Site du film : http://www.laraisonduplusfort.com/html/start.htm
Origine Nantes IndyMédia : http://nantes.indymedia.org
Annonce de la projection du film de Patrick Jean, à partir
du 16 février 2005 au Concorde à Nantes .
Ceci n'est pas une pub commerciale mais une information pour voir
un documentaire dont aucune personne que je connaisse n'est sortie
indemne...
RESUMÉ
Au lieu de combattre la pauvreté, on combat les
pauvres.
L'Europe : ses quartiers riches et ses banlieues de misère
où se généralise la « tolérance
zéro ». On construit une prison quand on ferme une
usine.
Les pauvres en général et les jeunes issus de l'immigration
en particulier sont l'objet de toutes les peurs. Passant de l'autre
côté du miroir et brisant les clichés, le film
les montre dans leur humanité, dans une rue, une prison,
un tribunal ou une cave de cité, avec leurs émotions,
leurs envies, leurs peurs et leur désespoir.
Loin d'une image de la démocratie européenne où
tous ont leur chance, le film, prenant à témoin la
France et la Belgique, offre un regard critique et émouvant
sur une société parfois sordide et brutale, la nôtre.
« Quelle drôle d'époque ! Que sommes-nous
en train de faire ? Avons-nous perdu la raison ? »
Chiffres et info
Prison et niveau d'instruction en Belgique
En Belgique, 30% des détenus n'ont pas atteint le niveau
primaire ou sont analphabètes. 75% n'ont pas de diplôme
d'enseignement secondaire (général, technique ou professionnel).
Prisons et psychiatrie en France
Il y a eu, dans les prisons françaises, 104 suicides en
2001 et 120 en 2002, c'est à dire un tous les trois jours.
En France, on est passé d'une proportion voisine de 16% d'accusés
jugés « irresponsables au moment des faits »
au début des années 80, à un taux de 0,17%
pour l'année 1997. On estime qu'un détenu sur deux
a des troubles de personnalité.
Vidéosurveillance
En mars 2001, une cinquantaine de caméras de surveillances
installées dans seulement deux arrondissements de Lyon dont
une vingtaine autour de la place des Terreaux. Coût : 18 millions
de F.F. plus l'entretien très coûteux et une douzaine
de salaires pour la surveillance. D'autres caméras ont été
installées depuis. Une de ces caméras très
précises peut lire une marque de bière sur un verre
d'une terrasse.
Marseille : cité Félix Pyat ou Bellevue
(cité en ruines à la fin du film et interview d'une
mère de famille). La cité comporte 6.000 habitants.
Dans certaines parties, plus d'ascenseur depuis 15 ans. Le loyer
est d'environ 400 euros pour un T4. Jusqu'en 1999, personne ne nettoyait
l'extérieur, on a enlevé 17 tonnes d'ordures dans
une cour intérieure. Certains « marchands de sommeil
», marseillais nantis ont acheté des appartements 760
euros pour les louer 380 euros par mois. La caisse d'allocations
familiales leur payait directement le loyer. On estime qu'il y a
60% de chômeurs. Le sous-préfet Curé espère
une évolution pour avoir « d'ici dix ans, une cité
à peu près viable et supportable ». Lire Henry
M., « Un bidonville vertical » in Libération,
26 décembre 2001, p. 1-3.
Délinquance
60% des infractions enregistrées en France en 2002 sont
des vols. Augmentation de 13% du nombre des gardes à vues
en 2002. Miracle de l'année : hausse de 4% des chiffres de
la délinquance entre janvier et mai 2002 puis baisse de 0,5%
à partir de mai, dès que le nouveau gouvernement est
mis en place et ce, sans augmentation du nombre de policier. Preuve
évidente de la manipulation des chiffres ou de la sympathie
bienveillante des délinquants pour le nouveau gouvernement...
Théorie de la « vitre brisée »
et de la « tolérance zéro »
Théories politiques issues du Manhattan Institute qui publie
les théories de Wilson et de Charles Murray, gourou du capitalisme
reaganien, et pour qui les inégalités raciales et
sociales sont le résultat du quotient intellectuel. En résumé
: l'homme moins intelligent sera plutôt noir, pauvre, vivant
sa relation hors mariage. Il aura une propension au crime. C'est
à New York sous la mairie de Giuliani que ces théories
seront d'abord mises en œuvre avant d'être importées
en Europe. New York embauchait alors 12.000 policiers (effectif
total 46.000) et supprimait 8.000 postes dans les services sociaux
(total 13.400 postes). Résultat : janvier 1999, quatre policiers
new-yorkais tuent de 41 balles un garçon de 22 ans, désarmé
et d'origine guinéenne. Une brigade de choc a arrêté
45.000 personnes sur simple suspicion et seulement une sur onze
avait réellement commis un délit. Lire Wacquant Loïc,
« Les prisons de la misère », Raisons d'Agir.
