Origine http://www.antipatriarcat.org/hcp/html/manifeste.html
"Le manifeste contre la culture", auquel fait référence
l'auteure est accessible à:
http://www.fondation-babybrul.org/manifeste_contre_la_culture.html
Je viens de relire le "Manifeste contre la culture",
vraiment c'est bien écrit ! Tu as du y passer du temps, à
y réfléchir, à le remanier, à articuler
tout ça. Moi aussi je peux te parler de culture d'un point
de vue que tu n'as pas imaginé, que tu n'as jamais ressenti.
Que tu ne peux pas imaginer ni ressentir. C'est normal et c'est
simpliste, tu es un garçon.
Tu dis que c'est à chacunE d'écrire son manifeste.
J'écris le mien.
La Culture, c'est apprendre aux filles à se dévaloriser
sans cesse.
La Culture, c'est apprendre aux filles à ne percevoir leur
corps que par la souffrance, la violence, la séduction, le
regard des garçons.
La Culture, c'est te rendre schizophrène jusqu'à
tout mélanger. Tendresse, affection, sexe, viol, désir,
consommation des corps, rapports de pouvoir.
La culture, c'est te clouer dans la tête que ton bien-être
ne peut pas venir de toi seule mais d'un prince charmant.
Et comme ce serait trop simple si c'était juste ça,
la culture pseudo subversive du milieu squat libertaire BLABLABLABLABLABLA
en rajoute une couche jusqu'à te faire hurler.
La culture pseudo subversive te fait croire que c'est facile de
dépasser les questions de genre. D'en parler, d'abolir les
rapports de pouvoir, de les renverser parfois, de les visibiliser,
de les conscientiser et de le traduire en actes.
La culture BLABLABLIBLABLABLA te fait croire que le milieu squat
est rempli de gens formidables, pas comme les "autres",
pas comme à "l'extérieur". C'est vrai dans
les squats il n'y a pas de violeurs. D'ailleurs, la violence entre
les gens n'est pas si genrée, il y a même des filles
qui agressent des garçons. C'est normal, elles sont hystériques,
comme toute bonne féministe qui fait chier son monde et qui
appuie là où ça fait mal.
La culture underground bien pensante pseudo déconstruite,
elle te fait croire aussi que c'est légitime d'être
irresponsable. De faire ce que je veux, quand je veux, parce que
c'est cool d'être libre de toute contrainte, c'est subversif.
Moi ces cultures, qu'elles soient institutionnelles ou "subversives"
je les vomis et les personnes qui pensent avoir tout compris avec.
Moi ma culture elle a grandi sur une violence intériorisée
et subie. Elle ne veut plus se laisser invisibiliser et ridiculiser
par des dominants qui ne disent pas leur nom.
"C'est plus compliqué", "c'est pas ça",
"tu m'agresses", démerdes-toi", "j'y
peux rien", "tu peux partir s'il te plait ?", "c'est
trop simpliste", "les choses ont un sens en elles mêmes,
pas besoin de les expliquer"....
SOUFFRES DANS TON COIN TOUTE SEULE COMME UNE GRANDE, LAISSE MOI
ETRE LACHE TRANQUILLE !
Ma culture à moi elle me donne envie de hurler, de dire
que le viol est quotidien, que oui j'ai l'air joyeuse quand même
et alors ?
Ma culture c'est être violente sans me laisser culpabiliser
une fois de plus.
C'est éclater ma gentillesse et ma docilité à
encaisser, si naturelles et tellement féminines. Je ne suis
pas toujours compréhensive. Je ne demande pas le droit de
ne pas l'être, je le prends et je ne veux pas avoir à
m'en justifier.
Je pète les plombs de trop de souffrance et alors ?
Je suis violente et alors ?
Les garçons qui ont l'air le plus doux peuvent aussi être
violents sans que ça se voie. C'est insidieux et ça
fait mal quand tu t'en rends compte. Ca fait mal aussi quand "on"
ne veut pas le reconnaître. Pas besoin d'avoir toutes les
marques extérieures et bien visibles du "mâle
dominant" pour continuer à se comporter comme un individu
garçon construit.
Le nier s'est sauter des étapes.
C'est aussi se croire au-dessus de ce que tu peux générer
comme souffrance à partir du moment où tu «
relationnes » affectivement avec quelqu'unE.
Je ne veux pas du couple.
Je ne veux pas de l'hétéronormalité.
Mais je ne veux pas me laisser piétiner pour de grandes
théories derrière lesquelles on se cache. Dans lesquelles
je ne trouve pas ma place si facilement.
Moi, c'est cette culture là que je me prends dans la gueule
trop souvent.
grenoble, fin mai 2004
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