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Origine : www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2007-4-page-33.htm
Stéphane Legrand, ancien élève de l'école
Normale Supérieure Lettres et Sciences humaines, agrégé
de philosophie et docteur en philosophie, a notamment publié
Les Normes chez Foucault (Paris, PUF, 2006).
Pour présenter l'analyse que propose Foucault, principalement
dans le cours au Collège de France de l'année 1979
(intitulé « Naissance de la biopolitique »),
concernant l'extension indéfinie de ce modèle théorique
qu'est le marché dans les théories néo-libérales,
cette sorte de phagocytage, par elles si ardemment promu, du champ
social mais aussi bien des subjectivités mêmes par
la structure marché-entreprise, il nous paraît essentiel
d'en passer par une médiation complexe : la question de la
responsabilité, et donc de prendre en compte tout un autre
aspect, tout un autre champ de problèmes historiques qui
ne concernent peut-être pas directement le néolibéralisme
lui-même mais qui nous semblent devoir lui être confrontés.
On peut trouver en effet dans les textes de Foucault deux types
de problématisation de la responsabilité, renvoyant
à deux champs d'analyse distincts, mais dont nous essaierons
de montrer qu'ils sont susceptibles de se croiser. D'une part, la
question juridique de la responsabilité d'un sujet à
l'égard d'un acte délictueux ou criminel qu'il a commis,
dont l'instruction généalogique impose de remonter
aux racines de l'expertise psychiatrique pénale dans la première
moitié du 19e siècle ; d'autre part, ce qu'on pourrait
appeler le problème de la responsabilisation des sujets à
l'égard d'eux-mêmes dans tout le domaine de leurs conduites,
qu'opère un certain type de discours néolibéral
plus récent sur l'économie, sur la société,
et plus généralement sur la subjectivité comme
telle. Nous nous contenterons ici de recontextualiser successivement
ces deux enjeux, pour tenter finalement de dégager le type
de structure problématique qu'ils construisent autour de
la notion de responsabilité.
De l'« imputabilité » à la «
terribilité »
Michel Foucault a analysé les transformations qui se sont
opérées dans les formes du jugement pénal,
tout au long du 19e siècle et jusqu'à nos jours, du
fait de l'insertion dans les tribunaux de la « fonction-Psy[1]»,
c'est-à-dire d'une prise en compte psychiatrique ou psychopathologique
des sujets à juger, du fait donc d'une articulation de plus
en plus marquée et inéluctable des normes juridiques
avec des normes psychologiques ¬ qui leur sont tout à
fait hétérogènes, logiquement et épistémologiquement.
Sans revenir sur le détail assez complexe des analyses historiques
de Foucault[2], efforçons-nous d'en mettre en relief les
principales thèses. Dans le principe, les psychiatres commis
à l'expertise auprès des tribunaux ne devaient y intervenir
que pour aider à déterminer l'imputabilité
de son crime au prévenu, puisque, en vertu de l'article 64
du Code pénal de 1810, il ne peut y avoir ni crime ni délit
si le prévenu était en état de démence
au moment de l'acte. Cette logique était purement binaire
: ou bien son crime est imputable au prévenu et il doit être
jugé selon les normes propres à l'instance judiciaire,
indépendamment de toute qualification médico-psychiatrique,
selon le principe de l'intime conviction du jury ; ou bien son crime
ne lui est pas imputable et il est soit relaxé, soit, plus
vraisemblablement, confié à l'institution psychiatrique
elle-même. Or, ce que repérait Foucault, c'est l'évolution
vers une prise en compte de plus en plus nette de la qualification
psychologique des sujets par l'instance qui juge, d'une part dans
la détermination de la culpabilité probable, d'autre
part dans la modulation même de la peine. Face à la
procédure policière et juridique de l'enquête
et de l'instruction, la psychiatrie a fait apparaître la figure
de sujets anormaux, de différentes anomalies de caractères
fonctionnant de facto comme autant d'indices de dangerosité,
donc de probabilités de culpabilité. Face à
la décision de punir, qui doit appliquer à un acte
la peine prévue par les codes, la psychiatrie a fait apparaître
(non plus un acte mais) un sujet, dont on doit sanctionner la nature,
car on commence à percevoir la peine elle-même comme
correction de cette nature, comme guérison de ses tendances
pathologiques.
[La psychiatrie] permet de doubler le délit, tel qu'il est
qualifié par la loi, de toute une série de comportements,
de manières d'être qui, bien entendu, dans le discours
de l'expert psychiatre, sont présentés comme la cause,
l'origine, la motivation, le point de départ du délit[3].
