Sur un site consacré à la philosphie en terminale
http://mapage.noos.fr/philosophie/cadr.htm
Sur un site consacré à la philosophie en Terminale un
texte pose la question de la répression du désuir par
la psycahanlyse. Il s'agit d'un commentaire d'un texte de Freud. La
problématique de la répression du désir est abordé
et discuté et la question de la légitimité et d
el'éthique est posée :
" Une violente répression dinstincts puissants
exercée de lextérieur napporte jamais pour
résultat lextinction ou la domination de ceux-ci, mais
occasionne un refoulement qui installe la propension à entrer
ultérieurement dans la névrose. La psychanalyse a souvent
eu loccasion dapprendre à quel point la sévérité
indubitablement sans discernement de léducation participe
à la production de la maladie nerveuse, ou au prix de quel préjudice
de la capacité dagir et de la capacité de jouir,
la normalité exigée est acquise. Elle peut aussi enseigner
quelle précieuse contribution à la formation du caractère
fournissent ces instincts asociaux et pervers de lenfant, sils
ne sont pas soumis au refoulement, mais sont écartés par
le processus dénommé sublimation de leurs buts primitifs
vers des buts plus précieux. Nos meilleures vertus sont nées
comme formations réactionnelles et sublimations sur lhumus
de nos plus mauvaises dispositions. Léducation devrait
se garder soigneusement de combler ces sources de forces fécondes
et se borner à favoriser les processus par lesquels ces énergies
sont conduites vers le bon chemin." FREUD.
Le lien d'origine : http://mapage.noos.fr/philosophie/cadr.htm
Commentaire de ce texte
Dans un texte consacré à l'éducation, Freud a pour objectif de récuser
la méthode répressive couramment utilisée afin de civiliser le petithomme.
Le problème soulevé porte sur la méthode et non la fin ou la nécessité
de l'éducation : que faire en effet des pulsions asociales de l'homme
? Les réprimer ou les sublimer ? Agir de manière ferme voire violente
à leur encontre afin de les museler voire de les supprimer ou bien se
contenter de les diriger vers des buts valorisés socialement, des buts
reconnus comme culturels ? La thèse de Freud penche en faveur de la
seconde méthode.
S'appuyant sur deux acquis de la psychanalyse, Freud s'attache ici
à justifier sa thèse en insistant sur l'échec de la première méthode.
Le moyen utilisé n'est pas adéquat à la fin projetée. La sublimation,
seconde voie qui conduit à l'humanisation de l'homme, est présentée
sous son meilleur jour : elle apparaît comme un moyen adéquat à la fin
visée et constitue un principe explicatif de nos meilleures vertus
Freud dresse le bilan négatif de la méthode répressive utilisée pour
éduquer : " Une violente répression d'instincts puissants exercés
de l'extérieur n'apporte jamais pour résultat l'extinction ou la domination
de ceux-ci ". La méthode la plus couramment utilisée pour éduquer
dans notre civilisation européenne est en effet la répression. L'éducateur,
le parent, le maître s'opposent de front aux instincts qui sont ici
compris dynamiquement comme des forces actives qui n'offriraient d'autre
voie à l'éducateur que l'opposition d'une force plus grande encore.
Punitions, fessées sont opposées traditionnellement à ces forces innées.
La violence de l'éducation s'oppose à la violence de la nature. L'homme
n'est en effet pas " cet être débonnaire " qui aime son prochain. Il
est au contraire animé à l'égard de l'autre d'intentions que la société
civilisée condamne. Ces instincts puissants le portent à tuer, piller,
violer…. Les lois de l'Etat condamnent et répriment ces actes
spontanés. Mais éduquer au sens d'amener un individu à intérioriser
quelques règles de conduites est nécessaire : cela évite de placer un
gendarme derrière chacun, chose impossible techniquement et qui conduirait
à une régression à l'infini, le gendarme étant homme lui aussi. Chacun
a par ailleurs un intérêt personnel et vital à l'éducation : si l'homme
est un loup pour l'homme, chacun doit être protégé de son semblable.
