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Origine : http://www.nouvelobs.com/dossiers/p2130/a275383.html
En 800 pages, une quarantaine d’experts de dix nationalités
différentes - psychiatres, historiens ou philosophes - s’attaquent
aux dogmes psychanalytiques et mettent en doute son efficacité
thérapeutique. Un livre iconoclaste qui suscite la discussion
et secoue les tabous. Extraits.
Une efficacité douteuse
Patrick Légeron, psychiatre
Chacun le sait, les Français sont champions du monde de
la consommation d’antidépresseurs et de tranquillisants.
Ce que l’on sait moins, c’est la place prépondérante
qu’occupe la psychanalyse dans notre pays. Les plus récentes
enquêtes indiquent qu’environ les trois quarts des psychiatres
français se réfèrent aux théories psychanalytiques
dans la prise en charge de leurs patients. […]
Ces deux exceptions françaises ont un point commun important:
la faible reconnaissance et la faible implantation des thérapies
cognitivo-comportementales (TCC) dans notre pays. La publication
en février 2004 d’un rapport de l’Inserm sur
l’évaluation des psychothérapies a été
un véritable pavé jeté dans la mare des psys.
Certains se sont étonnés de découvrir que,
à l’analyse d’un millier de travaux et recherches
scientifiques rigoureux sur les traitements psychologiques des troubles
mentaux, il apparaissait que la psychanalyse n’avait pas fait
la preuve d’une grande efficacité. D’autres ont
crié au scandale et reproché à l’Inserm
d’avoir participé à une «escroquerie scientifique»
ou d’avoir été «manipulé par les
comportementalistes», en ignorant superbement qu’au
niveau international de nombreux rapports allaient dans le même
sens (par exemple le rapport de l’Organisation mondiale de
la Santé publié dès 1993).
Tous ceux qui font de la «médecine basée sur
les preuves» leur référence savent depuis plus
de dix ans que les TCC sont quasiment les seuls traitements psychologiques
validés scientifiquement pour les troubles dépressifs
et la grande majorité des troubles anxieux, pathologies pour
lesquelles justement les psychotropes sont très (trop?) largement
prescrits. […] La France est devenue ainsi quasiment le seul
pays avancé où, institutionnellement, entre le Prozac
et le divan, il n’y aurait place pour rien!
Cette situation exceptionnelle est favorisée par un étonnant
retour de l’obscurantisme dans la psychiatrie française.
Le ministre de la Santé annonce à Paris, le 5 février
2005, devant un parterre de psychanalystes lacaniens, qu’il
fait retirer du site de son ministère le rapport de l’Inserm
(un an après sa publication), en ajoutant: «Vous n’en
entendrez plus parler!»
L’enfant cobaye
Didier Pleux, docteur en psychologie du développement
C’est avec Françoise Dolto que le discours psychanalytique
s’intéresse à l’enfant «normal».
On quitte le discours d’expert à expert pour un discours
grand public. Là est le danger. Les idées qui n’étaient
que des hypothèses issues de la psychopathologie vont être
assenées comme des vérités éducatives.
[…] Que dit la psychanalyse sur l’enfant? L’Inconscient
– et ses stades d’évolution – est le même
pour tous. Tout le monde a entendu parler des stades oral, anal,
phallique. […] Qu’est-ce qui nous dit que ces hypothèses
sont fondées? Où sont les observations, les études
qui valident des propositions? Quid de la socialisation de l’enfant,
sous-entendue pendant la «période de latence»:
n’est-elle pas un tournant important de l’évolution
de l’enfant dans ses rapports à l’autre? Idem
pour l’acquisition du jugement moral, l’époque
des apprentissages scolaires, etc. C’est cela qui choque:
tout ce qui est réel est mis au second plan, ce qui importe
est de signifier que la construction psychologique se fait en dehors
de la réalité, inconsciemment, à des moments
clés de l’évolution sexuelle, à des stades
où tout ratage générera refoulement, donc pathologie.
La mère coupable, forcément coupable
Violaine Guéritault, docteur en psychologie
Freud concevait la femme comme une triste copie de l’homme,
inexorablement obnubilée par le «complexe de castration».
