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origine http://www.ainfos.ca/fr/ainfos05354.html
Nous diffusons ce texte à propos de notre compagne CT qui
travaille a la maison départementale du Mindin, et qui après
un long combat, une persécution suivie d’une résistance
que nous avions suivie entraînant quelques années d’accalmies
et même une certaine reconnaissance de son travail et de la
justesse de ses remarques.
Pour de récentes prises de position elle vient à
nouveau d’être persécutée.
La CNT-AIT toujours vigilante quant à l’évolution
de la situation de sa compagne et de son lieu de travail tient à
nouveau à se manifester en rappelant brièvement l’histoire
de son combat, ce qui en avait découlé, et comment
un revirement s’est opéré récemment à
son encontre.
Nous tenons à dénoncer les persécutions contre
notre compagne soutenir certaines positions institutionnelles qu’il
conviendrait d’amorcer autour d’un travail si difficile,
si l’on veut réellement changer la vie dans ces lieux.
La maison départementale du Mindin (MDM), en Loire Atlantique
sur la commune de saint Brévin est un établissement
médico social départemental de la fonction publique
territoriale qui héberge à vie des personnes très
lourdement et mentalement handicapées, dites démunies.
Nous avions déjà diffusé deux écrits
(1999 et 2001) à propos de ce qui s’y passait et surtout
à propos du combat qu’avait mené quasiment seule
Madame CT, membre de la CNT-AIT, travaillant depuis 1992 comme aide
médico-psychologique dans cet établissement. Elle
avait du faire face, au mur du silence. Témoin de mauvais
traitements subis par des pensionnaires de ce lieu de relégation.
Durant toutes ces années elle n'avait pu se résoudre
à se taire, pour dénoncer ce qui lui paraissait anormal
et injuste tout en indiquant des pistes sur le travail qu'il conviendrait
de réaliser si l'on voulait rendre la vie quotidienne plus
agréable à ces personnes handicapées très
dépendantes et en permanence d’une aide humaine. Envers
et contre tous, elle avait persisté à travailler selon
son éthique, comme si en matière de soins et d'assistance,
le fait d'effectuer correctement son travail avait été
un acte de désobéissance contre ceux pour qui le seul
fait de "garder” ces handicapé-e-s suffisait.
Bien qu’elle ait alerté du monde, il n’y avait
pas eu de suites institutionnelles, montrant là le peu de
considération que son action recevait.
Des collègues, syndicalistes "maison" (FO), avaient
cependant dénoncé chez elle le "manque de solidarité
de classe" parce qu'elle dénonçait les conditions
indignes dont elle avait été témoin.
C’est pourtant en voulant faire de sa tâche une activité
au service du bien être de ces personnes handicapé-e-s
que madame CT faisait preuve de "solidarité de classe",
comme s'employer à critiquer et orienter l'activité
humaine dans un sens utile, répondant aux besoins et ne nuisant
pas.
Et donc, à ce moment là, quitter le seul corporatisme
revendicatif pour devenir révolutionnaire, c'est à
dire sur le chemin de la réappropriation de l'outil et du
sens du travail par le travailleur.
Il y a six ans la CNT-AIT, avait diffusé largement un 4
pages racontant toute cette histoire, dans le but d’ensemencer
une réflexion critique sur ce qu’il se passait ici
comme dans d’autres établissements. Ce tract avait
eu un certain impact local et régional y compris à
travers certains organes de presse. Une réunion publique
il y a 5 ans à Paris avait rassemblé nombre de travailleurs
du secteur santé-social-éducation.
Madame CT épuisée, sans avoir été prise
au sérieux, s’était tout de même retrouvé
en longue maladie. Cela pouvait arranger du monde, “l’emmerdeuse”,
celle qui pose problème, se retrouvant stigmatisée
semblait donner raison à ceux et celles qui avaient voulu
la voir comme une “folle”.
Cependant après toutes ces années, les deux ans de
discussion et de diffusion, continue et par nos soins, d’informations,
n’avaient commencé à porter leurs fruits: En
2002 un mouvement de mécontentement du personnel de la MDM
se faisait jour, soutenu par l’association des familles des
résidents des établissement de Mindin. Condamnant
la qualité de prise en charge minimale et le mal être
des résidents, une situation qui engendre des dysfonctionnements
et des actes de violence dont les résidents sont les victimes,
le mouvement dénonçait le manque criant de personnel
et tirait la sonnette d’alarme sur des conditions de travail
se dégradant, provoquant l’usure des agents et une
augmentation significative de l’absentéisme, les repos
- légitimes - jamais compensés en termes d’emploi.