Ces comportements et manières d'être ne représentent
évidemment pas ce qui est punissable aux yeux de la loi,
mais ils tendent à être de plus en plus pris en compte
jusqu'à constituer « la substance, la matière
même punissable[4] », à la fois en tant que causes
possibles du délit augmentant le degré de conviction
de ceux qui jugent, mais aussi en tant que substituts du délit,
« doublet psychologico-éthique du délit »
: cela même qui doit être sanctionné, et en l'étant,
corrigé. L'opération psychiatrique, le tour de passe-passe
psychiatrique, consiste à remplacer au dernier moment l'objet
que l'instance judiciaire a à punir (l'acte) par l'objet
psychologiquement défini (un caractère, des anormalités
constitutives, des perversions, etc.) qu'elle avait fait intervenir
seulement sous prétexte de le considérer pour décider
de la responsabilité du prévenu vis-à-vis de
son acte :
L'entreprise psychiatrique permet de transférer le point
d'application du châtiment, de l'infraction définie
par la loi, à la criminalité appréciée
du point de vue psychologico-moral[5].
Du même coup, la signification de l'opération de juger
et de punir se transforme : puisque le juge ne statue plus sur un
délit mais sur une manière d'être, puisqu'il
ne sanctionne plus celui qui s'est rendu coupable d'une transgression
de la loi mais celui dont la nature le voue à l'indiscipline,
la punition ne sera plus la sanction d'un acte illicite, mais participera
directement de toutes les techniques correctives et normalisantes
propres à ce que Foucault nomme le pouvoir disciplinaire,
et, corrélativement « le vilain métier de punir
se trouve ainsi né dans le beau métier de guérir[6]».
Ainsi pourra-t-on trouver ces textes baroques et quelque peu outrageants
pour la pensée que sont les expertises psychiatriques, dont
Foucault s'amuse à citer au début de ce cours divers
exemplaires qui ne laisseraient pas d'être réjouissants
si on ne les savait détenir le pouvoir institutionnel de
tuer. Ainsi ce rapport d'expertise de 1973, portant sur deux individus,
homosexuels, accusés de chantage dans une affaire sexuelle
: « X est totalement immoral, cynique, voire même bavard.
Il y a trois mille ans, il aurait certainement habité Sodome
et les feux du ciel l'auraient très justement puni de son
vice (...). Z [quant à lui] est un être cynique et
immoral. Il se vautre dans le stupre, il est manifestement fourbe
et réticent. (...) le trait le plus caractéristique
de son caractère semble être une paresse dont aucun
qualificatif ne saurait donner une idée de son importance.
Il est évidemment moins fatigant de changer des disques dans
une boîte de nuit et d'y trouver des clients, que de véritablement
travailler. (...) Il est particulièrement répugnant...
» Mal dissimulé par la haute scientificité de
ce discours de savoir issu de la psychiatrie contemporaine, on saisit
le point important : une expertise qui ne devrait porter, et prétend
ne porter, que sur le rapport de responsabilité entretenu
par le sujet à son acte, non seulement n'a pas du tout cela
pour objet mais bien l'assignation d'une série d'anormalités
constitutives du sujet dessinant autant de virtualités, et
de ce fait d'indices, de criminalité, mais évacue
le problème de la responsabilité, le ne pour
nous faire monstration d'un être qui est d'autant plus punissable
qu'il est moins responsable, au rebours de ce que préconisait
initialement la philosophie de notre code pénal. Certes,
ce monstre est d'autant moins responsable qu'il est plus déterminé,
psychiatriquement, voire biologiquement, au crime, mais cette irresponsabilité
ne va pas servir à décider que son crime ne lui est
pas imputable, elle va au contraire établir qu'il est d'autant
plus punissable qu'il est plus dangereux. Inversion d'une considérable
importance théorique.
Or dans cette inversion, on peut repérer un moment historiquement
capital : la deuxième moitié du 19e siècle.
C'est à cette époque qu'avec les théories de
la dégénérescence, initiées en 1857
par le livre de Benedict-August Morel, Traité des dégénérescences
physique, mentales et morales de l'espèce humaine, apparaît
une explication de la folie en termes non plus symptomatologiques
mais étiologiques, qui ne voit plus en elle une crise du
sujet devenant étranger à lui-même, mais un
état permanent et incurable lié à l'hérédité
morbide de ce sujet. Cette problématique va essaimer dans
l'anthropologie criminelle, à partir de Cesare Lombroso,
puis chez Enrico Ferri et Rafaele Garofalo, autour de la notion
de « criminel-né », mais aussi dans les théories
de la défense sociale représentée par l'école
belge avec Adolphe Prins et La Défense sociale et les transformations
du droit pénal (1910). Dans les discours de ces auteurs se
développe l'idée que, puisque les coupables dont la
psychiatrie nous dévoile le caractère psycho-biologique
d'anormalité sont victimes d'impulsions irrésistibles
liées à leur nature dégénérée,
ils sont d'autant plus dangereux et susceptibles de récidive
qu'ils sont moins responsables de leurs actes, et qu'il faut en
conséquence totalement abandonner la notion juridique de
responsabilité pour la remplacer par celle de dangerosité,
de terribilité comme disait Prins, et donc :
[déplacer] le critérium de la pénalité,
en le reconduisant au principe de la nécessité sociale
et en abandonnant celui de la responsabilité morale de l'individu[7]...