Très rapidement, dans son évolution, elle découvre
le manque affreux qui la caractérise: l’absence de
pénis. […] Au-delà de la sexualité, c’est
en fait l’ensemble de la personnalité féminine
qui se trouve profondément marqué par cette absence.
Freud décrétait (en 1918) que la jalousie caractérise
pleinement la femme: «Derrière l’envie de pénis
se révèle l’amertume hostile de la femme envers
l’homme, amertume dont les productions littéraires
des "émancipées" présentent les signes
les plus évidents.»
[…] Pour Freud, le malaise généré par
l’absence de pénis va poursuivre la femme jusque dans
la maternité. En fait le «désir d’enfant»
vient relayer le «désir du pénis» ou s’identifier
à lui. Autrement dit, une femme veut avoir un bébé
pour remplacer le pénis qu’elle n’aura jamais.
[…] De fait, c’est au moment où elle devient
mère qu’elle s’enlise dans ses névroses.
Le malaise est d’autant plus grave qu’il y a des répercussions
directes sur le développement psychique des enfants. «Madame,
quoi que vous fassiez, vous ferez mal!», aurait un jour décrété
Freud à une jeune mère. La sentence est tombée,
enfermant ainsi les mères dans un rôle d’agent
morbide où la culpabilité est sans cesse au rendez-vous.
Quoi qu’elles fassent ou ne fassent pas, elles se retrouvent
dans une situation toujours perdante car dans le freudisme l’omission
et l’action sont aussi pathogènes l’une que l’autre.
[Or] la psychologie moderne a compris que le psychisme humain n’était
pas un terrain de jeu sur lequel on peut se permettre d’énoncer
des pseudo-vérités sans preuves tangibles. Le drame
que des centaines de mères d’enfants schizophrènes
et autistes ont vécu pendant des années, accusées
des pires méfaits sur la seule foi d’une poignée
de psychiatres, est d’autant plus inadmissible que ces troubles
graves sont en grande partie d’origine neurophysiologique.
Quelles conséquences tragiques la culpabilisation à
outrance de ces mères a-t-elle pu avoir? Combien de mères
ont vécu dans la conviction qu’elles étaient
des monstres incapables d’amour vrai à l’égard
de leurs enfants? Combien de drames familiaux et de vies gâchées?
Des hypothèses non vérifiées
Frank Sulloway, historien des sciences
J’ai abordé Freud comme j’aurais abordé
l’un des grands esprits du xxe siècle, quelqu’un
de comparable à Copernic et à Darwin, ainsi qu’il
le prétendait lui-même. Mais plus j’étudiais
le développement de la psychanalyse, plus je découvrais
qu’elle était fondée sur des hypothèses
scientifiques qui dataient du xixe siècle et qui avaient
été définitivement réfutées.
[…] J’en suis venu à voir la psychanalyse comme
une sorte de tragédie, comme une discipline passée
d’une science très prometteuse à une pseudo-science
très décevante. La science est un processus qui comprend
deux étapes. La première consiste à formuler
des hypothèses et, à ce moment-là, il importe
peu que ces hypothèses soient vraies ou fausses. En d’autres
termes, Freud pouvait tout à fait avoir des hypothèses
erronées. Ce n’est pas là le point où
la science trébuche, c’est lors de la seconde étape,
lorsqu’il s’agit de tester ses hypothèses et
de les abandonner s’il s’avère qu’elles
sont erronées. On ne peut se permettre de se tromper lors
de la première étape que si l’on est extrêmement
rigoureux lors de la seconde. Freud avait développé
une série d’hypothèses tout à fait convaincantes
et plausibles pour son époque, mais il n’a jamais considéré
cette seconde étape clé de la procédure requise
par une vraie science. […] La controverse autour des théories
de Freud n’a fait qu’empirer les choses. Qu’a
fait la psychanalyse à ses débuts, quand elle a été
en butte aux critiques croissantes des psychiatres, des psychologues
et des biologistes à qui Freud devait tant du point de vue
intellectuel? Elle a réagi de manière régressive
en privatisant ses mécanismes de formation et en s’abstrayant
du même coup de cette tradition si fructueuse qui a vu le
jour avec la révolution scientifique et qui consiste à
tester les théories en appliquant des techniques institutionnalisées
d’autocritique. Au lieu de cela, la psychanalyse en est revenue
à la scolastique et à la tradition médiévale,
en créant de petits instituts privés au sein desquels
le savoir pouvait être enseigné de façon dogmatique
et où l’on apprenait aux élèves à
surmonter leurs «résistances» à la théorie.
