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Origine
RESISTONS ENSEMBLE CONTRE LES VIOLENCES POLICIERES ET SECURITAIRES
resistons_ensemble
at samizdat.net
liste d'informations du réseau Résistons Ensemble
http://listes.samizdat.net/wws/info/resistons_ensemble
Comme un récent rapport de l’ONG Amnesty International
le notait, les violences policières sont en augmentation
constante. Nous proposons quelques réflexions quant à
l’origine et à la nature de ces violences, et quelques
pistes sur la manière de réagir.
Les « bavures », qu’est-ce que c’est
?
Une bavure, au sens propre, c'est quand, sur un dessin ou un texte
calligraphié, un peu d'encre a coulé : bref, c'est
une tache. La bavure est la petite saleté sur la feuille
bien écrite du maintien de l'ordre. Comme si tout allait
bien, sauf la bavure. Quand on utilise ce mot, on sous-entend que
la police ferait bien son travail et que tout irait pour le mieux
s'il n'y avait pas les « bavures ».
Pourtant, loin d'être exceptionnelles, les violences sont
au cœur de la pratique courante de la police. Certes, elles
n'aboutissent pas toutes à la mort ou à la blessure
grave, elles ne font pas tous les jours, sous leur nom de «
bavures », les gros titres des journaux, mais elles sont en
revanche constantes et quotidiennes : manière de parler,
contrôle arbitraire, baffes, harcèlement, racisme,
etc. La violence ne réside pas uniquement dans les coups,
mais aussi dans la manière dont les policiers cherchent à
humilier ou à stresser les personnes qu’ils interpellent.
Ces méthodes poursuivent un double objectif : d’abord
elles sont une part non judiciaire de la « punition »
que la société désire infliger à ceux
qui contreviennent à ses lois, et elles sont assumées
comme telle. Même lorsque la procédure ne s’achève
pas par des poursuites, l’idée est que le passage par
le poste de police soit un moment suffisamment désagréable
pour dissuader d’y retourner. D’autre part, les mauvais
traitements visent à faire fléchir la résistance
des suspects pour obtenir leurs aveux ou leur coopération
à l’enquête – ce qui, en vocabulaire policier,
s’appelle «attendrir la viande».
Il ne saurait donc être question de bavures, mais de «
violences policières » au sens large, et de bien comprendre
que les cas extrêmes de mort ou de blessures graves ne sont
que la face visible et médiatique d’un phénomène
permanent.
Est-ce que le droit permet d’éviter les violences
policières?
Quand les associations comme le MRAP ou la LDH dénoncent
les « bavures », elles semblent croire le plus souvent
que, si la police respectait le « droit », sa violence
disparaîtrait, que la police deviendrait une institution démocratique,
au service des « citoyens »
Ce point de vue ignore, ou minimise, le fait que, comme on vient
de le voir, la violence de la police est nécessaire à
son fonctionnement même. Mais il se trompe surtout lourdement
sur la nature du « droit ».
Le droit, contrairement à ce qu’on dit en général,
n’est pas un ensemble de règles qui s'imposent à
tous et qu'on doit observer à tout instant. Le droit ne devient
réel qu’à travers les institutions qui le font
exister : l’État, la justice, la police.
Dans un tribunal, ce n’est pas la « vérité
» qui compte, mais la « vérité judiciaire
». La vérité et la « vérité
judiciaire » sont deux choses très différentes
; la vérité judiciaire est ce que décide le
tribunal, sur la foi des témoignages ou des preuves matérielles,
mais aussi en fonction des présupposés des juges,
du rang social de ceux qui sont jugés, etc. Ce qui compte
devant un tribunal, ce n’est pas la théorie, c’est
à dire ce que le droit prétend être ou devrait
être, mais comment les choses se passent pratiquement. Par
exemple la parole d’un policier n’a en principe pas
un poids plus important que celle d’un simple témoin,
ou d’un accusé : dans les faits le policier est presque
systématiquement cru, du seul fait qu’il est policier.
Cela n’est pas dû au fait que les policiers sont méchants
et mentent pour le plaisir, et que les juges croient les policiers
aussi par méchanceté. Il est simplement logique que,
dans la perspective judicaire, le témoin a priori le plus
fiable soit cru : or, un collaborateur de la justice doit être
plus fiable qu’un autre, sinon le système se condamne
lui-même. Ce n’est pas la police qui est un outil au
service du droit : c’est le droit qui est un outil au service
de la police (voir : « La justice peut-elle empêcher
les violences policières »).
