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Origine : http://infos.samizdat.net/article52.html?var_recherche=Rajsfus
Depuis le mois de septembre 1958, le référendum est
devenu un moyen utile, pour le pouvoir en place, de se faire plébisciter,
ou de tenter de convaincre les citoyens que les prises de décision
importantes leur appartiennent. Cette apparence de suffrage universel
n’est rien d’autre qu’une demande de délégation
de pouvoir pour un seul homme ou un petit groupe censé être
infaillible.
Quoique l’on puisse penser de la nécessité
ou non de participer à une consultation électorale,
il est certain que le référendum a toujours constitué
le piège à con absolu. C’est, à coup
sûr, l’inverse de la démocratie dans la mesure
où les fameux « élus du peuple » n’ont
plus la parole.
Le référendum est la meilleure approche pour faire
se mêler les voix du petit peuple avec celles de la bourgeoisie.
Toujours au nom d’une grande cause nationale. C’est
soi-disant au nom du peuple français que serait décidée
la grande réforme voulue, tout à la fois, par Giscard
et Jospin, en compagnie d’un Chirac qui, quelques mois plus
tôt, jurait que le quinquennat ne pouvait qu’être
contraire aux intérêts de « notre » constitution.
Aujourd’hui, ce serait la volonté du peuple.
De quel peuple s’agit-il ? Celui des sondages ? On ne parle
plus guère de la lie du peuple. Autrefois, on disait «
la canaille ». La « chienlit », comme éructait
De Gaulle et Pompidou, en mai 1968. S’il ouvrait un peu les
yeux, ce peuple, tellement manipulé, pourrait dire clairement
: « Quinquennat ou septennat, on s’en fout ! On ne veut
pas de président du tout ! »
Les socialistes, tout comme les gaullistes, incitent ce bon peuple
à faire un choix qui ne le concerne pas. Cet appel au peuple,
ce plébiscite en fait, relève surtout de la plus basse
démagogie, d’un populisme dégradant pour ceux
qui aimeraient voir les électeurs voter à l’unisson
une délégation de pouvoir infecte. Cette union nationale
autour d’un piège à électeurs consentants
donne surtout envie de vomir.
La démocratie n’a rien à voir avec ces gesticulations.
En la circonstance, le suffrage universel est utilisé pour
nier son intérêt. Il et vrai que tous les régimes
ont été tentés par le plébiscite. Ce
simulacre de consultation populaire, où la voix du peuple
ne trouve jamais son compte ne fait que renforcer les idéologies
dominantes. Le résultat est pire encore lorsque des courants
politiques contraires se retrouvent pour tenter de réaliser
un consensus où la morale ne trouve jamais son compte.
Les gaullistes sont dans leur rôle de faux démocrates,
lorsqu’ils appellent au référendum. Ils ont
toujours usé de ce stratagème pour tenter de faire
taire les oppositions... De leur côté, les socialistes
qui, à l’unisson avec les chiraquiens, nous appellent
à ce vote d’unanimité, n’en sont pas à
leur premier compromis avec leurs supposés adversaires politiques.
Il est vrai que la formule « ennemi de classe » ne fait
plus partie de leur lexique depuis bien longtemps.
Rappelons quelques-uns de leurs hauts faits. Au début du
XXe siècle, il y avait déjà les « possibilistes
», qui, de par leur appellation même, fixaient les limites
de leurs réformismes. Ces pionniers du reniement ouvraient
la voie, large comme un boulevard, pour leurs successeurs. Dès
le 31 juillet 1914, nos socialistes se proclamaient champions de
l’union sacrée avec les pires militaristes. En 1936,
les socialistes au pouvoir - Léon Blum étant président
du Conseil - mettent en place la politique de non-intervention ouvrant
la voie à l’assassinat de la révolution espagnole.
Ensuite, pour avoir voté les pleins pouvoirs à Pétain,
le 10 juillet 1940, à Vichy, la grande majorité des
parlementaires socialistes se déshonorent. En 1944, après
s’être refait une virginité dans la résistance,
nos sociaux-démocrates n’hésitent pas à
gouverner avec les démocrates-chrétiens du MRP, durant
une dizaine d’années. Leur leader d’alors, Guy
Mollet, conduisait la guerre d’Algérie, alors qu’il
venait d’être élu pour faire la paix. C’était
en 1956 mais, deux ans plus tard, après le coup d’Etat
de fait du général de Gaulle, le même Guy Mollet
plaçait le Parti socialiste « à l’avant-garde
de la Ve République ».
Oublions François Mitterrand, ses promesses, ses reniements,
sa « fidélité en amitié » avec
Bousquet, etc. Aujourd’hui, nous sommes gouvernés par
Lionel Jospin, lequel n’est guère différent
de ses devanciers en socialisme bidon. Son programme n’est
pas évident mais il veut nous faire partager cette certitude
que sa seule ambition réside dans l’élection
présidentielle, en 2002.
Quelle différence peut-il y avoir entre ces soi-disant socialistes,
qui ne sont plus avides que de pouvoir, et ces gaullistes mouillés
jusqu’aux oreilles dans des scandales financiers et des affaires
de fraude électorale ? C’est sans doute pour le peu
de distance qui les sépare que ces braves gens nous appellent,
ensemble, à adopter leur modification constitutionnelle sur
la durée du mandat présidentiel. Bien entendu, il
n’est pas question d’entrer dans ce jeu malsain. Il
n’y a qu’une façon de rester cohérent
: refuser de participer à cette mascarade, et le faire savoir,
appeler activement au boycott de cette fausse approche du vote populaire.
Nous pourrions dire, très simplement, aux promoteurs de
cette mascarade : non merci, cela ne nous concerne pas. Ou encore,
très poliment : nous préférons nous abstenir
car nous ne nous sentons pas concernés. Ou même : si
vous précisiez dans le détail l’intérêt
de ce référendum pour l’avenir de la démocratie,
le bénéfice que peuvent en tirer les précaires,
les sans-logis, les chômeurs, les sans-papiers, peut-être
pourrions réfléchir à votre proposition...
Impossible d’attendre de telles réponses. Face au
viol des foules, qui se prépare, une fois de plus, il n’y
a pas de dialogue à attendre. Alors, aux uns comme aux autres,
nous n’avons qu’une réponse à formuler
: allez vous faire voir !
Publié dans le mensuel No Pasaran ! - Septembre 2000.
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