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J'y suis, j'y vote ! La lutte pour les droits politiques aux résidents étrangers de Saïd Bouamama
Présentation du livre
samedi 8 novembre 2003, par Mogniss Abdallah

http://icietlabas.lautre.net/article.php3?id_article=67

La citoyenneté est indivisible". Cette maxime pourrait résumer le pamphlet que vient de publier le sociologue et militant associatif Saïd Bouamama aux éditions l'Esprit Frappeur.

"J'y suis, j'y vote !" relate les différentes étapes de la lutte pour les droits politiques non seulement pour les résidents étrangers, mais aussi en remontant dans le temps, pour les esclaves, les pauvres, les travailleurs et les femmes. N'en déplaise aux tenants du "républicainement correct", l'étendard de l'égalité des droits de l'homme porté par la Révolution française de 1789 est entâché d'exclusions. Si la République des débuts reconnaît en principe à tous de jouir des droits de "citoyens passifs" (protection de leur personne, de leur propriété, de leur liberté...), elle récuse pour les femmes, les enfants et les jeunes, les étrangers et les oisifs, une citoyenneté active, c'est-à-dire les droits politiques et le pouvoir d'influer sur la chose publique. Et cela au nom d'une "logique capacitaire", qui prétend que certaines catégories de la population sont incapables d'exercer ces droits politiques ou qui considère à tout le moins qu'elles doivent être soumises à une période probatoire plus ou moins longue.

Tout au long des XIXème et XXème siècles, cette indignité citoyenne "va marquer nettement une inégalité des droits" qui ancre dans les esprits et les comportements le principe de droits différenciés entre citoyens, entre citoyens et non-citoyens. La hiérarchisation de la citoyenneté ainsi pérennisée conduit inévitablement aujourd'hui à des phénomènes comme la catégorie des immigrés sans-papiers qui, bien que partie- prenante de la société française, se différencie en droits des résidents immigrés en situation régulière, eux-mêmes soumis à un régime de lois spéciales différencié selon leur appartenance à l'Union européenne, à des "pays sûrs" ou des "pays à risques" etc.

Face à cette citoyenneté à étages justifiée par des personnages illustres comme Condorcet ou Siéyès hier et par de grands ténors socialistes aujourd'hui, Saïd Bouamama préconise la réaffirmation de l'égalité des droits pour tous. Il appuie son argumentaire sur les droits historiques acquis par la lutte des esclaves, des travailleurs et des femmes.

Concernant l'accès des immigrés au droit de vote et à la nationalité, il rappelle que la Constitution de 1793 et les propositions du parti communiste français en 1930 ou à la veille du Front populaire allaient bien au-delà des attermoiements d'aujourd'hui. Il met en garde contre les tentations de démonstration "capacitaire" (conseils municipaux consultatifs, droit de vote limité aux élections locales etc.) et avance le mot d'ordre de pleine égalité des droits politiques à tous les échelons. Il réclame même l'accès automatique à la nationalité française par simple déclaration comme cela se pratique désormais en Belgique. Or, cet accès en France n'est toujours pas un droit, mais une option soumise au pouvoir discrétionnaire de l'administration.

Selon Saïd Bouamama, ce cadre permet de réunifier les luttes des différentes composantes de l'immigration et du mouvement social, en écartant les velléités de division comme celles qui voudraient par exemple opposer la question du droit de vote au mouvement des sans-papiers.

A cet égard, le titre du pamphlet est explicite. Le slogan "J'y suis, j'y vote !" renvoie directement à celui des immigrés avec ou sans papiers : "J'y suis, j'y reste !" (tous deux renvoient d'ailleurs à des campagnes sur ces thèmes entre 1986 et 1989 -cf. aussi le livre de MognissH. Abdallah "J'y suis, j'y reste ! les luttes de l'immigration en France depuis les années 60 ; éditions Reflex).

Cependant, le droit de vote et d'éligibilité à tous les échelons n'est pas une fin en soi. C'est, conclut l'auteur, une condition nécessaire mais pas suffisante pour l'égalité des droits et pour une transformation sociale et politique radicale de la société, sous l'impulsion de l'ensemble des citoyens actifs et solidaires.

Mogniss H. Abdallah agence IM'média

J'y suis, j'y vote ! La lutte pour les droits politiques aux résidents étrangers par Saïd Bouamama, Editions L'Esprit frappeur, Paris, 2000. 1,5 euros.


J'y suis, j'y vote - La Lutte pour les droits politiques aux résidents
Saïd Bouamama
Présentation du livre

http://www.agora-international.com/cgi-bin/librairie/reference/EF077


J'y suis, j'y vote - La Lutte pour les droits politiques aux résidents -

Savez-vous que les parents de Zinedine Zidane n'ont pas le droit de voter ?

S'il est aujourd'hui enfin question d'accorder le droit de vote aux résidents étrangers, la cause n'est pas entendue pour autant. Et les arguments avancés pour le refuser ou le retarder ressemblent à s'y méprendre à ceux qu'on utilisa contre les pauvres jusqu'au 18e siècle, contre les femmes jusqu'à la Libération.

Saïd Bouamama clarifie ici une question qui fait l'objet de toutes les manipulations politiques imaginables et nous rappelle l'essentiel : les étrangers en France continuent à avoir les mêmes devoirs que les Français sans avoir les mêmes droits...

En matière de droit de vote des étrangers, la France est en passe de devenir la lanterne rouge européenne, comme elle le fut naguère pour le droit de vote des femmes. La question, comme celle de l'immigration, a fait l'objet de toutes les manipulations idéologiques et politiques imaginables. Or, la question du droit de vote reste un aspect essentiel du combat démocratique.

La glorification excessive de la Révolution française fondant " le pays des droits de l'homme " permet depuis deux siècles de masquer une conception réactionnaire de la nation et des droits du citoyen. Ce sont, à chaque fois, des luttes sociales et des rapports de force qui ont permis successivement aux ouvriers, puis aux femmes, d'avoir accès au droit de vote, et non une " révolution ". Les arguments avancés hier pour refuser ou retarder le droit de vote à ces derniers ressemblent à s'y méprendre à ceux utilisés pour les immigrés aujourd'hui. Les étrangers en France continuent à avoir les mêmes devoirs que les Français sans pourtant avoir les mêmes droits.

Ce que la Révolution française avait proclamé comme droits de l'homme et du citoyen devait, à l'époque des nationalismes européens, se réduire très rapidement à des droits du citoyen, le concept de citoyen étant interprété de manière restrictive comme ressortissant. Cette logique étroite du nationalisme et l'État-nation considère comme allant de soi que celui qui est sans État, soit aussi sans droit. "

P. Leuprecht