Les violences, ce sont les flics qui en parlent le mieux…
Les syndicats policiers ont cet avantage sur des associations comme le MRAP
ou la LDH qu’ils savent mieux que quiconque que la violence
est indissociable de la pratique de la police. Ils ne se cachent
pas devant la réalité : ils avouent que faire respecter
l’ordre suppose une certaine dose de contrainte, même
s’ils cherchent parfois à la minimiser.
Toutefois, ces mêmes syndicats estiment cette violence légitime.
En gros, ils nous disent qu’on ne fait pas d’omelette
sans casser d’œufs. Certains vont se trouver la cible
de ces violences, mais c’est pour le bien de tous, la défense
de la veuve et de l’orphelin passant par ce sacrifice nécessaire.
Toutefois, les vraies questions, à savoir qui sont réellement
les « œufs », et ce qu’est « l’omelette
», les syndicats de flics ne les posent jamais.
Les « œufs » qu’il faut casser, pour les
flics, ce sont les « délinquants ». Un article
tiré du journal d’un syndicat de police (le Trait d’union
N°166, pp. 18-19) l’explique ainsi : « Les violences
dont sont accusés les fonctionnaires de police ne sont jamais
gratuites; elles ne sont que la conséquence de la commission
d’une infraction, d’un délit, par la personne
dont les conditions d’interpellation ou de maintien dans les
services de police sont contestées. » Les victimes
des violences policières l’ont bien cherché
: certes, il est regrettable qu’elles soient frappées,
mais si elles ne commettaient pas d’infraction, il ne leur
arriverait rien. Ce que le même article résume en disant
: « L’honnête citoyen ne se plaint jamais de l’intervention
policière qui au contraire le rassure, surtout dans les transports
en commun. Le délinquant quant à lui en sera toujours
marri, à juste titre. »
En réalité, là n’est pas le problème
: ceux qui font l’objet de violences policières peuvent
avoir commis une infraction, évidemment, comme ils peuvent
ne pas en avoir commis. Des « innocents » (si tant est
que ce mot ait un sens) sont constamment l’objet du mépris,
de la hargne ou de la violence policière.
Mais qu’ils respectent ou non les lois, ceux qui sont traités
ainsi appartiennent à des populations considérées
comme suspectes par nature. Ceux qui sont les premières victimes
de la violence de la police sont aussi ceux dont on pense qu’ils
sont les plus susceptibles de transgresser des lois qui servent
à les maintenir dans leur état d’exploités.
« L’omelette » qu’il s’agit de défendre
n’est évidemment pas le bien commun de tous les citoyens,
mais le gâteau que ceux qui dominent la société
doivent prendre garde de ne pas trop partager. Voilà ce qui
demande que soient sacrifiés sur l’autel de la violence
de la police ceux qui précisément sont les perdants
du système.
Un système inégal se perpétue par la violence
: c’est là la seule conclusion qu’on puisse tirer
de l’existence des « bavures » et de la violence
policière.
La justice peut-elle empêcher les violences policières
?
Michel Tubiana, président de la Ligue des droits de l’homme,
relève, dans un article du Parisien daté du 17 février
2005, que « les magistrats ont globalement tendance à
privilégier la version des policiers assermentés qui
portent plainte pour outrage et rébellion à celles
des citoyens qui affirment s’être fait taper dessus
ou humilier. La justice n’entend pas les plaintes à
égalité, classé “sans suite” voire
admet souvent que les policiers se couvrent entre eux ». Ammesty,
dans son rapport, fait le même constat.
Toutes ces organisations institutionnelles demandent à ce
que la justice exerce un meilleur contrôle sur la police.
Cet argument repose sur un principe, celui de l’indépendance
de la justice, qui ne résiste pas à l’épreuve
des faits.
Le juge étant le seul garant de la liberté individuelle,
le citoyen n’a pas le droit d’intervenir lorsqu’une
opération policière a lieu, et ce quelles que soient
les violences exercées. La Cour de cassation a même
pris la précaution de préciser que « l’illégalité
d’un contrôle d’identité ne saurait entraîner
la nullité des poursuites relatives à outrage et rébellion
et coups ou violences volontaires commis contre les autorités
de police à l’occasion du contrôle ». (Cour
de cassation, 7 février 1995). L’individu qui essaierait
de se soustraire ou de s’interposer face à un contrôle
policier pourtant reconnu comme illégal par la justice risquerait
donc d’être quand même condamné.
