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Ce texte fait partie d'un article intitulé « Prostitution,
crime organisé et marchandisation » qui a été publié par l'auteur
dans la Revue Tiers Monde, (Paris, PUF, vol. XLIV. n° 176,
octobre-décembre 2003 : 735-769). Sisyphe a présenté le dossier
en cinq parties ou chapitres afin d'en faciliter la lecture sur
Internet. Un lien à la fin de cet article permet d'accéder à la
bibliographie générale.
Il existe aujourd'hui prétendument
deux formes de prostitution et de traite : les unes sont volontaires,
les autres ne le sont pas. Cette opposition entre volontaire et
forcée permet d'expliquer, entre autres, que la prostitution est
causée essentiellement par des conditions économiques déplorables
et, en conséquence, certaines personnes, femmes et hommes confondus,
décident en connaissance de cause d'exercer le « métier »
du fait qu'il rapporte plus que beaucoup d'autres emplois.
Prostitution, pauvreté et vulnérabilité
Pour la prostitution de « plein
gré », il est donc question de choix personnel lié à une rationalité
économique. Aussi, pour nombre d'auteurs, la pauvreté est une condition
préalable, sinon le moteur essentiel de l'entrée dans la prostitution.
Pour Scambler et Scambler (1995), le sous-emploi, le chômage et
la pauvreté sont les raisons principales expliquant le recrutement
dans la prostitution. Un document de la Commission européenne intitulé
Traite des femmes, le miroir aux alouettes : de la pauvreté
à l'esclavage sexuel (2001 :2) explique que les causes
sous-jacentes au trafic des êtres humains sont la pauvreté, le chômage,
le manque d'éducation et d'accès aux ressources. Il soutient que,
d'un côté, les gens sont prêts à prendre le risque de tomber aux
mains de trafiquants pour améliorer leur vie, et de l'autre, il
y a une tendance chez les pays industriels à employer de la main-d'œuvre
bon marché, non déclarée, et d'exploiter sexuellement les femmes
et les enfants dans l'industrie de la prostitution et de la pornographie.
Toujours selon ce document, les femmes sont dans une position de
vulnérabilité particulière en raison de la féminisation de la pauvreté,
de la discrimination génériciste et de l'absence d'occasions éducatives
et professionnelles dans le pays d'origine. Certains n'expliquent
la prostitution que par la seule contrainte économique, plus particulièrement
par la précarité sociale et l'absence de moyens alternatifs d'existence.
Selon Lilian Mathieu (2003 :6)
les contraintes économiques impliquent que « l'engagement dans
la sexualité vénale n'est jamais un acte volontaire et délibéré ».
Par ailleurs, il explique que la « prostitution représente
[…] une des rares voies d'accès à un niveau de vie auquel
une origine sociale modeste et un faible niveau de compétence ne
permettent pas d'arriver ». L'argumentation de Mathieu s'appuie
sur deux enquêtes qui montrent que « ce sont les femmes de
la classe ouvrière et du lumpenprolétariat qui sont recrutées pour
la prostitution » (Høigård et Finstad, 1992 :15) ou des
« personnes issues de milieux sociaux modestes, parfois marginaux »
(1) (Ingold, 1996 :54). Le sociologue prétend en outre que
les chercheurs qui soutiennent l'existence d'autres raisons que
les seules causes liées à la vulnérabilité économique pour expliquer
la prostitution, se trompent et, en conséquence, considèrent les
prostituées comme des « inadaptées nécessairement victimes
de traumatismes psychologiques ».