Lorsqu'on a reconnu la nécessité d'éduquer, reste le problème des moyens
car " les passions instinctives sont plus fortes que les intérêts
rationnels " (Malaise dans la civilisation). L'homme ne se
rend pas à la raison. La méthode " classique " est ici récusée, non
pas parce que Freud recule devant toute violence frontale, par principe,
au nom de valeurs morales mais bien parce que celle-ci est inefficace.
Les effets espérés de la répression ne sont pas au rendez-vous, ne s'observent
pas. Il n'est pas ici de place pour des considérations morales : il
s'agit d'être efficace simplement. L'argument de l'inefficacité, de
l'échec est opposé aux tenants de la répression. L'éducation qui ne
conduirait pas à un travail sur soi, à une transformation intérieure
est vouée à l'échec : elle n'atteint jamais son but car les instincts
n'ont pas disparus et le face à face (violence de l'éducateur contre
violence des instincts) est voué à se poursuivre indéfiniment. Supprimer
les instincts est impossible, ce serait supprimer la vie même. Quant
à les dominer, cela suppose une bataille continuelle, un combat sans
fin : il faudrait continuellement opposer une force à une autre pour
lui faire contrepoids.
Quel est donc le résultat réellement obtenu, contraire à celui espéré
? " Une violente répression d'instincts […] occasionne un refoulement
qui installe la propension à entrer ultérieurement dans la névrose.
" Freud convoque déjà ici la psychanalyse en utilisant les concepts
qu'il a lui-même forgés. Définissons-les. Le refoulement est un mécanisme
de défense inconscient du moi contre la souffrance qui consiste à repousser
dans l'inconscient des représentations (images, souvenirs) lié à une
pulsion ou instinct, lorsque cette dernière entraîne du déplaisir (souffrance)
par rapport à d'autres exigences, sociales, morales par exemple. Le
refoulement est une sorte d'oubli qui ôte de la conscience un des éléments
du conflit psychique à l'origine de la souffrance. L'individu est en
effet déchiré entre ses pulsions sexuelle ou agressive qui cherche leur
satisfaction et les interdits que la civilisation ou que la réalité
physique tout simplement leur oppose. L'intériorisation de ses interdits,
engendrée par l'éducation a pour effet d'importer au coeur de l'individu
lui-même le conflit. Comment sortir alors du conflit et de la souffrance
qu'il engendre ? En boutant hors de la conscience l'un des deux termes
du conflit. Supprimer le conflit en supprimant de la conscience un des
deux termes en présence est l'opération du refoulement. Cependant, le
refoulement lui-même " installe la propension à entrer ultérieurement
dans la névrose. " Le refoulé, produit du refoulement ne disparaît
pas du seul fait qu'il n'est plus conscient. Ce qui est oublié n'a pas
pour autant disparu et pourrait de manière déguisée revenir hanter
la conscience sous la forme d'un symptôme. Telle scène traumatique (expression
du conflit) s'exprimera alors sous la forme d'un symptôme corporel.
Le corps rejoue la scène traumatique dans une " langue " que le sujet
ne comprend pas. Le symptôme est le retour du refoulé déguisé, refoulé
mis à la porte de la conscience mais qui revient par la fenêtre troubler
l'individu. Celui-ci sombre alors dans la névrose, maladie psychique
mais qui affecte aussi le corps (cf. les symptômes corporels tels les
paralysies, contractures des membres, vomissements…) La névrose
comme toute maladie est invalidante socialement : le malade ne peut
plus mener une vie sociale et affective normale. Si l'on considère que
le but de l'éducation est d'empêcher l'expression d'instincts asociaux,
qui perturbent, menacent la vie du groupe et donc des individus qui
le composent, la méthode répressive va à l'encontre non seulement des
instincts qu'elle souhaite annihiler mais encore de la société et de
la civilisation elles-mêmes. En effet, le névrosé souffre en tant qu'individu
mais il est aussi inutile à la société elle-même, incapable d'" aimer
et [de] travailler ", actes par lesquels Freud définit la normalité.