C’était avant la loi sur les RTT et il manquait déjà
44 postes dont 18 rendus nécessaires par l’observation
des repos compensateurs. Des mouvements similaires avaient lieu
dans d’autres établissements. Les manifestations de
personnels et familles de résidents, se succédant,
devant la MDM, sur le pont de Saint Nazaire, devant la préfecture
de Nantes où ils furent reçu par le directeur du cabinet
du préfet qui précisait que le directeur de la DDASS,
monsieur M, devrait être reçu au ministère à
ce sujet. Vigilants quand aux promesses, la conscience était
très vive qu’une réflexion de fond sur la structure
et le fonctionnement de La MDM, ne pouvait être esquivée.
C’était dans les faits une reconnaissance de la justesse
du combat que C.T avait mené pendant plusieurs années.
La CNT-AIT, savait pour l’occasion rediffusé un texte,
rappelant son rôle dans le réveil des consciences et
appuyant le mouvement en cours en appelant à la méfiance
les salariés et familles de résidents vis à
vis de structures syndicales qui non seulement n’avaient rien
fait depuis des années mais avaient à l’époque
enfoncé madame CT. Nous avions parmi d’autres revendications
demandées à l’époque que les injustices
dont elle avait été victime soient réparées
et qu’elle obtienne la reconnaissance qui lui est due, après
que sa parole ait été pendant si longtemps mise en
doute. Ce qui fut fait, en ce qui la concerne !
Et lorsque elle repris son travail en 2002, le ton avait changé,
elle n’était plus “la folle”, on lui dressait
un accueil chaleureux. Est-ce pour autant qu’un changement
concret dans l’organisation institutionnelle des prises en
charges était à l’oeuvre et au delà de
la mise en avant de quelques unités modèles utilisées
comme vitrine de l’établissement ? En fait non. Le
cours des choses repris. Toujours est-t-il que les notations d’années
et années s’avérèrent très favorable
au travail de CT. De la direction: “Madame, je vous félicité
d’avoir su vous réintégrer dans la structure
du FMN. Tout le monde devrait pouvoir apprécier vos qualités
de réflexion et votre engagement à satisfaire les
besoins des résidents”.
Ceci n’endormit pas la vigilance de CT, en ce qui la concerne
puisque elle tenta sans succès (entre Octobre 2004 et Janvier
2005) d’obtenir son dossier personnel et bien qu’elle
en ait le droit, toutes ses tentatives échouèrent.
CT ne fut non moins vigilante sur la protection des résidents.
Et inquiétée par le fait que de trop nombreux arrosage
aient lieu sur les lieu de travail et puisse nuire à la qualité
des prises en charges elle contacta, pour conseil, la présidente
d’une association d’anciens alcooliques (La croix d’Or).
Cette dernière était une ancienne salariée
de Mindin, qui transmit le courrier au chef de service de CT. Le
4/2/05, CT fut donc convoquée à une “réunion”,
en urgence qui se révéla être un véritable
tribunal où 25 personnes l’accablèrent verbalement
de reproches, lui mirent la pression. “Si elle ne supportait
pas la convivialité de l’alcool, elle ne correspondait
pas au projet du foyer”, “Que le fait qu’elle
fasse des remplacements dans les différentes unités
de Mindin était du voyeurisme”, “Qu’elle
parlait à un membre du personnel qui lui aussi était
sur la touche”...
Très choquée psychologiquement, CT s’est retrouvée
quelques temps en en arrêt maladie.
Bien sur ces pressions n’ont été que verbales,
aucun n’écrit ne pouvant venir contredire les bonnes
notations qu’elle venait de recevoir.
C’est pourquoi la CNT-AIT demande que cessent les persécutions
dont CT est l’objet, elle exige que CT puisse obtenir son
dossier personnel comme elle en a le droit.