Seul le juge peut, une fois saisi, donc forcement après les
faits, et souvent quelque mois voire quelques années plus
tard, décider si une intervention policière était
légale ou non. Si un individu se fait lyncher par des policiers,
voir tuer, comme ces sans papiers morts étouffés par
les flics lors de leur expulsion, personne ne doit intervenir, l’autorité
de la police doit demeurer absolue. Les policiers ont la libre appréciation
de la situation.
N’ayant pas eu le droit de réagir sur le moment, un
individu victime ou spectateur de violences policières va
donc peut-être (c’est souvent une bataille procédurale)
être amené à témoigner devant la justice.
Encore faut-il, s’il est un passant, que les policiers ne
l’aient pas obligé à « circuler »
en prétextant un périmètre de sécurité
qui leur permet d’éviter les témoins gênants.
Comment ce témoignage va-t-il être pris par la justice
? Un arrêt de la Cour d’appel de juillet 1999 offre
des indications quant aux conditions de crédibilité
des témoignages portés à la connaissance de
la justice. Cet arrêt commence par énoncer que «
dans l’absolu la parole d’un policier, a fortiori celle
d’un officier de police judiciaire, est plus crédible
que celle d’un trafiquant de drogue » Il faut entendre
par là que de manière générale la parole
d’un fonctionnaire assermenté est plus crédible
que celle du simple citoyen surtout s’il a fait l’objet
d’une intervention ( contrôle d’identité)
ou d’une poursuite ( outrage et rébellion) . Les dires
des policiers ne peuvent être remis en cause que si certains
éléments sont réunis : il faut que les déclarations
du « délinquant » (« un citoyen »
au main de la police devient un « délinquant »)
soient confortés par des éléments extérieurs
: constations médicales, contradictions dans PV et plus rarement
, aveux de certains des policiers. Pouvoir réunir ces éléments
est rarement possible. Une personne ayant déjà un
casier judiciaire n’aura de crédit que dans des cas
exceptionnels. Même lors d’un décès le
passé judiciaire de la personne est mis en avant pour justifier
le meurtre, comme pour Mourad à Nîmes. En cas de violences
policières ce n’est pas le comportement des policiers
qui est étudié mais le profil de l’individu
( quelle situation familiale, quel niveau d’étude,
quel emploi, quelle domiciliation) qui est mis en avant pour déterminer
sa crédibilité. En l’absence de témoins
considérés comme fiables et de contradictions dans
les procès-verbaux, les keufs sont assurés de ne pas
être inquiétés pour les violences qu’ils
auront commises. Si les flics sont assez malins, maquiller les procès-verbaux
et veiller à ne pas faire de contradictions rend leur version
inattaquable.
Pour donner plus de poids aux paroles de victimes de violences
policières, les associations de défense de droit de
l’homme voudraient que les juges cessent d’accorder
toute confiance aux procès-verbaux policiers. Or, ceci paraît
structurellement impossible : sans la confiance dans ses auxiliaires,
c’est le fonctionnement de la justice qui n’est plus
assuré. Si les manœuvres ou le maquillage d’une
faute ne sont pas démesurément grossiers, les éléments
du procès verbal sont toujours considérés comme
établissant la vérité. (voir Fabien Jobard,
bavures policières, la force publique et ses usages, p. 250).
S’il vient à l’idée d’un keuf de
contredire les autres flics , il peut se fait rappeler à
l’ordre par son supérieur et subir les brimades de
ses collègues. Agir ainsi c’est risquer d’être
mis au placard. Les juges n’ont qu’une version biaisée
des faits et ce n’est pas eux qui protègeront les citoyens
. Lorsque des vices de procédures ou des violences policières
leur sont rapportées , il est loin d’être systématique
que les juges annulent les poursuites , ni qu’ils sanctionnent
les fonctionnaires de police. En effet, les policiers font un travail
nécessaire aux juges, sans lequel, aucun dossier ne seraient
sur les bureaux des juges. Et ils ont conscience que souvent les
aveux et les preuves ne sont établies que si des pressions
sont exercées notamment lors des interrogatoires . Ils ferment
donc les yeux sur les pressions exercées, pour autant qu’elles
ne soient pas exorbitantes.
