"Ainsi, un seul et même aspect de la structure infantile
se conserve et sexprime par deux voies différentes : par
le contenu des actes, du propos et représentations de l´individu
et par leur forme. Notons que lanalyse du contenu laisse intacte
malgré lunité du contenu et de la forme
cette dernière ; que cette «forme» sert de retraite
aux contenus psychiques que lanalyse des contenus semble déjà
avoir éliminés ou rendus accessibles à la conscience
; quenfin l´analyse de la «forme» est particulièrement
efficace quand il sagit de libérer des affects""
Wilhelm Reich, Lanalyse caractérielle.
"La vertu de vitalité transmet la vie, plus lamour."
Michel Serres, Variations sur le corps.
Les pages quon va lire visent à dégager quelques
lignes de force de la pensée de Wilhelm Reich pour en comprendre
les implications dans la pratique du massage néo-reichien en
particulier et, plus largement, dans la clinique psychothérapeutique.
Dans la mesure où, quoi quon en dise, les enjeux théoriques
de luvre reichienne demeurent très mal connus
y compris chez de nombreux thérapeutes travaillant dans son sillage
et ne jurant que par le vécu, notion obscure et sans grande validité
clinique parce que la majorité de ses tenants, ne possédant
souvent aucune culture philosophique et se prêtant à un
anti-intellectualisme fascisant, négligent de penser le rapport
fondamental entre lexpérience et la vie, quand ils ne négligent
pas de penser tout court , mes considérations théoriques
ne se baseront ici presquexclusivement que sur son livre le plus
connu, à savoir Lanalyse caractérielle, le recours
à d´autres ouvrages mayant toutefois à certains
moments paru incontournable. Jai également parcouru la
grande majorité des travaux consacrés à Reich,
ce qui ma évidemment permis de me faire une idée
plus juste des enjeux et des effets de son intervention dans le champ
thérapeutique.
On comprendra donc que ce texte constitue lébauche plutôt
que le résultat dune réflexion personnelle, celle-ci
sétant progressivement structurée au cours des vingt
dernières années. Je suis venu à la massothérapie
à la suite dun long travail avec le corps afin de vérifier
sur le terrain, si je puis dire, ses assises. Déjà, à
lépoque où jenseignais la littérature
comparée, la question du rapport entre la structure psychique
et la structure corporelle sollicitait mon attention dans le cadre de
la théorie littéraire, de la psychanalyse, de la philosophie
et de lanthropologie. Je poursuivais à lépoque
cette recherche en étudiant les théories de Malinowski
et de Marx, deux fondements de luvre de Reich. Je mintéressais
alors aux aspects anthropologiques de la pensée de Reich de même
quà ses importantes réflexions au sujet du masochisme
et de la pulsion de mort ainsi quau sujet des liens entre lapparition
de la conscience chez lhomme, la culture et langoisse.
Pour stimulantes que pourraient être ces pistes de réflexion,
je ne retiendrai ici que les aspects de la pensée de Reich directement
liés au massage néo-reichien en affirmant toutefois dentrée
de jeu, à partir de ma double position de massothérapeute
et de psychothérapeute dorientation psychanalytique et
psychocorporelle, que je minscris radicalement en faux contre
le manichéisme idéologique et commercial opposant lexpression
corporelle à lexpression verbale, le corps dit plus affectif
et spontané dun côté, les mots dits plus intellectuels
et superficiels de lautre. Le psychanalyste Roger Gentis, dans
un livre incontournable où il analyse, après les avoir
expérimentées, les thérapies corporelles dallégeance
reichienne (en particulier celles de Lowen et de Janov), a montré
que le corps ne dit pas davantage la vérité que le langage
:
Opposer corps et discours est donc à ce niveau parfaitement gratuit
: lun et lautre exposent et dissimulent, lun et lautre
cherchent à leurrer et trahissent en même temps une vérité
inconsciente chacun à sa façon, chacun avec ses
ressources propres, pour autant quon puisse les cliver lun
et lautre.
Lanalyste à lécoute de «lautre
scène» comme le bio-énergéticien pratiquant
la «lecture du corps», tous deux savent en principe dépister
le leurre, reconnaître la surcompensation, interpréter
la dénégation... Mais le corps nest pas plus «vrai»
que le discours : il a simplement dautres façons de mentir,
et dautres aussi de laisser filtrer la vérité»1.
Cest quant à moi sur cette base que je dirai dabord,
pour aller au plus urgent, que lobjectif ultime du massage néo-reichien
est à mon sens daider la personne à ce quelle
parvienne, pour parler comme Reich, à simplifier son comportement,
à devenir plus «spontanée». Elle peut alors,
après avoir réussi à défaire ses fixations
infantiles, approcher davantage son désir et, idéalement,
atteindre une auto-régulation adéquate. En dautres
termes, la personne na plus besoin dun contrôle extérieur
et en vient à gérer elle-même sa dynamique. Bref,
il sagit de dépasser la régulation morale qui scotomise
notre inconscient et nous empêche daccéder au plaisir
de la vie, cest-à-dire à la jouissance pleine et
actuelle de l´existence. Reich écrit, au sujet de ce dépassement
:
«Maintenant que laptitude à la satisfaction devient
égale à lintensité des pulsions, la régulation
morale devient inutile, lancien mécanisme de maîtrise
de soi nest plus nécessaire. Cest que lénergie
sest retirée des pulsions antisociales, et il ne reste
plus grand-chose qui doive être contrôlé» 2.
Implicitement, cest toute une définition de la santé
qui surgit dans ce contexte, cette définition renvoyant bien
sûr à la question des rapports entre la normalité
et la déviance, armature de la nosologie psychopathologique :
«Lindividu sain na pratiquement plus de moralité
en lui, car il na pas de pulsions qui appellent linhibition
morale.» Tout en récusant pour ma part une position aussi
extrémiste, je pense quon peut sans difficulté admettre
que la personne bien-portante est par conséquent celle qui atteint
une homéostasie telle que ses processus naturels dautoguérison
agissent adéquatement, dynamique uniquement possible si elle
développe un caractère génital en accédant
à sa propre puissance orgastique, à la dimension de sa
jouissance (pour parler cette fois comme Lacan, infiniment plus rigoureux
que Reich sur cette question).
Pour en arriver à montrer comment le massothérapeute peut
aider la personne à «retrouver» son auto-régulation
et son entière responsabilité, jai l´intention
de minterroger sur quelques notions essentielles de la rencontre
thérapeutique au sens reichien et en particulier sur le caractère,
la cuirasse, la résistance, la forme et le transfert. Ce parcours
me permettra en conclusion de mettre en lumière ma conception
du travail corporel dans le cadre du massage néo-reichien. Mais
il me fallait d´abord poser une question fondamentale: pourquoi
«néo-reichien»?
Pourquoi «néo»-reichien?, ou du corps de la personne
au corps politique
Commençons donc par un rappel étymologique. Néo
est comme on sait le premier élément de nombreux mots
savants composés. Il est tiré du grec neos, qui signifie
«nouveau». Mais alors, quelle est la nouveauté du
massage néo-reichien par rapport au travail de Reich? Et en quel
sens entend-on ladite nouveauté? La question mérite dêtre
posée dans la mesure où pour ne prendre que cet
exemple , au Brésil, pays où jai vécu
plusieurs années, les thérapeutes reichiens procèdent
à des manipulations corporelles en considérant quils
respectent la lettre reichienne sans pourtant se désigner professionnellement
comme «néo»-reichiens. En décidant de parler
de massage néo-reichien, ne pose-t-on pas sans le dire que cette
pratique se serait en quelque sorte substituée à celle(s)
de Reich?
Or, à quoi aurait tenu cette substitution : aux limites ou impasses
thérapeutiques et théoriques du fondateur de l´analyse
caractérielle, à nos propres limitations ou à lélargissement
de nos connaissances? Sans doute toutes ces réponses sont-elles,
chacune à leur façon, valables, et dautres pourraient
évidemment être proposées. Que Reich se soit peut-être
trop centré sur la question sexuelle est sans doute aussi vrai
que le fait que nous tendions à refouler la sexualité
comme lieu même de surgissement de la matière vivante.
Que certaines données récentes aient relativisé
et le plus souvent confirmé mais non infirmé, comme
le prétendent encore plusieurs lecteurs pressés de sauter
aux conclusions (sans compter les non-lecteurs...) des spéculations
et des expériences (par exemple, leffet Kirlian venant
légitimer les observations de la bio-luminescense) qui semblaient
parfois fragiles et incomplètes, nul nen doute. On pourrait
également poser une autre hypothèse, plus prosaïque
: le mythe dun Reich plus ou moins «équilibré»
(on est comme on sait allé jusquà le qualifier de
schizophrène), surtout vers la fin de sa vie, naurait-il
pas contribué à ladoption dune dénomination
marquant une distance, dailleurs utile sur la plan de la mise
en marché de lapproche?
Chose certaine, Reich lui-même a sans cesse, tout au long de ses
recherches, réévalué les résultats obtenus.
Par exemple, au moment où il publie la troisième édition
de Lanalyse caractérielle, soit en 1948, il nutilise
déjà plus cette méthode, héritée
de la psychanalyse, et intervient plutôt par lorgonthérapie,
basée sur la bio-énergie des émotions. Il est donc
continuellement dans une position nouvelle par rapport à ses
propres avancées. Cest d´ailleurs dans cette troisième
édition quest intégré, avec dautres
importants textes (dont «La peste émotionnelle»),
«Le langage expressif de la vie», article majeur qui ne
figure pas dans lédition originale de janvier 1933 et dans
lequel Reich étudie de manière
|
Les sept anneaux de tension, de haut en bas :
oculaire, oral, cervical,
thoracique, abdominal et pelvien.
