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Mémorial pour l'abolition de l'esclavage à Nantes. Sans le Code noir, c'est regrettable
Publié le 20-05-2014
Par Marcel Zang écrivain

Origine : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1203771-memorial-pour-l-abolition-de-l-esclavage-a-nantes-sans-le-code-noir-c-est-regrettable.html

À Nantes, un mémorial pour l'abolition de l'esclavage a été inauguré le 24 mars 2012. Le problème : aucune mention n'est faite du Code noir, un texte juridique datant de 1685 et réglant la vie des esclaves noirs dans les îles françaises. Marcel Zang, écrivain, milite pour une mention de ce texte édifiant au sein de ce mémorial. Il nous explique sa position.

Le Mémorial de Nantes ne fait pas mention du Code noir, un manque pour notre contributeur.

"Couvrez ce sein que je ne saurais voir"

À Nantes, ce seing, qu'on ne saurait voir n'est autre que le Code noir.

La ville avait déjà pris le parti de l'intituler "le Mémorial de l'abolition de l'esclavage" et non point, par exemple, "le Mémorial de l'esclavage" ou même "le Mémorial de l'esclavage et de son abolition", comme l'eût souhaité le moindre quidam.

Le Code noir, un texte monstrueux

Voici maintenant que la municipalité socialiste des bords de Loire renâcle à y introduire la moindre référence au "Code noir" de Colbert et de Louis XIV.

Une position que semble approuver la Guadeloupéenne Maryse Condé, écrivaine et ex-présidente du Comité pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage dont le siège se trouve à Paris.

Il y a 25 ans, l’historien Louis Sala-Molins exhumait le Code noir qui, d’un point de vue juridique, a grandement contribué à la déshumanisation de l’homme noir.

"La société européenne est celle qui, sur des fondements racistes, a légitimé la pratique de la traite négrière et de l’esclavage pendant plusieurs siècles", déclarait-il tout en regrettant aujourd’hui l’absence de toute référence au Code Noir ("le texte le plus monstrueux de la modernité") dans le Mémorial de l’abolition de l’esclavage à Nantes.

Un texte emblématique de l'horreur de la traite

Il est une chose pire que l'horreur et la déshumanisation, c'est la codification et la légitimation de l’horreur et de la déshumanisation - le plus, l’acmé, le sommet. Et c'est du sommet d'une montagne qu'on peut aussi le mieux embrasser et considérer les pentes, les vallées, les ravins, les rivières de sang et les fosses à purin de l’abomination.

Ne dit-on pas que "celui qui peut le plus peut le moins" ? Et, en l’occurrence, le plus par le "Code Noir" dit aussi le moins des diverses traites et des esclavages.

Le Code noir, un cruel manque au Mémorial

Voilà pourquoi le Code Noir et la "traite française" sont emblématiques de cette horreur et de cette déshumanisation.

Mieux que tout, le Code Noir témoigne de cette descente aux enfers des volontés humaines et étatiques, et en cela il a pleinement sa place dans un lieu de mémoire et de résistance face à l'abject, à la monstruosité et à l'aliénation.

Aussi, loin de limiter le Mémorial de l’abolition de l’esclavage de Nantes à la "traite française" ou à la traite transatlantique, comme l’appréhende l’écrivaine Maryse Condé dans un récent entretien à Ouest-France, tout au contraire le Code noir, par la présence inouïe de son extrême langage, ferait lien et ouvrirait le Mémorial comme un fruit mûr et généreux dont la chair se répandrait en offrande aux consciences, au ciel et à la terre, tout comme le fait le clocher d’une église en son sommet, foyer de rayonnement et de convergence, centre des centres.