Compte-rendu de l'intervention de Gustave Massiah du 8 octobre
2003 à la rencontre entre les lieux interassociatif au CICP
à Paris
Le réseau RELACS se construit de la contradiction entre
lieux et moments ou encore espace et temps. Aujourd'hui il y a un
nouveau mouvement qui se développe et qui s'est approprié
un temps : celui des Forums Sociaux. Ce même mouvement n'a
pas franchi un autre pas qui est celui de s'approprier des lieux.
Il faut que les maisons interassociatives soient aussi des lieux
pour ce mouvement altermondialiste.
Ce mouvement ne réside pas uniquement autour de la solidarité
internationale mais repose sur des solidarités multiformes.
Certaines maisons se réfèrent aussi à la notion
de droits.
Déjà la première internationale définissait
le marché mondial comme une réalité et une
des conditions de l'entrée dans un monde en guerre. En 1980
nous assistons à un coup d'Etat mondial avec cette décision
de la hausse des taux d'intérêts et la fin du compromis
social de l'après guerre. Puis nous assistons à une
période de restauration de politiques agressives sur le plan
social. Les années 90 sont marquées par l'émergence
d'un nouveau mouvement social qui touche de nombreux pays comme
l'Italie, l'Allemagne, la France (décembre 1995) ou la Corée
du Sud. La lutte des infirmières de 1994 en France montre
que l'opinion publique refuse de rompre avec le soutien d'un mouvement
social qui s'inscrit dans la durée.
Seattle en 1999 constitue l'apogée du mouvement anti-mondialisation
avec le premier échec de l'OMC après celui de l'AMI
à Paris. C'est l'émergence des pays Baleines face
aux pays Dragons. C'est aussi le moment d'une grande recomposition
avec le début de convergences entre un certain nombre de
syndicats de salariés, de mouvements paysans, d'associations
de consommateurs, d'ONG de solidarité internationale et des
organisations aux préoccupations environnementales. La plate-forme
du Réseau des Lieux Associatifs de Création et de
Solidarité permet d'ailleurs de retrouver la convergence
de ces mouvements. C'est l'occasion de faire en sorte que, par exemple,
les associations de consommateurs deviennent autre chose que des
défenseurs du libéralisme.
Chaque mouvement tend à se radicaliser dans le sens de vouloir
traiter les problèmes à la racine. Dans ce contexte
nous arrivons à une prise de conscience sur la nécessité
de poser des alternatives, de passer de l'anti à l'alter
d'où la dynamique des forums sociaux.
Les Forums Sociaux sont des moments mais ne sont pas des espaces
: il faut aussi des points d'appui pour structurer ce mouvement.
Même si nos propositions sont fondées, dire qu'elles
vont s'imposer d'
elles-mêmes n'est qu'en partie vrai. Le mouvement social peut
aussi avancer dans des négociations société
civile à société politique. Il faut aussi des
lieux pour réfléchir et mener des expertises citoyennes,
élaborer des résistances et aussi avancer dans les
pratiques.
Dans les années 70 à 80 nous assistons à de
nouvelles politiques de
désengagement de l'Etat sur le plan social d'où la
création de certains
types de maisons spécialisées comme les boutiques
de solidarité, association d'insertion. C'est aussi une période
de crise de la décolonisation avec le développement
de régimes autoritaires et la non prise en charge de ce problème
par les pays du nord, ce qui implique une nécessaire mutation
des ONG de solidarité internationale et l'enjeu pour nous
que l'urgence soit traitée autrement que par l'humanitaire.
Les mouvements de solidarité sont confrontés à
la récupération par l'Etat et à une certaine
professionnalisation. Cependant l'action citoyenne portée
par Médecin du Monde de créer la Couverture Maladie
Universelle a fini par porter ses fruits.
La solidarité constitue déjà comme une réponse
à la mondialisation libérale. Dans les années
80 des lieux apparaissent pour prendre en compte ces nouvelles formes
de solidarité. Il y a la création de maisons logistiques
comme l'AGECA à Paris, il y a la création des Squats
ou des Squat-arts et il y a aussi l'apparition de maisons interassociatives
comme le Centre internationale de Culture Populaire (CICP) à
Paris ou la Maison de la Nature et de l'Environnement (MNE) à
Lille. Le projet du CICP a pu aboutir grâce à une souscription
qui a permis l'achat d'une maison rue de Nanteuil et de démarrer
à 30 associations. La Maison de la Nature et de l'Environnement
très liée aux questions d' écologie mais avec
une ouverture sur la solidarité internationale a pu voir
le jour grâce à la construction d'un rapport de force
durant les élections municipales de 1977 qui s'est traduit
par la mise à disposition d'un « quarante pièces
cuisine ». Ces exemples montrent aussi une capitalisation
de
l'inventivité associative à travers ces lieux.
Au cours des années 70, l'émergence des associations
en même temps que l' affirmation des collectivités
locales à travers la décentralisation pose la question
des liaisons qu'il peut y avoir entre ces deux nouveaux acteurs.
L'indépendance des lieux interassociatifs est importante
tout comme l'ingénierie associative pour répondre
aux enjeux des nouvelles formes de solidarité.
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