Le Service des Pensions est une administration du Ministère des
Finances implantée à Nantes depuis 1985. Ses agents (environ
400 à Nantes et 60 à La Rochelle) sont chargés de
la concession (c'est à dire de la détermination du droit
préalable au paiement) des pensions de l'ensemble des fonctionnaires
de l'Etat. Pratiquant professionnellement de manière quotidienne
le droit à la retraite, nous sommes en conséquence aux premières
loges pour porter une appréciation sur la réforme des retraites
présentée par le gouvernement.
Comme de très nombreux salariés, des secteurs public
et privé, nous constatons que celle-ci se traduit par une régression
généralisée de la situation des futurs pensionnés,
et se doublerait d'inégalités croissantes entre pensionnés
d'un même régime et ce, au détriment des situations
les plus modestes.
Nous avons donc voulu, par ce document, mettre à la disposition
du plus grand nombre, les éléments d'information tirés
de notre activité professionnelle, afin de battre en brèche
la propagande gouvernementale.
Sauver le système des retraites par répartitions ?
Qui paiera ?
Un tout petit peu les employeurs (10%),
Presque tout les salarié/es (90%),
Beaucoup les petits salaires,
Les femmes surtout,
Les jeunes aussi.
La réforme des retraites : un problème de société
Décote, surcote : une pompe à chômage !
Pour un autre financement !
QUATRE CONTRE VERITES SUR LA REFORME
1 / L'allongement des annuités aurait comme contre
partie la possibilité de racheter des années d'étude.
S'il est vrai que le projet de loi prévoit qu'un futur
article
L 9 bis du code des pensions autorise ce rachat dans la limite
de 12 trimestres, deux dispositions du même projet vident
cette possibilité de l'essentiel de son contenu.
Tout d'abord, le rachat n'est autorisé que si le diplôme
obtenu correspond au premier emploi dans lequel le fonctionnaire
a été titularisé ou si le même fonctionnaire
a pu accéder à cet emploi ultérieurement.
Exemple concret: un fonctionnaire titulaire du DEUG ou de la
licence entré dans la fonction publique par l'obtention
d'un concours de catégorie B sera exclu de cette mesure,
sauf s'il est promu ou accède à la catégorie
A par la suite dans le cas de la licence!!
Ensuite, il est indiqué que le rachat de cette période
s'effectuera " dans des conditions actuariellement neutres
pour le régime". Décryptée, cette
phrase pourrait signifier que sera mis à la charge du
fonctionnaire, non seulement l'équivalent de la retenue
pour pension ( comme dans la validation de services auxiliaires),
mais la "cotisation patronale implicite" ( soit la
somme fictive dont l'Etat aurait la charge s'il existait une
caisse de retraite des fonctionnaires). Le coût de cette
mesure devrait donc se révéler prohibitif et son
éventuel bénéfice être réservé
à certains hauts fonctionnaires…effort partagé
quand tu nous tiens…
|
2 / L'allongement des annuités serait également
compensé par la création d'un régime complémentaire
obligatoire par points concernant une partie du régime
indemnitaire.
Il ne s'agit aucunement par là d'une prise en compte
des primes pour le calcul de la pension.
Tout d'abord, il faut rappeler que certains fonctionnaires
( et parmi les plus modestes, comme l'attestent certains exemples
que nous détaillons) ne disposent pas d'un régime
indemnitaire tangible et que l'effet de cette mesure sera nul
sur leur situation.
Par ailleurs, et y compris pour les fonctionnaires dont la
part indemnitaire du traitement atteint ou excède les
20% du traitement brut qui constituent le plafond de cette fausse
"intégration", la mise en œuvre de ce
régime " par points" ( donc soumis aux aléas
futurs de l'évolution de ce point qui n'a rien à
voir avec l'indice mais avec les capacités financières
du régime), ne permettra en aucun cas d'en faire un outil
de compensation.
Qu'on en juge, le rendement attendu de la mise en œuvre
de ce régime complémentaire, ouvert au 1er janvier
2004, est de 6% pour une carrière correspondant à
40 annuités.
