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Origine : http://jo-paris.blogspot.com/2005_04_01_jo-paris_archive.html
« A l’intérieur de la mairie, les JO, cela relève
de l'obsession, sans doute parce que Delanoë pense que ce serait
un bon tremplin pour la présidentielle. On ne peut pas pousser
une porte sans en entendre parler, ni ouvrir un placard sans se
prendre des cartes "Paris 2012" sur le nez. »
Cette monomanie rapportée par un élu Vert n'a pas
seulement saisi le maire de Paris. « L’olympique attitude
», chère à notre ministre des sports Jean-François
Lamour, est partout, dam les transports, sur les édifices
les plus symboliques de la capitale, et même dans les manifestations.
Le 20 mars les syndicats ont défilé pour les 35 heures,
les salaires et l'emploi en arborant drapeaux, pin's et T-shirts
proclamant leur « amour des jeux ». Le secrétaire
général de la CFDT, François Cherèque,
avait même proposé de modifier la date du rassemblement
pour ne pas donner une mauvaise image de la ville au Comité
international olympique (CIO) en visite ce Jour là. La CFTC,
de son coté, a demandé à ses adhérents
de préférer la grève à la manifestation
de rue, histoire, selon son président Jacques Voisin, de
ne prendre aucun risque". Et. vraisemblablement, de ne pas
s'aliéner les 87% de Français favorables à
la candidature de la capitale (1).
Au milieu de cette union sacrée, des irréductibles
veulent pourtant faire entendre leur voix. Ils disent non à
la candidature de Paris. Premier argument, le moins virulent : elle
refléterait « ultra-centralisation » française,
comme le relève Sylvain Garel conseiller vert à la
mairie de Paris, pour qui "Paris n'est pas la ville de France
qui a le plus besoin d'infrastructures sportives". L'économiste
Bernard Maris : « C'est encore une fois la capitale qui va
toucher le jackpot. Mats si les retombées sont aussi formidables
qu'on nous le dit, pourquoi ne pas organiser les Jeux à Lyon,
Marseille ou Bordeaux ? ».
Sauf que le « jackpot » annoncé est lui-même
sujet à caution. Une étude affirme que l'impact direct
des Jeux, pendant la période de préparation, serait
de 6 milliards d'euros ? Bernard Maris rappelle qu'il faut mettre
en parallèle les 8,5 milliards d'investissements initiaux
: « Au final, ça fait peu non ?» Le même
document promet 60000 emplois ?
L'Oncle Bernard de Charlie Hebdo balaie d'une pichenette : «
Ce seront en grande partie des boulots précaires : vigiles,
vendeurs de billets… Tout ça étalé sur
sept ans. En considérant l'investissement de 8,5 milliards,
ça fait un peu cher l'emploi. » Quand les partisans
du oui avancent que le tourisme grimpera en flèche, même
scepticisme. A suivre Jean-François Bourg, chercheur au Centre
de droit et d'économie du sport, la saison 2012 en cas de
JO à Paris ne sera pas aussi prodigieuse qu'imaginé
: « En période de grand événement type
JO, beaucoup de gens préfèrent remettre leur voyage
à plus tard, parce qu'ils savent que la ville sera saturée."
Lors des derniers JO, tous les sites grecs en dehors d'Athènes
ont vu baisser leur fréquentation de 25 à 60 %. Pour
l'économiste, de toute façon, "d'un point de
vue scientifique », les raisons économiques des pro-Jeux
n'ont pas une grande valeur. Les hypothétiques gains sont
'surdimensionnés' parce que l'on oublie que 'les investissements
sont publics, et les retombées, privées".
Et à ses yeux le débat de fond se situe là
: « Quel est le véritable statut des JO ? Est-ce bien
de les socialiser, quand les grands bénéficiaires
des retombées, par exemple les télévisions,
ne redistribuent pas ?"
Du coup, pour lui. "la légitimité des JO ne
doit pas seulement s'apprécier d'un point de vue économique,
mais en fonction de leur utilité sociale ». Il le rappelle
: si les objectifs sont tenus et que Paris ne connaît pas
une augmentation de impôts due aux Jeux. « cela signifiera
que cet argent existe. Alors pourquoi le placer là plutôt
que dans des structures sociales fit même, renchérit
Charlotte Nenner conseillère verte à la Mairie de
Paris, pourquoi attendre les JO pour 'faire les travaux promis'',
comme le» logements sociaux qui succéderont au village
olympique des Batignolles, la couverture du périphérique
ou encore la prolongation
du tramway ?
Sylvain Garel poursuit : « Vous sommes une municipalité
de gauche. Notre objectif ne devrait pas être ta candidature
de Paris aux JO, mais la lutte contre les inégalités
sociales, pour le recul de la pollution et des habitats insalubres."
Autre point de friction : cette "municipalité de gauche"
s’affiche en toute occasion aux cotés du "Club
des entreprises", mené par Arnaud Lagardère pour
soutenir la candidature de la ville. Soit dix-sept grosses entreprises
comme Lagardère, donc, mais aussi Accenture, VediorBis, Suez,
Bouygues… Pas exactement des bienfaitrices de l'humanité,
qui s'offrent à peu de frais, une campagne de communication
efficace en soutenant une cause consensuelle.
