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Origine : http://www.evene.fr/livres/livre/eric-hazan-lqr-la-propagande-du-quotidien-18814.php
«Cette langue a une dynamique propre, un caractère
performatif qui fait sa force : plus elle est parlée et plus
ce qu’elle défend - sans jamais l'exprimer clairement
- a lieu»
Extrait du livre "LQR : La propagande du quotidien"
RÉSUMÉ DU LIVRE
De modernité à gouvernance en passant par transparence,
réforme, crise, croissance ou diversité, la Lingua
Quintae Respublicae (LQR) travailla chaque jour dans les journaux,
les supermarchés, les transports en commun, les '20 heures'
des grandes chaînes, à la domestication des esprits.
Comme par imprégnation lente, la langue du néolibéralisme
s'installe : plus elle est parlée, et plus ce qu'elle promeut
se produit dans la réalité. Créée et
diffusée par les publicitaires et les économistes,
reprise par les politiciens, la LQR est devenue l'une des armes
les plus efficaces du maintien de l'ordre. Ce livre décode
les tours et les détours de cette langue omniprésente,
décrypte ses euphémismes, ses façons d'essorer
les mots jusqu'à ce qu'ils en perdent leur sens, son exploitation
des 'valeurs universelles' et de la 'lutte antiterroriste'. Désormais,
il n'y a plus de pauvres mais des gens de condition modeste, plus
d'exploités mais des exclus, plus de classes mais des couches
sociales. C'est ainsi que la LQR substitue aux mots de l'émancipation
et de la subversion ceux de la conformité et de la soumission.
LA CRITIQUE EVENE
Livre dénonciateur, 'LQR' pointe du doigt ce langage qui
nous englobe partout et tout le temps, cette insidieuse langue de
la Ve république, en latin 'lingua quintae respublicae',
la fameuse LQR. Que l'on soit devant le journal télé,
une publicité, un document administratif ou professionnel,
c'est elle qui imprègne nos esprits. Mais dans quel but ?
Et selon quel fonctionnement ? C'est ce que nous expose avec une
grande clarté Eric Hazan. La LQR se saisit de certains mots,
en fait une coquille vide, minimaliste, et les ressort à
toutes les sauces. En abusant des euphémismes et des paraphrases,
elle met au monde de mots vides de sens, le voile idéal pour
endormir l'opinion et créer un consensus mou dans notre société.
S'appuyant sur de nombreux extraits de discours, de journaux ou
d'ouvrages, Hazan étaye brillamment sa théorie et
l'illustre d'exemples concrets. 'Crise', 'réforme', 'problème',
'social' , 'ensemble', toutes ces étiquettes sont analysées
et l'on prend conscience de la nébuleuse opaque qui naît
de cette langue-illusion. Tout devient flou, abstrait. Des comparaisons
avec les propagandes nazie et soviétique, sur la forme, pas
sur le fond évidemment, s'avèrent éloquentes.
Cet ouvrage pertinent n'est pas une charge contre la classe politique
ou les médias, l'auteur explique bien qu'ils ne sont pas
les seuls utilisateurs de cet outil dangereux et hypocrite, tous
les écrits officiels, des publicités aux mairies,
en abusent. Un premier pas vers une prise de conscience qui aiderait
à remettre en cause cette arme si efficace et menaçante
pour la démocratie.
Mikaël Demets
LES ANECDOTES
Eric Hazan, traducteur et éditeur, dirige 'La Fabrique éditions',
maison fondée en 1998 avec un groupe d'amis pour publier
des livres d'histoire, de philosophie et de politique. 'L'invention
de Paris, il n'y a pas de pas perdus' (Seuil, 2002) est son premier
livre. Le second, 'Chronique de la guerre civile', est paru en janvier
2004 (éditions La Fabrique.)
LA REVUE DE PRESSE
Télérama - Michèle Gazier (5 Avril 2006)
Hazan soulève le voile qui recouvre nos habitudes langagières
modelées... La LQR, nous dit-il, est le contraire d'un jaillissement
inventif. (... ) Elle promeut un mode de vie et de pensée
soumis aux impératifs dictés par l'idéologie
dominante. Décaper la langue pour en comprendre la saveur
: le livre d'Eric Hazan est une salutaire et excitante leçon
de liberté.
MORCEAUX CHOISIS
La plus belle phrase :
La LQR est la langue qui dit ou suggère le faux même
à partir du vrai
La phrase à retenir :
La LQR : un écran sémantique permettant de fait tourner
le moteur sans jamais dévoiler les rouages, 'le moyen de
propagande le plus puissant, le plus public et le plus secret',
disait Klemperer.
La phrase à retenir :
Après le référendum constitutionnel du 29 mai
2005, tous les médias ont souligné que 'la France
du non' était surtout rurale et peu diplômée,
jeune et peu fortunée. Façon polie de dire que le
pays a penché vers le non à cause de jeunes ploucs
sans argent ni éducation.
Livre
LES EXTRAITS de "LQR : La propagande du quotidien"
De 1933 à 1945, Victor Klemperer, professeur juif chassé
de l'université de Dresde, tient un journal où il
décrit la naissance et le développement d'une langue
nouvelle, celle de l'Allemagne national-socialiste. Sauvé
de l'extermination par son mariage avec ne 'aryenne' (et in extremis
par le bombardement de Dresde), il publie son texte en 1947 sous
le titre LTI-Notisbuch Eines Philologen, où LTI sont les
initiales de LIngua Tertii Imperii, la langue du IIIe Reich.
Chapitre : 1 - Naissance d'une langue - Page : 11 - Editeur : Raison
d'agir - 2006
Bref, derrière réforme , il'y a rien que du vide.
'Le mot réforme ne renvoie en définitive à
aucune réforme particulière mais consacre la distance
entre ce qui est bon pour le peuple et ce que celui-ci désire.'
Mais les politiciens, qui s'affirment tous 'réformistes',
font leur possible pour que cette notion reste crédible.
(... )
Une réforme est souvent présentée comme le
moyen de sortir d'une crise . Cet autre mot-masque est issu du vocabulaire
de la médecine classique : la crise est le bref moment -
quelques heures - où les signes de la maladie (pneumonie,
typhoïde) atteignent un pic, après quoi le patient meurt
ou guérit. (... ) La dérive du mot, actuellement employé
à contresens, n'est pas innocente : parler de crise à
propos du logement de l'emploi, du cognac ou de l'éducation
n'implique pas que leurs problèmes vont être résolus
à court terme. Chacun sait qu'ils sont tout à fait
chroniques mais l'évocation d'une crise, terme auquel continue
de s'attacher malgré tout la notion d'une temporalité
brève, contribue à calmer les impatiences, ce qui
est l'un des buts des euphémismes de la LQR.
Chapitre : 2 - Mots, tournures, procédés - Page :
32 - Editeur : Raisons d'agir - 2006
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