Mise au travail forcé des sans-emploi
Dans différents pays européens (Grande-Bretagne,
Belgique…) le welfare s'est transformé en workfare
par la mise au travail forcé des chômeurs. En Belgique
par exemple, l'allocation de « Minimum de moyens d'existence
» (Minimex) a été transformé en «
droit d'intégration sociale » avec mise au travail
dans des conditions les plus précaires. L'origine de cette
pratique est également américaine : Laurence Mead
publie en 1986 une thèse qui fera école, « Au-delà
des droits : les obligations de la citoyenneté » que
l'on peut résumer par « le non-travail est un acte
politique » contre lequel il faut recourir à l'autorité.
Il faut remplacer l'état-providence par un état punitif
pour forcer les pauvres à accepter les emplois pénibles
et précaires. Tout cela écrit en toutes lettres.
Citation
« Il est juste d'être intolérant vis-à-vis
des sdf dans la rue », Tony Blair, rapporté par le
Gardian, 10 avril 1997, cité par Wacquant, op.cit.
Prisons privées
Le nombre de détenus dans les prisons privées d'Angleterre
est passé de 200 à 4.000 en huit ans.
Immigration-délinquance
En France, les étrangers sont plus souvent déférés
que les nationaux (68 % contre 35 %).
La Belgique et la France en tête du racisme européen
Selon une enquête effectuée à l'échelle
de l'Union européenne au printemps 1997, une personne sur
trois se déclare « un peu raciste » et une sur
trois affirme ouvertement éprouver des sentiments «
plutôt » ou « très racistes ». La
Belgique arrive largement en tête avec 22% se déclarant
« très racistes », suivie par la France (16%)
et l'Autriche (14%). (Eurobaromètre 47.1)
Selon l'Eurobaromètre 2002, dans la population européenne,
quatre explications justifient l'idée que l'immigration serait
« un phénomène plutôt négatif »
: le chômage va augmenter (71%), la criminalité va
augmenter (60%), il y a déjà trop d'immigrés
dans notre pays (57% +40 points par rapport à 2001), il y
aura davantage de problèmes sociaux, notre niveau de vie
va baisser (53%).
Racisme en France
En France : une majorité de sondés (51 %) estime
indispensable que les personnes d'origine étrangère
qui vivent en France adoptent le mode de vie des Français.
Les trois quarts des Français (69 %) expriment à
un degré différent un sentiment de racisme ou de xénophobie,
selon la Commission nationale consultative des droits de l'Homme
(CNCDH), qui constate dans son rapport 2000 une stabilité
sur dix ans. Selon le sondage Louis-Harris pour l'année 2000,
43 % des personnes interrogées se disaient en 2000 plutôt
(12 %) ou un peu (31 %) racistes, 26 % s'affirmaient pas très
racistes, et seuls 28 % pas racistes du tout.
En un an, 4 % des personnes interrogées sont passées
du « pas très raciste » au « un peu raciste
», la CNCDH y voyant une « dégradation »
mais aussi une « banalisation » du racisme, tout aussi
inquiétante, selon elle. 60 % des Français jugent
qu'il y a trop de personnes d'origine étrangère en
France.
Le racisme vise surtout les Arabes, avec une forte hausse de l'intolérance
à leur égard (+ 12 points en 1999, confirmée
en 2000). Pour justifier le sentiment de « rejet »,
le chômage et l'équilibre des comptes sociaux sont
cités par un peu plus de la moitié des personnes.
Racisme religieux en Europe
La dernière enquête de l'Observatoire européen
des phénomènes racistes et xénophobes (EUMC)
montre que le Danemark et la Belgique sont les deux pays où
la présence d'autres religions rencontre le plus d'hostilité
au sein de la population. « En moyenne, 15% des citoyens de
l'UE expriment une certaine inquiétude à l'égard
d'autres religions », note l'enquête, mais le Danemark
(32%) et la Belgique (26%) « comptabilisent un pourcentage
nettement plus élevé ». Ce résultat montre,
selon Beate Winkler, la directrice de l'EUMC, que « dans les
pays où des partis politiques utilisent la religion comme
un élément de leurs campagnes, l'impact sur l'opinion
publique est important ».
Le sens de la peine carcérale
Au départ, la prison était un lieu d'expiation par
la souffrance et la solitude. Il s'agissait d'une vision religieuse.
