent en proportion variable selon la nature de l'emploi et selon le type de rapport que l'individu entretient avec son activité. La plupart des emplois sont à la fois un lieu de fatigue, de contrainte, voire d'aliénation, et un lieu d'expression, d'accomplissement de soi, voire de libération. Par ailleurs, un même travail peut-être vécu à certains moments comme un lieu de souffrance ou d'abrutissement et, à d'autres, comme un élément essentiel de réalisation, d'épanouissement et de rencontres. Il y a là une dynamique contradictoire qui articule des éléments objectifs et subjectifs.


° ° ° °

Longtemps les revendications des travailleurs ont essentiellement porté sur le premier point : les salaires, les conditions de travail, les avantages dits "sociaux". Les organisations syndicales ne savaient pas comment aborder les secondes considérées comme du domaine psychologique, intime, personnel. Elles commencent à se rendre compte que ces dimensions subjectives sont tout aussi essentielles, qu'elles sont indissociables des conditions de travail, et que les salariés attendent de leurs représentants qu'ils les défendent et les protègent de la violence et de la souffrance engendrées par ces conditions. Il faut alors changer les modes d'action, trouver d'autres modalités de mobilisation. Après le suicide d'un collègue, la grève n'est sans doute pas la meilleure réponse pour affirmer une solidarité et dénoncer les causes qui ont conduit au passage à l'acte. Et pourtant, il est essentiel, face à un acte profondément individuel et destructeur, de trouver des modalités d'action pour exprimer de la solidarité, donner une expression symbolique au malaise ressenti, favoriser une élaboration collective.

Le travail a donc des visages opposés. D'un côté il est un élément nodal de la construction de soi comme sujet, il apporte du plaisir, du sens, des éléments objectifs de bien-être; de l'autre, il peut être le lieu de l'aliénation, de l'oppression, il génère de la souffrance, de l'incohérence, des éléments subjectifs de mal-être. Alors que globalement les conditions de travail se sont améliorées, que le temps de travail a diminué, les indicateurs de santé au travail se dégradent et les symptômes d'un malaise s'accentuent. Si les contradictions entre émancipation et aliénation, sur le plan social, entre plaisir et souffrance sur le plan existentiel, ne sont pas nouvelles, c'est leur intensité, leur intrication et leur exacerbation qui sont devenues aujourd'hui un phénomène social.

Bibliographie

Arendt H. (1958), Condition de l'homme moderne, Paris, Agora, 1994.

Aubert N., Gaulejac V. de, Le Coût de l'excellence, Paris, Seuil, 1991.

Aubert N., L’individu hypermoderne, Toulouse, Erès, 2004,(ouvrage collectif).

Bourdieu P., Les structures sociales de l’économie, Paris, Seuil, 2000.

Bourdieu P., Contre-feux 2, Paris, Raisons d'agir, 2001.

Brunel V., Les managers de l'âme, Paris, La découverte, 2004

Castel R., Les métamorphoses de la question sociale, Paris, Fayard, 1995.

Castel R., L’insécurité sociale, Paris, Seuil, 2003.

Dejours C., Travail et usure mentale : de la psychopathologie à la psychodynamique du travail, 3e édition , Paris : Bayard Éditions, 2000.

Dejours C., L'évaluation du travail à l'épreuve du réel, Paris, INRA, sciences en questions, Édition Quae, 2003.

Enriquez E., Les jeux du désir et du pouvoir dans l'entreprise, Paris, Desclée de Brouwer, 1998.

Enriquez E., Clinique du pouvoir, Toulouse, ÉRÈS, 2007.

Fernandez, G., Soigner le travail. Itinéraire d’un médecin du travail,Toulouse. ERES, 2009.

Foucault M., Surveiller et punir, Paris, NRF, 1975.

Gaulejac V. (de), Taboada-Leonetti I., La lutte des places, Paris, Desclée de Brouwer, 1996.

Gaulejac V. (de) (2005), La société malade de la gestion, Paris, Seuil, Points, 2009. Traduction portugaise, Gestào como doença social, Idéias y Letras, Sao Paulo, 2008),

Gaulejac V. de, Hanique F., Roche P., La sociologie clinique, enjeux théoriques et méthodologiques, Toulouse, ÉRÈS, 2008.

Habermas J., Théorie de l’agir communicationnel, Paris, Fayard, 1987.

Hanique F., Le sens du travail, Toulouse, Érès, 2004.

Harlé A., Le coût et le goût du pouvoir : le désenchantement politique face à l'épreuve managériale, Paris, Dalloz, 2010.

Honneth A., Travail et agir instrumental, À propos des problèmes catégoriels d'une théorie critique de la société, Travailler, N°18, 2007.

Kojève A., Introduction à la lecture de Hegel. Leçons sur la Phénoménologie de l'esprit professées de 1933 à 1939 à l'École des Hautes Études, réunies et publiées par Raymond Queneau. Paris, Gallimard, 1947.

Lallement M., Le travail, une sociologie contemporaine, Paris, Folio, 2007.

Linhart D., Rist B., Durand E., Perte d’emploi, perte de soi, Toulouse, Érès, 2002.

Marx K. (1848), Ebauche d’une critique de l'économie politique, in Oeuvres, volume II, La pléiade, NRF, 1972.

Marx K. (1867), Le capital, in Oeuvres, volume II, La pléiade, NRF, 1972.

Marx K. (1867), Le capital, Livre I, Paris, PUF, collection Quadrige, 1993.

Méda D., Travail : la révolution nécessaire, Paris, L'aube, 2010.

Morin E., Introduction à la pensée complexe, Paris, ESF, 1990.

Pagès M., Bonetti M., Gaulejac V. (de), Descendre D., L’Emprise de l’organisation, Paris, Desclée de Brouwer, 1998. Traduction portugaise, O poder das organizaçòes, Atlas, Sao Paulo,1987.

Sainsaulieu R., L'identité au travail, Paris, Presses de la fondation des sciences politiques, 1976.

Weber M., (1905), L’éthique protestante et l’Esprit du capitalisme, Paris, Plon, 1969.

Weber H., Du ketchup dans les veines, Toulouse, ÉRÈS, 2005.

Note

1 L'association emploi / travail peut-être facteur de confusion. On peut en effet travailler sans avoir pour autant un emploi. Le travail domestique en est l'exemple le plus évident. Beaucoup de retraités n'ont plus d'emploi, mais développent des activités qui leur permettent de continuer à travailler activement. À l'heure ou les emplois deviennent précaires et le travail intense, la dissociation entre les deux est de plus en plus net.