Source : Stanley Keleman, Emotional Anatomy.
|
systématique la célèbre disposition segmentaire
de la cuirasse. C`est que Reich a entretemps développé
le lien entre énergie organismique et énergie psychique
et compris que
«lexpression bio-physique des émotions [constitue]
lobjet majeur de l´orgonthérapie médicale»
3.
De 1925 à 1933, Reich en est encore à lexploration
de léconomie sexuelle dans le cadre de la psychanalyse
freudienne ; ce nest qu´en 1933 qu´il commence à
développer les techniques de la végétothérapie
et de l´orgonthérapie, après avoir élaboré
sa critique de la notion de pulsion de mort chez Freud 4. Chacune des
nouvelles approches pourrait donc être qualifiée de «néo»
par rapport à la précédente, ce qui ne signifie
nullement, au contraire, quelles se dépassent mais plutôt
quelles sintégrent et senglobent.
Je men tiendrai quant à moi, pour expliquer l´utilisation
de la formule néo-reichien, à la raison qui mapparaît
la plus évidente, à savoir que Reich, à partir
dun certain moment, ne fait plus dinterventions corporelles
(massages localisés et manipulations précises), sauf lorsque
des examens médicaux savèrent nécessaires
pour mettre en relief des pathologies de nature physiologique. Fidèle
sur ce plan à la psychanalyse, cest d´abord par la
parole (la «talking cure») quil abordera toujours
le patient en amenant ce dernier à développer ses images
et ses sentis corporels. Voilà qui distingue nettement le massage
néo-reichien du type dintervention priviliégié
par Reich 5. Par contre, celui-ci nhésitera jamais à
prodiguer des conseils en proposant des exercices aidant à faire
surgir des vécus émotionnels neuro-végétatifs
et émerger les conflits.
Je crois pour ma part que le terme «néo-reichien»
fait symptôme dans la mesure où il permet de refouler certains
des fondements mêmes de la théorie et de la pratique reichiennes,
en particulier la question sexuelle, centrale si lon veut disposer
dune échelle permettant dévaluer les différents
types de caractères et donc daider la personne à
retrouver sa vitalité, cest-à-dire sa capacité
orgastique (problématique liée de près au coït
tel que le conçoit Sandor Ferenczi, un autre marginalisé
de la psychanalyse), en libérant progressivement ses anneaux.
Il est significatif que Céline Labrecque et Michèle Pépin,
dans un article publié il y a quelques années pour expliquer
clairement lapproche néo-reichienne, retiennent, parmi
les constats de Reich, celui-ci : «Lénergie sexuelle
est lénergie psychique circulant dans le corps de façon
ondulatoire : limpulsion vient du bassin et se répercute
jusqu`à la tête» 6. Dans leur texte, les deux auteures
signalaient évidemment le lien corps-émotion, mais sans
pour autant le rapporter explicitement à la question sexuelle.
Cest que la méthode est dite «inspirée»
de Reich, ce qui nimplique alors nullement quelle doive
suivre rigoureusement ses préceptes. Cest dire que le problème
central de la thérapeutique reichienne «Que fait
le sujet de sa sexualité?» nest pas articulé
de manière explicite dans la présentation et la pratique
du massage néo-reichien.
Cette question ouvre un champ complexe dans lequel le massothérapeute
intervient, quil le veuille ou non. Elle est en outre beaucoup
plus subtile que sa formulation peut le laisser croire, ainsi que la
montré Roger Dadoun, lun des meilleurs lecteurs de Reich.
Dadoun souligne en effet quelle pourrait être formulée
comme suit :
«[...] que fait du sujet la sexualité? comment le plaisir
est-il donné au sujet et reçu par lui dans ses expériences
infantiles? sur quel registre libidinal sinscrit son impuissance
orgastique, ou à quel degré de puissance orgastique est-il
parvenu? Quen est-il, historiquement et actuellement, de ses satisfactions
sexuelles ? 7»
Contrairement à ce qui se passe souvent (mais pas toujours, loin
sen faut) dans la situation analytique, un enjeu capital de la
situation thérapeutique reichienne consiste à sentendre
sur ce quil en est de lactualité. Pourquoi une personne
vient-elle nous voir, nous, et non un autre thérapeute, en massage
néo-reichien et non en psychanalyse (ou dans un autre cadre thérapeutique),
à ce moment-ci et non à tel autre? Pour plusieurs raisons,
cela va de soi. Mais je retiendrai celle-ci : parce que cette personne
sent et vit dans son corps et ses comportements quelle répète
actuellement quelque chose qui nappartient pas à la représentation,
quelle nest pas capable, à cette étape de
sa vie, de symboliser et par conséquent de perlaborer par le
biais de lexpression verbale. Ses symptômes sont donc le
signe dun travail du deuil non réalisé, à
venir. Il nest pas oublié puisque le symptôme est
là, et fait parler le corps. Le problème est que ce qui
est actuel ne sinscrit pas dans lhistoire du sujet, doù,
inévitablement, des coupures et des stases :
«[...] dans la répétition, il ne sagit pas
à proprement parler de passé. Il sagit de la catégorie
de lactuel, par quoi on désigne en psychanalyse un hors-temps
: ce qui se répète cest ce qui na pas eu lheur
de devenir du passé, dêtre archivé, dêtre
inscrit dans la trame du temps, et qui revient donc, toujours actuel»
8. Dans cette perspective, la réponse à la double question
de savoir ce que le sujet fait de sa sexualité et ce que la sexualité
fait du sujet doit passer par le corps actuel et placer au cur
du travail de massothérapie léconomie libidinale
de la personne. Que Reich y réponde pour sa part en posant une
norme hétérosexuelle (lhomosexualité étant
selon lui une sexualité pré-génitale) nempêche
pas quil ouvre pour nous, thérapeutes et intervenants,
deux dimensions fondamentales : lhistoire de la personne et sa
situation actuelle, dimensions à penser dans lhorizon de
lhypothèse limite de la recherche reichienne, à
savoir lénergie alpha (Ea), cest-à-dire lénergie
cosmique primordiale, l´orgone 9, par excellence mythologique.
L a position consistant à prendre ses distances par rapport à
Reich en utilisant la formule «néo-reichien» est
tout à fait légitime et ne saurait être remise en
question, en autant quelle reste fidèle à la double
dimension de lhistorique et de lactuel par le biais dune
prise en compte de larchivage de lénergie libidinale
et quelle ne renvoie pas bêtement à un division mécaniste
du travail qui ferait de la sexualité le champ privilégié
de la sexologie, ce à quoi sest toujours fortement opposé
Reich. Il mapparaît cependant que «lévitement»
de la sexualité critique10 de Reich fait en sorte qu´on
opère en coupant le corps de son champ énergétique
fondamental et quon reproduit ainsi un geste qui ressemble fort
à celui dune certaine orthodoxie psychanalytique, éliminant
ainsi la question politico-sociale inévitablement au cur
de la thérapie, parfois de façon massive. Dois-je rappeller
que Reich publie Lanalyse caractérielle la même année
que La psychologie de masse du fascisme?
Nous touchons ici, sans qu´il y paraisse, un aspect capital de
la clinique, à savoir, outre le passage de la chaise (lors de
lentrevue) à la table (lors du travail corporel), celui
de la table aux proches et, plus largement à la société.
Je veux dire par là que le massothérapeute en néo-reichien
intervient dans le champ politique, ce dernier étant présent
dans la structure psychique et corporelle de la personne. Être
massothérapeute en néo-reichien et ne pas sinterroger
sur la culture (morale, religieuse, scolaire, artistique, technologique,
politique, linguistique, etc.) dans laquelle baigne la personne me semble
un non-sens professionnel. Quand mes mains touchent un corps, elles
touchent une culture11.
Ce nest par conséquent pas un hasard si le philosophe Jean-Michel
Palmier a pu dire que lintérêt de luvre
de Reich (à lorigine de celle de Marcuse et de plusieurs
autres) résidait principalement dans sa critique de la société
répressive et des fondements de laliénation, bref
sur la genèse des névroses dans le capitalisme. Seul dailleurs
compte pour lui le Reich militant parmi les ouvriers et les jeunes communistes
de la banlieue rouge de Vienne et à Berlin, cest-à-dire
le fondateur du freudo-marxisme et de la socio-analyse brillament élaborées
dans Psychologie de masse du fascisme. Que lauteur de Lanalyse
caractérielle ait beaucoup ou peu apporté à la
psychanalyse, comme il le prétend jusquà un certain
point avec raison, cela dépend bien entendu de la conception
que lon se fait de cette discipline.
