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Origine : http://bellaciao.org/fr/spip.php?article40633
9 janvier 2007
"Hier, 3 janvier 2007, j’attendais à la porte
de la prison Ayalon à Ramle avec quelques dizaines d’amis,
pour accueillir Tali Fahima qui allait être libérée
après plus de deux années d’emprisonnement."
J’étais là, simplement présent, et j’avais
en mémoire un autre évènement, similaire à
celui-ci, il y a 16 ans de cela, quand mes amis et ma famille m’accueillaient,
ici, à cette même porte de la prison Ayalon, lors de
ma propre libération.
Les accusations contre moi n’étaient pas très
différentes de celles portées contre Tali : en un
mot, c’est parce que nous avons franchi la frontière
qui, selon la loi israélienne et l’idéologie
sioniste, doit séparer les Israéliens des Palestiniens.
Mais ici s’arrêtent les similitudes.
Alors que mon arrestation a eu lieu après deux décennies
d’activités politiques, Tali a commencé à
avoir des ennuis avec les autorités israéliennes dès
ses premières actions politiques ; alors que les relations
prohibées que j’ai eues avec les activistes palestiniens
se sont nouées en résultat d’un long processus
de maturation politique, la décision de Tali d’aller
à Jénine et d’y rencontrer l’activiste
palestinien, Zakariya Zbeideh, a été, comme elle l’a
expliqué pendant son procès, l’« acte
normal » d’un être humain libre, intéressé
à comprendre les racines d’un conflit qui détermine
nos existences. Elle ne pouvait accepter que dans ce conflit, il
y ait, d’un côté, des êtres humains, normaux
et paisibles, et de l’autre côté - dans le camp
de réfugiés de Jénine, dans les quartiers de
Gaza, les universités palestiniennes - que des monstres.
Autre différence : j’ai été élevé
dans une famille instruite, de la classe moyenne, « naturellement
» orientée à gauche, alors que Tali vient d’une
famille pauvre de Kiryat Gat, qui, traditionnellement, soutient
les partis de droite.
Dans ce sens, mes activités politiques ont été
le résultat d’une longue progression dans une politisation
soutenue par une activité politique transfrontalière
et une tradition historique ; je n’ai aucun mérite
d’avoir réalisé ces actes qui par la suite m’ont
mené en prison. Tali Fahima, par contre, a agi d’elle-même,
sans le soutien des siens, avec sa seule conscience et de sa libre
décision. De plus, elle a agi sans avoir reçu d’enseignement
marxiste, sans tradition communiste, sans camarades de parti et
sans personnalité historique à laquelle s’identifier.
C’est pourquoi Tali Fahima, cette jeune femme de Kiryat Gat,
est mon héros personnel.
Une dernière différence et d’importance : devant
la prison, en plus des quelques vieux suspects traditionnels de
ma génération politique, il y avait des dizaines de
jeunes, certains même très jeunes, des activistes israéliens
pour qui la personnalité et l’action de Tali représentent
un exemple. Des jeunes femmes et des jeunes hommes pour qui refuser
la construction d’un mur qui veut séparer les Juifs
des Arabes, les Israéliens des Palestiniens, est une chose
naturelle. Ces mêmes jeunes gens se confrontent avec l’armée
israélienne sur le mur à Bil’in chaque semaine,
protégent les habitants du sud de la Cisjordanie de la violence
des colons et se rendent à Ramallah malgré les check-points
et les lois qui l’interdisent.
Ils ont à peine entendu parler de la Première Intifada,
ne savent rien de l’OLP et, très certainement, n’ont
jamais lu Edward Saïd. Leur conscience politique s’est
formée seulement à partir de leur bon sens, une chose
qui ne les rend pas moins politiques que les générations
précédentes d’activistes, mais qui les rend
certainement plus déterminés et intransigeants dans
leur combat pour la justice.
Et c’est pourquoi ils s’identifient pleinement à
Tali Fahima, c’est pourquoi elle est leur héros, à
eux aussi.
Alternative Information Center (AIC), Jeudi 4 janvier 2007
http://alternativenews.org/index.ph...
Traduction : JPP
http://www.protection-palestine.org/impression4319.html
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