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Date: 16 Oct 2003
Objet: [infozone_l] A propos du publisexisme
Voici un texte théorique disponible sous forme de 4 pages
en écrivant au Collectif Contre le Publisexisme sur
contrelepublisexisme (at) samizdat.net
« Je la lie, je la fouette, et parfois elle passe à
la casserole ». Des millions d’hommes, de femmes et
d’enfants ont pu être indigné-e-s, amusé-e-s,
choqué-e-s, intrigué-e-s par ce slogan que Candia
a utilisé pour sa publicité sur la crème fraîche
Babette. Des millions de personnes auront donc intégré
le message implicite de la publicité : la relation entre
la femme et la crème fraîche est la même qu’entre
l’homme et la femme. Et ceci grâce à un simple
jeu de mot, à une simple ambiguïté de locuteur-trice
dans le slogan… Mais aussi grâce aux plusieurs dizaines
de milliers de panneaux d’affichage qui ont relayé
la campagne de Candia.
La publicité, véritable pieuvre, comme le dit François
Brune, a aujourd’hui un impact énorme sur les consciences.
Toujours présente, elle est tentaculaire dans la mesure où
aucun lieu ne lui échappe, aucun regard ne peut s’en
détacher vraiment. On considère aujourd’hui
qu’un-e occidental-e regarde plus de 2 500 publicités
par jour !!! (1) La publicité marque l’inconscient
aussi bien que le conscient, forge autant les préjugés
que les croyances.
Il apparaît aussi, et ce avec une ampleur jamais encore égalée,
que la publicité est l’un des vecteurs les plus directs
et les plus violents du patriarcat. Toutes les normes sexuées
(sexistes ?) sont chaque jour martelées dans les esprits.
La publicité participe de la construction du genre féminin
et masculin, véritables carcans sociaux apposés sur
les individus en fonction de leur sexe biologique.
La lutte contre les publicités sexistes est un biais pour
s’ériger contre la toute-puissance des images que le
capitalisme, et le patriarcat, déversent chaque jour dans
nos esprits. Combattre les publicités sexistes est donc un
moyen de rompre avec l’impunité des images du patriarcat
autant qu’un angle d’attaque contre la marchandisation
des rapports et des biens sociaux.
Décortiquer le fonctionnement de la publicité dans
ce qu’elle a de sexiste sert à comprendre comment agit
la publicité, et le capitalisme plus généralement.
Nous voulons d’abord interroger le sexisme présent
dans les publicités dont on nous abreuve chaque jour, et
montrer que ces images aliénantes, ont un poids dans notre
inconscient et notre façon d’appréhender le
monde. Nous verrons qu’il faut rompre avec les poncifs relativistes
qui prétendent que tout se vaut, que la publicité
n’est qu’une question de goût, et que tous les
goûts étant dans la nature, combattre la publicité
est une censure dirigée contre la liberté de chacun-e.
Après la mise au jour du danger publicitaire, nous aborderons
les différents aspects d’une lutte contre ce que nous
appelons le publisexisme.
Le sexisme dans la pub
Aujourd’hui, à la lumière des dernières
campagnes publicitaires, il est clair que la pub a trouvé
dans le sexisme un vrai créneau, notamment pour choquer.
Face à la quantité de plus en plus incroyable de messages
auxquels sont soumis-e-s les consommateurs-trices, les publicitaires
sont obligés de recourir à des arguments de plus en
plus dérangeants pour interpeller, happer les regards. Le
sexe, souvent accompagné de sexisme, est l’un des meilleurs
moyens de s’assurer une réussite. Comme l’avouaient
les publicitaires auteur-e-s de Babette : « notre but était
de choquer, il ne fallait pas prendre la publicité au premier
degré ». Pourtant, comment croire qu’une telle
quantité de messages imprimés chaque jour sur la rétine
des passant-e-s peut n’être que du second degré
sans aucune conséquence néfaste ?
Dans la course au sexisme spectaculaire, il existe cependant différents
niveaux de représentations patriarcales. Images et slogans
ne relèvent pas tous du même registre. Tout d’abord,
certaines publicités sexistes renvoient les femmes au rôle
de ménagères passives, cloîtrées dans
leur intérieur. Ces publicités pour lessive jadis
rabâchées par la télévision sont aujourd’hui
plus fines : si elles séparent toujours les tâches
féminines et masculines, elles le font de façon moins
directe (les publicités pour surgelés mettent majoritairement
en scène des femmes allant chercher les plats au four). Les
images sont moins criantes, mais le message est toujours le même
: les femmes à la cuisine (même si elles sont censées
y passer moins de temps qu’avant - ce qui est empiriquement
faux d’ailleurs).