Que peut-on faire quand on est victime de violences policières
?
Recours juridiques
Il existe plusieurs recours juridiques. Il est possible de déposer
une plainte, en se portant partie civile, dans un commissariat de
police, à la gendarmerie nationale ou en écrivant
directement au procureur de la république. On peut aussi
saisir l’IGPN/IGS, la police des police, et dans un autre
genre la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
Dans la pratique
La réalité du terrain, pour peu que l’on s’y
attarde, achève le travail des flics. Dans la plupart des
cas, L’IGPN ne retient pas le caractère illégitime
des faits qui lui sont soumis. La CNDS qui ne peut être saisie
que par l’intermédiaire d’un élu (un parlementaire,
sénateur ou député) ne connaît pas beaucoup
plus de résultat… et les difficultés rencontrées
dans le cadre d’une défense juridique sont nombreuses.
(voir « La justice peut-elle empêcher les violences
policières? »)
Ne pas avoir d’illusions
S’il est vrai que la machine judiciaire se révèle
être un outil au service de la police, la lutte contre les
violences policières peut et doit être quand même
menée. Ne pas avoir d’illusions, être conscient
qu’il y a peu de chance que la justice reconnaisse comme victime
de l’arbitraire policier celui qui s’est fait tabasser
ne veut pas dire qu’il faille se résigner ou délaisser
la lutte sur un plan juridique. (voir « Est-ce que le droit
permet d’éviter les violences policières ? »)
D’une part, il s’agit de répondre à l’urgence
de la menace d’une sanction judiciaire qui accompagne souvent
les violences policières. Si l’expérience montre
que l’on arrive que très exceptionnellement à
faire reconnaître par la justice l’existence des violences
policières, la stratégie offensive de la mobilisation
éventuellement accompagnée par une plainte contre
les brutalités policières peut aboutir à des
peines moins graves. En revanche, toute autre stratégie de
défense, du genre « je fais confiance à la justice
de mon pays », et en particulier celle qui s’imagine
que « faute avouée est à moitié pardonnée
» conduit en général aux peines les plus lourdes.
D’autre part, la lutte contre les violences policières
et sécuritaires, en étant conscient de la connivence
entre la police et la justice et du rôle social de ces outils
de répression de l’État peut passer par la mise
à nu de ces mécanismes. (voir « Comme la nuée
porte l’orage, l’État porte en lui même
la violence »)
L’auto organisation dans un comité de soutien
Il n’existe pas de recette toute faite. Chaque histoire est
unique et la manière d’y répondre dépend
d’abord de la volonté des premiers concernés,
les personnes qui ont subi les violences policières, puis
des conditions dans lesquelles se sont déroulées les
événements, de l’envie de réagir, de
l’inventivité face à ces situations… Les
conseils qui suivent ont pour vocation d’ouvrir des pistes
d’organisation et de faire partager quelques bilans d’expériences
passées.
Un comité de soutien est une manière de s’organiser
pour briser l’isolement, et ne pas se laisser enfermer dans
la toile d’araignée de la violence judiciaire. Il permet
de développer la mobilisation en veillant à rester
indépendants, construire un rapport de force qui seul pourra
faire rempart contre la toute puissance de la justice. Mais il peut
aussi poser le débat des violences policières dans
un cadre plus large…
Le premier conseil serait de commencer par compter sur soi-même,
les proches de la personne qui a subi les violences policières
et la famille. Un comité de soutien peut commencer à
peu de gens, car c'est moins le nombre qui va compter que l'implication
du noyau initial, sans se cacher que c'est une activité qui
demande pas mal de temps et d'énergie.
Par ailleurs, la rédaction d’un texte qui résume
l'affaire et pointe les violences de la police, ses accusations
mensongères, la situation médicale du détenu…
en essayant d’être court et argumenté, peut servir
à faire connaître l'affaire autour de soit, les connaissances,
même lointaines, le milieu professionnel, associatif ou dans
le quartier… Il peut servir à convoquer une réunion
d'information auprès des gens à qui il a été
distribué. Il permet aussi de contacter des associations
de défense des droits de l'homme d’autres collectifs
et réseaux de lutte contre les violences policières.
