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LQR - La propagande du quotidien de Éric Hazan
Résumé note de lecture par Gabriel Kerneis


Origine : http://blog.kerneis.info/public/livres/LQR_-_notes_de_lecture.txt

Texte diffusé sous la licence CC : http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/2.0/fr/


Chapitre 1 - Naissance d'une langue

LTI (Victor Klemperer) : langue du 3ème Reich 33-45

LQR : langue de la 5ème République 60-90

Modification du sens et de la valeur des mots, de leur fréquence.

Origine : économistes et publicitaires. économistes : lissage, vernis sémantique pour cacher les réalités derrière des abstractions. publicitaires : syntaxe privée d'articulaions logiques, hyperboles.

Recherche de l'efficacté au dépens de la vraisemblance. Le message est porté par la langue, les mots sont vidés de leur sens premier. Le discours peut n'avoir aucun sens pourvu qu'il atteigne le but fixé.

Raisons du succès : concentration des medîa mais surtout intérêt de toute une partie de la population (cadres, fonctionnaires, ...) à voir se maintenir l'ordre sous-jacent à la LQR.
Caractère performatif : plus elle est parlée, plus les valeurs qu'elle défend sont réalisées. On ne peut pas l'utiliser sans être imprégné du message.

Chapitre 2 - Mots, tournures, procédés

1) Fonctions de l'euphémisme
La LQR vise le consensus. Elle ne concerne pas les rares cyniques qui s'expriment publiquement. Elle a fait disparaitre les pauvres, qui sont devenus des "familles modestes".

Deux fonctions de l'euphémisme :
- contournement / évitement / substitution : cacher une réalité, contourner un non-dit. ex : partenaires (sociaux) = alliés dans une lutte (contre les salariés). Nombreux anglicismes utilisés. Ex : gouvernance.

- masque : cacher le vide derrière le mot. Réforme, qui cache soit un sacrifice soit une mise à la trappe de la réforme, justement ; crise, alors que les maux désignés sont chroniques, laisse supposer un mal bref qui se résout seul. La croissance, importante politiquement car rendue scientifique par des chiffres mystérieux tout en étant absolument incontrolable. Autre exemple, les "hauts" conseils, qui servent à rendre respectable ce chiffre magique (qui ne devrait pas être le seul indicateur économique pris en compte).

Préfixe "post" : donne l'illusion du mouvement, d'une progression alors que les problèmes restent. Efface le passé. Ex : post-colonial, post-industriel.

Amplification rhétorique : utiliser des mots porteurs d'un sens très fort, pour dramatiser, en sachant qu'on ne sera pas pris au pied de la lettre. Beaucoup de vocabulaire militaire (feuille de route, mobilisation, prise en otage des usagers, etc).

2) Un renversement de la dénégation freudienne ?
Dénégation freudienne = refouler ce que l'on a en nous.
LQR = se prévaut de ce qu'elle ne possède pas.
Exemples : transparence, élites, diversité.

3) L'essorage sémantique
Certains mots perdent leur sens initial pour être dévalués, devenir creux. Ainsi du vocabulaire de la Révolution / République. Également social (le plus souvent mot-coquille) et modernité (alternativement idéal inatteignable par les barbares non occidentaux et repoussoir à combattre au nom des anciennes valeurs). Modernisation fait fureur en tant que processus présenté comme inéluctable.

Chapitre 3 - L'esprit du temps

1) Société civile
Normalement opposée à l'État (par définition : "tout ce qui n'est pas la société politique"), la société civile est généralement récupérée et glorifiée comme un partenaire de la vie politique. Leurs liens sont biaisés par la dépendance financière et politique des ONG vis-à-vis des États. Les ONG finissent par faire le travail des États, tout en croyant être un contre-pouvoir.

2) Valeurs universelles
Autre exemple de renversement de la dénégation freudienne. Liberté, égalité, fraternité, terre d'accueil, etc. : grands mots pour masquer une réalité historique et quotidienne bien plus sombre.

3) Les nobles sentiments
Élites dirigeantes "fermes et décidées" mais pour le bien des gens (paternalisme) : ministres délégués aux défavorisés, alternance d'indignation face aux actes criminels inqualifiables et d'écoute bienvaillante des populations malheureuses et incapables de se prendre en main.

4) Une sémantique antiterroriste
Après 11/09, apparition de arabo-musulman (amalgame), islamiste. Quartier sensible, jeune issu de l'immigration, maghrébin. Al-quaïda, nébuleuse confuse utilisée comme épouvantail.

5) L'effroi, la violence
Quoique la LQR vise au lissage et à l'uniformité, il y a quelque domaine où elle se permet les pires dérapaqes. En particulier lorsqu'il s'agit de défendre l'Occident face aux peuples barbares. Le discours de la haine et de l'élimination s'exprime alors librement. Exemple : diatribes CONTRE l'antiaméricanisme.
''Note : malgré les exemples fournis, je suis peu convaincu par cette partie, trop partiale à mon goût (on trouve je crois de exemples de discours haineux dans tous les camps).''

Chapitre 4 - Effacer la division
Parallèle avec la Cité athénienne : l'unité athénienne autour de la démocratie est un idéal construit artificiellement pour effacer les divisions après une phase oligarque et une guerre civile (cf. La cité divisée de ?). Toute référence à la ''stasis'' (phase de conflit) est censurée d'un commun accord par les écrivains et historiens de l'époque.
Il en serait de même actuellement, et la LQR servirait à censurer ce qui s'oppose au néolibéralisme.

1) L'évitement des mots du litige
Après la chute de l'URSS, disparition des mots liés à la lutte des classes (=> couche sociale ou milieu) et au communisme en général.

2) Le recollage permanent des morceaux
2 tâches du politique : empêcher la division en expliquant à ceux qui pensent différemment qu'ils sont dans l'erreur et convaincre les citoyens qu'ils sont liés par une certaine unité (mots ''ensemble'', ''solidarité'', ''proximité'' des élus qui vont sur le ''terrain'').

3) Le recours à l'éthique
Les vices du système sont attribués au manque de ''vertu'', de ''transparence'' de certains acteurs : désignation de ''responsables''. Particulièrement flagrant dans le monde de la finance.
Entretien du mythe que la citée serait unie si certains ne faisaient pas n'importe quoi.

Conclusion