"Nouveau millénaire, Défis libertaires"
Licence
"GNU / FDL"
attribution
pas de modification
pas d'usage commercial
Copyleft 2001 /2014

Moteur de recherche
interne avec Google
Les limites de l’intégration
par Maurice Rajsfus
mardi 1er mai 2001

Origine : http://infos.samizdat.net/article59.html?var_recherche=Rajsfus

Un vent mauvais souffle sur la droite, dite « républicaine », dont on affirme qu’elle plonge ses racines dans la Résistance. Nous avons noté, au cours des récentes élections municipales, à quel point l’électorat traditionnel de l’extrême droite n’a pas manqué de se reporter au second tour sur les candidats de droite. S’agit-il d’un simple reclassement politique ? Bien naïf celui qui se risquerait à l’affirmer. En, effet, si ces braves gens se sont ralliés « à l’opposition nationale », c’est surtout parce que le discours tenu, profondément antisocial et raciste, leur convient parfaitement.

Prenons l’exemple de Toulouse où l’arrivée sur la scène médiatique des Motivé(e)s, sortis des sentiers battus de la politique politicienne, mettait en danger une droite, dite centriste, qui tient la ville depuis plusieurs décennies. Circonstance aggravante, les Motivé(e)s, issus du groupe Zebda, sont surtout d’origine maghrébine. Entre les deux tours, de bons toulousains, un peu plus de droite que réellement démocrates, ne se cachaient pas pour proclamer : « Si les socialistes gagnent avec l’aide des Motivé(e)s, les Arabes vont entrer au « Capitole » ! Et le Douste-Blazy a gagné la mairie. Ce cul-béni à la face de Carême, ce Dorenchiant inconsistant, s’est imposé à une majorité de bons français, affolée à l’idée que l’ordre des choses risquait d’être modifié.

Comment, en effet, accepter que de jeunes français ne s’appellent plus Pierre ou Paul, André ou Marcel, Cécile ou Marie, Geneviève ou Madeleine, Jacques ou Yves, Claude, Dominique, Camille, Denise ou Denis, Christian ou Christiane, etc.

Braves gens, malgré vos lamentations, il vous faudra bientôt accepter de voir se modifier le calendrier des Postes. Ainsi va la vie ? Je me réjouis toujours, en parcourant les colonnes décès et naissances de mon bulletin municipal, en constatant qu’il meurt surtout de vrais Français de France tandis qu’une importante partie des petits français qui pointent le nez à la fenêtre portent surtout des noms imprononçables.

Alors, allons-nous assister à la disparition progressive de ces prénoms bien de chez nous : Juliette et Adèle, Christophe et Alain, Germaine et Martine, Catherine, Sandrine, Odette, Valérie, Sophie et, pourquoi pas Bécassine ?

Il va falloir que la France profonde s’habitue à ce que ses enfants se prénomment Abdallah, Achour, Abdel, Ahmad, Abdelkefid, Amar, Abdelmalek, Abdesslam, Abdelhamid, Ameur, Aban, Anouar, Ahsène, Akli, Abderahmane, Ali, Aziz, Azouzi, Arezki, à moins qu’il ne s’agisse de Assia, Aziza, Amira, Adra, Awa, Aïcha. Hélas ! Hélas ! Nous ne serons plus chez nous !

Et pourtant, la mutation ne fait que commencer. Même si ne sont pris en compte, ici, que les prénoms maghrébins. Il y a aussi ceux des Africains noirs, des Malgaches, des Chinois, des Indous, etc. Il faudra moins d’une génération pour que dans les assemblées municipales, départementales, régionales ou nationales, les Richard, Georges, Marc et Maurice côtoient les Brahim, Bachir, Boudjema, Bellahouel, Bellaïd, Chérif, Daho, Djelloul, Didouche, Djamel, Djillali, Driss, Elias ou Embarek. De plus, comme nous sommes désormais à l’ère de la parité Solange, Antoinette, Nathalie, Claire, Monique ou Elisabeth se retrouveront sur les bancs de ces assemblées avec Baya, Badra, Chafia, Cherifa, Djalila, Djamila, Fadila, Farida, Fatima, Houria, Hassiba, Khalfa, Khalida...

