Origine : http://fr.wikipedia.org/wiki/Coop%C3%A9rative_Longo_Ma%C3%AF
La coopérative Longo Maï (de la formule provençale
exprimant un souhait « que ça dure longtemps »[1])
est une coopérative agricole d’idéologie alternative,
laïque, rurale et anticapitaliste, fondée en 1973, à
Limans (Alpes-de-Haute-Provence), qui a essaimé en réseau
depuis.
Histoire
Dans la foulée de Mai 68, des jeunes issus des groupes étudiants
autrichien Spartakus, réfugiés en Suisse suite à
des affrontements avec les groupes néonazis, se lient aux
étudiants suisses du groupe Hydra[2],[3],[4] ou Hydra7 selon
Humanisme pur[5]. Ces étudiants luttaient contre les groupuscules
néonazis et menaient de nombreuses actions militantes (contre
l’Église, l’armée, les dictatures, en
faveur des réfugiés, des ouvriers), soutiennent les
ouvriers qui reprennent en autogestion leur usine à Schirmeck[5].
Grâce à une collecte de fonds, ils achètent
un domaine à Limans[3], d’inspiration anarchiste crée,
lors d'un Congrès fondateur à Bâle, une communauté
rurale auto-gérée[3].
Le programme de la communauté est formulé par Roland
Perrot, qui déserta durant la guerre d'Algérie et
connaissait personnellement Giono et son expérience de commune
libre au Contadour dans les années 1930[5] ; il s’inspire
des idées fouriéristes[3], tout en incluant l’antimilitarisme
et le pacifisme, l’anticapitalisme, l’absence de représentant
politique, l’égalité entre hommes et femmes[3]
; le fonctionnement se base sur l’autosubsistance, la vie
commune, les productions artisanales et agricoles, la gestion commune
de l’énergie, de l’eau, l’absence de salaire[2].
Le groupe fonde en 1973 la première communauté agricole
sur un terrain de 270 hectares à Limans, près de Forcalquier
dans les Alpes de Haute-Provence, n’ayant pu s’installer
dans un pays germanophone à cause de la forte opposition
des gouvernements suisse, allemand et autrichien[5]. La colline
où elle s’installe, Zinzine, n’a qu’une
ferme en ruine, Grange-Neuve, et un pigeonnier pour les abriter[5].
Dotée à l'origine d'un statut de SCOP (Société
coopérative de production), elle passe ensuite à un
statut mixte mêlant Groupement foncier agricole, coopérative
et EARL (Exploitation agricole à responsabilité limitée).
À partir de 1976, les membres recherchent des terrains et
achètent des maisons et immeubles divers, ce qui suscite
des réactions hostiles chez les habitants des environs.
Les coopératives Longo Maï ont organisé diverses
campagnes de solidarité internationale, notamment en faveur
des résistants aux dictatures[2] :
* l'accueil de 2 000 exilés chiliens, menacés par
le putsch de Pinochet, dans des communes suisses ;
* des actions de solidarité avec les Indiens Guaranis au
Paraguay ;
* le soutien des opposants du Nicaragua en lutte contre le dictateur
Somoza, notamment par la création d’une coopérative
de réfugiés nicaraguayens au Costa Rica, encore active
aujourd’hui pour la défense de la petite paysannerie[3]
;
* la création du Comité européen de défense
des réfugiés et immigrés (CEDRI) ;
* du Forum civique européen (FCE) pour le soutien des processus
de démocratisation des pays de l’Est ;
* le soutien au Syndicat des ouvriers de la campagne (SOC) qui
défend les travailleurs saisonniers sans papier en Andalousie
(El Ejido) ;
* soutien à la création d’une coopérative
à Madagascar[3] ;
* campagne en faveur de l’opposant portugais Otelo de Carvalho[6]
;
* actions diverses en Afrique[6].