Certains vont plus loin et affirment
que les femmes se risquent dans la prostitution essentiellement
pour s'enrichir (Carr, 1995 ; Lancet, 1996 cité dans Farley
et Kelley, 2000). Puisqu'ils défendent l'idée que les femmes sont
dans la prostitution pour des raisons essentiellement d'enrichissement,
McCaghy et Hou (1994), dans leur étude sur la prostitution à Taiwan,
considèrent les prostituées comme des entrepreneures (2), ce que
Robinson (2002) fait également dans son article déjà cité. Une autre
recherche postule que les jeunes hommes se prostituent selon un
« rational decision-making » : " Pour James,
[la prostitution] répond à un besoin financier et il a apparemment
décidé que le haut rendement monétaire pour un investissement minimal
de temps est préférable à un emploi légitime et même aux conséquences
négatives d'une arrestation. " (Calhoun et Weaver, 1996 : 218.
Notre traduction.)
Déterminisme social et psychologique
dans la prostitution
Nul ne peut nier que la misère économique
est le terreau fertile sur lequel se développe l'industrie de la
prostitution. La prostitution, qui sévit massivement dans les pays
du tiers-monde, de l'Europe de l'Est, de l'ex-URSS et les Balkans,
est l'un des résultats de la catastrophe sociale et de la ruine
économique qu'impliquent les politiques d'ajustement structurel,
les privatisations, le libre échange à sens unique, bref la mondialisation
et ses effets sur l'accroissement des inégalités sociales au sein
des pays et entre les pays, ainsi que par l'aggravation fulgurante
des pauvretés. Cette prostitution, dont le visage ne cesse d'évoluer
- qui profite des femmes et des enfants du tiers-monde et des anciens
pays « socialistes », devenus « le cheptel »
de la misère mondiale - est organisée par des bandes criminelles :
les femmes et les enfants sont dupés, enlevés, vendus par leur famille,
razziés, violentés et exploités. Ce n'est pas nécessairement le
cas pour les prostituées occidentales (Europe de l'Ouest et Amérique
du Nord). Les personnes qui se prostituent ne le font pas dans les
mêmes conditions. Elles ne sont pas des sans-papiers. Elles ne connaissent
pas nécessairement la même précarité économique. Pour une certaine
partie de ces personnes, la prostitution représente « une solution
provisoire ou prolongée aux difficultés financières » (Chaleil,
2002 :12-13). Une telle prostitution alimentaire est, bien
sûr, pour nombre d'occasionnelles, une conséquence de la situation
économique et sociale (3).
Mais cela n'explique pas pourquoi
certaines personnes se prostituent et d'autres se refusent à le
faire. Autrement dit, l'argent semble être le moteur de tout et,
pourtant, il ne constitue pas une explication satisfaisante. D'autres
causes expliquent l'entrée dans la prostitution, car ce n'est pas
n'importe quelle femme, ni n'importe quel homme qui accepte de faire
« volontairement » ce « métier », qui réussit
à passer à l'acte, à (sur)vivre dans un autre monde, même si l'argent
constitue un attrait et le désir d'échapper aux piètres conditions
sociales d'existence, une motivation. S'il y a des causes alimentaires
et de survie à la prostitution, il existe aussi un déterminisme
social et psychologique qui prédispose certaines personnes à la
prostitution. Nombre de chercheurs refusent la dichotomie volontaire
et forcée, car ils veulent comprendre les conditions sociales et
psychologiques d'entrée dans la prostitution. Ils soutiennent que
l'engagement dans la prostitution est la conséquence de facteurs
multiples, d'un enchevêtrement de raisons économiques, personnelles,
sociales et psychologiques. La fabrication de cette marchandise
particulière a une histoire préalable, une histoire qui se déroule
en amont. C'est le poids de cette histoire qui permet à une personne
d'envisager de se prostituer, de vendre son sexe.
Violence et abus sexuels antérieurs
Nombre de recherches vont dans ce
sens : les prostitué-es ont un lourd passé traumatique et une
histoire d'abus sexuels chroniques (Burgess, Hartman et McCormack,
1987 ; Giobbe, Harrigan, Ryan et Gamache, 1990 ; James
et Meyerding, 1977 ; Silbert et Pines, 1981, 1982, 1983 ;
Simons et Whitbeck, 1991 ; Widom et Kuhns, 1996). Entre 60
% à 90 % des personnes qui se prostituent ont été sexuellement abusées
dans leur enfance (Murphy, 1993 ; Silbert et Pines, 1983).
