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Bracelet électronique mobile : les barreaux à la cheville
Olivier RAZAC
22 mars 2007

Origine : http://www.liberation.fr/societe/2007/03/22/bracelet-electronique-mobile-les-barreaux-a-la-cheville_88194

A la différence du dispositif fixe, utilisé au domicile, le «PSEM» s'adresse à des condamnés «dangereux». Sept en sont pourvus.

Ils sont sept en France.

Sept personnes condamnées à porter un bracelet à la cheville qui permet de les suivre en permanence. Seulement sept, alors que le bracelet électronique existe depuis longtemps déjà ! Oui, mais il ne s'agit pas du même bracelet. Le placement sous surveillance électronique (PSE) est en place depuis sept ans. Le placement sous surveillance électronique mobile (PSEM) a, lui, été institué par la loi du 12 décembre 2005, son expérimentation a commencé en juin 2006 et elle est entrée dans sa deuxième phase depuis janvier dernier. Il y a théoriquement 150 bracelets mobiles disponibles mais seulement sept placés sur des personnes. Peut-être parce que la décision ne doit pas être facile à prendre étant donné la nature et la nouveauté du dispositif. Il ne faudrait pourtant pas en tirer la conclusion hâtive que le PSEM n'est qu'un gadget sans avenir. Cinq ans après le début de l'expérimentation du bracelet fixe, il n'y avait encore que 300 placés simultanément. Il y en a près de 2000 aujourd'hui, bientôt 3 000.

GPS intégré.

Comment se présente le dispositif ? De prime abord, il ressemble au PSE que nous connaissons déjà. Le condamné doit porter un bracelet qui ressemble à une grosse montre et qui permet de le localiser. Il est pourtant très différent. Le PSE permet uniquement de savoir si le condamné est chez lui ou pas aux heures qui lui sont imposées. Un récepteur statique détecte les entrées et les sorties d'un périmètre prédéfini qui correspond au domicile. Une fois dehors l'individu est hors de portée de toute surveillance. Il faut dire que le bracelet fixe s'adresse à des personnes condamnées pour des petits délits. Ce n'est pas le cas du PSEM, qui s'adresse, lui, à des condamnés à une peine de prison d'au moins sept ans et qui sont considérés comme «dangereux». Il s'agit donc (pour l'essentiel) d'une peine complémentaire qui s'ajoute au temps de détention et qui peut durer jusqu'à six ans. Le «placé» doit porter, en plus du bracelet, un récepteur portable équipé d'un GPS intégré. Au domicile, un récepteur statique classique prend le relais. Il est donc possible de suivre le déplacement de l'individu en temps réel où qu'il aille. Plus précisément, le mode de surveillance choisi est dit «semi-actif». Une décision de justice précise les zones géographiques interdites au condamné (domicile d'une victime, écoles, zone habituelle d'infraction etc.) ainsi que les zones d'inclusion dans lesquelles il doit se trouver à certaines heures. Très schématiquement, il doit être chez lui la nuit et au travail ou en formation le jour. D'un petit geste de souris un agent du pôle centralisateur trace un cercle ou un carré sur la carte de la ville ou de la région et cette zone devient fermée pour le condamné et seulement pour lui. Une alarme se déclenche s'il franchit le périmètre interdit. De plus, le logiciel fournit chaque jour un journal des déplacements de chaque «placé» et peut fournir pour le besoin d'une enquête la liste de tous les «placés» proches d'un lieu donné à un moment donné.

Localiser sans contraindre.

Cette nouvelle forme de la peine pose de nombreuses questions. Il faut d'abord en percevoir l'extrême nouveauté. C'est la première fois qu'il est possible de localiser en temps réel des condamnés sans les contraindre physiquement. La prison, qui reste la peine de référence, est un lieu disciplinaire où des individus sont (presque) totalement contrôlés par l'épaisseur des murs et la pénétration des regards. Avec le PSEM, la présence des murs et des surveillants n'est plus nécessaire, la virtualité de limites intangibles et d'obligations intériorisées suffit. L'électronique annonce-t-elle alors la disparition des prisons ? Pas si sûr, car les condamnés qui ne respectent pas les contraintes de la mesure retournent en détention. Derrière l'aspect éthéré de la peine high-tech se tiennent les miradors et les barbelés de l'indéracinable prison.

RAZAC Olivier