Établissements
Dix coopératives Longo Maï fonctionnent en réseau[7]
:
* en France :
o à Limans ;
o près de Briançon (Hautes-Alpes), la filature de
Chantemerle, à Saint-Chaffrey, traite 12 à 15 tonnes
de laine par an ;
o le Mas de Granier, au village de Caphan, à Saint-Martin-de-Crau
(Bouches-du-Rhône) ;
o à Treynas, commune de Chanéac, en Haute-Ardèche
(vingt adultes et douze enfants en 1999[3]) ;
o la SCEA Dyonisos, à la Bastide des Jourdans ;
o la Cabrery, dans le Luberon : viticulture et oliviers[8] ;
* à Ulenkrug, Mecklembourg, en Allemagne ;
* le Hof Stoppar à Eisenkappel en Carinthie, en Autriche
(17 ha plus 25 ha loués, élevage de brebis[5]) ;
* la ferme le Montois dans le Jura suisse (12 ha, élevage
d’oies et de brebis[5]) ;
* à Oujgorod, en Transcarpathie, Ukraine, avec une école
de français[6] ;
* au Costa Rica.
Le siège de la coopérative est à Bâle,
d’où sont organisées les campagnes de collecte
de dons (environ cinq millions de francs annuels dans les années
1990)[3] 10 MF dette.
La coopérative a créé plusieurs médias
de communication[7] :
* la radio libre Radio Zinzine : fondée en 1981 et nommée
d’après la colline où s’est établie
la communauté, fréquemment menacée d’interdiction
d’émission. Elle est affiliée à la Fédération
européenne des radios libres[5]) ;
* une agence de presse, l’Agence indépendante d'information
(AIM)[3], à laquelle collaborent une centaine de journaliste[6]
;
* le journal Archipel ;
* le journal du Forum civique européen ;
* l’hebdomadaire Le Père Lapurge ;
* elle édite également quelques livres.
Elle gère un village de vacances, au hameau des Magnans[5]
(ouvert à tous), un camping destiné à ses activités[7]
Fonctionnement de la communauté
La communauté s’administre en coopérative auto-gérée.
Tous les biens financiers sont mis en commun. Les ressources propres
de la communauté sont l’élevage, la production
céréalière et maraîchère ; elle
pratique elle-même ses coupes de bois. La filature de laine
est alimentée par l’hydroélectricité
; la chaleur est fournie par l’énergie solaire[7].
Chacun travaille, les changements de tâches sont possibles,
le programme de chaque journée est décidé le
soir à la veillée ou le matin par vote à main
levée[5]. Cependant, le travail s’organise entre des
groupes constitués par affinités et par compétences[5].
À la fin des années 1990, elle abriterait 200 adultes
et une centaine d’enfants, répartis entre deux grandes
fermes et un hameau[7], ces membres étant d’une quinzaine
de nationalités différentes[5].
À Limans, elle possède 280[2] à 300 ha, dont
80 labourables. Elle utilise l’eau de la rivière. Les
matériaux de construction utilisés sont la pierre
locale et la brique crue[7]. Elle commercialise des produits cosmétiques,
des produits alimentaires bruts ou transformés, des vêtements.
La coopérative est soutenue par une association basée
à Bâle, qui collecte des fonds et emploie cinq personnes.
Le budget annuel de l’ensemble des collectivités est
estimé à plusieurs dizaines de millions de francs
suisses à la fin des années 1990[5], Le Monde donnant
des recettes de 5 millions en 1996[6]. La coopérative de
Limans dépend à environ 50 % de ces aides et subventions,
la moitié de ses besoins étant couverte par sa propre
production (années 2000)[9]. Après des dépenses
excessives les premiers temps, couvertes par des emprunts (32 millions
de francs suisses de dettes en 1979[6]), l’association a assaini
les comptes, augmenté les collectes de dons et remboursé
ses dettes dans les années 1980-1990[8] (dette de 9 millions
en 1995[6]).
