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Désirer autrement
Présentation du livre de Miguel Benasayag " La Fragilité"
Collectif Malgré tout

Origine http://www.citoyen.guideduvin.com/doc/quefaire.php

extraits

« Dans notre société, le problème est – comme diraient les deleuziens – comment peut-on désirer autrement ? Dans les banlieues, l’effet du désir est plus matériel que le mur qui nous fait face. Dans les banlieues, les mômes désirent tous là où le système leur dit de désirer. C’est l’aliénation parfaite. Alors que la véritable question est comment désirer autrement.

« Comment peux-tu trouver plus désirables les transports en commun que la Porsche ? Comment peux-tu trouver plus désirable d’avoir une piscine municipale qu’une piscine privée ? C’est évidemment compliqué, car la piscine municipale et les transports en commun sont moins désirables. Alors désirer autrement, c’est se désenclaver. Dans les banlieues, dans les lieux de grande souffrance sociale, c’est un vrai défi qui exige quand même qu’on sorte de la plainte, car tant qu’on est dans celle-ci, on est dans le "désirer comme les maîtres". Il faut pouvoir désenclaver et la pensée et le désir pour que quelque chose de matériel puisse exister.

« Concrètement, dans pas mal de lieux d’occupation des terres qui, économiquement, sur le plan du confort, ne sont pas très éloignés du bidonville, vous trouvez des gens qui vous disent "on a commencé à faire ça pour survivre, et on y a trouvé un mode de vie supérieur", et qui ne reviendraient pour rien au monde à une vie de petits bourgeois. Ce qui fait la différence, c’est que, à cet endroit, quelque chose s’est désenclavé de l’aliénation. »

Miguel Benasayag, avril 2003
dans la revue du Passant ordinaire


Présentation du dernier livre de Miguel Benasayay « Fragilité »
par William FERRARI Juin. 01, 2004
Article présentant le dernier travail de Miguel Benasayag " La Fragilité"

Origine http://216.17.145.91/news/2004/06/587.php

« La Fragilité » Miguel Benasayag, une leçon de philosophie radicale.

Définitivement, l'enchantement et le désenchantement du monde sont laissés au fond de la jarre de Pandore. Agités par l'appétit de savoir ce que recelait le fameux don de tous les dieux, les hommes se sont empressés d'imaginer leur vie subordonnée à l'espoir, seul resté au fond et dont la vertu est inconnue. Mais celui qui fait œuvre de salubrité contre les mythes, ne garantit pas son salut, et ici Miguel Benasayag porte le défi au cœur de chacun. La rencontre sera heureuse et de nouveaux corps composés apparaîtront, de nouvelles "dimensions d'existence"; ou bien un rejet, peut-être plus rassurant pour "l'illusion de la conscience", opèrera.

C'est la figure d'une phénoménologie radicale qui prend forme dans ce travail où les plis multiples d'une philosophie de l'immanence s'articulent et créent un nouveau paysage. Désormais c'est dans cette nouvelle géométrie conceptuelle qu'il faudra raisonner, sans quoi c'est d'aporie en aporie que nous serons ballottés.

Si le livre se termine avec les paroles du "rassembleur" ( l'Ecclésiaste) qui énonce le néant des choses, c'est que peut être rien ne justifie a priori l'émergence de l'être, ni son devenir, dans ce qui pourrait nous apparaître comme un chaos. Or, personne n'ordonne le phénomène dynamique de la création, et notre monde qui prétend le codifier assèche lui-même sa propre source.

C'est un appel à la vie, par l'effort de sagesse proposé par Miguel Benasayag, auquel le lecteur est invité, et surtout pas à un renoncement fataliste.

Ce qui fait que le voyage de la vie est éternel, c'est bien parce qu'il n'a aucun but.

William Ferrari.
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D'abord il y a ce constat : le monde est devenu "complexe", les manichéismes ne font plus vérité, d'où un sentiment d'éloignement, de séparation d'avec la réalité. Comment est-on arrivé à cette "subjectivité partagée" ?

Nos sociétés sont techniciennes, et la technique est devenue une combinatoire autonome.

La disparition de "la fonction sujet" issue des lumières, celui qui connaissait, prévoyait, ordonnait le monde, crée ce pessimisme ambiant. Les constructions théoriques actuelles sont des explications justificatives de l'après coup, "ce qui doit être" a été banni avec "la fonction sujet" et remplacée par "ce qui est" comme unique horizon.

L'hypothèse "d'une perte de la pensée" est ainsi avancée.Il s'agit donc de repenser la liberté sans faire retour à la toute puissance. La liberté est ainsi définie comme assomption de la situation, du destin. Le destin assumé non comme fatalité, comme fatum - prédiction -, mais en "connaissance de cause".

Mais la connaissance n'est pas la "conscience représentante de l'idée et de l'esprit" qui lutte pour se libérer et dominer la matière qui représenterait le mal.

Le mal en soi n'existe pas plus que la matière en soi, car celle-ci est toujours "médiée", nommée par la manifestation de ses états. La matière s'exprime comme une "tendance" et "ne se donne jamais sans une forme, un mode, une qualité". La pensée émerge donc conjointement avec les états de la matière, en tant qu'attribut.

En Occident la "conscience se transforme ainsi en véritable maladie (...)" avec son monde propre "où sont méprisées et niées toutes les autres dimensions de l'être qui échappent au moi conscient, à l'individu". Cet "individu, création de la conscience, se vit comme extérieur, comme « empire dans l'empire »" selon Spinoza. La multiplicité de l'être est niée et la séparation conscience-pure-extérieure et monde matériel objectivé, est le soubassement de cette construction.

"La séparation n'est pas autre chose qu'un mécanisme imaginaire, même quand elle provoque des effets bien réels". Mais pour autant cet accès au réel ne relève pas d'un dévoilement de ce qui serait caché. La conscience comme libre arbitre est principalement issue des Lumières, donc " une critique profonde de notre société ne pourra faire l'économie d'une véritable déconstruction de son modèle central, celui de la représentation". C'est en articulant les travaux de certains chercheurs en neurosciences et en sciences cognitives, en éthologie, en mathématiques, en physique fondamentale, en histoire et bien sur les philosophes de l'immanence, que la remise en cause de nos représentations comme instance centrale et totalisante de la réalité est opérée. La conscience est remise à sa place : une fonction dans le phénomène de la vie, parce qu'à la lumière des recherches en neurophysiologie, la conscience ne restitue en rien un "tout" qui n'a pas de "vérité" en soi, mais seulement ce que nos sens en retirent.