"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
Licence
"GNU / FDL"
attribution
pas de modification
pas d'usage commercial
Copyleft 2001 /2014

Moteur de recherche
interne avec Google
Qui est « je » ? Sociologie clinique du sujet Par V. de Gaulejac, Seuil, 2009
Notes de lecture Juliette Roméro

Origine : http://www.irts-lr.fr/spaw/uploads/images/NDL_qui_est_je_09.pdf

Notes de lectures "Le Sociographe"

Vous trouverez ci-dessous le listing des titres ayant donné lieu à une note de lecture, que nous nous mettons en ligne en complément des recensions publiées dans la revue. Chaque note fait une page maximun, que vous pouvez télécharger en Pdf. Ce listing est régulièrement actualisé (224 notes en lignes au 13/09/2011) http://www.irts-lr.fr/notes-de-lecture.html
(Le sociographe met à disposition les livres et périodiques qu'il reçoit des éditeurs pour recensions. Si vous êtes intéressé(e) pour recevoir chaque mois par mail le listing des titres disponibles, faites votre demande par mail (lesociographe at irts-lr.fr
Présentation Le Sociographe http://www.irts-lr.fr/presentation-sociographe.html
Le Sociographe publie une revue trois fois par an : (janvier, mai, septembre), des hors-séries et une série "Congrès & colloques" jusqu'en 2009. Au 1er décembre 2011, Le Sociographe est publié par l’IRTS du Languedoc-Roussillon. Associé avec BUC Ressources (Yvelines), l'EESTS NPDC, l'ESTES de Strasbourg, le GIRFAS-Bretagne, l'IREIS Rhône-Alpes et les IRTS de Basse-Normandie, de Champagne-Ardenne, de Ile-de-France Montrouge/Neuilly-sur-Marne, de Nord Pas de Calais, de PACA-Corse, de Poitou-Charentes et de La Réunion. ; et de Instituto superior de serviço social do Porto (Portugal). En partenariat avec la Sauvegarde du Nord. Avec le soutien de la MAIF.


Qui est « je » ? C’est donc un autre, développe tranquillement l’auteur de cet ouvrage aussi clair que méthodique. Sujet de la modernité et de ce l’on nomme désormais à loisir, l’hypermodernité, le Sujet Majuscule se tient au creux de l’histoire de nos idéologies.

Peut-on en déterminer l’essence, en définir la substance ? Et sur quels postulats théoriques ? « Pour nous, l’homme se caractérise par le dépassement d’une situation, par ce qu’il parvient à faire de ce qu’on a fait de lui » énonce Sartre. Le sujet se révèle dans le dépassement. Autrement dit, « aucun individu ne devient sujet sans être d’abord assujetti et sans subir une sujétion » rappelle Judith Butler. Au carrefour entre le sociologique et le psychologique, l’identité est alors une histoire que le sujet s’accorde comme auteur et lecteur. « L’histoire d’une vie ne cesse d’être refigurée par toutes les histoires véridiques ou fictives qu’un sujet se raconte sur lui-même » écrit Paul Ricoeur. L’identité est fiction, mouvement, continuité, indéfinissable strictement. Qu’en est-il du sujet ? Une croyance qui place l’homme en équivalence avec Dieu et occulte la diversité des « personnes psychiques » affirme Freud. Récusant l’idée d’une unité psychique, Freud écarte la notion même de sujet pour situer l’individu dans la dualité conflictuelle, c’est–à- dire l’appareil psychique dans l’ambivalence d’éros et de thanatos.

On est donc bien loin des convictions partisanes d’une « psychologie du moi » sans aspérités et autres descriptions de nos comportements troublés. Le grand ISA (Individu-Sujet-Acteur) condamné à réussir est pris dans des contradictions sociales et existentielles qui caractérisent l’hypermodernité actuelle. L’illusion de l’auto-engendrement du sujet adjointe à l’injonction de sa puissance en termes de mérite, gratification, reconnaissance place aujourd’hui l’individu dans le registre de la distinction, de la singularité à conquérir. « Si l’on considère la modernité du coté du surmoi, de la raison et de la loi, l’hypermodernité serait plutôt du côté de l’idéal du moi, du dépassement des limites et de la réalisation de soi-même » écrit Vincent de Gaulejac.

Et de conclure sur les significations sociologiques de ces nouvelles passions de l’identité, l’auteur interroge l’idéologie même de nos sociétés prônant et reléguant en un même mouvement au nouveau Sujet toute production de sens. Son verdict est finalement accablant car termine-t-il : « Là où l’homme et la femme souffrent, et face à l’impuissance des institutions et des politiques à apporter des réponses, on attend du sujet qu’il trouve « la » solution ». De quoi méditer très longuement sur la place occupée par le travail social, notamment, dans la généreuse gestion de nos vies précarisées…