Sur le plan pratique, le comité de soutien peut, si nécessaire,
servir à discuter collectivement la stratégie judiciaire
à adopter, trouver un avocat qui accepte la stratégie
choisie par le prévenu. Il va aussi s’intéresser
aux témoins qui ont vu la scène. Il faut savoir que
l’avocat n’est pas supposé rencontrer les témoins,
encore moins aller les chercher : on pourrait le soupçonner
de s’être entendu avec eux sur la version à livrer
au tribunal. C’est donc au comité de soutien de faire
ce travail : bien entendu il ne doit « trouver » que
des gens qui témoignent dans le sens favorable. Il va aussi
ramener à l’avocat les pièces nécessaires
lors du procès (attestation de logement, de stages, d’études,
de séjour...).
Si une plainte contre les flics a peu de chance d’aboutir,
elle peut fournir un argument au procès pour soutenir la
thèse de la défense.
Une fois sur pied, un comité de soutien peut aussi organiser
d’autres réunions voire envisager d'autres types d'action
: présence à l’audience, appui d’associations,
tracts, conférence de presse, affiches, réunions de
quartiers, manifestation, ou autres apparitions publiques dans la
rue sous forme de rassemblement, de table sur un marché…
C’est une stratégie offensive dont l’expérience
montre qu’elle peut être efficace.
C'est lorsque qu’un rapport de force se construit, que le
comité se solidifie que nous vous conseillons de prendre
contact avec la presse, les journaux locaux en priorité.
Trop tôt cela ne sert à rien, ils ne vous écouteront
que s’ils ont des relations... mais si le comité rencontre
un certain soutien, ils ne pourront pas l’ignorer.
Mettre a nu le rôle social de la machine répressive
Au-delà de la menace immédiate d’une sanction
judiciaire, et parallèlement à la réaction
à un cas concret de violence policière, la lutte contre
les violences policières passe aussi par la mise à
nu du rôle social des outils de répression de l’État,
la police, la justice… Dans ces conditions, la lutte sur le
plan juridique peut trouver sa place, mais encore une fois il est
illusoire de penser qu’elle puisse être une fin en soi.
Résister, démasquer, dénoncer, ne pas se laisser
faire, enrayer la machine chaque fois que cela est possible. Organiser
la solidarité autour des victimes, agir collectivement, d’une
telle bataille on en sortira plus fort, plus unis… et c’est
cela qui compte.
(voir « Comme la nuée porte l’orage, l’État
porte en lui même la violence »)
Comme la nuée porte l’orage, l’État
porte en lui même la violence.
L’État ici l’État là, État
policier, État providence, État de droit... Qu’en
est-il vraiment? A-t-on vraiment un État à double
face, une face qui distribue, qui garantit la santé,et les
services publics, qui assure les libertés publiques et l’autre,
celle de la matraque et des prisons ? Dr. Jekyll ou Mr. Hyde ?
La société capitaliste repose sur un loi fondamentale
: c’est le droit d’exploiter son prochain. Celui qui
possède l’usine, l’entreprise, les capitaux a
le droit de gagner de l’argent sur le dos de l’autre.
C’est vrai dans les sociétés dites démocratiques
ou dans les dictatures, que ce soit en France ou dans les usines
délocalisées dans les pays où l’exploitation
est encore plus juteuse. Ce droit d’exploiter est la loi absolue
de la société capitaliste. L’armée des
chômeurs, des précaires, des RMI-stes n’est pas
en dehors de l’exploitation générale. Son existence
participe à son efficacité et à sa bonne marche.
Souvent on nous parle d’ « État de droit »,
comme une référence pour définir un État
démocratique, égalitaire, juste, opposé aux
dictatures, à l’État répressif. Tous
les État sont de « droit », en ce sens qu’ils
sont fondés sur le droit de propriété des usines,
des banques, des actions etc. La loi ordonne la marche de la société,
la légalité, en fonction de la bonne marche de l’exploitation..
