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http://www.radioairlibre.be/infos/amnesty_international.htm
La torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants sont interdits en toutes circonstances par
le droit international. Cependant, chaque jour, dans des pays du
monde entier, des personnes sont victimes de tortures et de mauvais
traitements.
La plupart des instruments utilisés pour infliger des douleurs
ou des souffrances aiguës existent depuis des années.
Néanmoins, les tortionnaires ont de plus en plus recours
à des appareils faisant appel à des technologies récentes,
comme les armes incapacitantes qui envoient de fortes décharges
électriques. Ces armes sont fabriquées en nombre toujours
plus grand. Leur utilisation et leur prolifération sont en
passe d’échapper à tout contrôle.
Armes à décharges électriques
Selon une récente étude réalisée pour
le compte d’Amnesty International, 230 sociétés
dans 35 pays fabriquent, distribuent ou font le courtage d’armes
à décharges électriques. Huit pays représentent
une part substantielle de la production mondiale de ces armes, à
savoir la Chine, Taiwan, les États-Unis, la Corée
du Sud, l’Afrique du Sud, la République tchèque,
le Mexique et la Russie.
Les normes internationales concernant le recours à la force
par les responsables de l’application des lois exigent que
les fonctionnaires n’utilisent que le minimum de force nécessaire
pour atteindre un objectif légitime et que tout recours à
la force soit proportionnel à la menace représentée,
afin d’éviter toute lésion ou douleur injustifiée.
Amnesty International s’inquiète de ce que les armes
à décharges électriques se prêtent aisément
aux abus.
L’organisation ne cesse de recevoir des informations faisant
état de l’utilisation de ces armes dans des situations
où le recours à une telle force n’est pas justifié.
Aux États-Unis, des policiers auraient utilisé des
pistolets Taser contre des personnes qui étaient déjà
menottées et maîtrisées.
Pour Chiquita Hammonds, élève de quinze ans à
Miramar, en Floride, la journée du 3 octobre 2002 avait commencé
normalement. Mais le chauffeur du bus qui la conduisait à
l’école s’est arrêté en route pour
signaler à trois agents de police que les élèves
étaient turbulents. Chiquita Hammonds est descendue du véhicule.
Selon les policiers, elle a commencé à proférer
des insultes. Alors qu’elle s’éloignait, l’un
des policiers a attrapé la jeune fille par le poignet et
a tenté de lui passer les menottes. Elle aurait réagi
en faisant tomber les lunettes de soleil du policier. L’adolescente
a ensuite été immobilisée au sol tandis que
le policier essayait de la menotter. Un autre agent a aspergé
de gaz poivre le visage de la jeune fille, ce qui, selon la police,
n’a pas eu d’effet visible. C’est alors qu’un
troisième policier a dégainé son arme incapacitante
M-26 de marque Taser et a tiré dans le dos de Chiquita Hammonds,
lui envoyant une décharge de 50000 volts.
L’usage d’une telle arme, non létale mais douloureuse,
constitue ici un recours à la force excessif et disproportionné.
Entraves pour les jambes, chaînes et menottes pour
les pouces
Selon une récente étude réalisée pour
le compte d’Amnesty International, au moins 69 entreprises
de 12 pays fabriquent, distribuent ou font le commerce des entraves
pour les jambes, des chaînes ou des menottes pour les pouces.
Les chercheurs ont recensé des fabricants de ces matériels
dans des pays comme la Chine, la République tchèque,
l’Afrique du Sud, la Corée du Sud, Taiwan et les États-Unis.
Amnesty International a mis en évidence, dans de
nombreux pays, l’utilisation généralisée
de ces dispositifs à des fins de torture et autres mauvais
traitements.
Alfred Harding, un prisonnier reconnu coupable d’une infraction
liée à l’utilisation d’armes à
feu et pour ainsi dire détenu au secret dans le quartier
des condamnés à mort à Sainte-Lucie, a été
entravé des mois durant. On ne lui enlevait jamais les fers
de 15 centimètres qu’il portait aux chevilles et, la
nuit, ses poignets étaient également enchaînés.
En juillet 2000, lorsque Amnesty International est intervenue auprès
des autorités pour faire part de ses préoccupations
à son sujet, il était semble-t-il en proie à
des souffrances aiguës provoquées par le port des chaînes
pendant une période prolongée. Ses chevilles étaient
à vif en raison du contact constant avec les fers. Il avait
également mal au dos et ressentait de vives douleurs musculaires
du fait de son incapacité à se déplacer. Sur
la base des éléments de preuve disponibles, on peut
affirmer que le traitement réservé à cet homme
constituait une forme de torture.
En 2002, après une campagne organisée par la section
américaine d’Amnesty International, le gouvernement
des États-Unis a retiré la dispense de licence d’exportation
pour tous les pays de l’OTAN, à l’exception du
Canada. Autrement dit, le seul pays vers lequel les États-Unis
peuvent continuer à exporter sans qu’il soit besoin
d’une licence est le Canada. Cette mesure constitue incontestablement
une grande avancée. Cependant, le problème est que
le gouvernement canadien ne contrôle pas les exportations
d’entraves pour les jambes. Les dispositifs qui, d’une
façon ou d’une autre, arriveront au Canada pourront
donc être réexportés partout dans le monde,
sans aucun contrôle et en l’absence de toute procédure
de suivi qui permettrait de savoir où ils vont et comment
ils sont utilisés.
Renforcer les mécanismes de contrôle des exportations
et prévoir des mesures plus strictes
Dans de nombreux pays qui fabriquent ou fournissent des entraves
pour les jambes, des armes à décharges électriques
ou des équipements et produits utilisés pour infliger
la peine capitale, il n’y a pas de contrôle efficace,
si ce n’est aucun, sur l’importation, l’exportation
ou le courtage de ces matériels. En Afrique du Sud, par exemple,
il ne semble y avoir aucune réglementation nationale applicable
aux entraves pour les jambes, aux chaînes, aux menottes pour
les pouces ou aux armes à décharges électriques,
ni aucun mécanisme de contrôle des exportations. Une
fois entrés en Afrique du Sud, de tels équipements
peuvent être réexportés en dehors de toute surveillance
des autorités.
La Commission européenne a récemment arrêté
un règlement commercial qui, s’il est adopté
sans modification, interdira toute opération d’importation
et d’exportation et toute activité de courtage exercée
par une personne ou une entreprise à l’intérieur
ou à partir de l’un des 15 États membres de
l’Union européenne et ayant trait à des équipements
et produits classés par la Commission dans la catégorie
des équipements de torture, par exemple les ceinturons à
décharges électriques conçus ou modifiés
pour immobiliser des êtres humains, les entraves, les poucettes
et vis pour les pouces et les chaînes multiples. Ce règlement
imposera aussi à tous les États membres de soumettre
à des contrôles les exportations de matraques et armes
incapacitantes, ainsi que des agents de lutte anti-émeute
tels que les gaz lacrymogènes.
Amnesty International se félicite de l’introduction
de ce règlement et invite les autres gouvernements du monde
entier à prévoir des interdictions et des contrôles
analogues.
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