De sorte que la peine ne se conçoit plus comme la punition
d'un acte délictueux passé, mais comme une mesure
de défense de la société visant à prévenir
des dangers futurs, par élimination définitive, provisoire
ou partielle (stérilisation, castration). Notons que ce type
de problématisation des finalités du droit criminel
est à bien des égards lié à une redéfinition
strictement libérale de l'ordre légal et du modèle
social.
Premièrement, parce que les théoriciens de la dégénérescence
et de la criminalité innée établissent régulièrement
une continuité entre la nocivité active, de l'ordre
du crime punissable, et la nocivité passive, de l'ordre de
la simple improductivité, les deux ayant leur source dans
les mêmes mécanismes de dégénérescence
héréditaire. Citons à titre d'exemple un auteur
assez représentatif, le docteur Charles Ferré qui
écrivait en 1888 :
L'oisiveté n'est pas plus légitime que l'incendie
; ne rien faire, ou brûler, ou consommer en superfluité,
amène nécessairement un retard dans l'accumulation
des choses utiles, et par conséquent dans l'adaptation progressive[8].
Dans la mesure même où la responsabilité est
repensée en termes de danger, ou comme on aime à dire
aujourd'hui de risques, l'intervention politique, policière
et juridique est recodée en termes de calcul économique
rationnel : l'irresponsable est essentiellement un coût :
coût social direct, en termes de perte, par ses actions délictueuses
; coût social indirect par les dépenses en procédure
disciplinaires, sanctions, réhabilitations, qu'il impose
; coût biologique à terme par la dégénérescence
dont il est porteur et qu'il propage en se reproduisant ; coût
économique direct, du point de vue d'un coût d'opportunité,
par sa fainéantise qui l'empêche de produire les biens
utiles à la société - et à travers ce
dernier coût, d'ordre économique, reproduction et amplification
des précédents, puisque moins une société
produit de biens utiles, plus ses conditions d'existence sont propices
à la formations de tares et de dégénérés.
Quoique, de nos jours, les penseurs néolibéraux parlent
plutôt de chômeurs volontaires. Le vocable est en effet
à préférer, il est plus pudique.
On peut identifier une deuxième forme de ce recodage libéral
de la criminalité. Charles Ferré veut que la société
mette « hors d'état de nuire » les irresponsables
au nom de leurs « actes nuisibles passifs » avant même
qu'ils n'aient commis de crime. Mais en plus, lorsqu'ils en commettent
un, ils sont insolvables (puisque précisément improductifs).
Il faudrait alors considérer que l'État est responsable.
Car selon Ferré l'État n'est que l'un des partenaires
d'un contrat par lequel chaque citoyen achète sa sécurité
en payant un impôt ; en manquant à son devoir de protection,
l'État s'est rendu responsable de manquement au contrat,
et doit donc lui-même dédommager la victime lorsque
le délinquant ne le peut pas ; ce qui veut dire, du point
de vue juridique, que l'État est par rapport à la
victime dans une situation de responsabilité du fait d'autrui.
Il y a donc là toute une tentative, sur laquelle il faudrait
se pencher pour faire la généalogie de certaines théories
néolibérales actuelles sur la fonction de l'État,
pour redéfinir le contrat social comme étant, non
pas du tout d'essence constitutionnelle, avec pour principe et fondement
de sa légitimité l'autoconstitution d'une multitude
de volontés singulières en une volonté générale,
mais comme étant de l'ordre, formellement, du droit civil,
et ayant pour modèle le rapport d'échange où,
sur un marché, deux intérêts se rencontrent
et échangent des biens ou des services. Non plus moment de
constitution, mais rapport d'échange ; non plus réunion
des volontés, mais rencontre des intérêts.
On pourrait, quoi qu'il en soit, repérer là toute
une ligne de pente au terme de laquelle la colonisation des normes
juridiques par des normes psychologiques ou psychopathologiques
¬ insertion qui s'est faite par cette manière d'accrochage
de la psychiatrie sur le droit pénal autour de la notion
de responsabilité ¬ aurait abouti à un recodage
de la criminalité en termes de coûts et de dangers,
et donc à une sorte d'élision de facto de la responsabilité
elle-même. Disons que tendanciellement plus le jugement individualise,
analyse, psychologise le criminel, et superpose sa nature à
son acte, plus, paradoxalement, il déresponsabilise, élude
la question centrale de la responsabilité.
L'extension du modèle du marché et la dette
infinie
Relisons maintenant, sur ces bases, certaines autres thèses
de Foucault permettant de problématiser la notion de responsabilité,
celles-là directement liées à son analyse du
néolibéralisme.