Ceux qui parlent de l’État en général
omettent le point fondamental : pour mettre en pratique ce droit
fondamental à l’exploitation de l’homme par l’homme,
il faut un appareil de contrôle social. Cet appareil c’est
l’État. Selon Marx l’État n’est
« qu’une bande d’hommes en armes et ses annexes
». Ce qui veut dire que l’État est une machinerie,
qui, pour organiser l’exploitation, assure des fonctions complexes,
enchevêtrées, allant de la répression, au maintien
de la santé publique, l’éducation au niveau
socialement tolérable… De là vient la confusion,
souvent bien volontairement entretenue, comme quoi l’État
aurait une « double nature » : une nature régalienne
et répressive et une autre positive et « utile »
(santé, éducation, service publics). Et de là,
les organisations syndicales, politiques, à quelques rares
exceptions près, prônent un attachement à l’État,
croient, ou veulent faire croire à la possibilité
que sous la pression il est possible de faire reculer, sinon supprimer
le « côté répressif » de l’État.
Derrière cette idée de démocratisation de l’État
se cache l’idée de s’adapter, d’accepter
l’exploitation de l’homme par l’homme comme une
situation « naturelle, inévitable ».
Dans un État plus démocratique les conditions d’exploitation
sont certes plus douces que dans une dictature. Il est évident
que la France d’aujourd’hui et par exemple la Chine,
avec ses conditions d’exploitation digne du 19ème siècle
, ce n’est pas la même chose. Mais constater cela ne
suffit pas. D’autant moins que la tendance générale
du capitalisme ne va pas vers une amélioration globale des
conditions des exploités (ceux qui ont du travail et ceux
qui n’en n’ont pas).
L'État de droit est un « système institutionnel
dans lequel la puissance publique est soumise au droit. »
En partant de cette définition toutes les sociétés
capitalistes, allant de diverses formes de démocratie jusqu’au
dictatures sont des État de droit, la seule différence
est que le droit sur lequel l’État, la « puissance
publique » s’appuie est défini en fonction des
circonstances. C’est le droit qui varie, mais le droit fondamental,
celui d’exploiter, ne varie pas, c’est le socle social.
La grosse escroquerie de cette société dans laquelle
nous vivons consiste à cacher ce fait et de présenter
la loi et les « bandes d’hommes en armes » ( la
police, la justice) comme des institutions pour sauvegarder le «
bien être public » face aux délits et crimes
découlant de la « faiblesse humaine », alors
qu’ils s’agit des organes nécessaires pour maintenir
l’exploitation et l’oppression. C’est la nature
et le rôle social de la police, de la justice qui sont déterminants,
et non la qualité individuelle de tel juge, maton ou policier.
On trouve de rares (trop rares) policiers ou magistrats qui essayent
de faire preuve d’esprit d’indépendance et de
courage individuel, parfois même au détriment de leur
carrière. Mais ces éventuelles résistances
individuelles changent-elles la nature du corps auquel ils appartiennent
? Non, à moins de démissionner, ils sont obligés
de faire leur boulot, avec plus au mois de zèle, avec plus
au moins d’humanité. L’expulsion d’un sans-papiers,
d’un gréviste, d’un squatter, la dispersion d’une
manifestation à coups de matraques restent des actes en défense
de l’exploitation capitaliste même si le main du justicier
est gantée de velours. C’est la violence étatique,
la seule qui soit légitime. Du point de vue légal,
il n’y pas d’injustice commise, l’État
de droit est respecté.
La justice et la police, l’administration pénitentiaire
accomplissent leurs œuvres, avec la marge d’appréciation
et d’erreur que la société leur laisse. Demander
à la police qu’elle soit policée et à
la justice qu’elle soit juste, c’est demander à
un homme de se couper un bras pour améliorer le fonctionnement
de son corps. Faire croire que la société actuelle
serait capable d’une telle auto-mutilation, d’un tel
hara-kiri c’est semer des illusions mortelles.
On peut poser la question : puisque ces violences étatiques
constituent le propre de la société, est-ce qu’il
est possible, nécessaire de lutter contre ces violences ou
bien faut-il changer de société d’abord ? La
vérité est que la lutte contre les violences policières
et sécuritaires est un des chemins qui permettent de démasquer
le mythe de l’État de droit, le mythe de l’inévitabilité
de l’exploitation capitaliste.
RESISTONS ENSEMBLE CONTRE LES VIOLENCES POLICIERES ET SECURITAIRES
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liste d'informations du réseau Résistons Ensemble
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Charte du Réseau
Rappel des propositions du Forum de St Denis (26 mai 2002) :
* Ne pas créer une nouvelle organisation, mais un réseau.
