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Date: 25 Août 2003
Subject: [zpajol] Sans papiers - témoignages - l'Humanité
du 23 aout 2003
Sans-papiers Témoignages
" La France a besoin de nous "
Clandestinité, exploitation, interpellations, jugements, emprisonnements,
expulsion, ils vivent l'humiliation au quotidien.
Quand Sissoko Anzoumane décide de quitter le Mali pour la France,
en 1993, il ne sait pas encore qu'il va vivre un véritable calvaire.
À l'époque, Sarkozy ne s'intéressait qu'au Budget
et son aïeul s'appelait Pasqua. " Chez nous, on n'accorde
pas autant d'importance aux papiers. On vit encore avec le carnet de
famille, instauré par les Français à l'époque
coloniale, qui nous permet de voyager à l'intérieur du
pays ", raconte cet homme de trente-huit ans qui a quitté
son pays sous la dictature. Il obtient d'abord un visa pour la Belgique,
où il se procure une voiture pour traverser la frontière.
Arrivé dans le pays des droits de l'homme, on lui apprend qu'il
doit faire une demande d'asile. Réponse négative. Le voilà
donc " clandestin ". C'est en 1997 qu'il est interpellé
une première fois. " J'étais en garde à vue
le jour de la victoire de Jospin ", se souvient-il. Condamné
à une interdiction de séjour de dix ans, il refuse d'embarquer.
Rebelote en 2001. Arrêté à la sortie d'une bouche
de métro par quatre CRS, en possession de faux papiers d'identité,
il se retrouve cette fois-ci à la prison de la Santé.
Il y restera six semaines, au cours desquelles les docteurs de l'hôpital
Cochin détecteront une maladie importée d'Afrique, non
dangereuse mais qui nécessite un traitement en France. Une situation
dont le procureur ne tient pas compte. Mais l'intervention du consulat
du Mali, qui ne l'autorise pas à retourner au pays, lui donne
une nouvelle chance.
Agé de trente-huit ans, marié et père d'une petite
fille, Sissoko dispose aujourd'hui d'une autorisation provisoire de
séjour (APS) jusqu'au mois d'octobre. Employé dans une
société de nettoyage, il travaille également pour
la Coordination nationale des sans-papiers. " L'APS ouvre les droits
de Sécurité sociale, mais finit par créer des clandestins
lorsqu'elle arrive à échéance. La loi dit que,
lorsque l'on réside sur le sol français depuis dix, on
a droit à un titre de séjour pour raison de vie privée
familiale, mais ce n'est pas appliqué. La France fabrique des
sans-papiers parce qu'elle en a besoin. En prison, on nous fait travailler
pour moins de 100 euros par moi. Même la police me l'a dit : quand
on est en règle, ils n'ont pas les moyens de profiter de nous.
Sarkozy se dit humaniste et pragmatique, mais, pour nous, il est pire
que Le Pen. Il a supprimé dans la pratique le droit à
des papiers pour raison médicale ", dénonce-t-il.
Et d'espérer qu'" à partir de septembre la lutte
va reprendre ".
Avec son ami Sissoko Sékou, il partage le même prénom,
le même âge, la même nationalité et quasiment
le même sort. Arrivé en France le 30 septembre 1992, il
obtient, quant à lui, l'asile politique pour une durée
de sept mois. À son expiration, il se procure également
une fausse carte pour pouvoir travailler. Il est arrêté
en 1994 et condamné à trois mois de prison. Libéré
sans arrêté de reconduite à la frontière
- c'était avant l'existence de la double peine -, il retourne
dans la clandestinité.
De nouveau arrêté en 1996, il est envoyé au centre
de rétention de Versailles pendant trois jours, avant de prendre
la direction de l'aéroport de Roissy. Là, il est expulsé
vers la Belgique, mais refusera d'aller plus loin car il n'a pu prendre
de bagages avec lui. Retour à la case départ. Nouveau
jugement, nouvelle condamnation : dix ans d'interdiction de séjour
pour refus d'embarquer. Le cercle vicieux. Quand il demande une ligne
téléphonique à France Télécom, l'entreprise
se renseigne auprès de la préfecture et alerte la police.
Là encore, c'est le consulat qui s'opposera à son expulsion,
car la femme de Sissoko est enceinte de huit mois. À présent,
le fisc, à qui il a payé l'impôt sur les revenus
pendant cinq ans, lui réclame 3 000 euros et le menace de vendre
ses biens.
L'État, en effet, semble bien s'accommoder de ses sans-papiers.
Ludovic Tomas
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ZPAJOL liste sur les mouvements de sans papiers
* archives : <http://listes.rezo.net/archives/zpajol/>
Le lien d'origine sur site de l'Humanité
http://www.humanite.fr/journal/2003-08-23/2003-08-23-377492class=