Freud, médecin imaginaire
Mikkel Borch-Jacobsen, philosophe et historien
Dans sa conférence du 21 avril 1896 dans laquelle il proposait
de ramener les symptômes de l’hystérie à
des séductions sexuelles précoces, Freud annonçait
avec aplomb: «J’ai pu, dans quelque 18 cas d’hystérie,
reconnaître cette corrélation et, là où
les circonstances le permettaient, la confirmer par le succès
thérapeutique.» Deux semaines plus tard, Freud avouait
en privé à Fliess qu’«aucun [traitement]
n’est achevé». Au mois de décembre: «A
ce jour, aucun cas n’est fini.» En mars de l’année
suivante: «Je n’ai pas encore fini un seul cas.»
Et, dans sa fameuse lettre du 21 septembre 1897, Freud expliquait
à son ami que la première des raisons pour lesquelles
il en était venu à douter de sa théorie de
la séduction était «la déception continuelle
dans mes efforts pour faire arriver la moindre analyse à
une conclusion véritable». Il est clair que Freud n’avait
eu aucun «succès thérapeutique» à
se mettre sous la dent pour confirmer sa théorie au moment
où il l’avait avancée devant ses collègues.
Dora n’était pas un cas
Mikkel Borch-Jacobsen
Dans ce cas-là, au moins, dira-t-on, Freud a franchement
avoué l’échec de son traitement, puisqu’il
ne nous cache pas que sa patiente avait interrompu celui-ci avant
qu’il ait réussi à lever ses résistances.
Oui, mais Dora était-elle malade de quoi que ce fût?
Ida Bauer avait été amenée à Freud par
son père pour qu’il la «guérisse»
d’un comportement gênant: elle l’accusait, de
façon «délirante», de la livrer aux avances
sexuelles d’un de ses amis, M. Zellenka, en échange
de la complaisance de celui-ci à l’égard de
la liaison qu’il entretenait avec sa femme. Freud, tout à
son honneur, reconnut le bien-fondé des accusations de la
jeune Ida. Cependant, cela ne l’empêcha pas de la taxer
d’«hystérie» parce qu’elle avait
refusé l’arrangement familial et avait été
dégoûtée, à l’âge de 13 ou
14 ans, lorsque M. Zellenka l’avait agressée sexuellement.
De même, il interpréta une appendicite qu’Ida
avait eue durant son enfance et le fait qu’elle traînait
la jambe droite depuis comme des symptômes hystériques,
sans considérer un seul instant l’hypothèse
beaucoup plus plausible d’un point de vue médical d’une
séquelle d’appendicite pelvienne. Quoi qu’il
en soit de ce dernier point, on ne peut s’empêcher de
penser qu’Ida fit preuve d’une solide santé psychique
lorsqu’elle refusa la solution que lui proposait son médecin,
laquelle consistait à reconnaître qu’elle avait,
pendant tout ce temps, refoulé ses désirs libidineux
pour M. Zellenka! De fait, Ida Bauer ne manifesta aucun signe de
névrose ou d’instabilité psychique dans sa vie
ultérieure. […]
La fausse guérison de l’Homme aux loups
Frank Sulloway
«J’ai rêvé qu’il faisait nuit et
que j’étais allongé sur mon lit… Soudain
la fenêtre s’est ouverte d’elle-même et
j’ai été terrifié de voir que des loups
blancs étaient assis sur les branches du grand noisetier
en face de la fenêtre… Terrorisé à l’idée
d’être dévoré par les loups, je criai
et me réveillai.»