Il y a d’autres publicités qui font directement appel
aux violences physiques, de façon plus ou moins déguisée.
Celle pour la crème Babette en était une, au même
titre que cette publicité pour un grand magasin où
on voyait une femme gratifiée d’un splendide œil
au beurre noir, dont la cause n’était pas explicitée.
La banalisation des images de violence perpétrées
sur des femmes font partie intégrante d’une agression
que vivent chaque jour de nombreuses femmes. Si les viols de guerre
perpétrés en Ex-Yougoslavie concernent plusieurs dizaines
de milliers de femmes, 70 000 femmes sont chaque année victimes
de viol aux Etats-Unis. Pourtant, il n’y a pas de guerre là-bas…
Du moins pas de guerre entre nations…
Une chose non moins répandue, mais ô combien tolérée,
est l’utilisation des femmes comme objets sexuels, simplement
posées comme une accroche pour l’œil du spectateur
(et non de la spectatrice). Après tout, quoi de plus normal
que de voir les seins et les fesses d’une femme pour vanter
les mérites d’un yaourt ? Sans s’enfoncer dans
un puritanisme à tout va, on peut questionner l’utilisation
qui est faite ici des images des corps féminins. Il n’est
pas question dans ces publicités de briser le tabou inhérent
au corps aujourd’hui, mais plutôt, en jouant sur cet
interdit, de dévoiler le corps pour exciter le désir
du caché. Ce type de publicité sous-entend que des
seins pulpeux (il ne s’agit même pas d’une personne
à part entière) peuvent être achetés
aussi facilement qu’un pot de yaourt. La publicité
ravale alors le corps des femmes au rang d’objets dont on
peut disposer moyennant une certaine somme. Le fait que ce ne soit
pas réellement le cas ne pose pas de problème : pour
le consommateur, la frustration de ne pouvoir acheter des seins
sera reportée vers l’achat des yaourts. Ces images
de femmes réifiées sont le terreau sur lequel se développe
l’appropriation du corps des femmes par les hommes.
D’ailleurs, la publicité est encore plus pernicieuse
quand elle prétend parler de ce qu’elle montre. Un
exemple : les publicités pour les sous-vêtements Aubade.
Quoi de plus normal, pourrait-on dire, que de montrer des seins
dans une publicité pour des soutiens-gorge ? Pourtant, tout
n’est pas si simple. Non seulement les images montrées
sont celles de mannequins sélectionnés, mais qui plus
est, ce ne sont même pas des images réelles, car elles
sont retravaillées numériquement pour allonger des
jambes, mincir une taille de guêpe, arrondir une poitrine…
Bref, ces images sont des images de d’archétypes que
tout le monde intègre comme étant « la »
norme de beauté.
Si la beauté a toujours été culturelle (un
corps replet était signe d’érotisme pour les
femmes au XIXe siècle, le teint pâle faisait partie
du style des courtisan-e-s deux siècles plus tôt…),
ce n’est qu’aujourd’hui que la norme a atteint
un tel point, celui de la dictature. Grâce à la publicité,
non seulement la norme devient unique (le play-boy bronzé
et musclé étant le pendant de la pin-up à la
silhouette élancée) et universelle (nul ne peut y
échapper, à la différence des paysan-ne-s du
XVIIe siècle qui n’avaient que peu de considérations
pour l’esthétique de cour), mais cette norme n’est
même pas réelle. Nul ne peut posséder un corps
comme celui représenté dans les publicités,
pour la simple et bonne raison que les images sont travaillées
pour devenir plus représentatives de la « beauté
» que les personnes réelles. L’existence de normes
de beauté est déjà suffisamment aliénante,
mais lorsqu’il n’existe plus qu’une seule norme,
et qu’elle est totalement irréelle, on est en droit
de se demander si le syndicat des psys n’a pas passé
un contrat avec les publicitaires pour l’ouverture de ce juteux
marché de la frustration et du mal-être.
