Origine : http://www.rue89.com/2008/08/21/affaire-sine-derriere-lantisemitisme-le-non-dit
Il faudrait donc clouer au pilori le caricaturiste Siné.
Depuis la mi-juillet, un spectre hante le petit monde journalistique
: celui de l'antisémitisme. (Etant bien entendu que les Arabes
ne seraient pas sémites…) Certains de nos confrères
sont tellement paniqués à l'idée d'être
accusés d'antisémitisme qu'ils ne cessent d'attiser
des braises qui peuvent s'avérer dangereuses.
Diaboliser Siné permet surtout d'évacuer les scories
d'un sinistre communautarisme favorisé depuis l'arrivée
au pouvoir de Nicolas Sarkozy. Cela va tellement loin que quelques
bons esprits dérapent gravement, jusqu'à utiliser
le mot "race" dans leurs anathèmes.
Au nom du génocide commis par les nazis, il faudrait prendre
les plus grandes précautions dans l'utilisation du mot "juif".
Pourquoi tous ces pourfendeurs de racistes potentiels oublient de
crier leur rage rétrospective lorsque la France des droits
de l'homme n'a jamais envisagé de faire le procès
d'une institution policière qui a livré 76 000 juifs
aux nazis, de 1941 à 1944 ?
Sans pratiquer le moindre amalgame, comment se fait-il que les honorables
pétitionnaires, qui soutiennent l'antiraciste directeur de
Charlie Hebdo ne se pressent pas vraiment pour dénoncer les
centres de rétention administrative qui déshonorent
le pays de la liberté, et sont autant de petits Drancy ?
Pourquoi ces bons citoyens ne font-ils pas barrage de leur corps
pour empêcher ces dizaines de milliers d'abominables expulsions
de sans papiers ? Comment ne pas aborder le non-dit ? Il se dessine
derrière cette crainte de l'accusation majeure d'antisémitisme
la peur panique d'être montré du doigt comme un possible
ennemi d'Israël !
Il faudrait donc conclure que la simple critique du comportement
de l'Etat hébreu envers les Palestiniens, cet "antisionisme",
analysé comme de l'antisémitisme, est devenu un crime
majeur. L'un de ces délits pouvant permettre de présenter
celui qui refuse le dogme obligé comme un véritable
criminel de guerre par destination.
Du calme, mes chers confrères ! Maurice Rajsfus
Journaliste-écrivain rescapé du génocide nazi.
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