Le contexte général de ces analyses est celui d'une
définition de ce que Foucault propose de nommer biopouvoir,
soit une forme de pouvoir ne s'exerçant plus, comme le pouvoir
disciplinaire, de manière coercitive sur les corps individuels,
mais portant sur les phénomènes propres à la
vie elle-même (fécondité, natalité, mortalité,
nuptialité, hygiène, production des ressources, etc.)
saisis au niveau d'une entité nouvelle qui est la population
comme telle, en tant qu'elle est le support de certaines régularités
statistiques pertinentes indépendantes de la volonté
ou des intentions des individus qui la composent.
[La population est] une masse globale affectée de processus
d'ensemble qui sont propres à la vie et qui sont des processus
comme la naissance, la mort, la maladie [9].
Le biopouvoir cherche à gérer la vie en normalisant
ces processus, ce qui implique d'intervenir sur leurs déterminants
: organisation du milieu de vie, gestion des phénomènes
épidémiques et endémiques, répartition
des ressources, hygiène publique, assurances, etc. La norme
ultime à laquelle s'ordonnera cette intervention sera d'optimiser
les processus d'ensemble, au niveau de la population globale, au
prix d'éventuels amoindrissements locaux. Le problème
est de savoir selon quels critères, selon quelle rationalité
comme aimait à dire Foucault, seront prises les décisions.
Ou, pour mieux dire, quel codage de l'existence, quel type d'assujettissement
elles tendront à réaliser.
Or, il était apparu à Foucault que la technologie
de pouvoir, le type de rationalité propre à cette
biopolitique était constitué par le mode de gouvernement
libéral, la gouvernementalité libérale, qu'on
peut sommairement définir comme une technique de gestion
des multiplicités visant à construire un cadre dans
lequel certains processus qui sont liés à leur nature
ou à leur essence pourront se déployer d'eux-mêmes
(et qui n'est donc plus ce contrôle des corps individuels
leur imposant un modelage coercitif qu'était le pouvoir disciplinaire)
:
Le libéralisme, le jeu : laisser les gens faire, les choses
passer, les choses aller, laisser faire, passer et aller, cela veut
dire essentiellement et fondamentalement faire en sorte que la réalité
se développe et aille, suive son cours selon les lois mêmes,
les principes et les mécanismes qui sont ceux de la réalité[10].
Dans l'évolution historique de cette gouvernementalité,
il est possible d'isoler trois moments, qui sont les plus directement
liés aux problèmes du marché.
a) Avec le développement au 18e siècle, à
partir de l'économie politique, du thème d'un gouvernement
frugal, d'une nécessité de gouverner moins pour gouverner
mieux, on entre dans l'âge d'une rationalité gouvernementale
critique, inquiète d'elle-même[11] ; et ce branchement
entre pratique de gouvernement et économie politique va se
faire en référence à un lieu spécifique
qui avait déjà été un objet privilégié
de l'intervention du gouvernement depuis le Moyen-Âge, à
savoir le marché. Jusque lors, le marché avait fonctionné
essentiellement comme un lieu de juridiction, encadré par
des règlements concernant le type d'objets à y apporter,
leur mode de fabrication, leur origine et surtout leur prix. Lieu
d'intervention coercitive directe de la part d'un gouvernement qui
le normait de l'extérieur, de manière à lui
imposer une certaine justice. Or, selon Foucault, au 18e siècle,
le marché est apparu comme ne devant plus être essentiellement
un lieu de juridiction, mais plutôt :
(...) quelque chose qui obéissait et devait obéir
à des mécanismes « naturels », c'est-à-dire
à des mécanismes spontanés[12].
Suivant l'idée que c'est justement en intervenant sur lui
par des règlements de police qu'on en altère la naturalité
et qu'on en perturbe le fonctionnement ; en fait, il ne faudrait
pas le normer de l'extérieur selon certains critères
de justice, mais le laisser être en se contentant d'encadrer
son fonctionnement de manière à ce qu'il se normalise
de lui-même et réalise son équilibre optimal
et naturel. Et si l'on procède ainsi, alors le marché
sera révélateur d'une vérité, et d'une
vérité qui sera celle même du gouvernement,
dont il dévoilera la validité et la légitimité
:
(...) les prix, dans la mesure où ils sont conformes au marché,
vont constituer un étalon de vérité qui va
permettre de discerner, dans les pratiques gouvernementales celles
qui sont correctes et celles qui sont erronées[13].
À partir du moment où le marché est conçu
comme devant opérer continûment selon certaines lois
de fonctionnement qui lui sont immanentes, en référence
à une technique de gouvernement libérale, il devient
du même coup un lieu, non plus de juridiction mais de véridiction,
ce qui signifie qu'il devient le critère de vérification
et de falsification pour la pratique gouvernementale. La gouvernementalité
libérale est une gouvernementalité qui fonctionne
non plus à la justice mais à la vérité,
et dont le principal opérateur de véridiction se donne
comme étant le marché, le lieu des échanges.