* Une publication feuillet recto-verso : Résistons Ensemble.
* Mettre en place un réseau internet et éventuellement
une ligne hotline.
* Se sentir solidaires concrètement, réellement :
ce qui veut dire, par exemple, un soutien réel aux familles
éprouvées…
* Une aide juridique (éviter l’isolement terrible…).
* Mettre en place des pôles d’avocats.
* Faire pression sur les tribunaux pour délocaliser les procès.
* Faire pression par lettres recommandées.
* Aller en nombre aux tribunaux.
* Un soutien logistique aux associations locales.
* Créer un réseau d’information pour rapprocher
luttes dans les quartiers et militants (exemple : pourquoi pas une
grève syndicale en rapport à une bavure…).
* Un travail de sensibilisation (lycéens…).
* Une nouvelle éducation civique dans les quartiers ; intégrer
le fait de la colonisation.
* Eviter que les quartiers populaires soient complètement
sous contrôle ; que des check-points soient installés
tout autour de chaque quartier.
* Un forum d’alerte dès qu’il y a un problème
en banlieue. Groupes de vigilance et d’intervention en cas
de besoin, au niveau de chaque agglomération, de chaque secteur.
* Ne pas collaborer avec la police. Refuser d’aller dans les
réunions des contrats locaux de sécurité.
* Se mobiliser ensemble pour déconstruire le discours sécuritaire,
pour déconstruire le discours des médias.
* Remettre en cause les lois qui ne vont pas dans le sens de la
cour européenne des droits de l’homme. Penser à
la dimension européenne, internationale. Au delà des
frontières.
* Retrouver un langage de classes. Les opprimés luttent tous
les jours pour leur survie ; ils ont l’habitude de la lutte
et ce sont eux qui feront la lutte, et non des gens qui parlent
à leur place.
* Suivre les mouvements qui sont déjà dans la lutte.
Règles de fonctionnement du réseau internet
Ce réseau internet est un outil de débat et d'information
sur la politique sécuritaire et les violences policières
(meurtres, tabassages, militarisation des quartiers populaires),
ainsi que sur l'ensemble des initiatives, actions, manifestations,
expériences organisant la résistance et l'alternative
dans ce domaine.
L'utilité de ce réseau procédera de notre
capacité collective à en faire un espace de socialisation
et de circulation des expériences et initiatives. Si son
objectif est d'améliorer la diffusion de l'information, le
réseau internet ne saurait remplacer d'autres modes de communication
: courrier, téléphone, feuille d¹information,
contacts directs...
Chacun-ne reçoit et fait circuler informations et idées.
Cela impose une utilisation responsable de la liste. Il faut notamment
éviter de l'encombrer avec :
* des débats trop éloignés de son objet (il
y a bien d'autres listes).
* des polémiques personnelles
* la publicité pour les partis politiques, en particulier
les partis de gouvernement (ceux d'hier et d'aujourd'hui)
Les animateurs ou modérateurs se réservent la possibilité
de déconnecter quiconque ne respecterait pas les règles
ci-dessus, aurait un usage du réseau qui s'apparenterait
à du sabotage ou bien enverrait des messages contraires à
l'esprit du réseau comme à celui de notre hébergeur
(messages racistes, misogynes, homophobes, etc.).
Ouvert à tous ceux et celles qui partagent les buts de ce
réseau, il est géré par quelques-uns de ses
membres qui se portent volontaires, à tour de rôle.
Les animateurs rendent compte de leur gestion devant l'assemblée
générale de RESISTONS ENSEMBLE, dont l'information
des réunions est donnée sur le réseau, et qui
peut se tenir à Paris, mais aussi dans d'autres villes.
Réseau RESISTONS ENSEMBLE
* Pour s'inscrire à la LISTE D'INFORMATION : il suffit
de cliquer <-<-<-<-<- sur "abonnement".
* Pour s'inscrire à la LISTE DE DISCUSSION de Résistons
Ensemble, c'est ici :
http://listes.rezo.net/mailman/listinfo/resistons_ensemble
* Pour consulter le site : http://resistons.lautre.net
* Pour passer une info, une brève sur le bulletin recto/verso
: resistons_ensemble @ yahoo.com
* Pour écrire : resistons @ free.fr
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