S’il est clair qu’il existe une aliénation dans
le fait de devoir se conformer à une norme de beauté
préétablie pour chacun des deux sexes (étymologiquement,
l’aliénation n’est rien d’autre que le
fait de se « rendre étranger » à soi-même,
d’être « dépossédé »
de soi-même), ces normes ne sont équivalentes ni dans
leur représentation ni dans leur implication.
Ainsi, une publicité pour un parfum montrait une femme mannequin
dont la tête repose sur l’épaule protectrice
d’un homme (top model, lui aussi). Si les deux images des
corps sont bien sûr archétypales des normes de beauté,
la femme se retrouve en position dépendante, dominée.
Pour les hommes, il s’agit toujours de se conformer à
un modèle viril, solide, actif, d’être sujets
de leurs actes… Et pour les femmes, d’être belles,
de rester objets de désirs, d’être passives…
Les normes véhiculées par la publicité ancrent
les hommes dans l’agir et le paraître, les femmes étant
cantonnées uniquement au paraître.
Enfin, s’il faut discerner un dernier type de sexisme, il
s’agit de celui, nettement plus pernicieux, qu’est l’antiféminisme.
Une publicité pour soutiens-gorge scandait : « Boléro
soutient les femmes dans leur lutte… contre les courants d’air
! ». Imagine-t-on une publicité qui tourne en dérision
l’antiracisme ?! Kookaï a aussi investi ce thème,
en exacerbant la peur antiféministe classique de la géante
qui domine les minuscules hommes : ici, l’imaginaire le plus
sexiste (« les femmes ne veulent pas l’égalité,
elles veulent dominer à leur tour ») côtoie le
politiquement correct (« pour une fois, les femmes ne sont
pas montrées comme dominées »).
Le constat est clair : la publicité véhicule des valeurs
patriarcales, des normes sexistes. Cependant, si la publicité
n’avait pas plus d’impact qu’un slogan écrit
sur une cuvette de chiottes, rien de bien grave n’en découlerait.
Ce n’est malheureusement pas le cas…
La publicité est dangereuse
Le caractère nocif de la publicité tient en premier
lieu à son mécanisme même. Que son but soit
de vendre un produit ou, comme c’est de plus en plus le cas,
de promouvoir une image de marque, la pub est une manipulation mentale.
Les publicitaires prétendent moins vanter les qualités
d’un produit que marquer les esprits ; le taux de réussite
se mesurant en termes d’ « impact ». Les investissements
croissants pour imaginer des spots, des affiches, des encarts dans
la presse prouvent, de fait, que la pub possède une efficacité
et qu’elle influence réellement les achats des consommateur-trice-s.
Son but est de « créer des liens émotionnels
» avec le public. Pour cela, la publicité adopte des
stratégies issues de travaux sociologiques et scientifiques
: elle rationalise la manipulation des masses. Une affiche est étudiée
pour canaliser notre attention, le parcours que suit le regard étant
défini avant même que l’on ait posé les
yeux dessus.
La force de la pub est qu’elle s’attaque à notre
inconscient, s’infiltre dans notre cerveau pour que nous gardions
en mémoire la marque Duschmoll.
Mais plus que le nom de la société, ce sont les arguments
publicitaires qui imprègnent notre esprit sans cesse assailli.
Dans le cas du sexisme, abondamment utilisé, l’effet
exercé sur ceux qui la reçoivent n’est pas superficiel.
En plus d’imposer un modèle esthétique de la
féminité, les connotations sexuelles récurrentes
font du corps des femmes un objet de jouissance, et modèlent
le regard des passant-e-s. Les hommes sont influencés dans
leur désir et les femmes dans leur être. Les premiers
calquent leur érotisme sur les archétypes qui les
entourent et tendent à reproduire les comportements sexistes
ainsi banalisés. Pour les jeunes et moins jeunes femmes,
vouloir ressembler aux mannequins est devenu une condition sine
qua non d’une existence dite « normale ». Parmi
les conséquences les plus graves de ce phénomène,
généré aussi par l’industrie de la beauté,
on trouve les complexes physiques et les troubles du comportement
alimentaire, notamment l’anorexie, une maladie en constante
augmentation.