Le malade est incapable de s'intégrer socialement : l'éducation répressive
participe donc de la production de la maladie nerveuse, but qu'elle
n'avait certainement pas visé !
L'argument de l'inadéquation du moyen à la fin et de l'échec de l'éducation
répressive est présenté comme un acquis, un enseignement de la psychanalyse
dont Freud est le père : " La psychanalyse a souvent eu l'occasion
d'apprendre à quel point la sévérité indubitablement sans discernement
de l'éducation participe à la production de la maladie nerveuse……
" Freud s'appuie ici sur le matériel expérimental fourni par ses malades
lors de la cure psychanalytique. Freud s'est instruit au contact des
faits et de leur éclairage et explication psychanalytiques. Qu'est donc
la psychanalyse ? Pas seulement une méthode de traitement des désordres
névrotiques ; auquel cas elle ne concernerait que les malades et n'aurait
rien à nous dire au sujet de l'éducation, qui concerne chacun. Freud
la définit comme un procédé d'investigation de processus mentaux à peu
près inaccessibles autrement et comme une série de conceptions psychologiques
qui forment finalement une nouvelle discipline scientifique. Grâce à
l'association libre d'idées, Freud a accès à des données insoupçonnées
des pères fouettards, au destin des pulsions ou instincts par exemple
(cf. son premier argument/enseignement) ou encore au mécanisme inconscient
du refoulement. Ces enseignements de la psychanalyse sont présentés
comme étant sûrs, la psychanalyse étant elle-même comprise comme une
science.
Mais la maladie invalidante comprise psychanalytiquement n'est pas
la seule réalité qui plaide en faveur d'une autre méthode éducative.
La psychanalyse nous apprend aussi " au prix de quel préjudice de
la capacité d'agir et de jouir la normalité est exigée ". Freud
semble ici répondre par avance à une objection : on pourrait en effet
lui opposer que cette méthode répressive n'a finalement pas que du mauvais,
qu'elle a donné par le passé des résultats acceptables, que la civilisation
européenne elle-même en est le produit étant donné qu'elle a été systématiquement
mise en œoeuvre. On a toujours repris les enfants, punis les méchants…Freud
reconnaît lui-même que " la normalité exigée est acquise ". Les
tenants de cette éducation pourraient donc eux aussi s'autoriser des
faits et des résultats obtenus ! Faits contre faits et enseignement
de l'histoire contre enseignement d'une toute nouvelle science : à ce
compte-là, Freud risquerait bien d'être mis en difficulté. Un nouvel
enseignement et un nouvel argument donc sont opposés. Si l'on fait les
comptes, si l'on tente d'évaluer les bénéfices d'une telle éducation,
on peut la considérer comme peu "rentable" et s'écrier " quel gâchis
! ". La capacité d'agir est diminuée : les instincts sont en effet des
forces fécondes, qui poussent à l'action, qui tendent vers un but. Réprimées,
ces forces sont détournées, comme rentrées, voire retournées contre
soi (cf. la pulsion agressive ne trouble plus le prochain mais se retourne
contre l'individu lui-même qui se mutile, se bride et se brime). L'individu
devient timide, paralysé, arrêté dans ses élans ; l'impulsion à l'action
est toujours là, donnée par l'instinct, mais elle ne s'actualise pas,
ne conduit à aucune oeuvre. La société, la civilisation répressives
sont elles-mêmes victimes de cette diminution de la capacité d'agir
de leurs membres. Finalement, ni l'individu, malheureux, ni la civilisation
n'y trouvent leur compte. Dans l'intérêt social bien compris, il est
préférable de renoncer à ce type d'éducation. Une société n'a pas intérêt
à se couper de ces forces vives que sont les instincts. Quel bénéfice
pourrait-elle escompter d'individus amputés ou malades ? Un bénéfice
moins grand que celui qu'elle retirerait d'une autre méthode : favoriser
la sublimation.