Des fêtes rassemblent la communauté[5] :
* la fête des moissons ;
* la nuit du 4 août, en commémoration de la nuit
du 4 août 1789 (abolition des privilèges) ;
* la fête de la radio, fin juin ;
* un rassemblement des membres des différentes coopératives
fin décembre ;
Controverses et critiques
La coopérative a constitué un patrimoine immobilier
important : outre les domaines agricoles assez vastes, elle possède
des gîtes ruraux, un appartement à Paris qui sert de
point de chute[5]. Ces achats et les premiers contacts peu diplomatiques
avec les élus locaux ont creusé un fossé avec
les habitants des environs, ce qui a modifié les pratiques
dans les implantations suivantes, mieux préparées.
De même, le militantisme (appels à la désobéissance
civile, l’accueil de réfugiés, y compris d’Europe
de l'Est, de déserteurs), provoquent l’hostilité
des gouvernements qui luttent parfois activement contre les coopératives
:
* plusieurs procès pour outrage de l’État
autrichien, qui échouent ;
* traquenard mis en place par la police allemande ;
* arrêté d’expulsion du territoire français,
annulé par le Conseil d'État en 1979. Cet arrêté
provoque un débat dans les médias, qui amène
des visites et le recrutement de membres français, puis une
campagne de presse hostile se déclenche en 1979-1980[5].
Le fondateur, Roland Perrot, aurait eu des pratiques autoritaires
; les membres sont exploités : le travail est dur et non-rémunéré
directement, la coopérative est surveillée et défendue
des intrusions ; la nourriture distribuée serait insuffisante.
Prévensecte accuse même la coopérative de pratiquer
la mise en propriété commune des enfants (par refus
de l’autorité parentale), la coopérative ayant
une école privée interne. Cependant, les règles
communes très strictes sont assouplies en 1982[10].
Les règles de fonctionnement sont l'objet de critiques de
la part de groupes de surveillance des sectes, notamment le rapport
parlementaire de 1996. La coopérative n’a cependant
aucune activité religieuse ou assimilable, et œuvre
dans les domaines politique et économique seulement, selon
Maurice Duval[11],[10]. Le journal conservateur Le Figaro considère
également la coopérative comme une secte[3].
Ces critiques ont pu servir de justification à des descentes
de police, qui n’ont jamais rien donné[3], la plus
importante étant celle du 29 novembre 1989 (deux cent CRS
et gendarmes mobiles, avec renforts de la DST et survols en hélicoptères[5]),
à la demande du gouvernement allemand : le matériel
radio est cassé, une seule personne arrêtée
est relâchée dans la journée[5]. Ce jour-là,
les Renseignements généraux locaux ont refusé
de participer à la descente[6]. La communauté est
aujourd’hui mieux acceptée ; elle a aussi évolué
dans ses pratiques, l’amour libre (la vie de couple était
interdite) et la famille élargie, de rigueur dans les années
1970, sont moins pratiqués qu’auparavant[3] ; cet aspect
mise en commun des enfants peut être relativisé, car
la coopérative a très activement milité pour
la réouverture de l’école de Limans, les adolescents
sont envoyés au collège de Forcalquier ou au lycée
de Digne[5]. Ces accusations de moins en moins bien étayées,
ont donné lieu à des procès, dont le dernier
est gagné en 1995 par Longo Maï[12].