C'est le premier vecteur de son extension comme opérateur
social pour le libéralisme.
b) Un deuxième moment décisif serait constitué,
dans les années 1920-1930, par ce qu'on a pu appeler l'ordolibéralisme,
du nom de la revue Ordo, fondée et animée par Walter
Eucken, chef de file de l'école néolibérale
allemande, l'École de Fribourg, qui a eu une influence non
négligeable, d'une part sur les réformes économiques
introduites en Allemagne dans l'immédiat après guerre
par Ludwig Erhard, d'autre part sur le néolibéralisme
américain. Pour les ordolibéraux, le marché
n'est pas seulement le principe de vérité de l'action
gouvernementale, indiquant par son fonctionnement pur ou troublé
les limites de cette action, le partage entre ce qui peut et ce
qui ne doit pas être fait, ce à quoi l'on peut toucher
et ce qu'il ne faut pas toucher, agenda et non agenda ; il est bien
plus : dans la mesure où l'État est porteur de défectuosités
intrinsèques, et que son développement autonome est
nécessairement celui d'une croissance dévorant la
société et la liberté, il faut littéralement
demander au marché d'être :
(...) le principe de régulation interne de l'État,
de bout en bout de son existence et de son action. [...] Autrement
dit, un État sous surveillance de marché plutôt
qu'un marché sous surveillance de l'État[14].
C'est d'ailleurs ce thème qu'on retrouvera sous-jacent à
un discours fait fin avril 1948 par Ludwig Erhard, qui dirigeait
alors l'administration économique de la bizone[15], discours
longuement commenté par Foucault dans la leçon du
31 janvier 1979. Le problème qui selon Foucault se posait
à quelqu'un comme Erhard dans le cadre de la reconstruction
de l'État allemand était le suivant : soit un État
historiquement et politiquement délégitimé,
un État qui ne peut plus fonder sa légitimité
sur des droits historiques, car ces droits se trouvent, comme dit
Foucault, « forclos par l'histoire elle-même »,
un État qui d'autre part est occupé et divisé
et ne peut donc pas non plus fonder sa légitimité
sur une volonté collective qui n'est pas susceptible de se
manifester réellement, un État privé en somme
des deux principes traditionnels, l'un historique, l'autre juridique,
de légitimation possible. Alors, suggère Erhard, supposons
donné dans cet État un cadre institutionnel susceptible
de créer un espace de liberté pour les sujets dans
l'ordre économique, le marché libre, et dans cet espace,
laissons les individus jouer le jeu économique les uns avec
les autres ; alors l'exercice même de leur liberté
par ces sujets vaudra adhésion de facto à ce cadre,
vaudra consentement à toute décision qui pourra être
prise pour en assurer le fonctionnement.
Autrement dit, l'institution de la liberté va devoir, va
pouvoir en tout cas fonctionner, en quelque sorte comme un siphon,
comme une amorce pour la formation d'une souveraineté politique[16].
C'est sur le jeu même de la liberté économique
qu'il va falloir refonder la souveraineté politique allemande,
c'est l'économie, son développement et sa croissance,
qui va produire de la légitimité gouvernementale,
et c'est encore l'économie qui va être, selon la forte
expression de Foucault, « créatrice de droit public
». Ce qui se formule ici, c'est l'idée que le marché,
ce n'est pas seulement un objet théorique, ce n'est évidemment
pas non plus un lieu concret : c'est une forme, c'est une structure
qui est en même temps un opérateur politique, une structure
opératoire qui vient informer, déterminer, structurer
le champ politique. Thèse en laquelle on repère naturellement
un thème très récurrent et très fondamental
dans tout le néo-libéralisme : il ne faut pas seulement
rendre possible le marché libre dans la société,
il faut organiser la société selon les formes propres
à cette structure qu'est le marché : les maisons ce
sont des types d'entreprise, les écoles, les hôpitaux,
les communautés de voisinage ce sont des types d'entreprise,
les sujets individuels même, ce sont des types d'entreprise.
Songeons, parmi mille exemples, à cette réjouissante
formule d'un sympathique spécialiste de l'anthropologie économique,
Robbins Burling :
Il doit être possible de parler de l'offre de prestige, de
la demande de pouvoir et du coût de l'autorité. Et
je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas même aller jusqu'à
parler de l'utilité marginale de l'amour maternel[17].
Et si l'on parlait, à l'occasion, du coût d'opportunité
du travail en anthropologie économique ?