Après avoir mis en coupe réglée l'éducation répressive, Freud fait
ressortir tout l'intérêt de la psychanalyse : on peut aussi se fonder
sur elle pour construire, apporter des solutions et pas seulement critiquer,
réfuter. En effet " la psychanalyse peut aussi enseigner quelle précieuse
contribution à la formation du caractère fournissent ces instincts asociaux
et pervers de l'enfant…. " l'homme n'est pas un animal sociable
: la pulsion de mort, pulsion agressive qui l'anime tend en effet à
dissoudre le lien social, à détruire toute forme complexe d'organisation.
C'est pourquoi l'éducation est nécessaire, aux yeux mêmes de ceux qui
sont déjà intégrés socialement. Mais quelle éducation ? Freud répond
implicitement que l'éducation doit se proposer d'intégrer socialement
et de former le caractère. Qu'est-ce que le caractère ? Est-ce la personnalité
? Ou plutôt ici l'ensemble des caractéristiques d'un individu qui a
cessé de faire l'enfant, de n'être qu'un enfant, qui ne vit donc plus
seulement selon le principe de plaisir qui régit les pulsions, mais
aussi le principe de réalité qui régit le monde physique et humain.
Avoir du caractère consiste justement à être en mesure d'affronter la
réalité, de lui imprimer sa marque, de lui résister mais aussi et surtout
de résister à ses propres impulsions. Contre l'individu paralysé, timoré
qu'enfante l'éducation répressive, Freud insiste ici sur la force que
représentent les instincts avec lesquels il faut compter, force qui
doit être exploitée et non diminuée. Mais rappelons-nous que ces instincts
sont " asociaux et pervers " : il ne saurait être question de les laisser
s'exprimer brutalement. Là encore, Freud ne récuse pas la nécessité
de l'éducation mais propose une autre méthode afin de civiliser. Les
instincts ne peuvent disparaître ou être soumis, dominés mais ne peuvent
pas non plus être laissés à leur spontanéité ; la solution consistera
donc à les " écart[er] par le processus dénommé sublimation de leurs
buts primitifs vers des buts plus précieux ". Prenons le cas de
la pulsion sexuelle. De ce point de vue, l'enfant est " un pervers polymorphe.
" Sa sexualité est primitivement auto-érotique. On ne laissera pas la
pulsion sexuelle de l'enfant se satisfaire par cet objet qu'il est pour
lui-même mais on ne brisera pas pour autant cette force féconde. La
pulsion sexuelle ne vise pas du tout originairement dit Freud, dans
La vie sexuelle, la reproduction. La tâche de l'éducation sera
de limiter ce stade de l'auto-érotisme car sa prolongation rendrait
la pulsion sexuelle impossible à contrôler ultérieurement. Il s'agit
en fait de canaliser la pulsion vers le sexe opposé... et la reproduction.
La pulsion agressive peut être également sublimée : l'agressivité de
l'enfant à l'égard de l'autre enfant peut être d'un secours précieux
lorsqu'il s'agit d'apprendre et de progresser, d'être le meilleur en
maths ou à la course à pieds. Mais qu'est-ce au juste que la sublimation
?
Elle est d'abord la solution freudienne apportée au problème de l'éducation
: la méthode adéquate, la moins coûteuse pour l'individu et la société.
Au lieu de s'épuiser à combattre de front les pulsions, la société peut
en faire un usage fécond : nos "trésors de civilisation" en sont les
fruits. L'individu lui-même n'est pas privé de satisfaction ou de jouissance
puisqu'il satisfait grâce à elle ses pulsions mais de telle manière
que cette satisfaction n'est pas obtenue au détriment de la paix sociale
et des plus hautes valeurs de l'humanité. On pourrait dire que tous
y trouvent donc leur compte et le meilleur compte. La sublimation consiste
plus précisément à détourner les pulsions de vie ou de mort vers des
objets valorisés, reconnus socialement. Quelle est sa condition de possibilité
? Le fait même que la pulsion n'ait pas d'objet " attitré " naturellement.
