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L’univers concentrationnaire français: un modèle achevé,
le camp de Drancy, 1941-1944
Maurice Rajsfus

Origine : http://centri.univr.it/resistenza/indesiderabili/rajsfus.htm

Depuis le début des années 1930, la volonté des gouvernements successifs a été forte de contrôler – de plus en plus sévèrement – le travailleurs étrangers, mais également les réfugiés politiques. Des mécanismes d’expulsion sont mis en place.

Avec les décrets-lois du président du Conseil, Edouard Daladier, datés du 2 mai 1938, le gouvernement de la République passe à la vitesse supérieure. Les travailleurs étrangers sont désormais considérés comme des ennemis potentiels et le ministre de l’Intérieur, Albert Serraut, décrit les réfugiés politiques comme des "hôtes irréguliers", avant de stigmatiser "la tourbe étrangère".

Dès le mois de février 1939, avec la défaite de la République espagnole des dizaines de camps d’internement sont édifiés de part et d’autre des Pyrénées pour y enfermer les soldats de l’armée en déroute, en compagnie des combattants des brigades internationales.

En octobre 1939, avec l’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne nazie, le gouverne-ment Daladier-Sarraut décide l’internement des ressortissants allemands présents en France. Or, il s’agit essentiellement de réfugiés politiques antifascistes et de Juifs qui ont fui la répressione raciale. 110 lieux d’internement – au moins un par département – sont ouverts à cet effet. Une seconde vague d’arrestation sera effectuée, en mai 1940, suite à l’offensive allemande.

La voie est ouverte à une répression sur une grande échelle car le système concentrationnaire à la française est prêt à fonctionner, pour le compte du régime instauré par Pétain dans la zone sud de la France. Dès la fin du mois de septembre 1940, une loi sur "le étrangers en surnombre dans l’économie française" permet de peupler des camps de travail qui sont souvent – pour les Juifs – la première étape conduisant à la déportation. Ces mesures concernent rapidement plusieurs dizaines de milliers d’étrangers.

Dans la zone occupée par les nazis, la première vague d’arrestation, contre les Juifs étrangers, se déroule le 14 mai 1941, à Paris. Le soir même, deux camps d’internement pour Juifs sont ouverts dans le département du Loiret – à Pithiviers et à Beaune-la-Rolande. Après la rafle organisée les 20 et 21 août 1941, dans le Xième arrondissement de Paris, c’est l’ouverture du camp de Drancy, dans la banlieue nord de la capitale. Dans l’un et l’autre cas, ce sont exclusivement des policiers et des gendarmes français qui ont conduit cette répression.

Après un premier convoi de déportation, organisé le 27 mars 1942, les "évacuations" comme disent les policiers français et nazis, vont reprendre dès le mois de juin suivant.

La grande rafle des 16 et 17 juillet 1942, conduite également par les forces de police françaises, permet l’arrestation de plus de 13.000 personnes et, pour la première fois, des femmes et des enfants, qui sont enfermés pour moitié au vélodrome d’hiver de Paris et au camp de Drancy préalablemente vidé de ses premiers occupants. Dès lors, les convois de déportation vont se succéder au rytme, parfois, de trois par semaine avec mille déportés par convoi.

Environ 67.000 des 76.000 Juifs déportés depuis la France vont passer par la camp de Drancy, au fil des rafles qui vont se dérouler ensuite en zone non-occupée, en août 1942, après que les camps aient été vidés à leur tour et les internés conduits a leur tour au camp de Drancy, qui s’avère être un véritable centre de triage.

Dans la zone occupée par les nazis, les rafles vont se multiplier contre diverses catégories de Juifs étrangers jusqu’alors épargnés, à l’automne de 1942 (Grecs, Roumains, Hongrois). De grandes rafles comme celle du 11 février 1943, plus particulièrement, contribuent à peupler le camp de Drancy qui se vide ponctuellement car les déportations vont se pousuivre, et ce jusqu’au 17 août 1944, veille de la Libération de Paris.

Le camp de Drancy a cette spécificité qu’il est organisé à l’image des camps de concentrations nazis édifiés à l’Est de l’Europe.Ce sont les internés eux-mêmes qui doivent servir d’auxiliaires aux boureaux. La machine infernale ne peut que fonctionner selon les désirs de la Gestapo, secondée par le forces de l’ordre françaises. L’univers concentrationnaire étant un lieu des déshumanisation absolue, ce système ne peut que répondre à la volonté répressive des SS et de la Gestapo. Ce serà également le cas dans le camp de Maline, en Belgique, et au camp de Vesterbrok, aux Pays-Bas.