Pourtant, Reich a quant à moi contribué de manière
significative à la clinique. Si sa critique de la société
répressive reste inséparable de sa critique de la clinique
(le terme critique devant ici être entendu, non simplement comme
ensemble de jugements, mais dabord et avant tout au sens kantien
dexamen des fondements et des principes), cest parce quelle
attaque directement lordre bourgeois de la psychanalyse en insistant
sur limposibilité pour le citoyen «ordinaire»
de supporter une longue et coûteuse analyse hors du cadre dune
institution publique et cest également parce quelle
ramène inévitablement au corps, à la matière
elle-même, au vivant, à lorgasme. Car léconomie
sinscrit elle aussi dans ce corps. Par exemple, dans un contexte
thérapeutique, comment ignorer limportance de la précarité
de lemploi, voire du chômage et de toutes les angoisses
actuelles quil provoque chez un individu en détresse? Je
me souviens dune jeune fille je lappellerai Nathalie
qui mavait été référée
dans un centre de thérapie intensive dune durée
de 3 à 6 mois. Nathalie souffrait entre autres dun cancer
de la gorge et entretenait à mon égard en tant
quobjet un évident transfert négatif se manifestant
par une attitude ambiguë qui tenait à la fois de la provocation
et du charme à connotation ouvertement sexuelle. Comment, si
nous avions poursuivi notre travail à long terme, aurais-je pu
lui permettre dacquérir davantage de motilité végétative
sans nous attaquer au rapport concret entre certains de ses blocages
et son manque de formation de base, sa difficulté à exprimer
certains sentiments (évidente dans ses problèmes de respiration
et son clivage des bras et des jambes) et ce que jinterprétais
pour ma part comme une peur de la liberté, laquelle apparaissait
dans sa dépendance affective, sa consommation dalcool et
de drogues, ses tentatives de suicide ou encore sa façon «chaotique»
de gérer ses finances personnelles ce qui avait conduit
la DPJ à lui enlever la garde de ses deux filles en jeune âge?
Autre manière de dire quil aurait inévitablement
fallu brancher son corps à son réseau et à sa culture
(en tant que système symbolique), son corps individuel au corps
politique par le biais de léconomie sexuelle, ce à
quoi quelquun comme Palmier serait demeuré absolument aveugle,
, doù le fait quil ait pu réduire la
théorie de lorgasme à un biologisme et en faire
même un physiologisme délirant qui témoignerait
du déséquilibre mental de son créateur.
Cela dit, mon objectif nest bien sûr ni de juger de la santé
mentale de Reich, ni de faire ici la critique de ses théories,
ni dentrer dans les débats qui continuent d´entourer
la question de ses prétendues «déviations»
par rapport à une certaine institution psychanalytique, mais
simplement de souligner la tâche quil propose à lanalyste
et qui consiste, non pas à explorer linconscient, mais
plutôt à éliminer les résistances, les cuirasses
névrotiques, en les touchant là où elles se sont
inscrites/écrites, à savoir dans le corps. Et si la cuirasse
refoule toujours quelque chose qui appartient à léconomie
sexuelle, celle-ci établissant le lien entre la psyché
et le soma par le biais de lorgasme (lancrage physiologique
ne se réduisant donc pas à la conversion hystérique
ou à la simple somatisation), la tâche du thérapeute
en néo-reichien a donc nécessairement à voir avec
le sexuel. Sur le plan de la clinique, Reich en sappuyant
sur son travail dans les centres dhygiène sexuelle, les
dispensaires et les asiles met en effet laccent sur le
primat de la génitalité et insiste sur la fonction orgasmique
dans lanalyse du caractère. Cest dailleurs
ce primat qui pose problème pour Palmier et pour plusieurs critiques
de Reich puisque ce dernier refuse, en partant de lancrage physiologique,
de distinguer entre les psychonévroses (hystérie, phobie,
névrose obsessionnelle, etc.) et les névroses actuelles
(hypocondrie, névrose d´angoisse, etc.), celles-ci ayant
pour Freud leur source dans la sexualité adulte, celles-là
dans la sexualité infantile. Or, tout le problème réside
dans le fait que la critique reichienne des étiologies traditionnelles
se trouve combattue sur le terrain biographique alors quelle devrait
lêtre sur un autre terrain.
Parmi les travaux récents qui nuisent considérablement
à une juste compréhension des positions de Reich en adoptant
cette stratégie, figure ceux de deux membres de lestablishment
états-unien de la psychanalyse traditionnelle, Atwood et Stolorow.
Il est intéressant de sarrêter quelques instants
à leur travail parce quil véhicule les mêmes
lieux communs que la plupart des autres 12 et quil fait preuve
du même schématisme caricatural, les derniers écrits
du «découvreur» de lorgone donnant pour ainsi
dire la clé de sa confusion mentale. Les auteurs ramènent
lensemble de la théorie de Reich à une «cristallisation
symbolique de la quête tout au long de sa vie de labsolution
de sa culpabilité et pour la résurrection de sa mère»
13. Dans cette perspective dichotomique et simpliste, les forces anti-sexuelles
(quelles sactualisent dans la cuirasse caractérielle
ou dans les bacilles T) seraient identifiables à lautoritarisme
et à la violence de son père, alors que les forces de
la vie renverraient à lidéalisation de limage
de sa mère, dont il révèle lui-même ladultère,
ce qui aurait poussé la malheureuse au suicide. Toute la structure
de la personnalité de Reich serait du coup construite sur le
motif de la trahison, ce motif répondant à une série
de désillusions (du suicide en question à lexclusion
du Parti Communiste Allemand et à celle de lAssociation
Psychanalytique Internationale) menant tout droit au désordre
mental. Le signe de ce désorde : sa tendance à établir
des correspondances en postulant des relations ou des équivalences
entre différents niveaux de réalité, autrement
dit sa tendance à postuler des identités là ou
il ny aurait, selon Atwood et Stolorow, que des ressemblances
partielles et à construire ainsi, par exemple, un pseudo-évolutionnisme
comme lorsquil avance que les segments de la cuirasse reproduisent
celle des anneaux du vers.
Or, jamais Reich ne postule didentité (pas plus au sens
logique qu´au sens mathématique) entre les différents
niveaux de réalité. Il propose en fait des métaphores
ou mieux, des correspondances, autrement dit des homologies au sens
baudelairien du terme, c´est-à-dire une unité «ténébreuse
et profonde» entre les multiples plans de l´univers, laquelle
unité sexpérimente tout autant au plan sensible
des synesthésies (une sensation en évoquant une autre)
que sur les plans scientifique (lorgone comme énergie cosmique
universelle) et philosophique (offrant une métaphysique au sein
de laquelle le sensible, le matériel, et le spirituel se marient
dans le cur vibrant des hommes et des choses du monde). La tendance,
réelle, de Reich à faire des généralisations
et des synthèses serait issue de son besoin dêtre
réuni à sa mère idéalisée et de dépasser
la fragmentation14. Faisant ce quon pourrait appeler du Jung à
rabais, Atwood et Stolorow, engoncés dans un conception mécaniste
du corps et de la psyché, de la médecine et de la science,
sont incapables de souvir à la vision holistique et relationnelle
de Reich, vision «mythique» qui en fait linspirateur
de penseurs aussi importants, pour ne citer que ceux-là, que
Marcuse, Neil, Boyesen, Boadella, Lowen, Estrada, Bertherat, Deleuze,
Guattari et Leboyer. Tout en reconnaissant malgré eux la richesse
de lapport de l´analyse caractérielle, Atwood et
Stolorow la dépolitisent et éliminent ainsi prudemment
la Nature et le corps.
Dans leur lecture psychobiographique des travaux de Reich, Atwood et
Stolorow, se basant exclusivement sur quelques ouvrages publiés
aux États-Unis (en fait, pas plus de quatre), tentent donc de
démontrer que le développement du système théorique
reichien prend ancrage dans sa personnalité, «reflète»
et «symbolise» la lutte du penseur viennois pour sortir
de lexpérience traumatisante du suicide de sa mère
alors quil n´était qu´un enfant. Ne se basant
que sur la biographie de Reich par son fils, Peter, sur celle de sa
troisième épouse, Ilse Ollendorf, de même que sur
quelques citations décontextualisées du stimulant livre
de David Boadella, ils affirment que la dynamique précipitée
par cette tragédie se vérifierait autant dans son orientation
clinique que dans ses recherches sur les OVNI.
Il est facile de répondre à ces critiques. D´abord,
les «fantaisies» de Reich au sujet des OVNI, pour aussi
insolites qu´elles parraissent aujourdhui, sinscrivent
en réalité dans le contexte américain de lépoque
où, comme on le sait, l´Armée était au cur
des recherches sur les différentes formes de vie sur les autres
planètes. Affirmer que ces fantaisies marquent lentrée
définitive de Reich dans la psychose revient par conséquent
à postuler indirectement une psychose collective sans voir, beaucoup
plus simplement, que Reich participe à un vaste mouvement scientifique
et philosophique qui pose la problématique de laltérité
et de létranger (dont les extra-terrestres ne sont que
lune des figures au même titre que, par exemple, les sorcières),
ce questionnement étant de nos jours poursuivi dans le champ
des études culturelles.
Quant à la concaténation biographique, le premier psychanalyste
venu sait que ce type dinterprétation (dailleurs
appliqué de la même manière par les auteurs à
Freud, Jung et Rank) relève dune psychocritique et dune
sociologie naïves qui partent de la priori selon lequel il
y aurait une relation de cause à effet directe entre la vie et
luvre dun auteur. Dans le cas qui nous intéresse,
sont ainsi systématiquement négligés tous les processus
de médiation et de construction de la théorie et de la
pratique reichiennes, les flux d´énergie entre la structure
socioéconomique et la sructure sexuelle d´un individu et
dune société disparaissant tout simplement sous
la masse des lieux communs alors quelles sont clairement mentionnées
dans une citation faite par les auteurs15. On répliquera que
Reich lui-même, dans lintroduction à la première
édition de Lanalyse caractérielle, utilise la notion
marxiste de reflet : «Les structures caractérielles de
personnes appartenant à une certaine époque ou à
un certain ordre social ne sont pas seulement le reflet de cet ordre,
mais et ceci est bien plus important elles représentent
le lieu de son ancrage» (p. 17). En fait, Reich mentionne la notion
pour montrer son insuffisance, ce que ne sont pas en mesure de faire
Atwood et Stolorow parce quils obéissent à un modèle
déterministe et positiviste qui sappuie sur le principe
selon lequel les structures mentales dun individu doivent nécessairement
refléter la conscience commune dun groupe social (ce quon
appelle la mimésis). Or, un examen des rapports entre les structures
mentales de lindividu et celles du groupe démontre que
celles-ci sont rarement congruentes ou cohérentes. Dans ces conditions,
lImaginaire (au sens lacanien du terme, cest-à-dire
incluant les images, les représentations, etc.) vient médiatiser
le Symbolique et lui donner une forme propre, lui permettant même
de sopposer au discours social duquel il fait partie et quil
reproduit en partie. Parmi les terrains de médiation entre lindividu
et le collectif, lun des plus importants est justement le caractère.