Quoi qu'il en soit, à lire une formule de ce type, on ne
peut que donner raison à l'une des conclusions de Foucault
sur la logique néolibérale :
C'est cette démultiplication de la forme « entreprise
» à l'intérieur du corps social qui constitue,
je crois, l'enjeu de la politique libérale. Il s'agit de
faire du marché, de faire de la concurrence, et par conséquent
de l'entreprise, ce qu'on pourrait appeler la puissance informante
de la société[18].
Telle serait donc les deux premiers aspects de cette « extension
sociale du marché » dont nous parlons : d'une part,
la définition du marché comme lieu de vérité,
principe de vérification-falsification pour la gouvernementalité
; d'autre part, la thèse selon laquelle il s'agit de gouverner
à la fois pour le marché et par le marché,
de régler l'exercice même du pouvoir et de fonder sa
légitimité politique sur la structure propre à
l'économie de marché.
c) Mais cette citation de Burling nous amène également
au troisième moment de l'analyse foucaldienne que nous proposons
d'isoler : les théories du capital humain, qui ont trouvé
leur origine dans la fameuse École de Chicago, dont on peut
considérer Henri Calvert Simons comme le père fondateur
et qui a fourni à l'humanité reconnaissante (en particulier
le continent Sud-Américain[19]) trois Prix Nobel (Milton
Friedman en 1976, Georges Stigler en 1982, Gary Becker en 1992).
Or donc, ce qui intéresse particulièrement Foucault
dans les thèses issues de l'École de Chicago, ce ne
sont pas les merveilles théoriques que constituent les théories
monétaristes de Friedman, pourtant plus célèbres,
mais plutôt les théories du capital humain issues des
travaux d'anthropologie de Lionel Robbins, et très notablement
développées par Stigler et Becker. Leur principal
postulat est que les méthodes d'analyse appliquées
aux phénomènes économiques stricto sensu (soit
aux productions de biens et services orientées vers un échange
sanctionné par une contrepartie monétaire) peuvent
être généralisées à l'étude
des conduites humaines extérieures au champ habituel de l'analyse
économique (non sanctionnées par une contrepartie
monétaire directe). Cette extension a pour pivot la définition
de l'action humaine comme un choix opéré dans l'allocation
de ressources rares à des fins alternatives selon des modalités
concurrentes (c'est-à-dire incompatibles). La théorie
économique devient alors la théorie générale
des méthodes de choix rationnels déterminant la conduite
des individus. L'économie devra donc dans cette perspective
effectuer « l'analyse d'un comportement humain et de la rationalité
interne de ce comportement humain[20] », et c'est la connaissance
de cette rationalité interne des conduites qui lui permettra
de définir les variables pertinentes du milieu d'action sur
lesquelles il sera possible d'agir pour infléchir leur déroulement
sur un plan statistique. Cette définition de l'action humaine
implique, du point de vue de Becker par exemple, de recoder économiquement
la nature du sujet de la conduite : ces ressources rares que l'individu
alloue à des fins ne sont plus seulement les biens matériels
dont il dispose (comme dans le cadre de l'économie marginaliste
stricto sensu) mais les facultés dont il dispose en tant
que sujet, ce qu'il est et ce qu'il peut. L'individu humain, alors,
est un capital. Même lorsqu'il travaille dans un cadre où
il contribue à la production d'un profit, c'est-à-dire
à la valorisation d'un capital approprié par un autre
individu qui lui verse un salaire, il faut néanmoins comprendre
qu'il est en train d'investir un capital en s'efforçant lui-même
de le (se) valoriser : le salaire se définira comme le produit
du capital humain que le travailleur engage dans son travail, donc
de l'ensemble des facteurs qui le rendent plus ou moins apte à
accomplir ce travail.
Cette extension de la notion de capital permet une extension corrélative
de la structure marché-entreprise comme principe d'intelligibilité
et opérateur de gestion et de normalisation. Tous les domaines
de la gouvernementalité peuvent être recodés
ainsi : la politique de santé, la politique d'éducation,
la politique criminelle :
On peut repenser tous les problèmes de la protection de
santé, tous les problèmes de l'hygiène publique
en éléments susceptibles ou non d'améliorer
le capital humain[21].
Attardons-nous un instant avec Foucault, afin d'établir
une symétrie relativement à la première partie
de cet article, sur l'exemple de la politique criminelle. Si la
problématique de l'ordolibéralisme avait, comme nous
l'avons vu, pour finalité de faire du marché la structure
générale de la société, et de l'entreprise
sa puissance informante, les théories du capital humain définissent
ce que l'on pourrait nommer la « subjectivation de la forme
entreprise » : l'homo conomicus n'est pas seulement le partenaire
d'une série d'échanges dans lesquels il cherche à
maximiser son utilité, mais « un entrepreneur de lui-même[22].».
