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Origine :
http://www.rue89.com/2008/11/11/vichy-lettre-ouverte-a-m-hortefeux-gardien-de-l-identite-nationale
Monsieur le ministre,
Votre récente équipée à Vichy est édifiante
à plus d’un titre. Elle nous renvoie à une histoire
que de trop nombreux Français s’efforcent d’oublier,
voire de nier.
En réunissant à Vichy les 27 ministres de l’Intégration
de l’Union européenne, le 3 novembre, vous n’avez
fait que raviver les plaies d’un passé douloureux –en
fait, celui de la France de Vichy, dite Etat français. Lequel
s’est avéré violemment xénophobe et raciste.
Alors, monsieur le ministre, la meilleure façon d’éradiquer
ce passé, c’est de ne pas l’oublier. Pourtant,
vous n’avez pas craint de déclarer récemment:
"On n’en peut plus de cette histoire du passé.
On ne peut pas condamner une ville parce qu’il y a 60 ans
il y a eu Pétain. Maintenant, ça suffit !"
Revenons pourtant à ce passé qui ne passe pas. Dès
l’obtention des pleins pouvoirs par un vote très majoritaire
des deux Chambres, réunies en congrès le 10 juillet
1940 à Vichy, Philippe Pétain et ses ministres allaient
s’efforcer de transformer la France, jadis terre d’asile,
en un pays infréquentable, au nom d’une pseudo-identité
nationale.
Dès le 15 juillet, c’est une loi relative à
la procédure de déchéance de la qualité
de Français. Le 17 juillet, les citoyens français
nés de père étranger n’ont désormais
plus le droit d’exercer un emploi dans l’administration.
Le 22 juillet, c’est une loi portant sur la révision
des naturalisations qui est promulguée. Il y a tout juste
un mois que l’Armistice avec l’Allemagne nazie a été
signé.
Le 27 juillet, c’est la création d’une Commission
chargée de réviser les naturalisations effectuées
après le 10 août 1927. Le 27 août 1940, la loi
Marchandeau du 21 avril 1939 réprimant la diffamation raciale
est abrogée. Le 27 septembre, une loi relative à la
"situation des étrangers en surnombre dans l’économie
française" est promulguée.
Rapidement, dès lors, en zone non occupée, plus de
40 000 travailleurs étrangers sont regroupés dans
des camps de travail forcé, sous la surveillance des gendarmes.
Le 3 octobre, c’est la promulgation de la première
loi de Vichy portant statut des Juifs de France, suivie, le 4 octobre,
d’une loi complémentaire sur les ressortissants étrangers
de "race juive". Le 7 octobre, le gouvernement de Vichy
abroge le décret Crémieux du 24 octobre 1870, qui
attribuait la nationalité française aux juifs d’Algérie,
lesquels sont désormais réduits au statut de l’indigénat.
Ce premier trimestre d’activité du pouvoir installé
à Vichy était bien rempli ! Le pire était à
venir…
Monsieur Hortefeux, vous n’avez pas assez de mots pour protéger
les habitants de Vichy du passé pétainiste de leur
ville. En revanche, on ne vous a pas vraiment entendu réprouver
le rôle des forces de l’ordre françaises dans
la chasse aux communistes et aux gaullistes, de l’été
1940 à l’été 1944. Tout comme vous êtes
resté silencieux sur la contribution active de cette police
aux rafles qui voyaient les juifs comme victimes (et parmi eux 11
000 enfants, dont j’étais), faisant de la France de
Vichy une complice active de l’Allemagne nazie.
Monsieur le ministre, vous permettrez à un fils d’immigré
arrivé clandestinement en France en 1923 de vous faire ces
quelques rappels à une Histoire que nul ne doit oublier,
au risque de la revivre…
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