Cest pourquoi il faut maintenant nous pencher sur la conception
quen présente Reich, ce qui nous fera ensuite comprendre
la nature des résistances quoppose la personne à
la circulation énergétique.
Caractère et résistance
La définition que Reich propose du caractère nous ramène
en droite ligne à la pratique du néo-reichien. On peut
en effet se demander quelles sont les raisons précises qui nous
poussent à travailler sur les tensions chroniques plutôt
que sur les tensions passagères. La réponse nous est fournie
dans Lanalyse caractérielle : «Le caractère
est une modification chronique du Moi à laquelle on pourrait
donner le nom dinduration. Cest elle qui est responsable
de la chronicité des réactions caractérologiques
dune personne. Elle vise à protéger le Moi contre
les dangers externes et internes qui lassaillent. En tant que
mécanisme de protection permenant, il mérite parfaitement
le nom de cuirasse» (p. 145). Le caractère est donc à
la fois une structure et un mécanisme de défense en lui-même.
Cest, pour résumer, dabord et avant tout un mécanisme
de protection narcissique au moyen duquel la personne arrive bon an
mal an à survivre. Autrement dit, elle peut être positive
et adaptative ou négative et morbide, voire biopathique (comme
dans le cas du cancer).
En tant que somme des expériences vécues et incrustées
dans le corps et dans le comportement, la cuirasse comporte au moins
deux couches: la couche musculaire, plus facile à observer et
à atteindre, reflète la couche mentale, plus profonde
et nécessitant un travail psychothérapeutique à
beaucoup plus long terme pour être modifiée. Ajoutons que
la lecture du corps à laquelle doit procéder le massothérapeute
en néo-reichien doit clairement distinguer la cuirasse musculaire
du symptôme puisque ce dernier «correspond à une
seule expérience ou à une seule tendance» (p. 57),
ce qui explique quil ne soit jamais complètement rationalisé.
Cette distinction est pour nous, massothérapeutes, essentielle,
puisquelle a des conséquences cliniques évidentes
dans la mesure où notre travail porte sur la cuirasse et non
sur le symptôme, quil ne touche que de manière oblique.
De plus, notre action porte dabord et avant tout sur la cuirasse
musculaire (en particulier sur le tonus et le mouvement des muscles
lisses et striés), quil sagit dssouplir pour
quelle devienne plus fonctionnelle, et natteint que secondairement
la cuirasse caractérielle, cest-à-dire, ainsi que
la définit Gérard Guasch, «lassemblage particulier
de défenses mentales propre à chacun» 16. Si la
personne souhaite sengager dans une démarche qui prenne
en compte sa cuirasse mentale, ses états émotifs et affectifs,
elle doit alors choisir ou de consulter un psychothérapeute parallèlement
à ses séances de massage, ou consulter un massothérapeute
qui exerce également la psychothérapie17.
La nature de cet article ne me permettant pas dentrer dans les
subtilités de la théorie de Reich, je crois cependant
utile, pour mieux faire comprendre comment se structure et sactualise
la cuirasse, de fournir une définition synthétique du
caractère dont la genèse, on doit sen souvenir,
remonte au moment où se résout le complexe ddipe,
sous une forme différente du refoulement ou de la névrose
infantile18. Ce nest donc pas le complexe comme tel qui peut créer
problème, mais plutôt ses modes de résolution. Cela
dit, jemprunte ma définition du caractère à
Roger Dadoun parce quelle respecte la lettre reichienne et quelle
permet de mettre en lumière ses différents aspects :
"En concevant le caractère comme résistance et
cuirasse, forme et fonction, histoire et structure, [Reich] se donne
pour tâche détudier dabord des mécanismes
de défense, des organisations pulsionnelles, des circuits de
distribution libidinale, des modes de fixation du plaisir et de langoisse,
des émotions sexuelles ; la priorité va à lanalyse
universelle et aux articulations dynamiques, aux dépens de
la description et des grilles et tableaux aux fines touches où
sexhibe la virtuosité des psychologues universitaires
et populaires." 19
Le caractère englobe donc physiologiquement, corporellement,
lensemble des éléments fondamentaux informant la
personne humaine. Pour ce qui nous concerne ici, le point essentiel
consiste à prendre en considération, sur le plan clinique,
au moins deux éléments :
1 La disposition segmentaire de la cuirasse (représentant
comme on sait le ver dans l´homme) ne doit pas faire oublier que
sa structure est également «rhizomatique»20 dans
la mesure où le développement caractériel, ainsi
que le souligne à juste titre Dadoun, procède par dissociations
et enclenche une suite doppositions des fonctions végétatives,
les forces physiques et psychiques sexerçant dans plusieurs
directions, parfois parallèles, souvent divergentes. Au schéma
habituellement utilisé pour illustrer le travail de néo-reichien
:

|
Le courant orgonotique sécoule
perpendiculairement aux anneaux de la cuirasse. |
il m´apparaît essentiel de joindre celui-ci, qui
permet de montrer que la fonction de défense contre les
agressions du monde extérieur et contre les pulsions
internes produit inévitablement une structure «intégrant»
les multiples fissions qui parsèment le parcours historique
de la personne :
|
Schéma
de la structure
de la cuirasse. |
|
Cette seconde structure, plus compliquée que la première,
montre que le développement caractériel de lorganisme
nest pas conditionné par la seule disposition en anneaux
ou par un schéma simpliste stimuli-réponses, mais que
son inscription passe par un réseau de tendances et de dissociations
formant lidentité. Bref, les différentes couches
de la cuirasse sinterpénètrent et on peut dire quil
y a entre elles une constante interaction, ce que prouvent hors de tout
doute la circulation et les stases énergétiques.
2 Une fois noté que la cuirasse présente une structure
double (à la fois cylindrique et rhizomatique) et quelle
ne se situe pas simplement à la surface du corps, quelle
pénètre ses couches les plus archaïques, il faut
mettre en évidence le fait quelle nagit pas uniquement
contre lenvironnement extérieur et les pulsions internes,
mais aussi entre eux. Comme lécrit encore Dadoun, «elle
en vient nécessairement à assumer une fonction daménagement,
dorganisation et de contrôle des relations liant les deux
systèmes en question»21. On comprend pourquoi le massothérapeute
doit faire preuve dune extrême prudence lorsquil commence
à dénouer les anneaux : en agissant de façon précipitée,
il risquerait en effet de déstructurer la personne et de la plonger
dans une dissociation plus grave que celle dont elle souffre au moment
où elle le consulte. Dans la mesure où le muscle «est
à la fois le support matériel et le code binaire (tonique
croissante ou décroissante) avec lesquels s´écrit
lhistoire de lindividu», son lieu darchivage,
il faut peser chaque manuvre physique et discursive afin, autant
que faire se peut, de ne pas forcer les réponses corporelles,
sous peine d´enrayer gravement le processus de perlaboration.
Si lobjectif du travail thérapeutique consiste bien à
donner davantage de motilité au corps et à atteindre ainsi
la cuirasse génitale, adaptative, mobile, supportant lauthenticité
et la spontanéité, il importe donc de prendre en considération
le temps de gestation naturel de chaque individu. On se donne ainsi
la chance de lutter à lavance contre un phénomène
important que Reich appelle la «rémanence cachée»
de la cuirasse, désignant par là le retour du refoulé,
retour dont lun des exemples caractétistiques est la «viscosité
de la libido». En favorisant une approche trop rapide, on laisse
libre cours aux résistances qui laissent croire à leur
élimination alors quelles maintiennent subtilement la cuirasse
névrotique réglée sur langoisse ou, dans
les cas plus graves, la cuirasse biopathique réglée, elle,
sur la haine. En allant plus loin, on peut dire que la précipitation
comporte le très grave désavantage de ne pas permettre,
si le travail avance de manière positive, de faire face à
la «rage destructrice» qui, selon Reich, se manifeste inévitablement
lorsque les barrages énergétiques commencent à
céder, cest-à-dire lorsque le courant orgonotique,
perpendiculaire au flux végétatif, sécoule
de nouveau dans laxe vertical (la colonne vertébrale) du
corps. Dans cette perspective, il est évident que le modèle
thérapeutique néo-reichien de base (10 séances)
ne sert que de point de départ, et ne saurait constituer une
limite au travail.
Résistances, formes et transfert.
Je ne me suis pour le moment intéressé quà
la cuirasse en laissant dans lombre les résistances et
la structure, cest-à-dire la forme. Cest à
la mise en lumière de ces éléments que je vais
maintenant mattacher brièvement parce que leur compréhension
est fondamentale dans le cadre du massage néo-reichien.