L’analyse de ce rêve conduisit Freud à la conclusion
que les loups blancs symbolisaient les sous-vêtements blancs
des parents et que l’angoisse de castration du rêveur
provenait du fait qu’il avait assisté à un «coïtus
a tergo» (anal) répété à trois
reprises, «ce qui avait permis à l’Homme aux
loups de constater que sa mère n’avait pas de phallus».
Après une analyse de quatre ans suivie d’un deuxième
traitement plus court, Freud déclara son patient guéri.
Grâce aux efforts d’une journaliste autrichienne, Karin
Obholzer, qui parvint à retrouver la trace de l’Homme
aux loups (Sergius Pankejeff) à Vienne au début des
années 1970, nous avons maintenant accès aux propres
impressions de ce dernier sur son analyse avec Freud. «Toute
cette histoire est improbable, remarquait-il, parce que en Russie
les enfants dorment dans la chambre de leur nourrice, et non dans
celle de leurs parents.» Il indiquait que les «loups»
de son fameux rêve n’étaient absolument pas des
loups, mais une espèce de chiens ressemblant à des
loups – une contradiction curieuse et inexpliquée.
Il n’avait en aucune façon été guéri,
ni par Freud ni par aucun analyste. Il avait gardé la même
personnalité, broyant du noir de manière compulsive,
doutant en permanence de lui-même. […] Enfin, Karin
Obholzer rapporte que le directeur des Archives Freud, Kurt Eissler,
envoyait régulièrement de l’argent à
l’Homme aux loups. Eissler et d’autres psychanalystes
déployèrent également des efforts soutenus
pour le dissuader de s’entretenir avec Karin Obholzer, qui
n’arriva à ses fins que grâce à son extraordinaire
persévérance et à la promesse qu’elle
fit à son informateur, qui avait peur, de ne publier leurs
entretiens qu’après sa mort.
Da Vinci fable
Han Israëls, historien de la psychologie
[Léonard de Vinci] était l’enfant d’une
mère non mariée. Peu après sa naissance, son
père épousa une autre femme. A l’âge de
5 ans, il faisait partie du ménage de son père. C’est
tout ce que Freud avait pu trouver sur la petite enfance de Vinci.
Il n’avait aucune information sur l’âge précis
auquel le petit Léonard était venu vivre avec son
père. Mais il n’hésite pas à affirmer
que Vinci a passé les premières années de sa
vie seul avec sa mère. Le point de départ de Freud
est le seul souvenir d’enfance de Vinci qui soit connu. […]
«Etant encore au berceau, un vautour est descendu jusqu’à
moi, m’a ouvert la bouche de sa queue, et à plusieurs
reprises a heurté mes lèvres de cette même queue.»
Les Egyptiens, écrit Freud, croyaient qu’il n’y
avait que des vautours femelles. Au cours du vol, le vautour ouvre
son vagin et se fait féconder par le vent. Cette légende
égyptienne a été utilisée par les Pères
de l’Eglise pour accréditer la croyance en la conception
de Jésus par Marie sans l’intervention d’un homme.
Vinci, toujours selon Freud, a dû lire ce récit chez
un Père de l’Eglise et a dû y reconnaître
sa propre situation. Il était comparable au petit du vautour,
un enfant qui a une mère mais pas de père. Pour Freud,
le souvenir du vautour démontre que Vinci a passé
les premières années de sa vie seul avec sa mère.
[…]
A partir de cette conclusion, Freud en tire d’autres, plus
audacieuses encore. Un garçon qui a grandi seul avec sa mère
s’attache à elle à un point tel qu’il
ne voudra pas lui être infidèle en aimant d’autres
femmes. Il deviendra donc homosexuel. La curiosité naturelle
de l’enfant n’a pas été limitée
par l’autorité paternelle. Vinci sera plus tard un
homme libre des préjugés de ses contemporains. C’est
ainsi que Freud raisonne. […]
En 1923, un historien de l’art révèle que toute
la construction de Freud reposait sur une erreur de traduction.
