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Association UN PROJET POUR TOUS
Association d’aide aux orphelins handicapés du Vietnam. Miguel BENASAYAG, vice-président :
les raisons de son engagement
lundi 18 mai 2009

Origine : http://malgretout.collectifs.net/spip.php?article171


Extrait d’une interview 1. Les motivations de votre engagement au sein de cette association ?

Cette association est née d’une histoire d’amitié et de dialogue avec Agnès Munier. Lorsqu’après l’adoption de son fils vietnamien, elle m’a fait partager son ressenti sur les conditions de vie des orphelins handicapés vietnamiens, nous n’avons pas voulu rester inactifs. Notre volonté était forte d’agir de façon concrète, même de façon restreinte. En effet, nous sommes à une époque où la complexité des grands enjeux et la difficile résistance aux valeurs triomphantes de consommation et d’individualisme, incitent plutôt à la résignation, la tristesse et la passivité.

Par ailleurs, Le handicap relève de questions normatives que l’on préfère taire. Témoigner, ne pas être complice, est une façon de résister avec efficacité.

Enfin, l’adoption n’est pas une démarche sans effet. Il y a comme un arrachement des enfants à un pays, une culture, une histoire. Pouvoir donner quelque chose en retour évite peut-être de marquer une frontière trop abrupte. J’ai donc co-créé cette association avec Agnès Munier (présidente de l’association), avec qui je partage beaucoup de valeurs comme celle-ci "la vie ne peut pas être une simple question personnelle".

Le projet initial reposait donc sur la création d’un aller-retour avec le pays d’origine des enfants afin de consolider un pont entre les 2 pays, les 2 cultures : des liens de solidarité et non de simples projets personnels.

2. Pourquoi cette association ? il y a tant de sollicitations de toutes parts...

Je ne pense pas qu’on s’engage dans des associations en suivant la logique du supermarché. On s’engage toujours par rapport à des parcours et à des affinités électives. En ce qui me concerne, avant mon engagement auprès d’Agnès Munier, l’adoption d’enfants dans les pays "périphériques" faisait déjà partie de mes préoccupations. 3. En tant que psychanalyste, quelles sont les orientations que vous avez données aux actions pour l’accompagnement des enfants dans leur quotidien ?

Grâce à Agnès Munier, j’ai découvert l’existence de tous ces enfants laissés-pour-compte, car non adoptables, et qui voient d’autres enfants (valides), "heureux élus", partir vers une vie certainement idéale et confortable. C’est selon nous une véritable injustice.

Pour ces enfants condamnés à grandir à l’orphelinat sans distraction, nous avons donc programmé une base d’activités minimale et des stimulations. L’objectif de cet accompagnement étant de permettre à ces enfants aux handicaps différents et parfois très lourds de profiter des réseaux de solidarité.

4. Depuis la création de l’association en 2006, quelles sont les évolutions que vous avez notées dans le quotidien des enfants ?

Travaillant en étroite collaboration avec Agnès Munier, je peux dire que le changement est radical pour des enfants qui vivaient sans presque aucune stimulation, sans grands échanges affectifs, et développaient ce que du point de vue psychanalytique, l’on connaît sous le nom "d’hospitalisme" ; c’est-à-dire la réduction de plus en plus forte des activités vitales par manque d’un environnement adapté.

5. Quelles actions avez-vous menées pour soutenir l’association ?

Mes contacts avec le magazine Témoignage Chrétien, ont été l’occasion de communiquer sur ce projet, et de mettre également en lumière un prêtre vietnamien exceptionnel qui oeuvre de toutes ses forces pour les plus faibles et les plus démunis de son pays.

6. Quelles sont selon vous les priorités à donner aujourd’hui à l’action de l’association ?

Tout d’abord, continuer dans le sens donné par la présidente : c’est-à-dire le développement d’activités concrètes sur le terrain.

Mais nous avons maintenant un défi plus complexe : développer des modes de solidarité active nouveaux, qui ne tombent pas dans le paternalisme ou pire dans un rapport Nord-Sud. Ainsi, je n’approuve pas les individus qui font du tourisme social.

Il s’agit plutôt de développer des liens de solidarité qui modifient notre propre vie ; ces modèles de solidarité restent encore à penser...

Pour conclure, une pensée ouverte sur nos pratiques :

Nous avons besoin de tout type d’aide mais aussi de développer une pensée critique exigeante par rapport à nos pratiques. Nous devons développer une véritable responsabilité qui nous permet de poser la question des conséquences de nos actes dans le pays d’adoption comme dans le pays des adoptants.

Aujourd’hui, des couples provenant de pays occidentaux considèrent comme un droit acquis le fait d’avoir des enfants quand ils le désirent, avec les différentes méthodes (Procréation Médicalement Assistée, jusqu’à imaginer le clônage...)

L’autre possibilité d’assouvir son désir d’enfant, réside dans l’adoption dans des pays pauvres, pratique qui connaît un grand développement aujourd’hui. Nous devons sortir de la logique "puisque j’ai les moyens, je fais..."

Il s’agit tout simplement d’être citoyen et de comprendre que nos actes s’inscrivent dans des processus sociaux et historiques concrets. Pour ma part, je travaille dans ma pratique clinique, les effets négatifs de l’ignorance de la part de parents adoptifs dans le monde, de cette réalité complexe. Il faut comprendre que le monde et la société ne commencent pas au délà du mur de notre petite maison ! Le monde existe sous des formes précises, dans chaque relation, dans chaque maison, dans chaque histoire.

L’adoption à l’étranger est plus complexe que celle des enfants en France ; car dans ce dernier cas, nous sommes plus dans des circuits de solidarité classique : un enfant sans famille est incorporé à une famille. L’adoption à l’étranger pose des problèmes que nous ne voulons assumer de façon responsable.