Comme Ferenczi, Reich affirme quil est insuffisant de ne retenir
que les contenus du matériel apporté par la personne et
quil est nécessaire de faire d´abord et avant tout
ressortir les éléments formels :
"[...] ce qui importe au début de lanalyse nest
pas le contenu mais la présentation formelle des matériaux.»
On dira que cette indication ne concerne que la psychanalyse. Pourtant,
cest entre autres par elle que Reich prend ses distances par rapport
à la psychanalyse traditionnelle, et quil inaugure son
travail du corps, quelle concerne au premier chef la pratique
du massothérapeute :
«Or, loubli du comportement formel ou une attitude consistant
à le considérer comme moins important que le contenu des
communications aboutit à une conception de la surface psychique
dont on ne saurait sous-estimer les dangers sur le plan thérapeutique»
22.
Pour ne pas rester à la surface, Reich retient, parmi ces éléments
formels, la plupart de ceux (posture, habillement, comportement, respiration,
regard, voix, etc.) importants dans une lecture du corps en bonne et
due forme. Lobservation attentive de ces éléments
apporte de précieux indices sur les résistances lesquelles,
pour la plupart inconscientes (seules certaines parviennent à
la conscience), demeurent toujours inscrites dans le corps.
Comme il le précise clairement dans lintroduction à
la première édition de Lanalyse caractérielle,
Reich (il est alors chargé du traitement des psychopathes à
la Clinique Psychanalytique de Vienne) croit nécessaire de poser
dans ce contexte au moins deux problèmes, à la fois théoriques
et cliniques :
1 la nécessité de développer une théorie
génito-dynamique du caractère sur la base de laquelle
constituer une typologie des caractères (hystérique, compulsif,
phallique narcissique et masochiste) ;
2 la nécessité de distinguer entre le contenu et
la forme des résistances. Tirant leur origine de lordre
social inhibant les énergies libidinales en les détournant
au profit de la structure socioéconomique de production à
travers la famille et léducation, les résistances
sont au coeur du travail thérapeutique dans la mesure où
elles doivent être levées dans le transfert négatif
pour que lanalyse amène lanalysant à développer
une relation plus saine à la réalité en le rendant
mieux apte à sortir de ses scénarios infantiles en ne
cédant plus sur ses désirs : «Comme chaque névrose
dérive de conflits non résolus survenus avant lâge
de quatre ans et que le transfert nest autre chose que la réactivation
de ces conflits, lanalyse du transfert négatif constitue
avec l´élimination des résistances la tâche
la plus importante de l´analyste»23. Sur ce plan, Reich
suit de près les techniques proposées par Freud : association
libre, attention flottante, interprétation et transfert, les
résistances étant considérées comme des
forces sopposant à lélimination du refoulement,
mais la permettant paradoxalement. Sur le plan théorique, Reich
cherche à sortir de lherméneutique de la psychologie
des profondeurs, du contenu, pour aller vers la forme ou mieux, pour
lier la forme, le contenu et le matériau.
Pour Reich, ce problème est toutefois en premier lieu pratique,
clinique et empirique. Il a trait à la question de savoir comment
on peut accéder aux résistances. Or, la patience du thérapeute
qui sintéresse au corps n´est pas de même nature
que celle du psychanalyste. Plutôt que dattendre le matériel
refoulé, Reich attaque demblée les résistances
qui se manifestent dès le début du processus thérapeutique.
Cette stratégie ne vise pas à économiser du temps,
mais à faire fructifier chaque moment en allant directement aux
résistances caractérielles. De cette manière, plutôt
que daborder une à une les résistances, on accède
au champ entier où elles vivent, cest-à-dire au
corps. Roger Gentis écrit, à propos dune session
quil a lui-même suivi :
«On peut dire peut-être (cette question serait à
travailler) que dans [cette] thérapie, cette perlaboration est
en quelque sorte assistée enclenchée, impulsée,
machinée par laction du thérapeute, ses interventions
et aussi par laménagement de la situation thérapeutique»
24.
Le thérapeute et la personne voient alors se déployer
petit à petit des formes (physionomie, manière de parler,
de bouger, etc.), chacune delles étant reliée à
une ou à des fonctions. Bref, en partant de la manière
dêtre dune personne, on accèderait plus facilement
à la construction de son caractère, construction impliquant
à la fois sa sructure et son histoire. Et partant, si lon
suit la structure en ver et la structure rhizomatique, cest linconscient
lui-même qui, un jour ou l´autre, surgira au détour
dun geste ou dune parole, ce que résume superbement
Dadoun quand il écrit :
"Lorsquun trait caractériel, formant résistance,
a pu être cerné, dégagé, mobilisé
(au plein sens du terme, cest-à-dire remis, par une série
de déliaisons, dans un circuit activé de mobilité
historique et affective), alors, tel un brin filant dune texture,
ça vient : des dispositions structurales se dessinent avec
plus ou moins d´ampleur, des expériences passées,
infantiles, plus ou moins lointaines et archaïques, se pressent
dispositions et expériences qui disent ce que furent
et ce que sont pour le sujet le plaisir et langoisse, la nature
de ses conflits, le refoulement, la haine, lamour..." 25
Ça vient..., cest-à-dire que linconscient
(le Ça, ou «Es» en allemand) apparaît dans
la structure elle-même par la vertu des formes. Dans lhorizon
thérapeutique, la question devient alors celle de savoir si,
dans le «tiers-lieu»26 quoffre le dispositif clinique,
cest le matériel émergeant lors de la rencontre
thérapeutique (ou analytique) quil faut interpréter,
ou la résistance quelle provoque. Pour Reich comme pour
Freud, cela revient à se demander pourquoi le malade ne veut
pas guérir.
Or, cest justement pour trouver une solution à cet épineux
problème que Freud conçoit progressivement l´appareil
psychique à trois niveaux :
1º topique (la première topique proposant les instances
du Conscient, du Préconscient et de lInconscient, tandis
que la seconde propose de nouvelles instances, non plus superposées,
mais entrecroisées : le Moi, le Surmoi et le Ça) ;
2º dymanique (tout ce qui est en lien avec les pulsions) ;
3º économique, dont la question : «Pourquoi un individu
tombe-t-il malade?», implique une réponse : «Pour
préserver lintégrité du psychisme»
cette «réponse» ouvrant la voie à
une réflexion en profondeur sur les résistances et les
mécanismes de défense.
C´est le niveau économique que privilégie comme
on sait Reich (sans toutefois négliger les deux autres) parce
quil permet de soutenir la thèse pratique selon laquelle
«la capacité daccéder à une situation
sexuelle inadéquate, cest-à-dire à une génitalité
souple, est un «critère décisif du diagnostic»
et donc, de la réussite ou de léchec thérapeutique.
Sappuyant sur les résultats des recherches présentées
dans La fonction de l´orgasme, Reich peut alors avancer que «le
problème économique de la névrose de même
que celui de sa thérapeutique relèvent en premier lieu
du domaine somatique et ne saurait être appréhendés
quen fonction du contenu somatique du concept de la libido »27.
Dans ces conditions, le but de la thérapie devient on ne saurait
plus clair : éliminer les stases libidinales souvent installées
très tôt dans lenfance, parfois même avant
la naissance, pour offrir au malade les outils qui lui permettent d´organiser
sa vie sexuelle sur une base génitale qui lui donnera satisfaction.
En d´autres termes, la reconnaissance ou lidentification
du symptôme ainsi que la prise de conscience du symptôme
ne suffisent pas à lever les résistances. Il faut rétablir
la puissance orgastique dans le corps puisque celui-ci est le lieu même
du sujet, l´espace de la personne. Dans une formule si remarquable
qu´elle en paraît banale, Michel Serres synthétise
en fait ce que je considère comme l´enjeu du massage néo-reichien
:
«Quest-ce que l´inconscient? Le corps, mieux, le corps
en bonne forme» 28.
On constate à quel point la vigilance est alors nécessaire
: en touchant le corps, je touche linconscient. C´est pourquoi
le massothérapeute ne doit «jamais perdre de vue que la
névrose est contenue dans la résistance, quen éliminant
la résistance, nous éliminons déjà un fragment
de la névrose» 29. Si, comme je l´ai dit plus haut,
en touchant le corps, on touche également la culture, on démontant
les résistances de la personne 30, on démonte celles de
la famille, du groupe et de la société qui l´ont
en partie moulée. Par où l´on voit à quel
point clinique et politique sont indiscutablement liées.
Dans la mesure où, en démontant les résistances
actuelles, je fais surgir les complexes infantiles non résolus
de la personne 31, lélément fondamental que nous
navons pas encore abordé est bien sûr le transfert.
Cest en effet ce dernier qui permet aux affects dêtre
mobilisés, positivement ou négativement :
«La règle établie par Freud quil faut conduire
le malade de la mise en acte au souvenir, de lactuel à
linfantile, doit être complétée par une autre
: les éléments sclérosés et rigides ont
tout dabord besoin dêtre ranimés dans lémoi
du transfert» 32.
Cest ici, dans le cadre du problème de la résolution
du transfert en vue de lapprentissage de la réalité,
toute la question du narcissisme du massothérapeute qui apparaît.
Sans entrer dans les détails qui dépasseraient
de loin le cadre de ces pages , soulignons que Reich avance que
le transfert positif se manifestant au début du travail nest
souvent quun leurre, une stratégie inconsciente servant
à maintenir la solution trouvée par le corps et le psychisme
pour supporter les compromis quils ont ébalorés
pour ne pas sombrer. Autrement dit, le transfert positif sert souvent
à occulter les pulsions agressives et langoisse :
«Lanalyse considéré comme le perturbateur
de léquilibre névrotique fera toujours figure dennemi,
peu importe si les affects projetés sur lui sont des impulsions
damour ou de haine ; car dans les deux cas, elles sont affectées
dun fort coeficient de défense de refus» 33.