En clair un retraité au 1er janvier 2008 " bénéficierait"
d'un régime complémentaire à hauteur de
0,8%! ( la carrière de ce point de vue ne s'appréciant
que postérieurement à la mise en place du régime).
|
3 / La mise en œuvre de la décôte par trimestre manquant
ou anticipation de la limite d'âge serait une mesure d'équité
La mise en œuvre de cette décôte( à hauteur
de 5% par annuité manquante ou d'écart avec la limite
d'âge) va au contraire fragiliser les situations les plus modestes.
En effet, seront particulièrement touchées par ce dispositif:
- les carrières discontinues, et en particulier les femmes ayant
interrompu de manière significative leur carrière pour
des motifs familiaux. L'ensemble des périodes de non-activité
pour ces motifs ne sera en effet pas pris en compte et les pénalisations
s'effectueront pour tous eu égard à l'abaissement du pourcentage
rémunérant 1 année validée.
- les entrées tardives dans la fonction publique, compte tenu
de ce que nous avons exposé sur les conditions de validation
des années d'étude.
4 / Les minima de pension feraient l'objet d'une revalorisation sensible.
Non seulement il n'en est rien mais le dispositif complexe et progressif
adopté par le gouvernement pourrait se traduire par une diminution
des droits des fonctionnaires classés dans les échelles
de rémunération les plus basses et aux carrières
les plus courtes. Aujourd'hui ( article L 17 b du code des pensions)
un fonctionnaire a droit pour une carrière de 25 ans à
100% de l'indice majoré 216.
S'il a entre 15 et 25 ans de services et bonifications, il a droit
à 4 % par annuité de service et bonification (exemple:
pour 22 ans cela fait 88% du même indice 216) rapportés
à ce même indice.
A compter de 2004, le pourcentage attribué après 15 ans
de services ( donc aujourd'hui 15X4% soit 60%) décroît
petit à petit au profit d'un double calcul diminuant la part
des 15 premières années et augmentant celle-ci en fonction
des années comprises entre quinze et trente ans.
Une fois décodé, ce dispositif technocratique à
souhait, se traduit ainsi:
Aujourd'hui, un agent ayant effectué 22 ans de services disposerait
de 88% ( 22 ansX4) de l'indice 216, soit un montant annuel de 11 113
Euros ( 926 Euros par mois).
En 2008, ce même agent aurait 80,2% de l'indice 221, soit un
montant annuel de 10 314 Euros ( 860 Euros par mois).
En 2013, ce pensionné potentiel aurait 75% de l'indice 227,
soit un montant annuel de 9803 Euros ( 817 Euros par mois).
Où est l'effort sur les petites retraites?
Cerise sur le gâteau, le gouvernement exclura graduellement de
ce calcul les bonifications pénalisant une fois encore essentiellement
les femmes classées dans les échelles les plus basses.
Le gain nul se double donc d'une justice sociale zéro!
2 EXEMPLES DE CARRIERES INCOMPLETES
(personnels non bénéficiaires de primes car tous les fonctionnaires
ne sont pas assujettis à des indemnités…)
I - Un professeur certifié entré à 25 ans dans
l'administration et partant à l'âge de 60 ans le 1er janvier
2008 (à l'échelon terminal de son grade doté de
l'indice majoré 657 soit 34 488,10 euros annuels)
Aujourd'hui il aurait une pension basée sur 70 % (35 ans x 2
%) : il toucherait 24 141,67 Euros.
Le 1er janvier 2008 la base de calcul serait de 65,625 % (35 x 1,875
%) soit 22 632,82 Euros.
