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Origine : http://nopasaran.samizdat.net/article.php3?id_article=135
En 1989, avec la chute du Mur de Berlin, puis en 1991, après
l’implosion de l’Union soviétique, de doctes
esprits nous ont expliqué que nous assistions à la
fin de l’histoire. Finalement, les bons apôtres laissaient
entendre tranquillement qu’il s’agissait surtout de
la fin d’une histoire propre à celles des pays non-intégrés
au mode de développement capitaliste. Dans le même
temps, il convenait de faire croire que l’idée même
d’un modèle socialiste authentique n’était
plus à l’ordre du jour.
Débarrassé de l’Union soviétique post-stalinienne,
et de ses satellites, le "Monde libre" pouvait tout à
loisir désormais s’activer à ne pas s’inquiéter
que du profit. Bien sûr, il y avait le Tiers-monde, mais cette
fraction d’humanité n’était pas censée
représenter le moindre danger - sur le court terme - pour
les traders de Wall Street, de la City de Londres ou de la Bourse
de Francfort. Tout n’allait pourtant pas pour le mieux dans
le meilleurs des mondes capitalistes. Certains apprentis refusaient
soudain de continuer à obéir, s’estimant suffisamment
adultes pour refuser désormais la tutelle des Grands et même
du plus Grand d’entre les Grands : les USA. Et ce fut la Guerre
du Golfe, qui vit un Etat prédateur - entouré d’une
coalition de circonstance - écraser sous les bombes la population
d’un Etat dont le dictateur refusait curieusement de mettre
ses pas dans ceux du Grand Frère.
Depuis des décennies, déjà, les grands ainés
américains s’étaient appliqués à
défaire les démocraties, nées parfois de la
décolonisation, pour y installer des dictateurs qu’ils
croyaient tout à leur dévotion. Le Vietnam, écrasé
sous les bombes, ne put finalement que rester sous la botte d’un
modèle stalinien ; le Cambodge de Pol Pot. Sous d’autres
cieux, Pinochet, mis en place au Chili par les soins de Harry Kissinger
et le trust ITT, ne faisait que précéder les sanglantes
dictatures militaires apparues au Brésil, en Argentine ou
en Uruguay. Sans oublier Saint-Domingue ou l’Indonésie
(où le coup d’Eat du général Suharo,
en 1965, provoquait l’assassinat de près d’un
million de communistes ou supposés tels), voir les Philippines.
Tout cela n’allait pas sans quelques ruades de la part de
ces dictateurs, bons à exécuter des putsch militaires
mais incapables de gérer leur pays selon les vœux du
parrain (au sens mafieux du terme, bien sûr). Alors, selon
les nécessités du moment, les gérants du monstre
USA défont ces hommes-liges qui ne sont plus suffisamment
souples à leur gré car ils ont fini par se croire
les patrons naturels de ces Républiques bananières
dont ils ne sont que les gestionnaires temporaires.
La liste est longue de ces guignols sanglants -et nos gouvernants
français connaissent bien la recette - jetés par dessus
bord dès qu’ils deviennent encombrants : les Bokassa,
Amin Dada, Mobutu, Marcos, etc. On remplace ensuite ce petit personnel
pour espérer un répit salutaire et continuer à
pressurer des populations à qui l’on fait croire que
seul le modèle occidental est digne d’intérêt.
Pour la bonne conscience des pays du "Monde libre" apparaissent
alors de nouveaux enemis, taillés sur mesure car issus eux
aussi de la même école. Ce sont les "Etats voyous".
Certes, il fallait bien trouver un adversaire mais sa définition
étant aléatoire, le terme choisi permet d’élargir
la famille des éventuels coupables. Le "voyou",
véritable déviant, ne peut être que le contraire
d’un gentleman. Le "voyou" n’a pas d’honneur.
Finalement, le "voyou" est un terroriste en puissance.
De plus, l’Etat "voyou" se situe nécessairement
au Sud, et n’a pour seule ambition que d’anéantir
les pays riches. Pis encore, le "voyou" est musulman.
De son côté, le "Monde libre" est pur et
sans tache. Il a pour volonté de dominer la planète.
A sa tête, les USA donnent la direction à prendre.
Cela, bien évidement, pour le eul bonheur de l’humanité.
Bien sûr, c’est la Bourse qui impose sa conception du
bonheur mais le progrès est à ce prix. Et chacun connaît
l’importance des investissements nécessaires à
la montée en puissance de la haute technologie. Il est donc
indispensable de codifier les ordres de priorité définis
par le FMI.
Il y a par ailleurs ces régions du globe, abandonnées
à leur triste sort et auxquelles on ne demande que de fournir
des matières premières à vil prix. Ce sont
les pays dits sous-développés. Nous trouvons ensuite
les pays en voie de développement, où l’on s’assure
d’une main-d’œuvre sous-payée pour produire
à des prix de revient permettant des super-profit au stade
de la distribution, dans les démocraties occidentales. A
la suite, nous trouvons les pays émergeants, bientôt
prédateurs à leur tour et qui constituent une clientèle
de choix pour les industries d’armement : les seules sources
de production qui n’ont pas encore été délocalisées.
Si l’on se risque à murmurer que le "Monde libre"
constitue un espace privilégié, vivant aux dépends
du tiers monde, et que chaque bifteck consommé ici participe
de la destruction des cultures vivrières, là-bas,
on nous rétorque immédiatement que notre propos est
excessif. Finalement, inamovible gendarme du monde depuis plus d’un
demi siècle, l’Amérique est généralement
présenté comme le champion des libertés et
le meilleur garant du système démocratique.
Le 11 septembre 2001 ? l’un de ces "voyous", véritable
apprenti-sorcier, a échappé à la surveillance
de ce maître qu’il ne supportait plus de voir chasser
sur les terres musulmanes. Le ciel est tombé sur la tête
de ces maîtres du monde, pourtant déjà prêts
pour "la Guerre des étoiles" (contre quel ennemi
?) et qui avaient du mal à admettre qu’il était
possible de détourner des avions avec de simples cutters.
Très vite également, les USA ont découvert
la guerre bactériologique, et l’angoisse, estimant
tout cela injuste et contraire aux règles de la guerre. Quand
donc les matamores de Wall-Street et du Pentagone comprendront-ils
qu’en mettant en place des dictatures dans le tiers monde,
ils se tiraient une balle dans le genou, avec effets sur le long
terme ?
La nouvelle guerre, sans pertes de vies humaines pour le plus fort,
ne peut que se terminer par une défaite pour ceux qui, sans
la moindre vergogne, ont commencé par parler de "croisade".
Ultime maladresse de la part de ces Américains jusqu’alors
persuadés de leur puissance, et qui sont assez stupides pour
imaginer que les Arabes ont oublié le sens du mot croisade.
Ce qui permet à un Ben Laden de déclarer la guerre
aux "infidèles" et aux Juifs, par Israël interposé.
Une fois de plus, la realpolitic à la sauce américaine
empoisonne la planète, et lorsqu’on se risque à
rappeler que Ben Laden est le fils de la CIA, le contre-feu est
immédiatement trouvé : "Votre propos est obscène
!" Et peu importe que cette nouvelle "croisade" puisse
provoquer une relance de ce racisme antimaghrébin qui empoisonne
l’atmosphère de notre beau pays de France depuis la
fin de la guerre d’Algérie...
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