L’oiseau du souvenir de Vinci était un nibbio. Un milan,
non un vautour. L’origine de l’erreur de Freud se trouve
dans la traduction allemande d’un roman russe sur Vinci, qu’il
avait lu. En russe, le mot korshun désigne aussi bien un
vautour qu’un milan. Le traducteur allemand avait fait l’erreur
de choisir le premier de ces deux termes. Peu importe, la psychanalyse
fonctionne même quand elle se base sur des choses qui n’ont
pas eu lieu, comme l’apparition d’un «vautour»
dans un souvenir d’enfance. […] J’ai publié
les preuves du fait que Freud avait été parfaitement
informé de la dénomination correcte du rapace, un
milan, mais qu’il n’en a pas moins continué à
répéter la construction bâtie sur un vautour.
Ici comme ailleurs, Freud ne s’est jamais beaucoup soucié
de la réalité des faits.
Une théorie en caoutchouc
Mikkel Borch-Jacobsen
On dit que la psychanalyse, si erronée soit-elle, répond
à de très profonds besoins: le besoin de donner un
sens au mal-être et à l’angoisse existentielle
dans un monde déserté par Dieu; le besoin d’une
théorie justifiant la libération sexuelle à
l’époque du déclin de l’autorité
paternelle-masculine. On dira encore qu’elle a fourni une
idéologie à la société capitaliste et
à l’individualisme moderne, ou bien qu’elle a
servi de refuge aux déçus du marxisme.
Qu’y a-t-il dans la théorie psychanalytique qui la
rende capable de remplir tant de fonctions? Rien à mon sens:
c’est précisément parce qu’elle est parfaitement
vide, parfaitement creuse, que cette théorie a pu se propager
comme elle l’a fait et s’adapter à des contextes
si différents. […] C’est une nébuleuse
sans consistance. Qu’y a-t-il de commun entre les théories
de Freud et celles de Rank, de Ferenczi, de Reich, de Lacan, etc.?
Mieux encore: qu’y a-t-il de commun entre les [différentes]
théories professées par Freud?
La seule chose qui soit restée constante, c’est l’affirmation
de l’inconscient, couplée avec la prétention
des psychanalystes à en interpréter les messages.
L’inconscient, par définition, ne se présente
jamais à la conscience, nous ne pouvons donc le connaître
qu’une fois qu’il a été «traduit»
en conscient. Or comment s’opère cette traduction?
Uniquement grâce aux interprétations de l’analyste.
[…] De là les multiples conflits d’interprétation
qui ont immédiatement surgi entre les premiers analystes:
là où Freud disait «libido», d’autres
disaient «pulsion d’agression»; là où
il disait «complexe paternel», d’autres disaient
«complexe maternel» ou «traumatisme de la naissance».
Or comment décider qui avait raison, qui était le
traducteur autorisé de l’inconscient? La seule façon
de trancher le débat a été l’argument
d’autorité. […]
Or tout cela qui signe le caractère de pseudo-scientificité
de la psychanalyse aux yeux d’un Popper est justement la cause
de son incroyable succès. La théorie étant
parfaitement vide, elle est aussi du même coup suprêmement
adaptable. Tel ou tel aspect s’avère-t-il difficilement
défendable, comme le lien établi par Freud entre neurasthénie
et masturbation, par exemple, ou «l’envie de pénis»
censée régir la sexualité féminine,
ou le caractère de «perversion» de l’homosexualité?
Il suffit de le laisser tomber silencieusement et de sortir un nouveau
lapin théorique de l’inépuisable chapeau de
l’inconscient. C’est ce que les psychanalystes aiment
à décrire comme les «progrès» de
la psychanalyse, comme si chaque analyste explorait plus avant le
continent inconscient, en rectifiant les erreurs de ses prédécesseurs.
En fait, chaque école a sa propre idée de ce qu’est
le progrès, vigoureusement contestée par les autres,
et c’est en vain qu’on chercherait dans ces disputes
un quelconque développement cumulatif.
"Le Livre noir de la psychanalyse. Vivre, penser et aller mieux
sans Freud", 824 pages, Les Editions des Arênes, 29,80
euros"
Ursula Gauthier
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