Pour avoir le taux plein à 40 annuités, la décôte
serait de 20 trimestres (5 ans) x 0,45 % = 9 %
La décôte sur le montant serait de 3 103,93 Euros
Le traitement final serait donc de : 22 632,82 – 3 103,13 = 19
528,89 Euros
SOIT UNE PERTE FINALE DE 4 612,78 Euros ET UN POURCENTAGE
DE PERTE DE 13,38 %
II – Un adjoint administratif principal de 1ère classe
entré à 25 ans dans l'administration et partant à
l'âge de 60 ans au 1er janvier 2008 (à l'échelon
terminal de son grade doté de l'indice majoré 393 soit
20 629,87 Euros annuels)
Aujourd'hui sa pension serait basée sur 70 % : il toucherait
14 440,91 Euros
Le 1er janvier 2008 base de calcul de 65,625 % soit 13 538,35 Euros
La décôte de 9 % sur le montant serait de 1 856,69 Euros
Traitement final serait donc de 13 538,35 – 1 856,69 =11 681,66
Euros
SOIT UNE PERTE FINALE DE 2 759,25 Euros ET UN POURCENTAGE EGALEMENT
DE 13,38 %
NB : le taux de décôte vient certes d'être modifié
et porté à 0,375 au lieu de 0,45, mais chacun comprendra
aisément que le fond du problème reste entier….
SIMULATION DE DEPART A LA RETRAITE APRES 37,5 ANS DE COTISATIONS
A L'AGE DE 60 ANS SOIT UNE CARRIERE ACTUELLEMENT COMPLETE MONTANTS BRUTS
MENSUELS
GRADES |
DUREE |
INDICE |
MONTANT |
MONTANT |
PERTE |
MONTANT |
PERTE |
|
de
COTISATIONS
|
de
FIN
De
CARRIERE
|
RETRAITE
AVANT
2004
|
RETRAITE
EN 2008
(base de 40 ans
de
cotisations)
*
|
de
REVENU
ENTRE
2004
et
2008
|
RETRAITE
EN 2020
(Base de 42 ans
de
cotisations)
**
|
de
REVENU
ENTRE
2004
et
2020
|
Cat. C :
Adjoint
Administratif
Prtincipal
3è Echelon
|
37,5
|
393
|
1 290
|
1 160
|
130
(- 9,9 %)
|
1 060
|
230
(- 17,9 %)
|
Cat. B :
Secrétaire
Administratif
de Classe
Supérieure
8e Echelon
|
37,5
|
488
|
1 600
|
1 443
|
158
(- 9,9 %)
|
1 315
|
286
(- 17,9 %)
|
Cat. A :
Attaché
d'Administration
Centrale
12e Echelon
|
37,5
|
641
|
2 103
|
1 895
|
208
(- 9,9 %)
|
1 727
|
1 727
|
Ouvrier
D'Entretien
et d'Accueil
|
37,5
|
323
|
1 060
|
955
|
105
(-9,9%)
|
870
|
190
(- 17,9%)
|
* - 1, 875 % par année de cotisation avec décote de 2
% par année manquante + 0,8 % de primes
** - 1,785 % par année de cotisation avec décote de 5
% par année manquante + 3 % de primes
Derrière une égalité de façade se cachent
bien des disparités qui toucheront surtout la vraie "France
d'en bas".
Tout le monde n'a pas la chance d'avoir eu une carrière linéaire,
d'être rentré tôt dans la vie active, certains ont
effectué de longues études, d'autres ont travaillé
à temps partiel ou se sont mis en disponibilité pour participer
plus pleinement, entre autre, à l'éducation de leurs enfants
(une majorité de femmes).
Ce projet est inacceptable, on pourrait parler de double, voire triple
pénalités : base de calcul, décote pour les annuités
manquantes, perte graduelle des bonifications pour enfants nés
après 2004, travail à temps partiel risquant d'être
lourdement pénalisé (salaire et annuités), validation
à minima des années d'études ...
POUR DES RENSEIGNEMENTS COMPLEMENTAIRES VOUS POUVEZ CONTACTER PAR MESSAGERIE,
FAX OU TEL LA CGT DES PENSIONS
Mail : Syndicat-cgt-pensions @ syndicats.finances.gouv.fr
Fax : 02.40.08.85.56
Tel : 02.40.08.86.46
Origine du texte : Lors de la manif du Mardi 25 Mai 2003 à Nantes
des personnes distribuaient un dossier d'analyse sur la réforme
des retraites.
Ces personnes travaillent dans un service qui est chargé de contrôler
et calculer toutes les pensions de retraites de la fonction publique d'Etat
pour l'ensemble de l'hexagone.