Sur le fond de la dernière affaire: La CNT-AIT ne remet
pas en question le fait que les personnels se détendent et
célèbrent entre eux différents événement
conviviaux, tant qu’il n’y a pas de retentissement négatifs
sur les résidents. Mieux encore, il est possible et thérapeutique
pour les personnels d’organiser des événements
festifs et conviviaux avec les résidents, comme des repas
collectifs. Dans l’unité ou en dehors de l’unité.
Là où cela se pratique, c’est à la fois
profitable aux résidents et au moral des équipes et
cela participe du développement d’une ambiance bénéfique
dont les retombées sont évolutives et préventives
en matière de violence. Cela met de la vie dans des lieux
toujours menacés de sclérose morbide.
Si la convivialité permet par ailleurs d’associer
dans des festivités institutionnelles, les résidents,
cela ne peut que contribuer à leur épanouissement
et à mettre de la vie dans des lieux dont le risque permanent
est la sclérose et la relégation. Les rares endroits
où un travail d’ambiance et de convivialité
soignants/soigné se fait, les retombées sur la qualité
de vie des résidents (ou des patients) et sur le moral des
équipes profite à tout le monde, surtout lorsqu’il
s’agit de personnes très dépendantes. Par contre
lorsque les équipes se replient sur elle même, trop
souvent, pour échapper aux résidents exprimant leurs
désaccords par des troubles du comportement, le risque est
d’accroître un climat préjudiciable pour tous.
Un engrenage involutif..
Effectivement, les conditions d’hébergement, de soin,
de vie des personnes démunies concernant l’outil de
travail doivent intéresser au premier plan le syndicalisme.
Et que cette question intéresse la nécessaire réflexion
de fond sur ce type d’établissement. Des personnels
formés, motivés, conscients de leur tâche, en
nombre suffisant (créations de postes), mais aussi respectés
dans leurs droits et leur dignité.. Il est nécessaire
de désenclaver et d’ouvrir au monde extérieur
et au mouvement de la vie ce type de lieu de vie, afin qu’ils
ne s’enferment pas dans une logique de relégation.
Chaque résident est un individu à part entière
ayant droit à être considéré dans la
dignité et non un anonyme se confondant dans une masse informelle
et démunie gardée à l’écart du
monde. La société dans son ensemble est concernée,
tant il est vrai, que ce type de lieu de vie reste la conséquence
du fait qu’il n’est pas possible pour les proches de
ces personnes handicapées de vivre avec elles au quotidien.
Ce ne sont ni les proches, ni les personnels qui ont choisi de s’occuper
de ces personnes, qu’il faut questionner, mais l’ensemble
de la société sur son fonctionnement et la place qu’elle
assigne à certains de ses membres lorsqu’ils ne s’inscrivent
pas ou plus dans le système de la productivité/consommation
ordinaire.
Il ne s’agit pas d’accabler les personnels: s’occuper
de personnes complètement dépendantes (toilette, habillage,
alimentation, hygiène intime) au quotidien pendant des années
sans autres perspectives que de les maintenir dans un état
de tranquillité et de satisfaction, en dehors d’épouvantables
souffrances, est extrêmement difficile. C’est avant
tout une question de thérapie institutionnelle. Nous connaissons
l’engrenage institutionnel de la violence. Un nombre de personnel
insuffisant, une situation de lieu fermé, une absence d’ouverture
des lieux vers des activités des sorties, une absence de
travail de réflexion collective institutionnelle (psychologues,
médecins) font que ce travail quotidien peut progressivement
virer au cauchemar. Pour les équipes et donc pour les résidents...
Il s’agit de personnes complètement dépendantes,
mais tout à fait existantes, et la charge de travail est
énorme. Alors que de véritables relations et enjeux
humains se jouent et se nouent comme partout. Lorsque les travailleurs
n’en peuvent plus qu’ils n’arrivent plus à
créer une ambiance conviviale dans ces lieux de vies Cela
devient déroutant, déprimant, un sentiment d’échec,
une envie de se replier entre salariés et c’est l’engrenage
les personnes handicapées utilisent ce dont elles disposent
pour se faire entendre rajoutant de la pénibilité
au travail. Le pensionnaire devient alors sans l’avoir voulu
le persécuteur des travailleurs, ce qui facile les passage
à l’acte sadique à leur encontre par les plus
à bout, les plus fragile...