Voilà un aspect de sa pratique auquel le massothérapeute
doit faire face et auquel il doit donc se préparer.
Comme tout thérapeute, jai d´ailleurs moi-même
fait l´expérience de ce transfert négatif avec Lya,
que j´ai rencontrée à dix reprises pour des massages
néo-reichiens et qui manifestait à mon égard un
évident transfert positif : elle collaborait sans aucun problème,
apportait beaucoup de matériel, était bien disposée,
se montrait aimable et affirmait volontiers sa confiance dans notre
travail et dans lobjectif que nous nous étions fixé,
à savoir développer un sentiment de sécurité
et ramener la confiance à l´intérieur. Bref, elle
attirait la sympathie, démontrait une attitude positive envers
lapproche.
De fait, après avoir complété sa série de
dix massages et reçu l´appui dun psychothérapeute,
Lya est parvenue à prendre des décisions importantes dans
sa vie, dont celle de rompre avec son mari. Au terme de nos rencontres,
elle avait retenu, comme piste à suivre, l´identification
de ses besoins, ce qui impliquait, outre la possibilité de l´abandon
(de sérieux progrès dans ce sens avaient à mon
avis été réalisés, quoi que je ne puisse
affirmer que ce geste radical n´ait pas porté par ailleurs
un mécanisme de compensation), d´apprendre à dire
non aux moments adéquats et à ne pas se placer constamment
en agence. Un des éléments-clé pour cette évolution
consistait dans la nécessité de dépasser sa peur
de l´abandon et de la mort (le deuil de son père restant
encore à élaborer), peur inscrite au centre de son corps
(principalement au diaphragme et au bas-ventre) et symbolisée
dans son imaginaire par une pierre de granit gris renvoyant sans doute
au moment où, après sa naissance, elle avait dû
rester plus de deux semaines à l´hôpital, semble-t-il
à cause d´un manque de place à la maison. Quoi qu´il
en soit et cela sans connaître la suite de sa thérapie
, Lya camouflait à mon sens ses résistances pour
protéger cette angoisse, maintenir son paradoxal équilibre
psychique. À preuve, même après un travail intensif
avec plusieurs intervenants, ses attaques de panique (ralenties par
la médication), avec leurs symptômes (tremblements, etc.),
et ses douleurs musculaires chroniques navaient toujours pas été
éliminées. Cest dire que nous navions pas
encore touché le noyau névrotique.
Je dirais par conséquent quà plus long terme, mon
objectif avec Lya aurait été de lamener à
exprimer ses émotions et surtout sa colère, parcours qui
aurait sans doute fini par montrer que la «bonne malade»
cachait un transfert négatif. La reconnaissance de cet état
de fait aurait ainsi constitué le moment où aurait débuté
le vrai travail. Un transfert négatif aurait à mon avis
permis de mettre à jour de puissantes pulsions agressives à
légard de son père et de son mari en même
temps quil aurait fait apparaître des désirs incestueux
avec ses deux fils. Son amabilité à mon égard,
qui reproduisait sans doute son attitude de soumission à légard
des hommes, aurait alors été chambardée. Pour rendre
cet objectif viable, une solution se serait imposée, essentielle
pour déjouer lintelligence et la culture de Lya : travailler
la forme de ses comportements et non les contenus quelle apportait
avec une généreuse profusion, cela en étant conscient
que cette distinction est toujours difficile à maintenir concrètement
34. Comme lécrit Reich,
«[...] lexpérience prouve que lanalyse des
résistances caractérielles doit occuper la première
place. Il ne sensuit nullement quil faille se borner momentanément
à lanalyse des résistances caractérielles,
pour aborder ensuite seulement lanalyse des contenus. En réalité,
les deux phases analytiques (lanalyse des résistances et
lanalyse des expériences de la première enfance)
se superposent et se recoupent» 35.
En définitive, mon travail de massothérapeute auprès
de Lya aurait consisté à appuyer sa psychothérapie
en lui permettant de vivre dans le corps et par le biais du transfert
négatif son agressivité refoulée. À mon
sens, le massage néo-reichien la préparait à un
travail en profondeur en lui servant de support. L´efficacité
de ce type d´intervention trouve en effet son origine dans le
fait que les manoeuvres connectent la situation de la névrose
avec ses résistances à la situation infantile
(liée au scénario originel). La personne peut ainsi se
transformer au plan dynamique et accéder dans le cours de ce
processus à une véritable autonomie caractérielle
36.
Le rôle du massothérapeute ne consiste donc pas à
interpréter les formations de linconscient, mais à
sen tenir au Moi présent, au hic et nunc, la tâche
de linterpréation revenant au psychothérapeute ou
au psychanalyste. Dans le chapitre de Lanalyse caractérielle
consacré aux outils dont dispose le thérapeute, Reich
propose une excellente synthèse des éléments important
de sa technique en insistant sur la nécessité de prendre
en considération la forme du problème avec lequel est
aux prises la personne :
La forme de la défense du Moi est toujours fonction du caractère
du malade, quelle que puisse être la pulsion du Ça refoulée.
Comme corollaire, la même pulsion du Ça peut être
refoulée de différentes manières, selon les individus.
Si nous nous contentons de linterprétation des pulsions
du Ça, nous faisons abstraction du caractère. Si, au contraire,
nous abordons les résistances toujours par la défense,
par le Moi, nous intégrons le caractère névrosé
dans notre analyse. Dans le premier cas, nous énonçons
dès le début ce que le malade repousse ; dans le second,
nous lui expliquons d´abord quil se défend contre
«quelque chose», puis comment il sy prend, puis ce
que sa démarche signifie (lanalyse caractérielle)
; en dernier lieu seulement, quand lanalyse de la résistance
a fait des progrès suffisants, nous lui disons ou il découvre
lui-même contre quoi il se défend. Sur le long chemin
conduisant à linterprétation des pulsions du Ça,
toutes les attitudes du Moi ont été analysées.
On préserve ainsi le malade de toute découverte prématurée
et on sassure son concours affectif et sa participation active
37.
Où le massothérapeute entre-t-il en scène dans
ce processus? En aidant à poser la question du «comment»
plutôt que celle du «pourquoi» (sans pour autant rejeter
le «pourquoi» lorsquil est énoncé).
En fait, il sagit pour nous de libérer des affects emprisonnés
dans la structure caractérielle aux lieux où se manifestent
les blocages qui, sils ne sont pas défaits, interviendront
dans lespace proprement psychothérapeutique. Pour reprendre
le cas de Lya, on comprend alors dans ce contexte pourquoi il a été
à mon sens capital de ne pas interpréter la tendresse
nommée au moment où j´ai proposé, lors de
notre troisième rencontre, de lui peigner les cheveux.
Les remarques qui précèdent peuvent donner limpression
que je considère le transfert négatif comme le cur
de la démarche, même si cest sur la base des problèmes
que pose ce dernier que Reich développe le concept de cuirasse.
Or, il nen est rien et dailleurs, ni Freud ni Reich nont
soutenu pareils propos. En réalité, cest dabord
le transfert positif qui importe, lequel se manifeste sous trois formes
:
1 le transfert positif réactif (lorsque la personne substitue
à la haine lamour) ;
2 la docilité passive (le sentiment de culpabilité
dominant alors le rapport au thérapeute) ;
3 le transfert de désirs narcissiques (lorsque la personne
tente dobtenir lamour ou ladmiration de la personne).
Mais le vrai transfert positif, celui qui est marqué de tendresse
et de sensualité, napparaît pour de bon quune
fois que les distorsions de la génitalité à la
base de langoisse ont été éliminées.
Le transfert positif est essentiel pour faire surgir à long terme
les résistances. En dautres termes, le vrai transfert doit
consister à transférer le sentiment de plénitude
du thérapeute à un autre objet, «mieux adapté
aux besoins réels du malade»38. Que le transfert positif
soit essentiel à lévolution de la personne se vérifie
dans le fait quil faille à tout prix construire un espace
thérapeutique sécuritaire. Ce n´est quune
fois installé ce «cadre», aussi souple que possible,
que les forces du transfert négatif peuvent faire progresser
vers une économie sexuelle liant psyché et soma par le
biais de lorgasme. Nul besoin pour entreprendre ce travail dêtre
un spécialiste tablant sur des années dexpérience.
En élaborant les aspects cliniques de sa théorie du caractère,
Reich avait d´abord pensé que cétait le cas.
Mais il en vint ensuite, en 1945, à modifier totalement sa position
à ce sujet. Relativisant ses réserves quant au fait que
lanalyste pratiquant lanalyse caractérielle peut
se trouver déboussolé devant la violence du malade une
fois que celui-ci commence à se libérer de ses défenses
narcissiques, il écrit : «Cette restriction était
justifiée dans les commencements de lanalyse caractérielle,
il y a dix-huit ans. Mais déjà à cette époque,
on a justement fait remarquer que la technique de lanalyse caractérielle
devait être enseignée aux débutants et non seulement
aux analystes chevronnés, puisquelle est supérieure
à lanalyse des symtômes» 39. Cette remarque,
adressée aux psychanalystes, vaut quant à moi tout autant
pour les praticiens du massage néo-reichien qui doivent apprendre
le plus tôt possible, non seulement à installer un transfert
positif efficace, mais aussi à faire face au transfert négatif.
