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Origine http://www.regardconscient.net/archi04/0407dominpsychan.html
Résumé : En organisant sa théorie sexuelle, Freud refoule la
terreur relationnelle suscitée par son père. Les projections qu’il
fait sur la nature féminine, loin de libérer les hommes, les éloignent
de leur capacité à jouir de la vie.
La psychanalyse pointe des souffrances humaines tout en verrouillant
l'accès à leurs causes. Ainsi, sa vulgarisation sert le patriarcat
car elle focalise l'esprit sur des interprétations orientées dans
le but non conscient d'éviter les responsabilités du père dans la
mise en scène des schémas relationnels dont il a souffert. L’utilisation
des notions erronées de supériorité et d'infériorité
en sont des exemples. Ces torsions du rapport à soi et aux autres
résultent de tout un processus de refoulement et de gestion du rôle
attribué à l'enfant dans la relation au père, à la mère et à la
communauté. Le déni de la primauté de la conscience commune aux
deux sexes qui est à l’origine de ces torsions, lutte insidieusement
contre le processus de libération et de réalisation de cette conscience.
Il entérine une relation de pouvoir qui est, au regard de notre
nature, une aberration.
Culpabilité et châtiments
La relation de pouvoir engendre un sentiment de culpabilité vécu
le plus souvent comme endogène. En fait, ce dernier est un avertissement
de l’abandon d’un état conscient au profit d’une
adaptation structurée à la névrose parentale et sociale. Notre nature
étant consciente, elle manifeste par un état spécifique les entraves
à sa spontanéité. Lorsque les mères se culpabilisent d'abandonner
leurs bébés à une nourrice ou à la crèche, c'est que leur place
d'êtres conscients est d'être auprès d'eux. La culpabilité que les
parents ressentent à vivre inconscients - et de plus, à le revendiquer
- est projetée sur l'enfant qui, à leurs yeux, est rendu alors coupable
de ne pas s'adapter suffisamment vite à leur structure névrotique.
Dans la mise en place des rejouements collectifs, les représentants
du pouvoir entérinent cette conception perverse. Ils l’entérinent
et se servent du sentiment de culpabilité pour se légitimer de juger
et de punir afin d'asservir, au lieu de résoudre ce dernier en lui
reconnaissant ses causes réelles. Les châtiments infligés aux déviants sont
toujours la manifestation crue des causes de l’aveuglement
collectif : humiliations, coups, isolement, emprisonnement, voire
exécution. Mais en pratiquant ce raccourci, les gens de pouvoir
créent un choc psychique qui interdit de réaliser les liens libérateurs
entre conséquences et causes, et imposent le refoulement de ce sentiment
par la soumission aux règles qui assurent sa pérennité.
Prouesse de la conscience
La psychanalyse, qui ménage les rôles imposés par le père, introduit une
force négative s'opposant à une force positive au
coeur de la spontanéité de l'enfant. L’idée de « force
négative » définit en fait l’ensemble des entraves
au bon développement physique de l'enfant et à la bonne réalisation
de sa conscience. Dès lors, la lutte intérieure que mène l'enfant
pour rester en vie et tenter de sauvegarder son intégrité, malgré
les dénis subis et les exigences imposées, est une prouesse de sa
conscience. Tous les comportements de l’enfant - ses
appels au secours, ses colères, ses affirmations, ses reflets, son
accompagnement… - sont interprétés en fonction du refus
des adultes de reconnaître la monstruosité des exigences masculines
sur les femmes, sur les mères et sur les enfants.
Nous aspirons tous à vivre pleinement ce que, au fond de nous,
nous savons pouvoir vivre. Par la voix des médias et de la publicité,
les classes dominantes veulent nous faire croire que nous voulons
être plus heureux, plus riches, plus beaux et plus intelligents.
Mais comment pourrions-nous vouloir être autres que ce que nous
renions être, si ce n'est pour compenser la souffrance qu’engendre
ce reniement ?
La nature consciente de l'être humain est jouissance, joie, plénitude,
abondance, amour... Le summum de la manipulation consiste à enfermer
celle-ci, par des pratiques éducatives et des fantasmes de consommation,
dans la croyance que la vie est souffrance, insatisfaction, renoncement,
lutte, maîtrise de soi et dans l’idée que le but honorable
de l'homme serait d'humaniser cette misère humaine. Cette conception
de la vie n’a pour objectif que le refoulement impératif du
sentiment d'impuissance vécu face à l'obstination névrotique du
père.
Complexe de castration
Pour ne pas remettre en cause les projections des hommes sur la
nature féminine - a fortiori celles qu’ils opèrent
sur leur propre nature masculine - et ne pas reconnaître l'existence
d'une conscience sensible aux deux principes, Freud et tous ses
disciples, ont confirmé le mal au plus intime de l'être féminin :
au centre de sa sexualité. En réalité, lorsque la petite fille
pense que sa nature est mauvaise, c'est que ses parents l'y ont
contrainte. Tous les enfants manifestent à leurs parents que ceux-ci
agissent aveuglément, mais au lieu de remettre en cause leur comportement,
ces derniers font porter à l'enfant qu’il est méchant
ou mauvais. La petite fille ne peut pas penser que sa
nature est mauvaise sans qu'une persécution psychique et physique
l'y ait contrainte.
Des générations d'hommes ont entretenu la croyance que les femmes
sont des êtres inférieurs, sans âme, obsédés par le sexe, qu'il
faut soumettre, surveiller, maîtriser, enfermer, interdire de parole.
Cette dévalorisation constante de leur nature sensible et consciente
est tellement omniprésente dans les civilisations qu’elles-mêmes
en arrivent à porter atteinte psychologiquement ou physiquement
à leur sexe jusqu'à en nier l’activité. C’est une façon
d'exprimer la souffrance et son origine projective.
Pour la psychanalyse, la différence anatomique entre le garçon
et la fille serait, avant même que cette dernière ne gère les conséquences
des projections faites sur sa féminité, la preuve de sa mauvaise
nature psychologique. Ces projections destructrices, loin de libérer
les hommes, les éloignent de leur capacité à jouir de la vie. Ceux-ci
deviennent les compagnons d'une misère qu'ils provoquent et entretiennent
eux-mêmes. Leur insupportable incompréhension les fait projeter
sur l'autre sexe les causes et les conséquences de leur propre vécu.
Ainsi, Freud organise-t-il son complexe de castration sur deux réalités
de niveaux différents. L'une, niée, est la conscience de l'enfant,
et l'autre, théorisée, est l'organisation conceptuelle autour d’un
traumatisme. La première étant la connaissance innée de l'anatomie
féminine commune aux deux sexes et la deuxième, universalisée de
force par un besoin impératif de résolution, étant sa propre circoncision.
Face à l’intégrité physique du sexe féminin, l'enfant mutilé
est emporté par une réminiscence du traumatisme vécu. Il lui faut
précipitamment organiser un monde qui prenne en compte sa véritable
nature, les passages à l'acte subis et les exigences parentales,
notamment celle, impitoyable, d'être vus comme de bons parents innocents.
C'est ce que fit Freud. Mais le père effrayant n'était pas imaginaire.
Il était bien là, dans toute sa réduction, obéissant aux lois de
la compulsion névrotique masculine et déniant la spontanéité de
la vie.
Sylvie Vermeulen
sylvie.vermeulen@wanadoo.fr
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