"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
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Le faux sérieux comme impuissance
jeudi 13 juillet 2006

Origine : http://malgretout.collectifs.net/spip.php?article51

En France, comme un peu partout dans le monde, il existe des gens de bonne volonté, des ”belles-âmes”, qui voudraient être, ne serait-ce qu’un peu, solidaires de ceux qui sont en difficulté comme ce fut le cas pour les ”sans-papiers” de l’église St- Ambroise et St-Bernard : et ceux qui ne font pas partie des salauds qui se sont réjoui des expulsions pensent qu’il est quand même bien hardi et compliqué d’accepter concrètement que les immigrés restent là où ils sont.

C’est ainsi qu’ils pensent (les gens ”sérieux”) que nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde en se justifiant par des propos fantaisistes. Ils se comportent ainsi de manière hyper-idéaliste en évoquant toute la misère du monde là où il s’agit de réagir et de s’engager dans une situation concrète. Bien entendu, vouloir préserver l’ordre établi en traitant les choses ”au cas par cas” revient à dépolitiser l’action des ”sans-papiers”. Ceux-ci proposent une solution collective et solidaire qui, loin de se centrer sur chaque cas particulier, est et reste un défi pour tous les habitants de ce pays. Penser le monde en termes de gestion individualiste tout comme son envers qui est de prétendre penser le monde dans sa totalité sont les figures mêmes de l’impuissance.

Il faut refuser ce faux sérieux qui nous condamne à l’impuissance la plus absolue et cesser ce petit jeu qui nous met dans la position d’une prétendue géo-politique et qui au nom d’une hyper-complexité du monde, nous plonge dans un pessimisme paralysant. Car penser le monde en terme de totalité empêche la pensée. En revanche, aborder les enjeux de notre situation et de chaque situation concrète est ce qui nous permet d’agir ici et maintenant et de modifier effectivement le monde.

Il ne s’agit pas d’être réformiste ou maximaliste mais d’abandonner cette chimère selon laquelle nos actes concrets devraient obligatoirement s’inscrire dans une pensée qui rende compte de la globalité du monde. Puisque ces belles âmes craignent d’introduire un désordre quelconque par leurs actes ou par leur engagement, nous leur rappelons que c’est cet ordre mondial qui relève du désordre le plus féroce, lui qui n’a pour seule étoile polaire que le profit. Alors, ayant abandonné la chimère de pouvoir ordonner le monde à notre gré, soyons capables de favoriser des désordres grâce à une myriade d’actes de solidarité libertaire. Il existe, par rapport aux sans-papiers, une loi au dessus de toutes les lois à laquelle il semble juste d’obéir, celle qui nous dit que la survie de l’humanité dépend du développement de la solidarité et du partage : tous ceux qui sont ici sont d’ici. La détermination des ”sans-papiers” et de leurs amis a montré que contrairement au pessimisme ambiant, des pratiques de solidarité concrètes sont possibles ici et maintenant pour peu qu’on abandonne l’attente d’un espoir toujours ajourné et qu’on assume la construction d’un espoir au quotidien.<