Judith Trinquart précise qu'en France on « recense entre 80
et 95 % d'antécédents de violences sexuelles chez les personnes
prostituées originaire du pays » (citée dans Chaleil, 2002 :11).
Au Brésil, Gilberto Dimestein (1992), qui a interrogé 53 fillettes
et adolescentes « venues d'elles-mêmes à la prostitution »
soutient que 95 % d'entre elles étaient issues de familles dysfonctionnelles.
Ces violences sont la raison de la fugue d'adolescent-es qui sont
attendu-es par des recruteurs dans les gares de train et d'autobus
des grandes villes (Poulin, 1994 : chapitre II). L'enfance
des personnes prostituées a été marquée par l'abus sexuel et physique
(Farley et al.,1998). Quelque 62 % des prostituées interviewées
par Bagley et Young (1987) ont avoué une histoire d'abus physique
dans leur enfance. Une autre étude révèle que 90 % des prostituées
avaient été physiquement agressées dans leur enfance ; 74 %
de ces mêmes interviewées ont été sexuellement abusées dans leurs
familles et 50 % ont été sexuellement abusées par une personne étrangère
à leur famille (Giobbe, Harrigan, Ryan, et Gamache 1990). Selon
le Council for Prostitution Alternatives de Portland, des
123 survivants de la prostitution interviewés, 85 % ont souffert
d'inceste, 90 % d'abus physique et 98 % d'abus émotionnel (Hunter,
1994). Selon Widom et Ames (1994), l'enfant survivant aux abus sexuels
risque beaucoup plus d'être arrêté adulte pour prostitution que
le survivant aux abus physiques. Les survivant-es de traumatismes
sexuels vécus dans l'enfance, risquent de vivre des dysfonctionnements
importants : ils développent souvent des idées et des comportements
auto-destructeurs, un mépris de soi, un sentiment de honte, des
désordres alimentaires, l'abus de drogues, etc. (Herman, 1992 ;
Morin 1984) Pour le psychothérapeute Bernard Lempert (2001) :
Toutes les violences tiennent ensemble.
La violence produit la violence […] Il y a une cohérence.
Ainsi, la relation entre inceste et prostitution me semble flagrante.
Je ne dis pas que c'est son seul mode de production - la misère
a son rôle à jouer, la criminalité également. Mais l'inceste est
pour moi un des principaux fournisseurs de la prostitution. En écoutant
les gens, leurs rêves, j'ai compris que la prostitution est un des
symptômes de l'inceste, et/ou des agressions sexuelles extra-familiales
mais avec un système d'exposition à l'intérieur de la famille.
Certains chercheurs expliquent l'existence
d'un état de dissociation émotionnelle comme un élément nécessaire
à la survie au viol ainsi qu'à l'inceste et aux agressions sexuelles
dans l'enfance (Giobbe, 1991). La dissociation est le processus
psychologique qui permet d'enfouir les événements traumatiques au
plus profond de la conscience (Herman, 1992). Les états de stress
post-traumatique (ESPT) sont des réactions émotionnelles intenses
de longue durée. Elles apparaissent suite à un événement traumatique,
hors du commun. La personne revit régulièrement, éveillée ou lors
de cauchemars, la situation traumatique initiale. Elle évite ce
qui pourrait rappeler le traumatisme. Sa réactivité générale est
amoindrie : la personne est apathique, et morose par rapport
à son avenir. Une hyperactivité physiologique (insomnie, irritabilité,
difficultés de concentration) complète le trouble. L'ESPT est causé
par un stress extrême chez les prisonniers de guerre qui sont torturés,
chez les enfants qui sont sexuellement agressés et chez des femmes
battues ou violées… Et chez les prostituées. Pour Vanwesenbeeck
(1994), la dissociation émotionnelle est une conséquence de la violence
subie dans l'enfance ainsi que de la violence vécue dans la prostitution.