Et c'est bien ainsi que le phénomène de la criminalité
sera interprété : le criminel investit son capital
humain dans une entreprise criminelle, qu'il choisit de préférence
à d'autres fins alternatives. Si bien que la norme d'une
politique criminelle efficace sera l'équilibration du marché
de la criminalité au taux d'offre qui pourra être défini
comme économiquement optimal[23]. Le système pénal
ne sera plus pensé comme l'instance qui doit agir sur les
criminels pour annuler la criminalité, mais comme le cadre
formel qui doit assurer l'autorégulation du marché
de la criminalité autour de son seuil optimal, qui réduira
autant que possible les externalités négatives de
ce marché. Autrement dit, il doit être le dispositif
de sécurité qui, au lieu de normer le marché
du crime au nom d'un principe de réduction maximale des comportements
infractionnels (ce qui ne pourrait se faire qu'au nom d'une finalité
sociale spécifique du gouvernement, ce que les néo-libéraux
américains rejettent avec Hayek), pourra le normaliser, c'est-à-dire
lui permettre de se régler lui-même conformément
à sa nature de marché.
Il s'agit donc là d'un mode d'objectivation de la délinquance
qui est rigoureusement inverse de celui dont nous parlions précédemment,
car il fait abstraction entièrement de toute caractéristique
individuelle des sujets, de toute question de motivation ou de détermination
psychologique : il ne saisit les crimes qu'en tant que criminalité,
phénomène biopolitique global, propre à une
multiplicité indépendamment des sujets qui la composent.
Or il semble bien qu'il aboutisse également à une
conséquence inverse du point de vue de la question de la
responsabilité. Car de même que le dispositif qu'on
peut dire disciplinaire, à force d'individualiser et de psychologiser
les sujets aboutit à une paradoxale élision de la
responsabilité, de même ce dispositif de type biopolitique
- à force de désindividualiser la gestion des sujets
et de les fondre dans l'entité population dont seules sont
pertinentes économiquement les variables propres et les moyens
d'encadrer son fonctionnement pour qu'il se normalise à hauteur
de son optimum - s'articule à une « surresponsabilisation[24]
», à une sorte de responsabilisation infinie des sujets,
sommés d'être les entrepreneurs d'eux-mêmes,
renvoyés, par le cadre de normalisation économique
qui valorise objectivement un certain type de conduite et de rapport
à soi, que ce soit dans l'ordre de la criminalité,
de la santé ou de l'éducation, à une sorte
de dette infinie à l'égard du capital qu'ils sont.
Ce qui, moyennant bien sûr d'importants approfondissements,
pourrait peut-être être suggéré, serait
l'existence d'une manière de chiasme, structurant pour les
dispositifs modernes de pouvoir et les figures de la subjectivité
qu'ils appellent. Un chiasme qui articulerait aussi, sur un mode
hautement problématique et instable, ces deux technologies
de pouvoir inhérentes aux conditions d'existence et de fonctionnement
du capitalisme que sont, d'un côté le pouvoir disciplinaire,
de l'autre le biopouvoir (et donc la gouvernementalité libérale),
qui en dépit de leurs profondes différences fonctionnent
cependant ensemble ; et ils se pourrait bien que ce chiasme se perçoive
tout particulièrement dans l'articulation entre une institution
judiciaire qui est essentiellement disciplinaire, donc individualisante
et psychologisante, mais qui évacue pour ces raisons mêmes,
et si paradoxal que cela soit, l'enjeu porté par la notion
de responsabilité parce qu'elle tend à naturaliser,
pour ainsi dire, la volonté, et une politique criminelle
qui pourrait bien être tendanciellement de plus en plus biopolitique,
c'est-à-dire, malgré les apparences, de plus en plus
axée sur la constitution de cadres impersonnels pour assurer
l'autorégulation du marché de la criminalité
autour de son état économiquement optimal, mais qui
serait justement, par cela même, inversement sur-responsabilisante
pour les sujets qui, à n'en pas douter, lorsqu'ils ne seront
pas de parfaits et hardis entrepreneur d'eux-mêmes, lorsqu'ils
n'auront pas convenablement subjectivé la forme entreprise,
lorsqu'ils seront plus ou moins marginalisés, plus ou moins
pauvres, plus ou moins fous, n'auront clairement à s'en prendre
qu'à eux-mêmes lorsque, dans le cadre légal
défini par les jolies équations de Becker qui intègrent
les différentes variables économiquement pertinentes
du marché de la criminalité et en fixent l'état
d'équilibre à la marge, ils viendront inéluctablement
mettre leurs pieds dans ces zones de l'espace des possibles qui
conduisent directement à la case prison sans passer par la
banque.
Ce n'est là bien sûr qu'une hypothèse, de surcroît
bien trop abstraite ¬ disons : programmatique.
Notes
[1] Foucault utilise cette expression dans Le Pouvoir psychiatrique.
Cours au Collège de France (1973-1974), Paris, Gallimard/Seuil,
coll. « Hautes Études », 2003, p. 86 : «
[...] la fonction-Psy, c'est-à-dire la fonction psychiatrique,
psychopathologique, psychosociologique, psychocriminologique, psychanalytique,
etc. »
[2] On se reportera notamment à M. Foucault, Les Anormaux.