Il faudrait évidemment pousser beaucoup plus loin cette étude
40 pour rendre justice aux propositions de Reich et mieux mesurer ses
enjeux cliniques dans le massage néo-reichien. Je voudrais simplement
clore ce parcours en affirmant qu´il y avantage à aller
très loin dans l´analyse du passage du transfert positif,
renforçant trop souvent le narcissisme du thérapeute (même
chevronné), au transfert négatif. Car ce que pose ce problème
du passage, cest aussi celui du temps, linterprétation
dune situation de détresse ne pouvant être interprétée
«tant quil y a des résistances à interpréter»
41. Ce nest certes pas par hasard que cest dans le contexte
dun extraordinaire exposé dun cas de schizophrénie
que Reich insiste sur limportance de la patience et du temps pour
faire émerger le transfert négatif :
«Cest une règle quil ne faut jamais précipiter
les choses mais desserrer la cuirasse, progressivement, lentement, en
sentourant de toutes les précautions posibles. Il ne faut
jamais pénétrer dans les profondeurs biophysiques avant
de savoir exactement ce qui se passe chez le malade et avant que le
malade ne se soit habitué à la situation ainsi obtenu»42.
En dautres termes, la patience et la retenue sont dans le processus
thérapeutique, quil sagisse de la psychothérapie
ou du massage néo-reichien, des vertus cardinales puisquen
passant dune première résistance de transert à
une seconde, il ne faut jamais négliger la couche intermédiaire
et, au besoin, ne pas avoir peur de revenir au point de départ.
On se donne ainsi les moyens didentifer avec la personne les stases
et leur point de départ, leur fondement.
LE TEMPS DE L´ÉCOUTE
Nous avons vu que l'importance de léconomie sexuelle motive
une pensée et une pratique de la cure reliant le corps et la
psyché en les connectant aux nuds de leur histoire et de
leur actualité. Nous avons par ailleurs compris, en explorant
le caractère, la résistance, la forme et le transfert,
que la plupart des principes formulés par Reich dans le cadre
de lanalyse caractérielle peuvent être utilisés
de manière efficace dans le massage néo-reichien, lequel
relève en fait, sur le plan pratique, davantage de lorgonthérapie
dans la mesure où le massothérapeute agit dabord
et avant tout au niveau biophysique.
Or, cette utilisation nest possible que si lon renoue avec
les enjeux de la sexualité, lieu par excellence des émotions
et de la vitalité de la personne. Le but du massage nest-il
pas en définitive daider à une auto-régulation
fondée sur une «économie équilibrée
de la libido» 43?
En restituant en elle cette capacité dautorégulation,
la personne devient enfin le sujet de sa propre expérience du
monde. Entreprenant ainsi une démarche par laquelle, en ayant
progressivement accès à ses clivages, ses tensions chroniques
et ses lieux de drame, «à lexpression biophysique
de ses émotions», elle se met à lécoute
des stases de son corps, mais également à celle de ses
flux, de ses rythmes, de ses forces, de ses lieux de création.
Peu importe à quel stade du processus thérapeutique elle
est parvenue, quelle affronte ses émotions primaires ou
ses émotions secondaires 44, la personne en arrive à percevoir
de mouvement (é-motion) de la réalité vivante,
faite dorgone, cette réalité offerte dans limmanence
du quotidien lui-même : «Le vivant ne se distingue ni du
vécu quotidien et historique, ni de lactivité connaissante
qui en est issue et qui sen saisit. Il ny a, pour Reich,
de connaissance fondamentale que du vivant mais cest que
le vivant est lui-même, fondamentalement, connaissance»
45. On comprend combien le massage peut modifier la vie dune personne
et lamener, pour parler comme Reich, à assumer concrètement
les trois activités aimer, travailler, connaître
formant la triade existentielle fondée sur la libido et
en laquelle lêtre humain trouve lénergie nécessaire
pour exercer sa conscience, sa lucidité et sa responsabilité.
Pour découvrir son potentiel bio-électrique, rétablir
ses courants plasmatiques et reprendre contact avec lessence de
la vie circulant en elle et à travers le cosmos en elle, la personne
a par conséquent besoin dun thérapeute sachant intervenir
de façon fine, discrète, lente, et privilégiant,
comme le dit Dadoun, une action «respectueuse de la dynamique
vivante des tissus, des organes, des individus et de leur histoire»
46. Cela nest à mon avis possible que si le masothérapeute
sait faire preuve, non pas dune simple empathie, mais bien
et surtout dune sympathie pour la personne dont il soutient
le processus. Entendue au sens de Max Scheler, cest-à-dire
comme «capacité subjective à supporter l´autre
dans sa souffrance...» 47, cette sympathie ne saurait se comprendre
que dans le sens éthique du terme (et non moral). Elle fait alors
du massage néo-reichien un espace où la «veillance»
devient une «histoire damour et de transfert». Comment
pourrait-il en être autrement lorsque la base de notre travail
consiste à toucher lautre dans sa vie secrète, dans
ses tissus les plus intimes ?
Michel Peterson, juin 2002.
Notes
1 Roger Gentis. Leçons de corps, p. 45.
2 La révolution sexuelle, p. 49-50.
3 Lanalyse caractérielle, p. 6.
4 Dans lordre, Reich passe de la psychanalyse à lanalyse
caractérielle, puis à la végétothérapie
et enfin à lorgonthérapie. Quil ait rompu
avec Freud à cause de désaccords théoriques et
cliniques profonds (entre autres autour de la question de la pulsion
de mort) nempêche aucunement quil ait toujours continué
jusquà la fin à faire preuve dun immense respect
pour le père de la psychanalyse. À preuve, cette stratégique
«profession de foi», ou cette reconnaissance de «dette»,
comme on voudra, de la troisième édition : «[...]
léconomie sexuelle ne sest jamais inscrite en faux
contre les découvertes scientifiques fondamentales de Freud.
[...] Léconomie sexuelle ne soppose pas plus à
la psychanalyse que les lois de la gravtitation de Newton ne sopposent
aux lois de Kepler. Léconomie sexuelle est le prolongement
de la psychanalyse de Freud à laquelle elle apporte le solide
soutien des sciences naturelles, de la biophysique et de la sexologie
sociale» (Ibid., p. 10).
5 Il en va de même pour les analystes psychocoporels formés
à Montréal à lÉcole Québécoise
de Formation de Psychothérapeutes (site internet: eqfp.com) et
dont les méthodes dintervention corporelle articulées
en fonction du Modèle dAnalyse Psychocoporelle développé
par Jean-Claude Tremblay sinspirent de Reich, mais aussi,
plus largement, des travaux de Gerda Boyesen, Rafaël Estrada, Jung
et Lowen.
6 «Le massage néo-reichien». In : Le massager, p.
20.
7 Roger Dadoun. Cent fleurs pour Wilhelm Reich, p. 111.
8 Dominique Scarfone. Oublier Freud?, p. 140.
9 Je souhaiterais ici remettre les pendules à lheure en
ce qui concerne laccumulateur d´orgone, cette machine autour
de laquelle se sont tissés des ragôts ayant permis la perpétuation
dun mythe sordide. À la limite, cet appareil, qualifié
avec raison par Dadoun d«objet littéraire»,
et qui a d´ailleurs intéressé des écrivains
de la Beat Generation comme Jack Kerouac et William Burroughs, est moins
une machine ou un outil de calcul statistique (Reich nest ni Kinsey,
ni Masters & Johnson) quun lieu du possible, un espace de
rencontres, de croisements, de flux : «Laccumulateur serait
moins un instrument quun espace, un repère, le lieu
pragmatique ou fantasmatique, ce nest pas ici ce qui importe le
plus dune polarisation et dune prise de conscience
énergétique, une territorialité singulière,
intense, critique, conflictuelle, enclavé dans notre espace déterritorialisé,
informe et désert à force dêtre balayé
dassauts idéologiques, objets, images, couleurs, rituels,
etc. Peut-être le sujet parviendrait-il ainsi à une écoute
de son corps total, de ses énergies, ses ruptures, ses carences,
et pourrait-il résister à la totalitaire entreprise de
paranoïa médicale qui, sous sa livrée scientifique,
prolonge dans le monde moderne la paranoïa sociale et ritualisée
du prêtre-sorcier» (Cent fleurs pour Wilhelm Reich, p. 27).
Bref, cet appareil est un créateur dintensité corporelle
et cest à ce titre quil intéresse. Ce lieu,
nest-ce pas cet espace vide, cet espace de sécurité
et de confiance que nous essayons de créer en massage néo-reichien?
Laccumulateur d´orgone pourrait alors la métaphore
de notre cabinet!
10 Jemprunte cette expession à Roger Dadoun, expression
par laquelle il désigne une sexualité «qui critique
un statut sexuel hégémonique et répressif, et qui,
en même temps, est vécue comme crise aiguë et dramatique;
ce puritanisme est à distinguer radicalement du puritanisme moral
chrétien, farouchement dénoncé par Reich, qui est
fondé sur la notion de péché et qui, surtout, fonctionne
comme support privilégié dune idéologie dominante,
anti-sexuelle» (Ibid., p. 19).
11 On pourrait prendre lexemple dun grave problème
comme celui des abus sexuels et démontrer limportance pour
le thérapeute d´en identifier les paramètres culturels
sil veut entendre les personnes en ayant été victimes.