La dépression aussi bien que des symptômes de l'ESPT sont communs
chez les prostituées. Farley, Baral, Kiremire et Sezgin (1998),
qui ont interviewé 475 prostitué-es dans cinq pays (Afrique du Sud,
Thaïlande, Turquie, États-Unis et Zambie), ont constaté que 67 %
des personnes souffraient du syndrome ESPT. Ce n'est donc pas sans
raison que, chez les prostituées des États-Unis et de la France,
le taux de suicides et de tentatives de suicide est parmi les plus
élevés du corps social (Chaleil, 2002 :105).
Peut-on toujours prétendre qu'il
existe une prostitution « volontaire » quand d'autres
données significatives démentent cette prétention : l'âge moyen
de l'entrée dans la prostitution aux États-Unis est de 14 ans (Silbert
et Pines, 1981 ; Giobbe, 1992). Selon Fleishman (2000), des
fillettes de 12 ans font le trottoir en Italie (elles doivent rapporter
500 dollars US par nuit).
Si la prostituée ne doit pas être
considérée comme une victime, mais comme une personne autonome pouvant
faire ses propres choix, comment comprendre et expliquer un âge
d'entrée aussi jeune ? Cela ne veut pas dire que les prostituées
sont inertes face au proxénète et au client, mais cela implique
que les rapports sociaux de domination masculins et marchands structurent
la prostitution pour le bénéfice d'un système proxénète ramifié
et mondialisé dont les activités tendent à être, de plus en plus,
normalisées. Est-ce qu'au nom de l'autonomie, on peut tout accepter ?
Y compris une prétendue entrée « volontaire » dans la
prostitution à l'âge moyen de 14 ans ? Cela ne représente-il
pas la fin de la liberté, la réduction de l'individu à une chose,
son anéantissement en tant que sujet, bref sa réification ?
Peut-on concevoir, à la suite de Georg Simmel (1988 :11-12)
« que ce soit un délice, soir après soir et par tous les temps,
de courir par les rues pour offrir une proie et servir de mécanisme
éjaculatoire au premier individu, aussi répugnant soit-il ?
[…] Croit-on que cette vie puisse être choisie avec […]
libre arbitre ? » Derrière un choix apparemment autonome
se cache donc une situation, comme nous avons tenté de le démontrer,
qui oblige à faire un tel choix. Aussi ce choix n'en est
pas un !
Conclusion : la vénalité
triomphante
La mondialisation capitaliste implique
aujourd'hui une " marchandisation " inégalée des êtres humains dans
l'histoire. Depuis trente ans, le changement le plus dramatique
du commerce sexuel a été son industrialisation, sa banalisation
et sa diffusion massive à l'échelle mondiale. Cette industrialisation,
qui est à la fois légale et illégale et qui rapporte des milliards
de dollars, a créé un marché d'échanges sexuels, où des millions
de femmes et d'enfants ont été transformés en marchandises à caractère
sexuel. Ce marché a été généré par le déploiement massif de la prostitution,
par le développement sans précédent de l'industrie touristique,
par l'essor et la normalisation de la pornographie, ainsi que par
les besoins de l'accumulation du capital. Cette industrie est désormais
une puissance économique incontournable. L'industrialisation du
commerce sexuel et sa transnationalisation sont les facteurs fondamentaux
qui rendent la prostitution contemporaine qualitativement différente
de la prostitution d'hier. La prostitution fait partie désormais
de la stratégie de développement de certains États. Sous l'obligation
de rembourser la dette, de nombreux États du tiers-monde ont été
encouragés par les organisations internationales comme le Fonds
monétaire internationale (FMI) et la Banque mondiale - qui ont offert
à ces occasions des prêts importants - à développer leurs industries
du tourisme et de divertissement. Dans chacun des cas, l'essor de
ces secteurs a permis l'envolée de l'industrie du commerce sexuel.