Opposants et soutiens
Liste d’opposants :
* Roger Ikor
* ministre français de l’Intérieur, Marcellin
* Françoise d'Eaubonne
Soutiens[6] :
* l’écrivain régional Pierre Magnan, d’abord
sceptique (il y fait allusion dans son roman La Folie Forcalquier)
;
* Huguette Bouchardeau, du PSU ;
* Michel Cardoze ;
* Georges Duby ;
* René Dumont ;
* Jean-Pierre Faye ;
* Bernard Langlois ;
* Jean-Pierre Pelrin, voisin ;
* Jean Ziegler ;
* Friedrich Dürrenmatt
Voir aussi
Publications
* Luc Willette, Longo Maï, vingt ans d'utopie communautaire,
Syros, Paris, 1993, ISBN 978-2-86738936-8
* Jacques Berguerand, « Longo Maï : de la ferme à
l’engagement politique », et de Marc Ollivier, «
Une expérience internationale de recherche autogérée
: les ‘chercheurs de survie’ du réseau ‘Longo
Maï’ », publié dans l’ouvrage collectif
Produire de la richesse autrement : usines récupérées,
coopératives, micro-finance,… les révolutions
silencieuses, PubliCetim n°31, octobre 2008, éditions
du CETIM, Genève. ISBN 2-88053-059-5
* Beatriz Graf, Longo Maï : révolte et utopie après
mai 68. Vie et auto-gestion dans les coopératives européennes,
Thésis, 2006
* Gilbert-François Caty, Les Héritiers contestés
: Longo Maï et les médias d'Europe, Anthropos ;
* Eaubonne, Vingt ans de mensonge ou la baudruche crevée,
éditions de Magrie, 1994
Liens internes
* Phalanstère
* Radio Zinzine
* Roland Perrot
Liens externes
* Les coopératives Longo Maï en France : autogestion
et solidarité internationale, fiche de lecture CETIM Suisse]
* Les coopératives Longo Maï
* Longo Mai - Une mise en pratique de l’autogestion dans
le secteur agricole depuis 35 ans (Réseau No Pasaran)
* Une expérience internationale de recherche autogérée
: les « chercheurs de survie » du réseau «
Longo Maï », Fiche de lecture RITIMO
Notes
1. ? Macao, Cotignac, Région, Provence, Littérature
et…fantaisie !, [1] [archive], consulté le 4 mars 2009
2. ? a? b? c? d? Julie Duchâtel, Les coopératives
Longo Maï en France : autogestion et solidarité internationale,
en ligne [2] [archive], publié en juillet 2008, consulté
le 4 mars 2009
3. ? a? b? c? d? e? f? g? h? i? j? k? l? m? Estelle Nouel, Longo
Maï une communauté agricole, [3] [archive], publié
en 1999, consulté le 4 mars 2009
4. ? Ingrid Carlander, À Longo Maï, réussites
et tâtonnements, Manières de Voir no 103, février-mars
1979 ; article initial : Les irréductibles de Longo Maï,
Le Monde diplomatique, mars 1996. p 78
5. ? a? b? c? d? e? f? g? h? i? j? k? l? m? n? o? p? q? r? s?
Michel Bernard, Les coopératives Longo Maï, en ligne
[4] [archive], publié en 1995, consulté le 4 mars
2009
6. ? a? b? c? d? e? f? g? h? i? Ingrid Carlander, À Longo
Maï, réussites et tâtonnements, Manières
de Voir no 103, février-mars 1979 ; article initial : Les
irréductibles de Longo Maï, Le Monde diplomatique, mars
1996. p 80
7. ? a? b? c? d? e? f? Réseau français des écovillages,
Longo Mai, en ligne [5] [archive], consulté le 4 mars 2009
8. ? a? b? Ingrid Carlander, À Longo Maï, réussites
et tâtonnements, Manières de Voir no 103, février-mars
1979 ; article initial : Les irréductibles de Longo Maï,
Le Monde diplomatique, mars 1996. p 79
9. ? Puck, Une mise en pratique de l’autogestion dans le
secteur agricole depuis 35 ans, No Pasaran, en ligne [6] [archive],
publié en 2008, consulté le 4 mars 2009
10. ? a? b? Prévensectes, Notice Longo Maï [archive],
consultée le 4 mars 2009
11. ? Maurice Duval, « Le discours anti-secte comme support
de l'idéologie néolibérale » [archive],
CICNS, consulté le 4 mars 2009.
12. ? Sectes info [archive]
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