En effet, le but de la pulsion ou de l'instinct est la suppression de
la tension générée par une excitation corporelle. La tension psychique
pulsionnelle est trop forte et est vécue comme déplaisir ou souffrance.
Il s'agit donc de ramener la quantité excitation psychique a un niveau
supportable, normal. Ce qui est fait lorsque la pulsion atteint son
but (supprimer la tension, ce qui procure satisfaction ou plaisir) et
trouve son objet : ce par quoi le but est atteint. Cet objet est donc
relativement indéterminé. A l'éducation de donner à la pulsion son objet,
d'orienter la pulsion vers un objet. Non seulement, les individus ne
seront plus frustrés et agressifs pour cause de frustration mais ils
seront vertueux. L'éducation vise aussi à la vertu et la sublimation,
comme moyen d'éduquer, y conduit. Les exigences morales élevées de l'adolescent
en matière de justice sont comprises par Freud comme un effet de la
sublimation de la pulsion sexuelle lors de la période de latence, période
pendant laquelle la libido semble endormie, qui précède le stade génital
où la libido, pulsion sexuelle, se fixe alors, pour le plus grand nombre
sur le sexe opposé.
L'origine de la vertu proposée par Freud est étonnante : "
Nos meilleures vertus sont nées comme formations réactionnelles et sublimations
sur l'humus de nos plus mauvaises dispositions ". Freud se garde
bien ici de moraliser et même on peut dire qu'il désacralise la vertu.
Il parle en scientifique, se gardant de tout jugement de valeur. Il
choisit néanmoins son camp : celui de la culture ou de la civilisation
qui selon lui " désigne la totalité des œoeuvres et des organisations
dont l'institution nous éloigne de l'état animal de nos ancêtres et
qui servent deux fins : la protection de l'homme contre la nature et
la réglementation des relations des hommes entre eux " (Malaise dans
la civilisation) La nature n'est ni bonne ni mauvaise en soi mais
il ne saurait être question de sacrifier le meilleur à notre spontanéité
pulsionnelle aveugle. Les comptes sont en effet vite faits : qui renoncerait
aux arts, aux sciences, aux techniques…, aux agréments qu'ils
procurent, aux intérêts qu'ils ont, pour satisfaire des pulsions aux
buts primitifs au deux sens du terme (ce qui nous conduirait à notre
propre perte ) et qui peuvent néanmoins l'être si elles sont sublimées
? Les pulsions seront donc satisfaites mais en prime, nous disposerons
des trésors de civilisation qui n'auraient pas vu le jour sans la sublimation.
La conséquence peut désormais être tirée : " l'éducation devrait
se garder soigneusement de combler ces sources fécondes et se borner
à favoriser les processus par lesquels ces énergies sont conduites vers
le bon chemin. " La pulsion est là encore comprise de manière dynamique,
énergétique. Freud développe une conception quasi mécanique (la mécanique
étant une partie de la physique qui étudie les lois du mouvement) du
psychisme : il dégage les " lois " du mouvement des forces psychiques
en présence. L'éducation doit " se borner à " ; conformément
à l'étymologie, il s'agit de conduire, de diriger, de guider et non
de réprimer, de briser sans pour autant renoncer au progrès moral et
aux avancées culturelles. Freud, s'appuyant sur la psychanalyse, sans
faire d'angélisme mais sans jouer non plus les pères fouettards, ne
renonce pas ici à éduquer : il propose simplement une nouvelle méthode
qui s'inscrit dans le fil de ses découvertes scientifiques. Ce faisant,
il réconcilie les exigences de l'individu et les exigences sociales
et culturelles.
Cependant, la solution freudienne repose sur des acquis, des enseignements
de la psychanalyse comme science. Or, la psychanalyse ne semble pas
s'élever au niveau des exigences de la science. Elle ne remplit pas
le cahier des charges établi par Popper. Si la réfutabilité ou la falsifiabilité
caractérise la démarche scientifique, force est de constater que la
psychanalyse est irréfutable. Toute objection y est interprétée comme
un effet de la résistance, force inconsciente et mécanisme de défense
contre la souffrance qui interdit aux désirs inconscients l'accès à
la conscience en l'absence de toute transformation destinée à les travestir.