Cours au Collège de France (1974-1975), Paris, Gallimard/Seuil,
coll. « Hautes Études », 1999, ainsi qu'à
la conférence « L'évolution de la notion d'individu
dangereux dans la psychiatrie du 19e siècle », in M.
Foucault, Dits et Écrits III, Paris, Gallimard, coll. «
Bibliothèque des sciences humaines », 1994, p. 443
et suiv.
[3] M. Foucault, Les Anormaux, op. cit., p. 14.
[4] Ibid.
[5] Ibid., p. 16.
[6] Ibid., p. 23.
[7] Rafaele Garofalo, La Criminologie, Paris, Felix Alcan, 1888,
p. IX.
[8] Charles Ferré, Dégénérescence et
criminalité, Paris, Alcan, 1888, p. 102.
[9] M. Foucault, Il faut défendre la société.
Cours au Collège de France (1976), Paris, Gallimard/Seuil,
coll. « Hautes Études », 1997, p. 216.
[10] M. Foucault, Sécurité, territoire et population.
Cours au Collège de France (1977-1978), Paris, Gallimard/Seuil,
coll. « Hautes Études », 2004, cours du 18 janvier
1978, p. 49.
[11] Sur ce point, voir Michel Senellart, « La critique de
la raison gouvernementale », in Guillaume Le Blanc et Jean
Terrel (dir.), Foucault au Collège de France : un itinéraire,
Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux, 2003, p. 131-149.
[12] M. Foucault, Naissance de la biopolitique. Cours au Collège
de France (1978-1979), Paris, Gallimard/Seuil, coll. « Hautes
Études », 2004, p. 33.
[13] Ibid.
[14] Ibid., p. 120.
[15] Erhard deviendra ministre de l'Économie sous Adenauer
en 1951. Beaucoup l'ont considéré comme le père
du Wirtschaftswunder allemand.
[16] M. Foucault, Naissance de la biopolitique, op. cit., p. 84.
[17] Ibid., p. 120. R. Burling, « Théories de la maximisation
et anthropologie économique », in Maurice Godelier
(dir.), Un domaine contesté : l'anthropologie économique,
Paris, Mouton, 1974, p. 120.
[18] Ibid., p. 155.
[19] Concernant le rôle des « Chicago boys »
(groupe d'une centaine d'étudiants chiliens en économie
formés entre 1957 et 1970 à l'Université de
Chicago dans le cadre du Chili Project) dans les éblouissantes
réussites économiques de Pinochet, on consultera très
utilement Yves Delazay et Bryant G. Garth, La mondialisation des
guerres de palais. La restructuration du pouvoir d'État en
Amérique latine, entre notables du droit et « Chicago
boys », Paris, Seuil, coll. « Liber », 2002, notamment
p. 131-160.
[20] Foucault, Naissance de la biopolitique, op. cit., p. 229.
[21] Ibid., p. 236.
[22] Ibid., p. 232.
[23] Foucault se réfère principalement à Gary
Becker, The Economic Approach to Human Behaviour, Chicago/Londres,
The University of Chicago Press, 1976, et plus spécifiquement
au chapitre « Crime and Punishment : An Economic Approach
», p. 39-89.
[24] Sur cette question, on se reportera utilement aux analyses
que livre Anne Golse, à propos du cas spécifique des
politiques de santé publique, dans son article « De
la médecine de la maladie à la médecine de
la santé », in Philippe Artières et Emmanuel
Da Silva (dir.), Michel Foucault et la médecine, Paris, Éditions
Kimé, 2001. Et éventuellement à nos propres
développements dans S. Legrand, Les normes chez Foucault,
Paris, PUF, coll. « Pratiques théoriques », 2007,
p. 298 et suiv.
Résumé
L’extension sociale du marché dans le néolibéralisme
Cet article se propose de reprendre les analyses consacrées
par Foucault à l’extension sociale du modèle théorique du marché concurrentiel
libre en les rattachant à l’évolution de la catégorie (juridique,
morale, psychologique) de responsabilité,
et ce autour de deux types de processus : les transformations du
concept de
responsabilité pénale depuis le début du 19e
siècle, notamment sous l’influence
de l’expertise psychiatrique ; la responsabilisation infinie
des sujets vis-à-vis d’eux-mêmes
qu’induisent les dispositifs de gouvernementalité néolibéraux.
L’auteur croit pouvoir dégager de cette analyse un chiasme structurant,
situé au coeur des
régimes normatifs propres aux politiques de la criminalité
contemporaines.
Stéphane Legrand « L'extension sociale du marché
dans le néolibéralisme », Raisons politiques
4/2007 (n° 28), p. 33-47.
www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2007-4-page-33.htm
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