La dangerosité de la pub vient du fait qu’elle nous
agresse partout : dans la rue, sur les routes, dans la presse, à
la radio, à la télé, dans les transports…
Jusque dans les toilettes des universités américaines
que des publicitaires ont jugé bon d’investir pour
cibler davantage les consommateurs-trices jeunes. On le voit, la
publicité nous submerge et il est certain qu’elle continuera
de coloniser chaque espace vierge qu’elle pourra trouver.
La forme qu’elle adopte n’est rien d’autre que
celle du totalitarisme. Sait-on qu’un des fantasmes de Nike
est de projeter son logo sur la surface de la lune ? (2)
Ce fait est d’autant plus inquiétant que, dans le
fond, la pub tend de plus en plus à s’emparer de notions
politiques, au sens large. Le sentiment d’appartenance à
une communauté, une façon de voir le monde, un idéal
ou des valeurs que l’on défend… Ces idées
qui touche à l’identité sont pillées
par les publicitaires. Car le dessein avoué de Nike, de Coca-Cola,
de Gap est désormais de vendre « la magie du sport
», « une sensation », « un mode de vie »,
plus que des baskets, du soda ou des fringues. Pour les acheteur-euse-s,
acquérir des produits de la marque devient un moyen de s’affirmer
personnellement, de manifester un statut social. Les rêves
des jeunes consommateurs-trices regorgent d’objets manufacturés
et de produits de luxe plus que d’idéaux collectifs.
La publicité propose tout simplement une utopie individuelle
qui remplace les utopies sociales déjà moribondes.
Une légitime défense
La propagande publicitaire renforce le sentiment de passivité,
d’autant qu’on voudrait nous faire croire qu’il
est vain et insensé de l’attaquer.
Beaucoup ont intégré l’idée que la publicité
est une expression comme une autre, et que la juger revient à
discuter des goûts et des couleurs. Or, il ne s’agit
en rien d’une question d’esthétisme, ni d’un
problème subjectif.
La pub communique une idée précise (« Achetez
! »), de la manière la plus séduisante possible.
Les formes qu’elle adopte peuvent être belles, mais
en aucun cas la publicité ne peut prétendre à
être de l’art. Cet argument d’une soi-disant création
artistique, qui vient de l’assimilation des concepteurs publicitaires
à des créatifs, est l’un des plus pervers. Il
vise à faire oublier que la publicité est une arme
redoutable dans l’arsenal du marketing. Son unique but est
de faire vendre. A la différence de la création artistique,
« l’œuvre » créée par la pub
est utilitaire et sa qualité est jugée en terme d’efficacité,
alors qu’une peinture ou une pièce de théâtre
possèdent une fin en soi. Cette idée est d’autant
plus défendue par les publicitaires qu’elle les assimile
à des artistes, voire à des sociologues, et que les
remettre en cause reviendrait à exercer une censure sur la
création, ou à bâillonner la liberté
d’expression.
La pub tente aussi, avec succès, de s’imposer dans
la culture. Les Nuits des Publivores et autres types de manifestations
veulent faire croire qu’il suffit de devenir une référence
dans l’esprit des gens pour faire partie de la culture d’un
pays.
L’autodéfense est justifiée par rapport à
l’agression, au danger qu’elle représente. C’est
notre liberté que nous exerçons en exigeant de ne
plus servir de cibles.
La publicité véhicule des valeurs sexistes et influent
nos consciences. Elle n’est pas un art, et la refuser n’est
pas une censure, mais une légitime défense face à
un totalitarisme diffus. Fort-e-s de ces constats, posons-nous maintenant
la question de l’action : comment combattre le sexisme légitimé
chaque jour un peu plus grâce aux publicités ?
Comment se battre ?
Concernant les questions du racisme et des droits de la personne
humaine (ou plutôt de droits de l’Homme, ce qui explique
peut-être certaines choses…), le Bureau de Vérification
de la Publicité (BVP), par lequel doivent passer les pubs
télévisées, et certaines affiches (pour les
agences qui le désirent), veille. Mais celui-ci n’a
pas d’incidence sur le sexisme. C’est pourquoi, en 1983,
Yvette Roudy, à l’époque ministre déléguée
chargée des droits de la femme, a proposé un projet
de loi antisexiste ; projet enterré par l’action conjointe
du gouvernement et des publicitaires, invoquant la liberté
de presse et d’expression…
Dernièrement, les exactions des publicitaires ont remis
au goût du jour l’idée de légiférer
contre le sexisme dans la publicité (3). En juillet 2001,
un groupe d’expert a remis à Nicole Péry, secrétaire
d’Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle,
un rapport sur « L’image des femmes dans la publicité
». Déplorant le manque d’associations pouvant
recourir en justice sur de telles questions, plusieurs mesures ont
été envisagées. Tout d’abord, il s’agissait
de pouvoi saisir les tribunaux, mais aussi de modifier les recommandations
du BVP rédigée en 1975 pour l’adapter aux exactions
contemporaines. Il était même question de poser des
amendements allant dans ce sens (étant donné l’inexistence
de jurisprudences sur cette question), « d’encourager
le débat public », et même de mettre en place
un numéro vert où pourraient téléphoner
les femmes se sentant agressées par des publicités
(4).
