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Origine : http://crisedanslesmedias.hautetfort.com/archive/2006/02/index.html
A l’heure où l’on cherche des outils pour décrypter
les médias, ausculter la langue de bois des politiques et
démasquer les mensonges des communicants de tous poils ou
de toutes plumes, un petit livre (petit par la taille) vient à
point nommé. LQR, La Propagande du quotidien, d’Eric
Hazan, est une critique efficace des tics de langage qui fleurissent
dans la bouche et sous le stylo de ceux qui, on ne sait pourquoi,
s'obstinent à se nommer « élite ».
LQR : Lingua Quintae Republicae, Langue de la cinquième
république en bon français. Cette langue est épurée
à souhait. Elle parle de réforme pour signifier que
la pilule sera dure à avaler. Elle dénomme modestes
ou exclus les pauvres. Sa figure favorite est l’euphémisme.
Autre feinte de la LQR, affirmer l’existence d’une
chose qui n’existe pas. Plus on parle de dialogue et de communication,
moins on se parle. La solidarité s’affirme mais ne
se matérialise pas souvent.
La chute du mur de Berlin a contribué à renforcer
les effets lénifiants (rien à voir avec Lénine)
de la LQR. Plus de communisme, exit le prolétariat, la lutte
des classes, et même les classes tout court.
Le 11 septembre est aussi passé par là. Arabo-musulman,
maghrébins, d’origine maghrébine, issus de l’immigration
sont des vocables qui n’ont, en principe, aucun rapport avec
celui d’islamiste (préféré in extremis
à celui d’islamique, qui avait sans doute le défaut
de ne pas rimer avec terroriste et extrémiste). Mais l’amalgame
n’est jamais loin.
On l’aura compris, la LQR, terme qu’Eric Hazan a forgé
à partir de la LTI (Lingua Tertii Imperii), langue du Troisième
Reich, a une fonction très forte : elle sert à maintenir
la cohérence de nos sociétés. Affirmer l’unité
quand il est si difficile de vivre ensemble. Déjà
les Grecs avaient besoin d’éviter quelques mots qui
fâchent pour faire tenir ensemble leur demokratia. Car, à
l’origine de l’unité démocratique, il
y a du conflit. A l’origine de tout groupe il y a un deuil,
disait Maurice Blanchot (ou le meurtre d’un bouc émissaire,
dirait sans doute René Girard). C’est ce genre de vérité
en forme de cadavre caché dans le placard qui git au creux
de notre langue policée.
Ils en parlent sur Acrimed, le site de critique des médias.
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