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origine :
http://libresechanges.humanite.fr/article.php3?id_article=847
Si vous ne connaissez pas encore Miguel Benasayag, préparez
vos idées à un bon coup de frais !
Philosophe, psychologue et militant de longue date, celui-ci vient
de publier deux nouveaux ouvrages, dont un consacré au phénomène
du téléphone portable.
(1) Une bonne occasion pour se pencher sur la manière dont
ce petit objet a, sans faire de bruit - si on peut dire-, révolutionné
nos vies. Pour Benasayag, il ne faut pas seulement nous demander
ce que le progrès technique nous apporte, mais aussi ce qu’il
nous enlève. Ainsi, si on y réfléchit, loin
de rapprocher les hommes, ainsi que le claironnent les slogans publicitaires,
le portable, ne viendrait-il pas détériorer nos liens
interpersonnels ? Non seulement le portable nous "permet"
désormais d’"échapper" aux personnes
qui sont immédiatement présentes autour de nous, mais
il nous dispense d’aller voir en chair et en os nos interlocuteurs.
Autrement dit, avec le portable, nous substituons bien souvent des
illusions de relations à des liens véritables, cultivant
de ce fait dans une solitude bien réelle, elle. De ce fait,
il s’insère bel et bien dans la dissolution du lien
social qu’entraîne la marchandisation progressive de
tous nos échanges (2). La nouvelle mode qui consiste à
frapper par surprise un inconnu pour le filmer avec son téléphone
illustre bien cette idée. Cette pratique "gratuite"
semble venir marquer le triomphe de Guy Debord : nous semblons bel
et bien entrés dans une "société du spectacle"
où, ne sachant plus communiquer directement, les individus
restent seuls face à leurs écrans, intermédiaires
entre eux et le monde. Finalement, les opérateurs téléphoniques
ne croient pas si bien dire en nous poussant à souscrire
(à) leurs "forfaits"...
(1) Plus jamais seul, Bayard, 2006. L’autre ouvrage est Connaître
est agir, La Découverte, 2006
(2) Pour développer ce sujet, n’hésitez pas
à lire La Grande Transformation de Karl Polanyi, Gallimard,
1944
Le nouveau doudou Pépites Le bloc-notes des pépites
de l'actualité 20.7.06
Origine http://pepites.blogspot.com/2006/07/le-nouveau-doudou.html
" Dans notre société rationnelle et désacralisée,
les technologies deviennent de nouveaux fétiches. Pour nos
contemporains, le portable a un côté magique, il fait
office de doudou, d'objet transitionnel. La nécessité
de parler à tout instant à n'importe qui d'autre,
sans même avoir réfléchi pour soi-même,
efface l'angoisse de la séparation - à l'origine,
celle du bébé d'avec sa mère. Dans une société
où les anxiolytiques sont consommés à outrance
arrive un instrument très performant, qui a soudain la fonction
imaginaire de remplir le manque… Le portable a la capacité
d'effacer l'environnement. Pire même que la télévision.
Beaucoup de gens connaissent l'angoisse d'éteindre la télé,
qui les ramène à la réalité. Avec le
portable se joue le même phénomène, mais en
permanence. Je suis dans un train, inconnu parmi des inconnus, dans
un de ces endroits où le petit bébé que je
continue à être se sent perdu. En utilisant mon portable,
j'efface soudain les contours et, en outre, je claironne ma carte
de visite - tout le monde va comprendre que je suis avocat, ou un
séducteur, etc. Il n'y a plus que moi qui compte, dans un
mouvement narcissique et régressif très fort. Le portable
fait croire à une forme de puissance : je suis partout, on
peut me joindre partout. La seule réalité de cette
ubiquité, c'est qu'en fait je ne suis nulle part. "
Dixit le psychanalyste Miguel Benasayag, coauteur de " Plus
jamais seul, le phénomène du portable ". (La
Vie, 22/06/06)
Posté par Pépites le 20.7.06
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