Moquant la volonté martelée par Bertrand Delanoë
d'accueillir des "Jeux éthiques et solidaires",
le groupe alternatif et rigolard de "L'Eglise de la très
sainte consommation" a récité une "prière"
de remerciements aux sponsors, le 12 mars lors d'"alter- JO"
tenus devant l'Hôtel de Ville. « Pour des Jeux éthiques,
un marchand de canons un escroc de l'eau, un pollueur nucléaire
des complices de la France-afrique, des pollueurs notoires. Ô
Sponsors, vendeurs de soupe. Merci de renforcer l'idéal sportif
!"
A côté des débats sur l'utilisation de l'argent
public. les tenants du non s'inquiètent des répercussions
de l'organisation des JO sur la ville: six ans de travaux les inquiètent
et un élu vert du XVII affirme que dans son arrondissement,
le rue André Suares située au coeur du futur village
olympique, pourrait être déclarée plus ou moins
morte en cas de Jeux : « Il est question d'envoyer pendant
trois semaines l'ensemble de ses habitants en vacances ».
Il y a aussi les arguments écologiques : "A quoi va
servir ta construction d'un dôme a Roland-Garros dans le bois
de Boulogne, au détriment d'un des seuls espaces verts parisiens
?, se demande Charlotte Nenner, en chœur avec les riverains
et l'ensemble des opposants.
Même les efforts faits pour des Jeux écologiquement
viables ne soulèvent pas l'enthousiasme : l'association des
Amis de la Terre a été sollicitée pour l'établissement
d'une charte de développement durable pour "Paris 2012".
Elle a décliné. Son directeur, Patrick Teil, déplore
le caractère "non contraignant" de cette charte
vis-à-vis des entreprises partenaires, et relève la
problématique soulevée par la présence dans
"le Club des entreprises" de Suez, "contre lequel
nous nous battons en permanence".
De son côté, Sylvain Garel note que si les futures
infrastructures en cas de victoires sont "pour le moment",
envisagées comme devant répondre aux normes de la
Haute qualité environnementale (HQE). Leur construction,
"à marche forcée", « devra tenir les
délais très serrés. Du coup ces belles déclarations
finiront probablement par passer à la trappe."
Les arguments contre Paris 2012 recoupent largement une opposition
aux Jeux olympiques, même ailleurs. Si Charlotte Nenner a
signé avec Sylvain Garel et Bernard Maris une tribune «
Des Jeux à Paris, Non, merci… » (2), la conseillère
verte explique qu'elle aurait. aussi bien pu s'appeler "Ni
ici. ni ailleurs". Même ambiance chez Valérie
et Martin. Simples citoyens affiliés nulle part ils ont créé
un site Internet (3) pour lancer un grand
« NOOOOON » téléchargeable en auto-collants.
Le « matraquage » dû à la candidature de
Paris, cette « propagande soviétique », les a
certes "réveillés", mais ce sont bien "ces"
Jeux qu'ils contestent. "La compétition à outrance
au nom du sport est insupportable, explique Valérie. Elle
reflète les valeurs d'une société ou le sport
est sponsorisé par Coca et McDo. ». Ils arguent aussi
de la corruption au sein du CI0. Cet été, un de ses
membres a été pris en flagrant délit de négociations
par la BBC.et un autre exclu pour des détournements de fonds.
D'accord avec tout cela, Sylvain Garel met également en
avant ''la contradiction fondamentale entre l'écologie politique
et la devise des JO » : la première vise à "économiser
les ressources de la planète, dépenser moins d'énergie,
aller moins loin", quand la seconde exhorte à aller
plus vite, plus loin, plus fort". Et cela vaut aussi pour les
hommes, selon Albert Jacquard, auteur de Halte aux Jeux (Stock)
: « Ce qui me dérange, ce sont les podiums, cette société
de palmarès. Et puis voyez ces sportifs de haut niveau :
s'entraîner plus de six heures par jour mettre toutes ses
forces dans un seul objectif, cela produit des désastres
humains."
Mais. alors que le généticien attribue la responsabilité
de ces dérives au sport de compétition, et pense en
gros que d'autres jeux sont possibles, le sociologue Orléanais
Michel Caillât conteste cette vision. Animateur du Mouvement
critique du sport, il diffuse depuis février sur Internet
une lettre anti-olympique mensuelle : "Personne n'a jamais
lu la charte olympique. C'est pourtant une doctrine qu'il faut analyser
et débattre" Et si personne ne le fait, c'est peut-être
à cause de la fonction qu'il attribue aux JO : 'Celle d'un
mythe. Les identités collectives ont explosé, alors
on essaie de les remplacer par des factices." Du pain et des
Jeux, l'histoire n'est pas nouvelle. ».
Anne Comte
(1) Selon un sondage du journal L’Equipe du 8 mars.
(2) Le Monde du 8 mars.
(3) http://mapage.noos.fr/paris-2012
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