Comment briser ce cercle vicieux est la vraie question ? Comment
avancer en ce sens, se mettre sur la voie puisqu’il y a beaucoup
à faire ? C’est justement cela reprendre en main l’outil
de travail. Bien que ce soit une tache ardue, elle n’est pas
insurmontable avec temps et ténacité, travail collectif,
temps de réflexions et d’échanges, temps de
parole, visites et échanges avec d’autres institutions...
Par expérience de certaines institutions, encore trop rares,
qui ont pu le mettre en oeuvre et le maintenir. Cela marche !
Or Mindin n’a pas le personnel en nombre pour, ni assez de
psychologues cliniciens rompus aux techniques de thérapies
institutionnelle, ni suffisamment de médecins habitués
des patients très dépendants ... Mindin ne fonctionne
pas habituellement comme cela, il faut donc qu’une réflexion
collective à l’initiative de membres du personnel (hors
hiérarchie, car il est difficile de s’exprimer librement
en présence de ceux qui notent même lorsqu’ils
vous assurent de leur bienveillance, et il faut savoir “cadrer
le cadre”), puisse se mener par des rencontres entre personnels
de mêmes unités et d’unités différentes
pour échanger ensemble sur les difficultés, de les
besoins, de les désirs. En sachant que les résident
sont une population de personnes complètement existantes
souvent intelligente, dont le développement psychosocial
a été bloqué, envahi, souvent à la suite
de graves traumatismes de le toute petite enfance, mais dont le
principal problème se situe autour de la capacité
à communiquer et dans son rapport à l’autre.
Souvent sans paroles, à la structure du langage délabrée
ou mal construite, sans être muets, ils n’en sont pas
moins des êtres sensibles qui ont en fonction de leurs possibilités
leurs propres stratégies. La plus grandes difficulté
pour le personnel, en dehors d’un strict gardiennage qui mène,
lorsqu’il se limite à cela, de toute façon à
des situations pénibles pour tout le monde, est de chercher
à donner un sens avec le langage à des signes infraverbaux
adressés par le résident. Tenter de les comprendre
c’est créer de la “prothèse institutionnelle”,
et lorsque cela marche cela permet de remédier à des
problèmes le plus souvent, et après coup d’une
simplicité déconcertante ... Et d’améliorer
la vie quotidienne des résidents comme des personnels.
Discuter de tous ces sujets est un préalable incontournable
qui pourrait se faire à l’initiative des salariés,
même s’ils ne sont que quelques uns au début..
Il faut aussi dans les moyens alloués à l’institution,
demander médecins et psychologues... Demander que deux lieux
pour les sorties et pour l’habitat soient possibles pour chacune
de ces personnes car elles ont besoin, comme tout le monde, d’évoluer
dans plusieurs lieux, même si une certaine ritualisation des
activités a un effet rassurant et répond avec adéquation
à leurs problématiques profondes. Des prises en charges
individualisées et “sur mesure” doivent pouvoir
se réaliser pour leur épanouissement individuel.
Même dans les limites de handicaps lourds liés à
des dégâts structuraux irréversibles mais fixés,
il y a toujours deux possibles en évolution: la souffrance
de l’angoisse envahissante et de la relégation ou bien
le bonheur de la tranquillité et de la plénitude de
sois, qui contient parfois ses surprises évolutives... Il
est temps de choisir!
La CNT-AIT, dans une démarche intercorporative, interprofessionnelle
et interrégionale, reste vigilante quant aux suites données
à ces différentes revendications.
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Tract réalisé par des militants des syndicats:
CNT-AIT Bourse du Travail, place Allende 44600 St Nazaire
et du Syndicat des Travailleurs, Chômeurs, Précaires
de Paris, BP 352 75526 Paris cedex 11.
CNT * AIT Confédération Nationale du Travail
Association Internationale des Travailleurs Secteur santé-social
CNT-AIT Bourse du Travail, place Allende 44600 St Nazaire
Syndicat des Travailleurs, Chômeurs, Précaires de
Paris.
BP 352 75526 Paris cedex 11 stcpp.cnt-ait75 (at) club-internet.fr
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A-infos-fr mailing list A-infos-fr at ainfos.ca
http://ainfos.ca/cgi-bin/mailman/listinfo/a-infos-fr
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