Le mot « cellule » est d'abord un mot qui appartient
au vocabulaire religieux. Etymologiquement la cellule est une petite
chambre où l'on est seul. Elle représente un lieu
de silence et de recueillement qui favorise la conversion de l'âme
à Dieu. La souffrance infligée doit permettre de racheter
les fautes.
La symbolique religieuse a ensuite été remplacée
par celle de l'économie : être emprisonné c'est
payer une dette. C'est rembourser la société.
Aujourd'hui, c'est une utopie pseudo-sociale qui domine : l'enfermement
resocialiserait le condamné ! Outre l'impossibilité
de l'idée, on peut remarquer qu'il n'est jamais question
de remédier au causes sociales de la délinquance.
La faute n'est jamais dans la structure sociale, toujours dans l'exclu.
La preuve dans les propos d'un directeur des services pénitentiaires
de Paris : « Les délinquants sont des inadaptés
sociaux et la finalité carcérale est de les remodeler
pour les rendre aptes au fonctionnement de la société.
» Autrement dit, leur apprendre à accepter leur condition.
Nombre de détenus
Aux États-Unis, le taux d'incarcération a quadruplé
en vingt ans, tandis que la criminalité est restée
stagnante. En France de 380.000 détenus en 1975, on est passé
à 1,6 millions en 1995 avec une croissance de 8% l'an. Or
les crimes et délits n'ont évidemment pas augmenté
de 160%.
Aux États-Unis, la prison est devenue l'outil central de
gestion de l'insécurité sociale et il semble que l'Europe
suive le même chemin.
Prison et pauvreté
Il n'y a aucune corrélation entre le taux d'incarcération
et le taux de criminalité. (lire à ce propos : Rushe
et Kirchheimer, Peine et structure sociale). En revanche, il y a
un rapport étroit entre le taux d'incarcération et
le taux de chômage observé dans un pays. De nombreuses
études empiriques le démontrent dans différents
pays. La prison est donc une manière de faire pression et
d'imposer le salariat précaire et sous-payé quand
l'offre de main d'œuvre dépasse la demande.
Pauvreté et psychiatrie
En Belgique : 56% des tentatives de suicide touchent des personnes
affectées par des conditions socio-économiques défavorables.
(GOSSET Ch, Aspects épidémiologiques du Suicide. In
: Observatoire n°2, 1994.)
Les taux de suicide en Belgique et en France sont les plus élevés
d'Europe (si l'on excepte la Finlande dont la situation est particulière).
Beaucoup plus qu'aux Etats-Unis ou au Japon. Pour 100.000 habitants
: 49,2 suicides annuels en Belgique, 41,2 en France, 24 aux Etats-Unis,
37 au Japon et 7 en Grèce.
École et violence
Description d'une classe dans une école française
: citation du livre : Collèges de France, de Mara Goyet,
éditions Fayard.
« Le père d'une élève s'est suicidé.
Depuis, elle a des pertes de mémoire et tombe sans cesse
malade. La mère d'un jeune garçon ne veut plus l'avoir
à sa charge, il vit désormais chez ses grands-parents.
Le jour de son anniversaire, il attend sa visite toute la journée,
elle ne vient pas. Il s'endurcit.
Une jeune fille dont la naissance n'était pas désirée
est élevée par ses grands-parents, qui l'infantilisent.
Elle suce son pouce à longueur de cours.
Un élève fait des allers-retours entre le domicile
de sa mère et des familles d'accueil. Il est dans l'affrontement
perpétuel.
Un de ses camarades arrive tout juste d'Afrique ; son père
meurt d'une crise cardiaque deux mois plus tard.
Une autre débarque précipitamment d'Algérie
; on a peine à imaginer ce qu'elle y a vu et perdu.
Tous ces cas dans une seule et même classe. Ils vont mal,
ils en donnent tous les signes. Ils deviennent souvent incontrôlables.
Ils se montrent odieux. Ils restent sans aide, sans soins. Ils sont
tous les jours devant nous. Notre sévérité
et notre agacement envers eux nous paraissent tour à tour
du respect et de la cruauté. Nous tentons de comprendre sans
excuser. Nous nous efforçons de faire abstraction, d'éviter
l'empathie, de travailler hors contexte, hors société.
Dans tous les cas nous sommes injustes, balourds, peu délicats.
La misère du monde pénètre au collège
et nous ne savons qu'en faire. Alors on se dit que le mieux est
de continuer à travailler normalement, de juger des résultats
scolaires, de vérifier que les devoirs ont été
faits, de veiller à ce que chacun se tienne bien en classe,
comme si de rien n'était. De ne considérer que l'élève.
Toujours avec l'idée que l'on est peut-être monstrueux.
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