L'industrie du commerce sexuel est
de plus en plus considérée comme une industrie du divertissement,
et la prostitution comme un travail légitime. L'industrialisation
de la prostitution s'accompagne d'une libéralisation ; depuis
le début de ce siècle l'Allemagne et les Pays-Bas ont légalisé la
prostitution (5). Au cours des années quatre-vingt-dix, les organisations
internationales ont adopté des positions qui, malgré un discours
dénonçant les pires effets de cette mondialisation des marchés du
sexe, tendent à la libéralisation de la prostitution et des marchés
sexuels (6). En quelque sorte, ce que défend l'Organisation mondiale
du commerce (OMC) en faveur de la mondialisation néo-libérale est
actuellement relayé par divers organismes européens et internationaux,
dont l'ONU, dans le domaine de l'exploitation sexuelle des femmes
et des enfants. L'officialisation institutionnelle (la légalisation)
des marchés du sexe renforce les activités de l'organisation proxénète
et du crime organisé.
L'industrialisation actuelle dévaste
de façon massive des femmes et des enfants. Ils sont gérés comme
des bêtes à plaisir, des machines à sous, et organisés pour que
leur rendement sexuel soit maximal. Leur commerce embrigade des
populations colossales et génère de fastueux bénéfices recyclés
dans l'économie mondiale. Et ce n'est pas sans raison qu'elle touche
surtout des femmes et des enfants. L'argument « économique »
de Mathieu (2003) minimise le fait que cette industrie fonctionne
au profit d'hommes et d'un système de domination masculine. Tout
ce qui relève du fonctionnement discriminatoire de la société est
amplifié par cette industrie. Les femmes et les enfants sont le
groupe cible ; les personnes qui sont l'objet de la prostitution
proviennent davantage de couches sociales défavorisées, aux revenus
précaires et limités, de minorités ethniques, de groupes indigènes,
de réfugiés, d'immigrants clandestins, du tiers-monde, des pays
déstructurés par leur transition catastrophique vers l'économie
capitaliste ; elles sont également davantage des personnes
à bas niveau d'éducation, des fugueuses, des individus abusés physiquement,
psychologiquement et sexuellement dans leur enfance ; au moment
de leur recrutement, elles sont souvent jeunes (et de plus en plus
jeunes).
Puisque le sexisme se conjugue aux
relations marchandes dans l'industrie mondiale du commerce sexuel,
toute femme ou tout enfant est potentiellement une proie. C'est
précisément leur condition de femme et d'enfant qui rend leur commerce
profitable (7) et non le fait qu'ils sont démunis économiquement,
bien que cela soit un facteur prédisposant à l'embrigadement dans
la prostitution. Il faut toutefois insister sur le fait que pour
transmuter une personne en marchandise, c'est-à-dire en une personne
apte à subir et à vivre une constante aliénation, il faut créer,
en aval et/ou en amont, les conditions nécessaires à son fonctionnement
comme corps qui ne s'appartient plus et utiliser les moyens contraignants
à sa fabrication en tant qu'objet d'échange.
Ce texte est le dernier d'une série de cinq. Retour
au premier texte de la série
Bibliographie
générale
Notes
1. Plus précisément, cette enquête
d'Inglod (1993) portait sur 241 femmes et hommes prostitués de la
région parisienne ; 41 % des interviewés étaient issues des
milieux sociaux modestes et marginaux, ce qui laisse tout de même
59 % des interviewés issus d'autres milieux que ceux mentionnés
par Mathieu.
2. Selon Barry (1995 : 139), à Taiwan, 40 % des prostituées
sont d'origine aborigène, vraisemblablement l'objet d'une traite.
Elles sont vendues à un bordel et obligées à se prostituer. Pour
de nombreuses femmes autochtones, ces violations de leurs droits
les plus élémentaires ne sont sans doute pas considérées comme les
risques intrinsèques de la liberté d'entreprise !