La psychanalyse n'a ainsi pas d'extériorité ! Comment pourrait-elle
sans contradiction s'appuyer sur des faits puisqu'elle les récuse comme
autre et n'a jamais affaire en définitive qu'à des interprétations.
Le refoulement lui-même est considéré comme prouvé par l'existence de
la résistance que nous manifestons (paraît-il) à prendre conscience
du refoulé. Mais est-ce bien la "résistance" au sens où Freud l'entend
qui se manifeste ? Ainsi, la solution apportée par Freud ne vaut
que ce que vaut ce sur quoi elle prend appui et qui paraît bien fragile
quoique cohérent.
On pourrait aussi, plus radicalement peut-être, reprocher à Freud sa
timidité. Pourquoi en effet adapter, ne serait-ce que par le biais de
la sublimation l'individu à la société, aux exigences sociales ?
Pourquoi s'adapter à une société que Marcuse par exemple trouve injuste
et qui a précisément provoqué la névrose ? Marcuse met en avant le fait
que la société capitaliste exige de l'individu du travail à outrance,
travail qui est l'effet d'une sublimation, fruit des forces utilisées
mais qui dépasse largement le nécessaire à la satisfaction des besoins
vitaux et sociaux. Ce sur-travail exigé servirait en fait l'intérêt
égoïste des classes dominantes. (Cf. la plus-value) Ainsi, non seulement
la répression mais la sublimation à tout crin ne seraient pas exigées
par la civilisation mais par l'égoïsme de quelques-uns. La solution
au problème posé par les pulsions asociales ne serait donc plus (seulement)
pédagogique mais politique et philosophique. La sublimation profite-t-elle
bien à tous ?
En effet, les fins de la sublimation doivent être questionnées et fondées.
Les valeurs de la civilisation européenne doivent être évaluées par
une raison critique qui suppose une distance. Si la sublimation consiste
à déplacer les pulsions vers des fins et objets plus élevés, ces derniers
doivent faire l'objet d'une interrogation philosophique et politique
large, englobante qui permette de les évaluer sans préjugé. Quelles
sont les fins que l'on peut légitimement proposer aux pulsions sans
renoncer à l'intérêt commun ?
Le problème posé était le suivant : que faire de nos instincts : les
réprimer ou les sublimer ? Comment concilier l'intérêt des individus
et les exigences sociales ? Se fondant sur ces travaux, la meilleure
solution selon Freud est de les sublimer mais l'on peut se demander
: jusqu'à quel point et comment le faire sans interdire, sans réprimer
quelque peu ? d'autre part, il faut rappeler que cette solution ne vaut
que si les thèses psychanalytiques sont certaines, ce qui ne semble
pas le cas. (Voir la critique radicale menée par Sartre) La solution
au problème de l'éducation devra, quoiqu'il en soit, passer par une
réflexion philosophique et politique de grande ampleur, débordant la
psychanalyse elle-même, pour interroger les vertus auxquelles la sublimation
est censée donner naissance. On peut se rappeler à cette occasion, avec
Spinoza, que la vertu peut être fausse et n'être en réalité qu'un vice
déguisé. La haine des assassins est socialement moins dangereuse que
la haine des magistrats, mais elle ne rend pas l'homme meilleur ni plus
heureux, la haine étant toujours une passion, triste qui plus est !
Le lien d'origine : Réprimer les désirs ?
http://mapage.noos.fr/philosophie/philo/menucor/commt/freud_repression_education_nevrose_comm.html
Les auteurs, voici comment ils se présentent eux-mêmes
:
Derrière ces pages aléatoirement mais obstinément
mises à jour se tiennent - qui l'aurait cru ? - deux professeurs
de philosophie, dont l'un travaille au Mans et l'autre à Allonnes.
Que dire de plus ? Rien.