Assez ! diront ceux qui s’estiment être les héritiers de Charles Martel - qui a arrêté les Arabes à Poitiers en 732 -, et qui estiment que les invasions barbares nous menacent toujours. Assez surenchérissent les nostalgiques d’un autre temps, pour qui la guerre d’Algérie n’est toujours pas terminée - en France.

Dans son livre La guerre d’Algérie (Julliard, 1961), Jules Roy donne la parole à un pied-noir. Pas à un de ces colons qui, depuis cent trente ans, faisait « suer le burnous », mais à un humble cheminot, salarié, exploité. Le propos est sans équivoque et donne envie de vomir : « ... les Arabes sont une sale race et notre erreur a été de les traiter avec humanité. Ils ne sont bons à rien, on ne peut rien leur confier sans se faire voler. Ils sont rebelles à tout progrès social et l’instruction qu’on leur donne ne sert qu’à vous bafouer... »

Au secours ! Une fois de plus, il semble que depuis la fin de la guerre d’Algérie, rien n’a changé. Avec cette certitude que pour nos policiers républicains, la traque aux « Bougnoules » doit se poursuivre dans les banlieues des villes. Pour chacun de ces policiers - les plus jeunes étant entrés dans la Grande Maison au niveau bac ou bac +2, l’équation est simple : Algérien = Arabe (même s’il est kabyle). Arabe = Musulman. Ensuite, tout va de soi : Musulman = Islamiste, et Islamiste = terroriste. En fait, le raisonnement est souvent bien plus simpliste : jeunes nés de l’immigration maghrébine = racaille !

Soyez-en persuadés, Farid, Fouad, Foudil, Ghassan, Gwendouz, Hassan, Hafid, Hamadou, Hakim, Hamdane, Hamdi, Hocine, Hassène, Habid, Hammou, Houari, Idir, Kaddour, Karim, Kamel, Khader, Larbi, Lamine, Lakhdour, Lahlou, Lamri, Lofti, Mahmoud, Mabrouk, Maleki, Mahieddine, Mahfoud, Meziane, Mouloud, Messaoud, Mokhtar, Mouammar, Mohamed, Mohed, Madjid, Malik, Mohan, Mani, Mustapha, Mounir, Mostefa, Magid, Mourad, Mousse, Moussaoui, Moubarak, ceux qui prétendent vous « intégrer » ne sont pas nécessairement vos amis. Comme on disait jadis, avec le gros bon sens populaire : « ceux-là sont francs comme des chevaux qui reculent... ».

Ah, les Français ont bien aimé vos pères ou vos grands pères lorsque la patrie avait besoin d’eux comme chair à canon, au cours des guerres passées - 1870, 1914, 1939. La patrie des droits de l’homme n’était pas économe du sang de Nabil, Norcine, Nacef, Omar, Oualid, Rabah, Redha, Rachid, Ramdane, Saïd, Smaïn, Slimane, Sid, Salem, Salim. Qu’importaient les veuves qui pleuraient au pays, la France se défendait, où se libérait, selon les cas. Saviez-vous qu’en janvier 1945, le général de Lattre de Tassigny avait décidé que ses troupes prendraient Colmar le jour de son anniversaire. Ce caprice avait coûté la vie à 3000 soldats français qui, en majorité, se prénommaient Tahar, Taleb, Tawfik, Tarik, Tayeb, Yacef, Zighoud, Zine, Zoubir, et bien d’autres.

Depuis la fin des années soixante-dix, ceux qui ont largement contribué à reconstruire la France, et participé à son développement économique, nous ont offert Lila et Lamria, Lalla, Leïla, Malika, Nadia, Nabila, Mounira, Rachida, Salima, Samira, Samia, Sarra, Yamina, Zohra et Zahia. Il faudrait être aveugle pour ne pas s’en apercevoir et stupide pour refuser à admettre qu’elles vont, elles aussi, repeupler la France dont la courbe démographique suit une mauvaise pente...

Publié dans le mensuel No Pasaran ! - Mai 2001.