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« Le trafic négrier, clé de l'âge d'or nantais »
Jean Breteau

Origine : Ouest France vendredi 09 mai 2008

http://www.ouest-france.fr/-Le-trafic-negrier-cle-de-l-age-d-or-nantais-/re/actuDet/actu_29-627553------_actu.html

Jean Breteau devant l'immeuble ayant appartenu, sur l'Île Feydeau, à un négrier : « Avec des bateaux construits et armés à Nantes, on a déporté 400 000 Africains. »
Demain est commémoré le crime que fut la traite négrière. Jean Breteau, historien, rappelle la place éminente de Nantes dans ce trafic.

Comment et pourquoi en êtes-vous venu à vous intéresser au Nantes négrier, qui perdura 130 ans, du XVIIIe au premier tiers du XIXe siècle ?

Comme d'autres, avec qui j'ai fondé en 1990 l'association des Anneaux de la mémoire, j'étais scandalisé par l'occultation de ce crime contre l'humanité. Je voulais que Nantes reconnaisse et assume, son passé.

La traite, à Nantes, s'est poursuivie même lorsqu'elle était interdite ?

Le trafic se poursuit au moins jusqu'en 1827, alors que ça devient interdit et honteux.

Comment s'effectuait ce commerce ?

Des marchandises de toute l'Europe partaient de Nantes : de l'eau-de-vie, de la verroterie vénitienne, du métal, du tissu, des perles... En Afrique, elles étaient troquées contre des captifs, hommes, femmes et enfants, qui étaient emmenés aux Amériques. Là, de nouveau, ils étaient vendus ou troqués contre du café, du tabac, du coton. Et tout cela revenait à Nantes, qui en tirait sa prospérité.

A-t-on une idée de la place de Nantes dans la traite mondiale ?

Nantes est, après Liverpool, le plus grand port négrier. Avec des bateaux construits et armés à Nantes, on a déporté 400 000 Africains, soit quatre fois plus que la population nantaise de l'époque. Et nous savons qu'au moins 20 % d'entre eux sont morts durant la traversée.

Ce trafic a enrichi Nantes, non ?

Bien sûr, il est la clé de l'âge d'or nantais. Il lui a apporté une fortune inimaginable. Lorsque j'ai recherché sur le sujet, j'ai été étonné par le nombre ahurissant de bâtiments, châteaux, folies et résidences, qui appartenaient aux armateurs ou colons directement liés à ce commerce criminel.

Cette richesse s'inscrit encore à travers un bâti que vous invitez à visiter ?

L'immeuble du 2, place de la Petite-Hollande, par exemple, avec son faste ostentatoire, était la propriété d'un des négriers les plus connus et importants : Guillaume Grou. Et des mascarons qui ornent l'entresol de l'immense immeuble de l'allée Brancas, conçu comme un tout par Ceineray, évoquent un visage de femme noire très caractérisé ou le sourire d'un jeune indien coiffé de plumes.

Pourquoi faut-il partir à la recherche de ce passé, inscrit encore dans la pierre ?

Nous ne sommes pas des donneurs de leçons. Et nous ne stigmatisons personne. Nous voulons donner aux gens les moyens de la connaissance du passé de la cité. Pour qu'ils regardent l'architecture, bien sûr. Mais se posent aussi cette question : la richesse de Feydeau, par exemple, d'où elle sort ? Elle s'est faite à quel prix de souffrances ?

Recueilli par Gaspard NORRITO.

Un dépliant disponible à l'office de tourisme de Nantes-Métropole et à Cosmopolis, permet de suivre les traces architecturales du passé négrier à Nantes.

Par ailleurs, une brochure de 32 pages, qui sort des presses, intitulée
« Barbechat, Nantes, Paimboeuf : sur les traces de la traite négrière », complète utilement le dépliant. Prix : 7 €.
Disponible à partir du 10 mai, au Village de la Liberté, situé devant le Palais de justice.
Et ensuite, à Cosmopolis. Tél. 02 40 69 68 52. Mail : anneaux.memoire@wanadoo.fr