3. Leur destin est quand même différent de la prostituée à temps
plein, dans la mesure où, rappelle Chaleil (2002 : 493), « les
prostituées à temps partiel […] continuent à participer à
deux mondes, alors que la professionnelle, en plongeant corps et
biens dans la prostitution, a perdu tous ses repères » ;
la prostituée évolue dans un milieu social particulier, à la marge
de la société, et la stigmatisation sociale dont elle est l'objet
renforce cette appartenance au « milieu ». Les biographies
de prostituées et de « hardeuses » montrent bien cet aspect
des choses. Voir, entre autres, l'autobiographie de Raffaëla Anderson,
Hard, Paris, Grasset, 2001.
4. Effets de la chosification, Monto (1999) a constaté l'existence
d'une forte corrélation chez les clients entre la sexualité tarifiée,
les mythes sur le viol, la violence sexuelle et l'utilisation moins
fréquente de préservatifs.
5. Cette légalisation s'effectue dans le cadre d'un système réglementariste
qui légitime non seulement la prostitution, mais également le proxénétisme
(Fondation Scelles, 2002 : 83 et suivantes).
6. Voir sur cette question, l'interview de Marie-Victoire Louis
(2000) dans les Cahiers marxistes.
7. Bien que la prostitution se soit développée depuis quelques décennies
chez les jeunes hommes, il n'en reste pas moins qu'elle se fait,
là aussi, au profit avant tout d'autres hommes (Dorais, 2003 :
18) et elles est « en grande partie sous la coupe du crime
organisé » (Dorais, 2003 : 27).
LA REVUE TIERS MONDE
La Revue Tiers Monde publie,
depuis 1960, les résultats de recherches récentes sur les problèmes
que soulève le développement économique et social différencié des
États du monde. Complexité du système mondial, diversité des réactions
régionales, politiques et expériences de développement sont étudiées
par des spécialistes des sciences économiques et sociales, le plus
souvent du point de vue théorique ; des études de cas, fondées
sur des travaux de terrain originaux, viennent enrichir ces analyses.
La Revue Tiers Monde est interdisciplinaire et internationale,
par son public et l'origine de ses collaborateurs. Deux à trois
numéros par an sont consacrés à un thème, sous la responsabilité
d'un spécialiste, les autres sont constitués d'articles divers.
Pierre Salama, économiste, en est le directeur.
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Revue Tiers Monde et Richard Poulin
Sisyphe 2002-2004
Richard Poulin, professeur de sociologie
à l'Université d'Ottawa
Professeur titulaire de sociologie à l'Université d'Ottawa, auteur
de romans noirs et fondateur de la maison d'édition Vents d'Ouest,
Richard Poulin travaille depuis plusieurs années sur la question
des marchés sexuels, plus particulièrement sur la pornographie.
Il s'intéresse également aux questions ethniques et nationales.
En 2000, il publiait La déraison nationaliste, conflits nationaux,
pays " socialiste " et marxisme (Ottawa, L'Interligne) et Les
révolutions bourgeoises (Innsbruck, Apor Verlag). En 2001, son
roman sur l'extrême droite au Canada, Gouverneur du crépuscule
(Ottawa, L'Interligne, 2000), signé par Skip Moën, était lauréat
du prix des lecteurs de Radio-Canada (Ontario). Il est également
l'auteur de La violence pornographique, industrie du fantasme
et réalités (Yens-sur-Morges, Cabédita, 1993).
Les liens d'origine sur le site Sisyphe au Canada : http://sisyphe.org/
1. L'essor du système proxénète
dû à la mondalisation
2. Le crime organisé contrôle
la prostitution et organise le trafic des êtres humains
3. La prostitution est
soumise à la loi de l'économie néolibérale
4. Comment on transforme
un être humain en marchandise sexuelle
5. Rarement un choix, la
prostitution n'a pas que des causes économiques Bibliographie
générale : Le marché mondial du sexe au temps de la vénalité
triomphante
Origine : 5. Rarement un choix, la
prostitution n'a pas que des causes économiques
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