En clair, les paramètres ethnologiques de labus chez les
Québécois ou chez les Haïtiens ou les Coréens
ne sont pas les mêmes. Ce ne sont pas les abus qui sont culturels,
mais bien la manière et le contexte libidinal dans lequel ils
sont perpétrés.
12 La critique de ces ouvrages ayant été faite par Roger
Dadoun de manière tout à fait lucide, je ny reviendrai
pas ici. Voir in op. cit., larticle «Délires»,
p. 147-155.
13 Faces in a Cloud. Intersubjectivity in Personality Theory. «Wilhelm
Reich», p. 117.
14 Ibid., p. 122.
15 À la page 107, les auteurs citent en effet le passage suivant
de la version anglaise de La psychologie de masse du fascisme, sans
en tirer aucune conséquence théorique, aveuglés
quils sont par leur objectif : «The interlacing of the socioeconomic
structure with the sexual sructure of society... takes place in the
first four or five years in the authoritarian family... Thus the authoritarian
state gains an enormous interest in the authoritarian family : It becomes
the factory in which the state`s structure and ideology are molded.»
16 Gérard Guasch. Quand le corps parle..., p. 63.
17 Gerda Boyesen, formée par Ola Raknes et Aadel Büllow-Hansen,
va encore plus loin et aborde les symptômes psychosomatiques ainsi
que les couches émotionnelles en effectuant des manuvres
agissant sur la pression du fluide énergétique qui circule
dans les membranes et les tissus superficiels (la cuirasse tissulaire)
dune part, et la pression fluidique à lintérieur
des parois intestinales (la cuirasse viscérale) dautre
part. Voir, à ce sujet, Entre psyché et soma. Au Québec,
seule lÉcole Québécoise de Formation de Psychothérapeutes
sest donnée comme mission de former des thérapeutes
proposant aux thérapisants une démarche psychocorporelle
(psycho-organique) impliquant lutilisation de plusieurs des techniques
(massages californien et biodynamique, végétothérapie,
relaxation dynamique, imagerie mentale, thérapie verbale, etc.)
quemployait Gerda Boyesen (qui recourrait également, dans
une remarquable synthèse clinique, à la physiothérapie,
lacupressure, le drainage lymphanique, etc.).
18 Je pense quant à moi qu´il remonte beaucoup plus tôt,
à savoir au moment où se développe lembryon.
C´est à mon sens ce que pourrait démontrer
et que démontrent effectivement les recherches dans le
domaine de lhaptonomie.
19 Roger Dadoun, op. cit., p. 112.
20 Je renvoie, pour lexplication de ce terme qui appartient au
vocabulaire de la botanique, aux importantes théories psychanalytiques
et philosophiques soutenues par Gilles Deleuze et Félix Guattari
dans le second volume de Capitalisme et schizophrénie : Mille
plateaux. Paris : Minuit, 1972. Le rhizome est une tige souterraine
de plantes vivaces qui pousse des bourgeons au dehors et émet
des racines adventives à sa partie inférieure. Partant
de cette «figure» de la nature, Deleuze et Guattari en viennent
à sintéresser aux points de conection (ce quon
pourrait presque appeler, dans le cadre de la massothérapie,
les points trigger) entre les différents concepts, corps, surfaces,
discours, etc.
21 Roger Dadoun, op. cit., p. 136.
22 L´analyse caractérielle, p. 45 et 45-46 pour la citation
précédente.
23 Ibidem, p. 24.
24 Op. cit., p. 30.
25 Op. cit., p. 109. Gentis parle quant à lui, dans une formule
hautement suggestive renvoyant à Groddeck, d«épiphanie
du Ça»: «Et ce qui se passe là, en thérapie,
en ces moments privilégiés où lon se sent
soudain arraché à soi-même, emporté par une
vague surgie du fond du monde, où la conscience tout à
coup muette sétale dans la pure transparence de ce qui
se passe là [...], cet instant de rupture, ce point brisant pour
reprendre le mot de Breton, ce passage dun seuil de non-retour
au cours de la montée vers lacmé et au-delà...
Au-delà, nayons pas peur des mots, au-delà est le
domaine du sacrée (le ça crée, dirait-on du côté
de chez Lacan), qui est aussi celui de la transe, de la possession,
de lextase. Au-delà, cest la présence immédiate
du dieu. De linnombale: Ça. Expérience immémoriale
de lhumanité. Mais expérience de toujours privilégiée
réservée à qui accepte de sabandonner,
de se perdre...» (Op. cit., p. 35-36).
26 Le terme est de Ginette Michaud.
27 L´analyse caractérielle, p. 32.
28 Variations sur le corps, p. 104.
29 Lanalyse caractérielle, p. 86.
30 Ce démontage comporte pour Reich quatre étapes : 1
le thérapeute saisit la signification de la résistance
; 2 - il en fait prendre conscience au malade en linterpétant,
en lanalysant rigoureusement ; 3 il en démonte les
rouages ; 4 il fait comprendre au malade contre quoi ou qui elle
est dirigée.
31 Cest ici le lieu dexpliquer pourquoi je parle, dans le
cadre du massage néo-reichien, de la personne et non du patient,
encore moins du client. Je prends le terme personne au sens que lui
donne Jean-Charles Crombez : «La personne se caractérise
comme un lieu dévénements et un emplacement
didentité.» Il continue : «Le lieu dévénements,
c´est ce dont on parle le plus souvent : tout ce qui remplit la
vie communautaire et la vie intérieure, les millions de préoccupations,
d´occupations, de rôles et d´idées. En tant
quemplacement didentité, on souligne la place spécifique
de quelquun ; cest grâce à cette identité
quon nomme le sujet et quon se dénomme comme sujet.
Lidentité est unique et changeante. Unique en ce sens quelle
se résume à une impression dêtre quelquun,
une sensation dexister. Changeante, car les qualités de
cette perception varient continuellement» (La guérison
en ECHO, p. 20). Notre objectif en massage néo-reichien me semble
daccompagner des gens dans un moment parfois difficile de leur
vie, pas de faire croître une entreprise et de réifier
la personne.
32 L´analyse caractérielle, p. 86.
33 Ibidem, p. 47.
34 Je pourrai sans doute bientôt vérifier ces hypothèses
puisque Lya ma récemment consulté pour une psychothérapie.
35 Ibidem, p. 64.
36 Je rappelle que le sous-titre de La révolution sexuelle était
justement «Pour une autonomie caractérielle de lhomme».
37 Lanalyse caractérielle, p. 76.
38 Ibidem, p. 134.
39 Ibidem, p. 116, note 1.
40 Pour des observations détaillées concernant le transfert,
on se rapportera au chapitre VI («Le maniement du transfert»)
de la première partie de Lanalyse caractérielle.
Je nai bien sûr pas pu entrer ici dans la question de la
distinction entre la névrose spécifiquement transférentielle
(que Ferenczi appelle à juste titre la compulsion de transfert)
et la névrose individuelle de la personne parce que cela maurait
amené à développer le problème de la personnalité
analytique de lanalysant.
41 Ibidem, p. 43.
42 Ibidem, p. 347.
43 Léquilibre recherché nexcluant pas un certain
mouvement vital entre les pôles caractériels : «Il
ne faudrait pas oublier non plus que la distinction entre le caractère
névrosé et le caractère génital na
rien dabsolu. Puisquelle se fonde sur un critère
quantitatif lordre de grandeur de la satisfaction sexuelle
directe ou de la stase libidinale on peut rencontrer tous les
degrés intermédiaires séparant les deux types idéaux»
(Lanalyse caractérielle, p. 175).
44 Reich distingue comme on sait entre les émotions primaires,
«émotions fondamentales de la matière vivante»
(le plaisir, la nostalgie, l´angoisse, la colère et la
tristesse), et les émotions secondaires, que traitent surtout
les psychothérapies traditionnelles, et qui composent, sur le
plan psychosomatique, la cuirasse caractérielle. Les émotions
secondaires sont en fait les mêmes que les émotions primaires,
mais elles ont été détournées de leur fonction
vitale.
45 Roger Dadoun, Cent fleurs pour Wilhelm Reich, p. 10.
46 Ibidem, p. 60.
47 Cité par Jean Oury, dans sa préface au livre de Ginette
Michaud. Le terme «veillance», cité plus loin, est
de G. Michaud.
Bibliographie :
uvres de Reich utilisées :
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Kammitzer. Paris : Payot, 1971.
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par Pierre Kammitzer. Paris : Payot, 1972.
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ATWOOD, George E. et STOLOROW, Robert D. «Wilhelm Reich».
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lanalyse reichienne. Vannes: Sully, 1998.
LABRECQUE, Céline et PÈPIN, Michèle. «Le
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Paris : Fayard, 1973.
MICHAUD, Ginette. Figures du Réel. Paris : Denoël, 1999.
PALMIER, Jean-Michel. Wilhelm Reich. Essai sur la naissance du freudo-marxisme.
Paris: UGÉ, «10/18», 1969.
REICH, Ilse Ollendorff. Wilhelm Reich. Pais : Belfond, 1969.
REICH, Peter. À la recherche de mon père. Trad. fr. Marianne
Véron. Paris : Albin Michel, 1977.
SCARFONE, Dominique. Oublier Freud?. Montréal : Boréal,
1999.
SERRES, Michel. Variations sur le corps. Paris : Le Pommmier/Fayard,
1999.
Le massage néo-reichien : vers lauto-régulation
de la personne est un article écrit par Michel Peterson,
massothérapeute et psychothérapeute au Canada
Le lien d'origine sur W . Reich et le massage néoreichien par
M. Peterson http://www.cmappac.com/bibliotheque.html