C’est le comble du traitement individualiste des injustices,
dans une société où le-la consommateur-trice
est imaginé-e comme cellule (biologique, ou munie de barreaux
?) atomique. Les droits et moyens d’action ne concernent que
cette catégorie d’individu-e-s (pensée comme
universelle), d’où le traitement au cas par cas du
sexisme. La question n’est pas de choisir entre la réforme
ou la révolution, mais de savoir si l’on veut qu’un
tel, qu’une telle, se sente moins touché-e par les
horreurs qui nous agressent dans la rue, ou s’il y a une réelle
volonté de s’attaquer au patriarcat en tant que système
(et non de remédier à une simple coïncidence
: des individu-e-s auraient par pur hasard des comportements différents,
les hommes se retrouvant par malchance violents, et les femmes par
malchance battues…). Il semblerait en tout cas à nouveau
que seule l’utopie individuelle – individualiste –
(la même que celle véhiculée par la publicité)
soit mise en avant par l’Etat.
Les propositions du rapport 2001 sont tombées aux oubliettes,
invalidées de fait par le BVP qui a refusé catégoriquement
de remanier ses recommandations. La position de ces professionnels
de la pub (ils sont majoritaires dans cet organisme) est qu’il
n’est nullement besoin de rédiger des recommandations
spécifiques sur le sexisme ou l’image des femmes, car
les femmes étant des êtres humains, leurs droits sont
de fait inclus dans ceux des droits de l’Homme… Eternelle
pirouette juridique !
Hormis une loi potentielle qui n’est pas prête de voir
le jour, il existe de multiples formes de résistance, plus
efficaces, à en croire les publicitaires eux-mêmes.
« Nous n’aurions jamais osé faire une telle publicité
au Québec, nous aurions eu trop de problèmes avec
les mouvements féministes », déclaraient les
auteurs de la pub pour Babette. Comme quoi la résistance
au quotidien, organisée et concertée, peut avoir un
impact beaucoup plus important que des textes juridiques. Si les
agences de publicités n’osent plus réaliser
de pubs sexistes par peur de représailles, le sexisme aura
pour une fois reculé de façon claire et précise.
Même si seul un pan du patriarcat est ainsi attaqué,
les structures même de l’édifice se trouveront
interrogées par de telles pratiques. Si les pubs sexistes
sont systématiquement recollées, si les agences responsables
subissent des pressions à chaque publication, si la publicité
ne peux plus matraquer ses slogans sans entraîner de véritables
réactions, alors le terrain gagné le sera de façon
beaucoup plus sûre que par les déclarations de principe
de nos gouvernant-e-s. Ne laissons pas d’espace où
puisse s’exprimer et se pérenniser le sexisme. Ni à
prendre, ni à vendre, les femmes ne sont pas des objets :
publisexistes, gare à vous, on vous rendra les coups !
Collectif Contre le Publisexisme
(1) « La pieuvre publicitaire » de Ignacio Ramonet,
Le Monde Diplomatique, mai 2001.
(2) No Logo de Naomi Klein, éd. Actes-Sud, un pavé
précieux sur le poids des marques et ceux qui les combattent.
(3) Selon un sondage réalisé par l’institut
Ipsos (auprès de 1 015 personnes d’ un échantillon
national représentatif) et publié par Culturepubmag
(mai-juin 2001), 46 % des gens (tous sexes et âges confondus)
trouvent qu’il y a aujourd’hui une tendance machiste
dans la publicité, 47 % ne trouvent pas qu’il y ait
une tendance machiste, et 7 % ne savent pas.
(4) Le Monde, mercredi 11 juillet 2001.
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